Monsieur le ministre, en souhaitant sanctuariser l’école maternelle avec un cycle unique, non seulement vous remettez en cause le souhait exprimé par la représentation nationale depuis vingt-cinq ans, mais encore vous commettez une erreur fondamentale.
Enfin, s’agissant de la mesure « plus de maîtres que de classes », plusieurs études ont démontré que l’ajout d’un enseignant surnuméraire dans une classe ne donnait pas forcément de résultats. Quelles sont les principales causes de cette situation ? J’en citerai deux.
Tout d’abord, l’enseignant en place délègue à l’enseignant surnuméraire, souvent inexpérimenté, le soin de s’occuper de ses élèves les plus en difficulté ; cela contribue à accroître encore un peu plus les inégalités scolaires.
Par ailleurs, les différences de pratiques pédagogiques entre les deux enseignants conduisent à « embrouiller » les élèves.
Concrètement, pour que cette mesure produise des effets, elle doit être strictement définie et encadrée. J’espère, monsieur le ministre, que ce dispositif sera évalué et que vous viendrez rendre compte devant la représentation nationale de ses résultats.
J’aurais également souhaité que soit instauré un soutien pour les enseignants qui rencontrent des difficultés à faire progresser leurs élèves. Je proposerais volontiers la mise en place d’un tutorat, qui pourrait être exercé par les inspecteurs de l’éducation nationale ou par les conseillers pédagogiques, dont les missions devraient être redéfinies afin qu’ils soient plus présents sur le terrain et se consacrent moins à des tâches administratives.
Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi de vous faire part de mon désaccord sur la méthode.
Depuis des décennies, chaque ministre chargé de l’éducation, quelle que soit son appartenance politique, qu’il s’agisse par exemple de M. Jospin, qui avait compris le rôle majeur du cycle des apprentissages fondamentaux, ou de M. Fillon, qui savait l’importance du socle commun, souhaite améliorer les choses. Mais, malgré leur volonté, notre système est de plus en plus inefficace et inéquitable.
Cela tient, à mon sens, à trois raisons majeures.
Premièrement, dans notre pays, les corporatismes sont forts. S’ils sont des piliers de notre démocratie, ils privilégient parfois des intérêts catégoriels, aux dépens de l’intérêt général. Soyons clairs, je parle de tous les corporatismes, ceux des enseignants, bien sûr, des parents, de l’administration de l’éducation nationale, mais également, mes chers collègues, celui des élus que nous sommes, pas toujours cohérents.