Séance en hémicycle du 21 mai 2013 à 21h45

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.

Photo de Jean-Léonce Dupont

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme la rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, madame la présidente de la commission de la culture, madame le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, sur proposition de sa présidente, Annie David, la commission des affaires sociales du Sénat s’est saisie pour avis du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République sur la question plus spécifique de la scolarisation des enfants en situation de handicap.

Il s’agit en effet d’un sujet majeur, sur lequel notre commission s’est toujours beaucoup impliquée. Il nécessite d’être approfondi dans le cadre de l’examen de ce projet de loi.

En outre, le rapport pour avis de notre commission s’inscrit dans la continuité du travail que j’ai effectué l’année dernière avec notre collègue Isabelle Debré, dans le cadre de la commission pour le contrôle de l’application des lois sur l’évaluation de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, ou « loi handicap ».

En affirmant le droit de tout enfant en situation de handicap à une scolarisation en milieu ordinaire au plus près de son domicile et à un parcours scolaire continu et adapté, cette loi a permis un réel mouvement d’ouverture de l’école de la République sur le monde du handicap. Pour preuve, depuis 2006, le nombre d’enfants en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire augmenté d’un tiers, soit 55 000 élèves supplémentaires.

Pour autant, ces bons résultats doivent être nuancés. D’une part, on estime à 20 000 le nombre d’enfants en situation de handicap qui sont encore sans solution de scolarisation. D’autre part, cette avancée quantitative ne s’est pas accompagnée d’une amélioration qualitative de même ampleur.

En effet, que constate-t-on sur le terrain ?

Tout d’abord, on note une extrême diversité des situations vécues par les familles selon les départements. Les temps hebdomadaires de scolarisation sont très aléatoires, et les projets personnalisés de scolarisation sont de qualité hétérogène, quand ils ne sont pas inexistants.

Ensuite, il existe des ruptures dans les parcours de scolarisation, du fait de la difficulté à poursuivre la scolarité en milieu ordinaire dans le second degré et d’un accès encore très limité à l’enseignement supérieur.

Autre constat particulièrement préoccupant, l’échec de l’accompagnement en milieu ordinaire. Le recours croissant aux auxiliaires de vie scolaire, les AVS, qui sont recrutés sur des contrats précaires et qui sont insuffisamment formés, ne permet pas de répondre de manière pertinente aux besoins.

À cela s’ajoute l’insuffisante formation des personnels enseignants et des personnels d’éducation, lesquels se sentent le plus souvent démunis devant le handicap d’un élève.

Enfin, il existe un véritable manque de coopération entre le secteur médico-social et l’éducation nationale, qui se caractérise par un cloisonnement des filières préjudiciable à la qualité de la prise en charge.

Ce bilan en demi-teinte nous a conduits avec Isabelle Debré à formuler, l’année dernière, plusieurs recommandations, parmi lesquelles la réactivation du groupe de travail sur les AVS, le renforcement de la problématique du handicap dans la formation initiale et continue des personnels de l’éducation nationale, ainsi que la promotion de la coopération entre les sphères médicosociale et éducative.

De son côté, le Gouvernement, sous l’impulsion de Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, a pris – je m’en félicite – la mesure de la situation en lançant plusieurs chantiers, qui correspondent aux priorités que nous avions identifiées.

Premièrement, la mise en place d’un groupe de travail sur la professionnalisation du métier d’accompagnant, dont l’objectif est de parvenir à la définition d’une nouvelle profession qui englobe toutes les formes d’accompagnement, qu’elles soient scolaires ou périscolaires. Ses conclusions seront rendues publiques prochainement.

Dans l’attente de la création de ce nouveau métier, vous avez d’ores et déjà annoncé, monsieur le ministre, le recrutement de 1 500 AVS supplémentaires à la rentrée 2013.

Deuxièmement, la nouvelle impulsion donnée au dossier de l’accessibilité par la mission qui m’a été confiée à l’automne 2012.

Dans le rapport que j’ai remis au Premier ministre le 1er mars dernier, je préconise, s’agissant de l’accessibilité des établissements recevant du public, les ERP, parmi lesquels les établissements scolaires, la mise en œuvre concertée d’un principe d’accessibilité raisonnée, en d’autres termes l’ajustement de la réglementation aux difficultés existantes.

Troisièmement, le lancement d’un nouveau plan Autisme dont la scolarisation constitue l’axe fort, avec le développement des services d’éducation spécialisée et de soins à domicile, les SESSAD, ainsi que la mise en place, à la rentrée 2014, de trente unités d’enseignement dédiées à l’autisme en école maternelle.

Quatrièmement, enfin, l’intégration à la rentrée 2013 dans la formation initiale des enseignants d’un module de sensibilité obligatoire à la question du handicap à l’école, mesure sur laquelle, monsieur le ministre, vous reviendrez sans doute au cours de nos débats.

J’en viens maintenant au projet de loi qui nous est soumis.

Sa version initiale ne comporte pas, dans le corps même des articles, de disposition relative à la scolarisation des enfants en situation de handicap.

En revanche, le rapport annexé mentionne à plusieurs reprises cette question et y consacre même un paragraphe spécifique qui met, à juste titre, l’accent sur l’importance de l’accompagnement humain.

En première lecture, l’Assemblée nationale a utilement enrichi ce rapport annexé de nouvelles références à la question du handicap à l’école.

Elle a, en particulier, introduit la notion d’école inclusive, considérant que l’école de la République ne doit pas simplement accueillir les enfants en situation de handicap, mais qu’elle doit aussi s’adapter à leurs spécificités. C’est un progrès significatif, qui marque un véritable changement de paradigme : désormais, c’est à l’école de s’adapter aux besoins de ces enfants, et non l’inverse.

Nos collègues députés ont ensuite introduit plusieurs dispositions de nature législative.

Sur l’initiative du Gouvernement, ils ont inséré un nouvel article 3 bis pour ériger l’inclusion scolaire de tous les élèves, notamment des élèves en situation de handicap, au rang des missions du service public de l’éducation.

Sur proposition de sa rapporteure, Françoise Cartron, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat a fait le choix de déplacer ce principe d’inclusion scolaire dans un nouvel article 3 A tout en l’élargissant à toutes les autres sources d’exclusion : origine, milieu social, conditions de santé.

Nous ne pouvons que nous féliciter de cette disposition, qui donne force de loi à l’inclusion scolaire.

L’Assemblée nationale a également introduit un nouvel article 4 ter relatif à l’orientation des élèves en situation de handicap, qui a déclenché à juste titre – vous l’avez souligné, monsieur le ministre – la colère du monde associatif.

En remplaçant l’accord des parents par une simple consultation, cet article tendrait à les priver de la possibilité de décider du mode de scolarisation de leur enfant. Or l’accord des parents est fondamental, car il agit comme un garde-fou pour éviter que la demande de révision ne se traduise, comme c’est parfois le cas, par la fin de la scolarisation de l’enfant en milieu ordinaire.

Cette disposition va à l’encontre de l’objectif d’inclusion scolaire et de la volonté de construire un véritable partenariat avec les parents.

Je me réjouis donc que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat ait supprimé cet article.

À l’article 10, les députés ont précisé que la diffusion des technologies numériques dans les établissements scolaires s’adresse, notamment, aux élèves en situation de handicap.

L’offre d’outils numériques adaptés et personnalisés représente, en effet, une véritable plus-value pour ces enfants.

La commission de la culture, de l’éducation et de la communication a décidé de retenir une rédaction plus générale, visant l’ensemble des élèves, choix tout à fait pertinent.

Enfin, à l’article 30, l’Assemblée nationale a précisé que l’enseignement dispensé dans les écoles maternelles doit être adapté aux besoins des élèves en situation de handicap.

C’est en effet le plus tôt possible que ces enfants doivent pouvoir être scolarisés en milieu ordinaire, non seulement pour leur permettre de débuter leur parcours scolaire dans de bonnes conditions, mais aussi pour sensibiliser les autres enfants à l’acceptation de la différence.

Cette disposition a été maintenue par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication de notre assemblée.

Je souhaite, à présent, insister sur un point : il me semble indispensable que les dispositions relatives à la scolarisation des enfants en situation de handicap ne soient pas simplement traitées dans le rapport annexé au projet de loi, comme c’était le cas initialement, car celui-ci – je le rappelle – n’a pas de portée normative. Si l’on veut avancer sur la voie de l’inclusion scolaire, il faut que ses modalités soient inscrites dans la loi.

C’est pourquoi la commission des affaires sociales a adopté, sur ma proposition, neuf amendements portant sur plusieurs articles du texte.

Le premier entend relancer le chantier de la coopération entre l’éducation nationale et le secteur médicosocial en inscrivant ce principe dans la loi.

Les deuxième et troisième amendements visent à rappeler que les départements et les régions, qui sont respectivement chargés de la construction, de l’équipement et du fonctionnement des collèges ainsi que des lycées, doivent aussi assurer l’accessibilité de ces établissements.

Les quatrième et cinquième amendements tendent à permettre au Conseil supérieur des programmes de proposer des aménagements aux épreuves des examens et des concours pour les candidats en situation de handicap.

Le sixième amendement vise à charger le Conseil national d’évaluation du système éducatif d’évaluer les politiques publiques mises en œuvre pour scolariser les élèves en situation de handicap en milieu ordinaire.

Le septième amendement tend à prévoir que la formation des élèves à l’utilisation des outils numériques soit aussi dispensée au sein des unités d’enseignement des établissements médicosociaux et de santé.

Enfin, les huitième et neuvième amendements visent à ce que les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, d’une part, assurent le développement et la promotion de méthodes pédagogiques adaptées aux besoins des élèves en situation de handicap et, d’autre part, organisent des formations de sensibilisation à l’inclusion scolaire de ces enfants.

Mes chers collègues, je suis convaincue que ce projet de loi est l’occasion d’améliorer les conditions de scolarisation des enfants en situation de handicap et de permettre que l’école de la République devienne une école réellement inclusive. Il est utile que nous nous en donnions les moyens !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République traduit l’engagement du Gouvernement de faire de l’éducation nationale l’une des priorités du nouveau quinquennat, en consacrant les moyens financiers et humains nécessaires au premier des services publics de la République française.

La commission des finances du Sénat a souhaité se saisir du texte pour avis, notamment sur les articles relatifs à la création de postes dans l’éducation nationale, ainsi que sur toutes les dispositions qui concernent les finances des collectivités locales.

Pierre angulaire de la refondation de l’école de la République, le rétablissement dans l’enseignement de 60 000 postes supprimés par l’ancienne majorité était au cœur de la campagne du candidat François Hollande : le présent projet de loi traduit cet engagement, le déclinant pour la première fois par catégorie de postes et ciblant des territoires prioritaires, tout en définissant les objectifs et le cadre d’une ambition nouvelle pour l’école.

Dans un contexte particulièrement contraint pour les finances publiques, les choix opérés au bénéfice de l’éducation nationale résultent d’arbitrages au sein d’une enveloppe budgétaire fermée : la stabilisation, d’une part, des dépenses de l’État sous les doubles normes « zéro volume » et « zéro valeur » et, d’autre part, des effectifs, signifie que l’effort accompli dans le domaine de l’enseignement est compensé par des économies équivalentes au sein du budget de l’État, suivant les principes fixés par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

Alors que les crédits de l’ensemble des missions du budget général hors charges de la dette et pensions sont stabilisés en valeur et devraient être révisés à la baisse, la loi de programmation des finances publiques a prévu une augmentation des crédits de la mission « Enseignement scolaire » de 1, 18 milliard d’euros en 2015 par rapport à la loi de finances initiale pour 2012. La mission enregistre la deuxième plus importante hausse des crédits sur la période du budget triennal 2013-2015, après la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

S’agissant des mesures ayant un impact budgétaire sur les finances de l’État, le rapport annexé au projet de loi détaille la programmation des 60 000 emplois devant être créés dans l’enseignement au cours de la législature.

Sur ce total de 60 000 postes, 54 000 emplois seront créés au ministère de l’éducation nationale, 5 000 au ministère de l’enseignement supérieur et 1 000 au ministère de l’agriculture au titre de l’enseignement technique agricole.

La réforme de la formation initiale représentera la moitié des créations d’emplois dans l’éducation nationale, soit 27 000 postes sur un total de 54 000. À ces créations de 27 000 postes s’ajoutent 27 000 autres postes, répartis entre 21 000 nouveaux postes d’enseignant titulaire, dont 14 000 dans le premier degré et 7 000 dans le second degré, et 6 000 postes supplémentaires pour la scolarisation des élèves en situation de handicap, la prévention et la sécurité, le suivi médical et social, l’amélioration du pilotage des établissements et des services académiques.

En particulier, 3 000 nouveaux postes permettront d’améliorer la scolarisation des enfants de moins de trois ans. La répartition des postes devra être déclinée par académie, mais elle devra veiller en priorité à réduire les inégalités territoriales et se concentrer sur les zones les plus fragiles. L’objectif d’amélioration du remplacement figure explicitement parmi les créations de postes du premier degré.

La commission des finances a adopté, sur ma proposition, un amendement, que je présenterai en séance publique, pour compenser également les suppressions de postes de remplaçants dans le deuxième degré. Cette difficulté nous est souvent rappelée dans nos territoires.

C’est donc bien l’ensemble des personnels d’éducation qui bénéficieront d’un renforcement de leurs effectifs, une priorité étant accordée à l’enseignement primaire, car il a été montré que c’est dès le plus jeune âge qu’il faut assurer un même accueil des enfants pour empêcher que ne se développent les inégalités sociales.

La commission des finances a également examiné les dispositions ayant un impact sur les finances des collectivités territoriales, qui sont des partenaires à part entière de la refondation de l’école.

Tout d’abord, les articles 12, 13 et 14 du projet de loi sont relatifs à la répartition des compétences entre l’État et les collectivités en ce qui concerne l’acquisition et la maintenance des équipements informatiques dans les collèges et les lycées.

D’un point de vue juridique, cette répartition des compétences est aujourd’hui ambiguë. La commission des finances estime que le Gouvernement devra apporter des éclaircissements en séance publique. Lors du débat, je reviendrai, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur les différentes interprétations dont nous ont fait part, en particulier, les associations d’élus.

Par ailleurs, l’article 47 crée un fonds d’amorçage, temporaire, destiné à aider les collectivités territoriales dans la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires. Au cours des auditions que j’ai menées ou à la lecture des contributions écrites que j’ai reçues, il est apparu clairement que l’ensemble des associations d’élus ont apporté leur soutien au principe même de la réforme, en reconnaissant l’amélioration des conditions d’enseignement qu’elle permettra.

Les auditions ont toutefois fait ressortir des obstacles liés à des difficultés pratiques d’organisation, à des contraintes d’un calendrier qui a semblé trop serré à certains élus ou encore et surtout à des raisons financières. Afin de consolider juridiquement le dispositif, la commission de la culture, sur l’initiative de la commission des finances, a inscrit dans le texte du projet de loi le montant des aides annoncées pour les collectivités territoriales.

Cette disposition offrira aux collectivités concernées une certaine garantie quant aux montants qu’elles percevront, étant entendu que cette aide a pu constituer un facteur important dans leur décision de mettre en œuvre la réforme dès la rentrée 2013.

Pour autant, le décret d’application soulève plusieurs difficultés sur lesquelles j’entends revenir en séance publique. Ces difficultés, auxquelles le Gouvernement a en partie apporté une réponse, portent sur les EPCI dotés de la compétence en matière d’éducation, qui toucheront la majoration du fait d’une ou plusieurs communes éligibles en leur sein, sur la question de l’année d’éligibilité à la DSU-cible ou à la DSR-cible prise en compte. Nous y reviendrons lors de la discussion des articles, en évoquant également la question, cruciale, du financement du fonds.

Enfin, j’ai souhaité saisir l’occasion que présentait ce texte – mais à mon grand regret, je n’ai pas été suivi par la commission de la culture –, pour traiter du sujet des normes applicables aux collectivités territoriales. Il s’agit d’un enjeu financier important. Les normes nouvelles pèseront en effet sur le budget des collectivités, à hauteur de 1, 8 milliard d’euros environ en 2014.

Je vous proposerai ainsi trois amendements – mais j’ai cru comprendre que je ne serai pas suivi – qui s’inspirent d’une proposition du rapport de notre collègue Éric Doligé sur la simplification des normes applicables aux collectivités territoriales. Que ce soit dans les communes, les départements ou les régions, lorsque des établissements mettent à disposition certains équipements, il me semble plus cohérent de raisonner par année plutôt que de faire examiner chaque demande au cas par cas par le conseil d’administration des établissements.

Telles sont, monsieur le ministre, les principales observations de la commission des finances, sous le bénéfice desquelles elle a proposé au Sénat l’adoption du présent projet de loi.

Si des éclaircissements nous semblent nécessaires, ce texte, perfectible, n’en marque pas moins une étape décisive dans l’ambition de refonder l’école de la République, en restituant au service public de l’éducation les moyens nécessaires à son fonctionnement. C’est un enjeu majeur qu’il nous faut relever : nous ne devons plus accepter que des enfants et des jeunes sortent du système scolaire sans qualification et sans perspectives. C’est à nous, législateur, à nous, parlementaires, de faire de l’éducation et de la formation les pierres angulaires d’une société plus solidaire, qui refuse la fatalité de la reproduction des inégalités scolaires, sociales et territoriales. Tel est le chantier qui s’ouvre à nous : nous vous soutiendrons dans cette tâche, monsieur le ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, dans un contexte difficile, socialement et budgétairement, au cours d’une session chargée, parfois bousculée par l’ordre du jour ou des contretemps inédits, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, pour la façon dont ce texte arrive en discussion au Parlement.

Le présent projet de loi répond à une nécessité et à une priorité que nous avons tous au cœur : l’éducation. Il prend en compte les mutations à l’œuvre, prévoit l’innovation pédagogique, s’inscrit dans la société numérique. Il répare la disparition coupable de la formation professionnelle des enseignants. Il est amené dans le respect de la démocratie, en navette entière, avec une rédaction fidèle à ce que vous aviez dessiné à grands traits dès le mois de juillet. Enfin, il est accompagné de moyens qui rendent tout à fait crédibles les propositions qu’il comporte.

Voilà pour l’expression de notre satisfaction.

En commission, nous avons, vous le verrez, pris toute notre part du travail, et j’en remercie en votre présence, la rapporteure, Françoise Cartron. Mes remerciements vont aussi à toutes celles et à tous ceux qui ont enrichi de leurs travaux la réflexion, la vôtre, madame, sur la carte scolaire, celle de Brigitte Gonthier-Maurin sur le métier d’enseignant. Je remercie enfin le groupe de Jacques-Bernard Magner sur le prérecrutement, tous les membres de la commission pour leur intérêt et leur assiduité, leurs déplacements sur le terrain, et bien sûr les administrateurs, dont les week-ends n’ont pas été épargnés par le calendrier…

C’est parce que chacun, au Gouvernement comme au Parlement, s’est engagé pour la réussite de ce texte qu’il est souhaitable que ne soient pas ici détricotées des avancées significatives.

Il est d’usage, et de bonne utilité pour certaines cohérences ou conformités législatives, que, sur l’initiative du Gouvernement, et dans un souci partagé de réalisme, soient réparés des oublis, voire modérés des excès. Toutefois, il serait contre-productif que disparaissent des apports exigeants, nourris d’observations actualisées. De même, une plus grande fidélité à la rédaction d’une plume experte du ministère ne saurait, par la voie d’un amendement, spolier le Parlement de son apport contributif. Le prix symbolique serait trop fort. Monsieur le ministre, vous venez de le déclarer, on est intelligent à plusieurs.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Je le pense !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Je reprends donc espoir !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Voilà pour notre sensibilité à la démocratie parlementaire.

Enfin, je souhaite me faire l’écho des questions qui accompagnent le changement.

Ce qui fut fait avant la loi, et qui est peu évoqué – le temps scolaire et le temps d’ouverture dans l’école – a suscité beaucoup de résistances, non sur le bien-fondé de l’allégement, mais du fait de craintes de perdre des acquis : des enseignants ne voulant pas perdre l’unique interlocuteur qu’est l’État, des parents voulant des garanties d’horaires et de contenus, des associations s’interrogeant sur la transition de leurs permanents du mercredi aux fins de journées, des collectivités aux moyens plus que jamais tendus... Les objections n’ont pas manqué, au point que même l’excellente idée du projet éducatif territorial ne se dessine qu’en pointillé.

Monsieur le ministre, passer d’une société bloquée, comme vous l’avez trouvée §parce qu’elle a été malmenée, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

… à un climat de confiance pour coproduire des projets, demandera beaucoup de conseils, d’écoute, de souplesse et de prise en compte des difficultés de chacun, sans renoncement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Il en est de même des questions qui entourent le parcours culturel et artistique, pour lequel il faut à la fois des certitudes sur l’inclusion dans le programme – c’est écrit dans la loi – et des ouvertures sur les talents et richesses du territoire.

Tout comme notre commission a soutenu la pluridisciplinarité dans les travaux scolaires, je me permets d’insister sur l’indispensable coordination interministérielle entre l’éducation, la culture, l’enseignement supérieur, mais aussi l’éducation populaire, et même le travail, pour l’intermittence et le statut de l’animation.

Voilà pour ce qui entoure le texte, et qui doit aussi contribuer à sa réussite dans la durée !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Monsieur le président, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la commission demande la réserve de l’article 1er du projet de loi et du rapport qui lui est annexé, ce jusqu’à la fin de la discussion des articles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Aux termes de l’article 44, alinéa 6, de notre règlement, la réserve, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est donc votre avis sur cette demande de réserve formulée par la commission, monsieur le ministre ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Pas d’opposition !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

« Être illettré aujourd’hui, c’est être empêché de participer à l’essor économique de ce pays parce que l’on est privé des moyens minimum nécessaires à la promotion sociale et économique. Être illettré aujourd’hui, c’est être enfermé dans un cercle étroit de connivence et de proximité, coupé de la communication sociale et de la culture commune. Être illettré aujourd’hui, c’est être vulnérable face à des discours et à des textes dangereux portés par des individus sans scrupules. Être illettré enfin, c’est être plus immédiatement porté au passage à l’acte violent parce que l’argumentation, l’explication sont difficiles. »

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, madame la rapporteur pour avis, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, si j’ai choisi de citer en préambule le linguiste Alain Bentolila, c’est parce que les centristes estiment que le véritable enjeu de cette énième réforme de l’école, c’est bien l’illettrisme.

Aujourd’hui, 20 % des jeunes quittent le système scolaire entre seize et dix-sept ans sans diplôme, plus de 50 % sont en situation d’illettrisme, plus de 78 % ne décrocheront pas d’emploi stable. Les chiffres ont été rappelés et, pourtant, le mot « illettrisme » n’apparaît pas dans ce texte de loi. C’est un véritable paradoxe, l’année même où le Premier ministre a déclaré l’illettrisme « grande cause nationale » !

Au cours des trente dernières années, notre pays a relevé le défi de l’accès de tous à l’éducation et au savoir, mais la question de l’école bute toujours aujourd’hui sur le qualitatif. Il ne s’agit pas seulement de réussir l’exploit que chacun des 12 millions d’élèves ait un enseignant face à lui chaque matin, il faut que l’école pour tous soit aussi une école de la réussite de chacun.

À l’heure actuelle, 20 % des élèves qui entrent en sixième ne maîtrisent pas les savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter. Ce résultat est d’autant plus préoccupant que notre dépense publique en matière d’éducation est l’une des plus élevées au monde. C’est bien la preuve qu’une addition de micro-réformes ne suffit pas. Et pourtant, aujourd’hui, on nous en propose une nouvelle !

Il serait question de refondation : refonder l’école de la République et refonder la République par l’école ! Nous souscrivons tous à ces nobles intentions, mais objectivement, le présent texte n’est pas une véritable refondation de notre système éducatif. En témoigne d’ailleurs son architecture complexe et illisible. Au projet de loi proprement dit, on a ajouté un rapport annexé, rapport bavard et peu hiérarchisé dont on ne perçoit pas la qualité normative.

Avant tout, une réelle refondation aurait impliqué la prise en compte des rythmes scolaires dans le projet de loi, et que ces rythmes ne soient pas chamboulés dans la précipitation, par décret, quelques semaines avant le dépôt du texte.

En même temps, le rapport annexé prévoit que les rythmes scolaires seront ultérieurement amenés à être encore modifiés ! Ces annonces, déconnectées les unes des autres, qui modifient le temps de la journée et de la semaine sans commencer par ce qui était le préalable, allonger l’année, dénotent un manque de cohérence dans l’approche.

Et pourtant, l’aménagement du temps de l’enfant, articulant soigneusement le temps scolaire et le temps périscolaire, et ce en concertation avec les collectivités locales qui en assument les politiques, ou encore les acteurs de la petite enfance, aurait dû être à la base de la réflexion du Gouvernement sur la refondation de l’école.

On mesure aujourd’hui l’efficacité de la méthode : perplexes, une très grande majorité d’élus ont repoussé l’application de cette réforme à 2014. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : dans mon département, sur 589 communes, seules 77 se sont lancées pour la prochaine rentrée.

Si l’on parle de refondation, il faut aborder tous les sujets. Ainsi, je trouve très regrettable, alors que l’on se penche sur la formation des enseignants, et c’est une bonne chose, que la question du statut des personnels du monde éducatif soit totalement occultée, qu’il s’agisse du statut des enseignants, de celui des directeurs de cycle primaire ou encore, alors que l’intégration des handicapés est un impératif républicain, de celui des auxiliaires de vie scolaire.

Une vraie « refondation » de l’école aurait dû passer par là, par une réflexion sur les missions des maîtres dans un monde qui, on l’avouera, a tout de même bougé depuis 1950, date du dernier décret qui fixe ce statut.

Autre question non posée, celle du statut et de l’autonomie des établissements qui permettraient de donner une vraie réalité et, surtout, une véritable efficacité aux projets d’établissement, le tout dans un cadre national, qu’il s’agisse des programmes ou du statut des enseignants.

C’est la condition pour remettre l’ascenseur scolaire en marche. Nous sommes convaincus qu’il faut passer d’une logique très concentrée, très centralisée, à une logique de projets adaptés en fonction des enfants.

On n’appréhende pas les apprentissages fondamentaux de la même façon selon que les enfants vivent dans le VIIe arrondissement de Paris, à Argenteuil, où certains parents éprouvent parfois eux-mêmes des difficultés avec la langue française, ou dans un village de Seine-Maritime dont le niveau socioculturel sera plus faible.

Il est des besoins d’individualisation des parcours et d’accompagnement auxquels nous n’apportons toujours pas de réponses suffisantes. Il y a ici et là, de la part d’enseignants, des initiatives remarquables qui mériteraient valorisation et reconnaissance...

L’école doit avant tout garantir la réussite de chaque élève, ce qui nécessite une adaptation à chaque élève. Cela démontre l’importance de l’orientation, dont je ne comprends pas bien en quoi elle est réformée par le présent texte.

Sur ce sujet, je trouve complètement dépassé, en tout cas déconnecté du marché de l’emploi, le regard que porte l’actuel gouvernement sur la formation professionnelle et l’apprentissage, et ce alors que le nombre d’élèves sortant sans diplôme du système éducatif ne cesse de croître chaque année.

Je suis pour une orientation choisie, mûrement réfléchie, mais aussi un parcours souple au service de l’élève. Il y a cette obsession du collège unique, mais, je tiens à le souligner, « unique » ne veut pas dire « uniformisation » !

Ma collègue Françoise Férat s’attardera plus longuement tout à l’heure sur cet attachement des centristes à la promotion de la diversité des intelligences.

Cette réussite de chaque élève passe aussi par la formation des enseignants. Je déplore en ce sens l’absence de mesures précises quant à la formation continue, et je m’interroge sur le contenu des enseignements qui leur seront délivrés au sein des ESPE.

Je vous ai bien écouté, monsieur le ministre, et je vous le dis, il ne faudrait pas retomber dans les écueils des IUFM d’antan ! Pendant des années, les instituts universitaires de formation des maîtres ont développé des recherches parallèles à celles des universités, qui auraient pourtant pu enrichir beaucoup plus le contenu et la manière d’enseigner en France.

Pendant des années, aussi, à la différence des écoles normales, les IUFM ont ignoré la réalité du terrain et préféré se constituer en annexe du CNRS. Il nous faut des enseignants ayant eu une formation en pédagogie et un apprentissage des réalités du terrain, ainsi qu’une réelle ouverture au monde professionnel.

Pour en revenir à l’enjeu essentiel qu’est l’illettrisme, je voulais souligner le point positif du texte qui est de décider d’investir sur le primaire, sur les classes où tout s’apprend et où tout se joue ; c’est le seul moyen par lequel nous pourrons lutter efficacement contre les problèmes de lecture et d’écriture.

Cela faisait partie des préconisations centristes pour le projet présidentiel et législatif, nées du constat de la grande distorsion des moyens accordés au lycée et au collège, au détriment du primaire.

Notre proposition était aussi d’aller plus loin dans le rapprochement de l’école primaire et du collège au sein d’un même établissement public. J’approuve donc la mise en avant du cycle primaire par le projet de loi, tout comme la scolarisation des enfants de moins de trois ans dans toutes les zones urbaines sensibles et les zones rurales isolées.

En revanche, nous déplorons l’écrasement du socle commun de compétences et de connaissances défini par la loi de 2005. Au regard du phénomène croissant et socialement dévastateur que constitue l’illettrisme, le socle commun – lire-écrire-compter – doit être considéré en effet non comme un minimum, mais comme un préalable au succès de toute scolarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

D’où le rôle central du législateur. Le cœur même de l’école ne peut être laissé au seul pouvoir réglementaire comme le prévoit le texte.

Bien entendu, l’éducation est l’apprentissage de savoir-faire, mais également de savoir-être. Insérer à terme un enfant dans la vie professionnelle et en faire un adulte responsable et épanoui : voilà deux objectifs à donner à l’école. Les disciplines permettant le développement du sens critique, l’éveil sensoriel et de la sensibilité sont essentielles.

J’avais proposé en 2005 un amendement au socle sur les pratiques sportives et culturelles, finalement repris par décret. Aussi, je soutiens l’ambition de mettre en avant dans ce texte l’éducation artistique et culturelle, mais je souhaiterais que le projet apporte des clarifications et une articulation entre les notions d’éducation artistique et d’enseignement artistique, les deux n’étant pas tout à fait identiques. Généralement, ces derniers enseignements sont dispensés dans des établissements qui permettent de prolonger la formation des jeunes.

En pratique, cette réforme doit assurer un continuum, depuis la sensibilisation jusqu’à la formation des futurs amateurs ou professionnels.

L’autre point non clarifié est la notion d’activité culturelle liée à la réforme des rythmes scolaires, pour laquelle on perçoit que le temps et les activités périscolaires et scolaires n’ont pas été pensés dans leur complémentarité.

Quant au sport, nous regrettons qu’il ait été négligé par ce texte et uniquement traité dans les annexes. Nous y reviendrons lors de la discussion des amendements.

Je dirai quelques mots sur le numérique, pour lequel le texte porte une certaine ambition. L’école du XXIe siècle ne peut ignorer la génération digitale, tous ces enfants qui, telle la « Petite Poucette » de Michel Serres, ont un rapport familier et intuitif avec le numérique. Le numérique modifie l’accès aux savoirs, les manières d’apprendre et de travailler.

Notre groupe d’études « Médias et nouvelles technologies », que j’ai le plaisir de présider, a tenu l’année dernière à conduire des travaux sur ce sujet. Nos conclusions sont unanimes : l’école doit penser non seulement les nouveaux outils, mais aussi les nouveaux usages et la pédagogie adaptée.

Cela exige que le maître ait un rôle central dans l’apprentissage de l’analyse et de la sélection des multiples informations que reçoivent les élèves au quotidien ; il s’agit d’en faire des adultes éclairés, et pas seulement des récepteurs d’informations passifs.

Je voudrais conclure sur un sujet fondamental pour les collectivités dont la Haute Assemblée incarne la représentation : je pense au rôle dont ne sauraient être dépourvus les représentants des territoires, premiers partenaires de l’éducation nationale autour de l’enfant. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé plusieurs amendements tendant à redonner toute son importance à la concertation avec les élus.

Monsieur le ministre, répondant à l’une de mes questions d’actualité, vous m’aviez affirmé que les élus locaux devaient « faire des efforts ».Je ne pense pas qu’ils aient goûté la remarque, au moment où l’État diminue sa dotation – moins 3 milliards d’euros, je le rappelle – et se décharge, d’une certaine façon, de ses responsabilités...

Ce qui inquiète les élus, c’est que ce texte, bien qu’affichant des intentions contraires, porte en lui l’émergence d’une école à deux vitesses en fonction des moyens dont les communes ou groupements de communes disposeront ou pas.

Le fonds d’aide de l’État est non seulement insuffisant, il n’est pas pérennisé. Pis, on envisage de ponctionner des politiques sociales essentielles consacrées à la petite enfance ou à la parentalité, à travers des subventions de la Caisse nationale des allocations familiales.

En réalité, en ces temps de restrictions budgétaires obligées, si la CNAF finance la réforme des rythmes à la place de l’éducation nationale, cela reviendra bien pour elle à déshabiller Pierre pour habiller Paul !

Pour terminer tout à fait, je dirai que, pour qu’elle puisse se réformer, il faudrait que l’éducation nationale échappe aux aléas de nature purement politique et bénéficie de lignes directrices sur quinze ou vingt ans. À cet égard, il est regrettable que certains dispositifs mis en place ces cinq dernières années aient été balayés avec mépris, en dépit de rapport d’évaluation positifs.

Mme la rapporteure proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je pense aux internats d’excellence ou encore à l’aide personnalisée, engloutie dans la réforme des rythmes. C’est malheureux quand on sait que l’éducation aurait besoin de davantage de consensus et d’objectivité pour avancer.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

M. Jean-Michel Baylet . Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, avant d’entamer l’examen d’un texte de loi relatif à l’école, on devrait toujours relire Alain. Je ne dis pas cela, vous le comprendrez aisément, seulement parce que ce bon philosophe était radical

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Dans ses Propos sur l’éducation, en 1932, il écrivait : « Si j’étais directeur de l’enseignement primaire, je me proposerais, comme but unique, d’apprendre à lire à tous les Français. Disons aussi à écrire et à compter. »

Au moment de dresser l’état des lieux de notre système éducatif, l’école semble, hélas ! avoir oublié l’esprit d’Alain.

Toutes les études nationales et internationales tendent vers un même constat : la stagnation, voire la régression de notre système éducatif. Aujourd’hui, à la fin du primaire, près d’un élève sur cinq éprouve des difficultés face à l’écrit, et 140 000 élèves sortent annuellement de l’enseignement scolaire sans diplôme ni qualification.

Mes chers collègues, l’école de la République est donc en panne, d’une part, parce qu’elle remplit mal sa mission de transmission du savoir et qu’elle ne parvient pas à lutter contre l’échec scolaire, d’autre part, parce qu’elle n’est plus cet outil au service de la méritocratie républicaine et qu’elle contribue, au contraire, à la reproduction des inégalités sociales.

Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’un constat similaire avait déjà été dressé en 2005, lors de l’élaboration de la précédente loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école. Or, depuis, nous le savons tous, la situation ne s’est pas améliorée ; pire, elle s’est dégradée, et ce constat peut, je le crois, être partagé sur toutes les travées de notre assemblée.

En effet, ces dix dernières années, la politique éducative de notre pays s’est résumée à des déclarations excessives et à la mise en avant d’expérimentations qui ont trop masqué l’abandon d’une institution. Le non-remplacement systématique d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, appliqué à l’éducation nationale, a constitué une véritable saignée.

Ce phénomène malheureux, couplé à une déconstruction de la formation des enseignants, a aggravé les disparités socioterritoriales et dégradé l’offre d’éducation.

Cette gestion comptable, et coupable, de l’éducation a même abouti à la recherche d’enseignants remplaçants via le site internet de petites annonces de vente d’occasion Leboncoin.fr, le recrutement se retrouvant placé entre une armoire normande et un scooter d’occasion. §Il était plus qu’urgent de changer de cap ! C’est ce que vous nous proposez, monsieur le ministre.

Une telle loi d’orientation et de programmation était nécessaire, indispensable, même, et se devait d’être ambitieuse. Ce projet de loi est la pierre angulaire de l’action du Gouvernement en matière d’éducation. Il s’inscrit dans cette vision volontariste pour l’école : augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, loi de finances pour 2013 où, dans un contexte budgétaire contraint, nous le savons tous, l’effort vers les missions d’éducation nationale a été accru. Il faut le souligner, le répéter et même l’apprécier.

Je pourrais également citer les emplois d’avenir professeur, dont vous avez parlé, monsieur le ministre, mais également le projet de réforme des rythmes éducatifs, qui sont autant de chantiers en cours.

Mes chers collègues, l’examen, par notre assemblée, de ce texte constitue l’aboutissement d’un long processus entamé dès juillet 2012, et que vous avez exposé aux différents groupes sénatoriaux, monsieur le ministre, y compris au RDSE. Nous y avons été sensibles !

Les radicaux de gauche s’accordent, bien sûr, sur les grandes lignes du projet de loi : l’effort en matière de recrutement de personnels en direction notamment du primaire, l’indispensable réforme de la formation initiale des enseignants, avec la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, la lutte contre l’échec scolaire et la réforme de l’orientation. Quant à la création d’un service public de l’enseignement numérique, que vous avez évoquée, nous serons particulièrement vigilants pour que les transferts de compétences de l’État vers les collectivités en matière d’achat et d’entretien du matériel informatique soient compensés convenablement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Les lois d’orientation et de programmation relatives à l’école sont trop souvent des « lois bavardes », dans le sens où elles exposent les grands principes vers lesquels doit seulement tendre l’action éducative.

Je rappelle que, aux termes de l’article 34 de la Constitution, la loi détermine les principes fondamentaux de l’enseignement… Le présent texte n’en oublie pas pour autant la mobilisation des moyens nécessaires à la mise en œuvre des objectifs fixés, ce qui, à l’aune des politiques menées par les derniers gouvernements, constitue, reconnaissons-le, un progrès notable.

Aujourd’hui, mes chers collègues, trop de jeunes sortent du système éducatif sans qualification. Trop d’élèves, à leur entrée au collège, ne maîtrisent pas les bases des connaissances en termes de lecture. Ces populations, les statistiques le démontrent, sont naturellement celles qui éprouvent le plus de difficultés à s’insérer sur le marché du travail.

L’on perçoit donc le caractère fondamental de l’effort que nous devons consentir en faveur de l’éducation.

Monsieur le ministre, si les sénateurs radicaux s’accordent, vous l’avez compris, sur l’économie générale du texte et les objectifs qu’il assigne à l’école de la République, lors de l’examen des articles, notre groupe défendra plusieurs amendements tendant à améliorer le projet de loi, notamment sur l’articulation entre le socle commun des connaissances et les programmes, sur l’abaissement de l’âge de la scolarisation obligatoire, thème cher à Françoise Laborde.

En outre, nous aborderons les implications pour les collectivités en termes de rythmes scolaires et d’organisation de l’offre scolaire et périscolaire. Vous savez que nous sommes un certain nombre, dans les départements, à avoir combattu pour que cette réforme soit une réussite.

Enfin, dans la lignée du débat sur l’application de la loi de 2005 relative au handicap qui s’est tenu dans cet hémicycle fin 2012, nous veillerons à faire de l’école le lieu d’inclusion de tous les élèves, notamment des jeunes handicapés.

J’entends bien ces voix qui, dans l’opposition, ergotent parfois sur le choix du terme « refondation ». Certes, il ne s’agit pas de balayer l’édifice existant, d’en faire table rase. La présente réforme ambitionne cependant de renouer avec les fondations républicaines de l’éducation. C’est la raison pour laquelle les radicaux se sont réjouis de l’annonce de la création d’un enseignement laïque de la morale. Cette discipline, qui sera dispensée et évaluée du primaire au lycée, doit permettre de partager et de transmettre nos valeurs communes de liberté, d’égalité et de fraternité qui constituent la base du « vivre ensemble ».

L’affichage et la diffusion, auprès des élèves, d’une « charte de la laïcité » doivent également contribuer à faire de l’école le premier lieu où vit et où se vit la République.

Faire entrer cette morale laïque au sein de l’école relève d’une volonté affirmée. Le choix des termes est primordial. Monsieur le ministre, je ne crois pas que vous me contredirez, vous qui avez tant étudié l’œuvre de Ferdinand Buisson. Il s’agit bien de morale, c’est-à-dire d’un ensemble de valeurs, de principes et de règles, et cette morale à l’école ne peut bien sûr qu’être laïque, c’est-à-dire hermétique aux influences partisanes, religieuses, communautaires ou économiques.

Les missions que nous attribuons à l’éducation nationale ont été magnifiquement résumées par celui qui en fut un ministre visionnaire, Jean Zay : encore un radical ! §Oui, mes chers collègues, les radicaux ont fondé la République ! Il est bon de le rappeler !

Dans l’ouvrage qu’il rédigea au cours de sa dure et cruelle détention, Souvenirs et solitude, Jean Zay revint sur l’ambitieuse réforme qu’il avait menée en 1937. À ses yeux, l’enseignement devait consister « à former le caractère par la discipline de l’esprit et le développement des vertus intellectuelles ; à apprendre à bien conduire sa raison […] ; à garder toujours éveillé l’esprit critique ; à démêler le vrai du faux, à douter sainement ; à observer, à comprendre autant qu’à connaître ; à librement épanouir sa liberté. »

Ce sont bien les lumières de cet humanisme qu’il nous revient de rallumer aujourd’hui. Pour ce faire, monsieur le ministre, nous comptons sur vous ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, « projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République » : voilà un titre qui sonne, qui claque, qui claironne ! Toutefois, s’agit-il d’un texte ambitieux ou d’un texte emphatique ? Nous avons le droit de nous poser la question. En tout cas, ce projet de loi mérite d’être examiné attentivement et sans a priori. C’est ce que les commissaires de l’UMP et moi-même avons fait : quand il s’agit de l’avenir de nos enfants, la politique doit rester secondaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Cela étant, il nous faut bien avouer notre déception ou, à tout le moins, notre inquiétude.

Monsieur le ministre, j’ai l’expérience d’un certain nombre de textes essentiels, effectivement fondateurs. Je songe aux lois qui, au début de la Ve République, portèrent de 14 à 16 ans l’âge de la fin de la scolarité obligatoire et supprimèrent l’examen d’entrée en sixième, en postulant que tous les enfants devaient aller au collège. Je songe à la création des collèges d’enseignement secondaire, les CES, que la gauche n’approuva pas à l’époque, à celle des instituts universitaires de technologie, qui fut combattue, de même que le ministre d’alors, Christian Fouchet. Je songe également à d’autres textes tout aussi essentiels, notamment à la loi Haby, dont j’ai d’ailleurs été le rapporteur et qui a unifié les filières des premiers cycles du second degré ; ce fut un progrès important.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Je songe enfin aux objectifs définis, en 1980, par le ministre Christian Beullac, dont votre serviteur était le secrétaire d’État : aucun jeune ne devait quitter l’école sans avoir une somme de connaissances générales suffisante et une qualification professionnelle attestée. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Cela a été rappelé, chaque année, entre 130 000 et 150 000 jeunes quittent encore le système scolaire sans un niveau suffisant et sans qualification professionnelle. Ces jeunes sont les plus vulnérables face au chômage.

Pourtant, les moyens de l’éducation nationale ont été fortement augmentés, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

… presque doublés depuis 1980. Il faut en tirer les leçons : les mauvais chiffres révélés par l’étude PISA ne sont pas dus, pour l’essentiel, à un manque de moyens.

Face à cette situation, que proposez-vous, monsieur le ministre ? Vous nous présentez un projet de loi incomplet, puisque ce texte n’aborde pas le problème du second cycle du second degré et n’innove pas dans le domaine pourtant critique de l’orientation, tandis qu’il semble amorcer une remise en cause du socle commun.

Monsieur le ministre, votre projet de loi, il faut le reconnaître, prévoit d’abord la mobilisation de crédits importants pour recruter à nouveau des enseignants, avec le remplacement de tous les départs à la retraite et la création de nouveaux postes.

Nous contestons ce choix pour deux raisons.

Premièrement, cette mesure aura des conséquences sur l’équilibre global de la fonction publique. En effet, le Président de la République s’est engagé à ne pas augmenter le nombre total de fonctionnaires. Cet accroissement du nombre d’enseignants devra donc être compensé par une diminution importante des effectifs dans d’autres corps de la fonction publique, à savoir, en pratique, la défense nationale : il ne faut pas s’étonner de certains choix récemment rendus publics ! L’équilibre est toujours difficile à atteindre entre deux exigences réelles, entre deux devoirs de l’État : d’une part, assurer l’éducation, d’autre part, garantir la défense et la sécurité de la République en ces temps particulièrement difficiles.

Deuxièmement, cette « refondation » vise avant tout à permettre l’accueil des enfants à la maternelle dès l’âge de 2 ans. Or, à nos yeux, c’est plutôt sur la dernière année de maternelle et le début de l’école primaire que l’effort doit être porté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Nous avons proposé de tirer les conséquences d’une réalité : à l’âge de 5 ans, tous les enfants vont à la maternelle. Abaisser à 5 ans l’âge du début de la scolarité obligatoire, organiser un cycle entre la dernière année de l’école maternelle et la première année de l’enseignement primaire, voilà qui permettrait, nous semble-t-il, de favoriser l’acquisition des fondamentaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Nous regrettons de n’avoir pas été entendus jusqu’à présent sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Et la préparation aux acquisitions, ça se fait à quel moment ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Par ailleurs, à certains égards, nous craignons de voir adopter une loi de réaction plus que de refondation.

Le collège unique serait-il devenu la vache sacrée à laquelle on ne pourrait pas toucher ? Je puis en parler, ayant contribué à sa création : plusieurs décennies plus tard, l’expérience montre que sa rigidité même nuit aux élèves les plus en difficulté. Or vous nous proposez de rigidifier davantage encore le collège unique ; on ne s’en évadera plus guère, alors qu’il faudrait introduire de la souplesse, pourquoi pas via l’instauration de modules. Le texte du Gouvernement va dans l’autre sens : avance-t-on ou opère-t-on un retour en arrière ?

Monsieur le ministre, votre propension à « grignoter » les fondamentaux du socle commun est elle aussi inquiétante. La loi Fillon fixait clairement dans la législation les matières de ce socle. Quant à vous, vous renvoyez à un décret : c’est un recul.

Parallèlement, votre texte en appelle aux équipes pédagogiques, aux enseignements transversaux. Pourquoi pas, mais que devient la liberté pédagogique des enseignants ? Dans ce domaine, comme dans les préconisations de l’annexe en matière d’évaluation, plane un parfum discret de pédagogisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

L’innovation a ses mérites, mais elle doit également avoir ses limites : il ne faut jamais perdre de vue l’absolue nécessité d’assurer, en toute priorité, l’apprentissage de la lecture et des savoirs fondamentaux du socle commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Cela impose de revoir le dispositif d’évaluation des élèves, ainsi que celui des enseignants. « Évaluation » n’est pas un mot choquant.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

C’est pourquoi vous avez multiplié les réformes sans les évaluer !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

L’évaluation doit s’appliquer au système, aux élèves et aux enseignants ! Évaluer les enseignants, c’est aussi les reconnaître, faire en sorte qu’ils soient estimés à leur juste valeur, à la mesure de l’importance de leur fonction dans la société ; c’est faire en sorte qu’ils soient mieux payés. Rappelons que le non-renouvellement des postes par le précédent gouvernement ainsi que l’allongement des études des futurs enseignants avaient aussi pour objectif de permettre une revalorisation salariale. Comment ferez-vous pour augmenter à la fois le nombre et la rémunération des enseignants ?

Des enseignants mieux payés doivent être bien formés. Vous avez raison d’insister sur ce point, monsieur le ministre, mais est-ce à dire qu’il faille en venir à mettre en place des structures, les ESPE, qui rappellent tout de même furieusement les IUFM ? Votre projet de loi insiste sur l’autonomie de ces écoles par rapport aux universités. Nous sommes attachés à ce que l’université joue pleinement son rôle dans la formation des enseignants, qui doivent recevoir une solide préparation disciplinaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

… et bénéficier d’expériences de terrain au côté d’enseignants chevronnés plutôt que de cours ex cathedra dispensés par des pédagogues spécialisés dans les sciences de l’éducation.

Enfin, j’en viens à la réforme des rythmes scolaires.

Monsieur le ministre, là aussi, vous avez raison de poursuivre, avec un certain courage, que je vous reconnais volontiers, la réflexion engagée par votre prédécesseur, M. Luc Chatel. Toutefois, faut-il pour autant aller trop vite ? Nous sommes favorables à la réforme des rythmes scolaires, mais sa mise en œuvre pose des problèmes. Les collectivités territoriales doivent y être pleinement associées, car ce seront elles, en définitive, qui paieront !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Elles paient déjà, nous pouvons en témoigner !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Sur ce plan, la précipitation peut se révéler néfaste : plutôt que d’appâter quelques communes volontaires avec un peu d’argent, mieux vaut se donner une année de plus et aider toutes les communes à démarrer. Nous en appelons tout simplement au bon sens.

Telles sont les remarques argumentées que je tenais à formuler. Nous avons déposé de nombreux amendements qui s’en inspirent, mais, contrairement à ce que j’ai entendu affirmer, presque tous ont été rejetés par la commission. Ce matin, en particulier, aucun amendement émanant des groupes de l’opposition n’a été accepté.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Si, certains ont été acceptés, ce qui n’était pas le cas quand vous étiez aux manettes !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, chers collègues, penser un projet pour l’école, c’est penser un projet pour la société.

Or, l’une des dimensions fondamentales des évolutions en cours repose sur la mutation des formes de savoirs et de raisonnement. Dès lors, comment poser la question de l’école sans aborder celle, fondamentale, de la place des savoirs et de leur évolution ?

En effet, notre société est de plus en plus structurée par des savoirs complexes, savants, qui modèlent les situations auxquelles sont confrontés les citoyens et les travailleurs. Cette évolution pose indéniablement à notre société le défi de l’élévation du niveau de connaissances.

Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’apprendre par cœur et de restituer un savoir, mais de comprendre, de substituer, de mettre en relation des savoirs. Cette exigence de réflexion se conjugue avec des contenus devenus plus notionnels. De récents travaux de recherche montrent d’ailleurs que ces exigences croissantes sont présentes dès l’école maternelle.

Cette évolution doit nous conduire à nous poser deux questions : quelle finalité conférer aux savoirs ? Les destine-t-on à tous ? Un projet pour l’école doit, selon nous, répondre sans ambiguïté à cette double interrogation.

Lors du précédent quinquennat, la droite a mené, via la RGPP, une politique de démantèlement du service public, concrétisée par la suppression de près de 80 000 postes. Cette politique a profondément déstabilisé les personnels dans l’exercice de leur mission, en imposant une logique de gestion de la pénurie que les écoles et les établissements subissent encore actuellement.

Dans le même temps, confrontée au défi de l’élévation du niveau de connaissances, la droite a, par ses réformes, jeté les bases d’un autre objectif pour l’école : l’employabilité, avec, comme principaux outils de tri des élèves, l’individualisation des parcours et la notion de « compétences », consacrée en 2000 par la stratégie dite de Lisbonne et devenue, hélas, la boussole des réformes éducatives libérales en Europe.

L’école subit aussi la panne du processus de démocratisation scolaire, dont relevait l’exigence de la poursuite d’études. Il a débouché sur une « démocratisation quantitative », laquelle « ne s’est pas accompagnée d’une diminution des inégalités sociales qui se sont juste décalées dans le temps », pour reprendre les mots du chercheur Jean-Yves Rochex.

Les outils employés pour conduire cette massification ― orientation, classes de quatrième et de troisième technologique, chute du nombre de redoublements ― ont bien débloqué des verrous, mais ils ont aussi montré leurs limites en ne permettant pas de lutter efficacement contre l’échec scolaire. Ainsi, depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, le taux de passage en seconde n’évolue plus, ou seulement très lentement.

La loi Fillon de 2005 n’a pas relancé ce processus. Bien au contraire, avec l’inscription dans la loi d’un socle minimal de connaissances et de compétences, un recentrage s’est opéré sur la scolarité obligatoire, dont l’instauration remonte tout de même au décret Berthoin de 1959 !

Selon nous, pour répondre au défi de l’élévation du niveau de connaissances, une relance du processus de démocratisation scolaire est nécessaire, car seule celle-ci peut permettre de construire une école au service de l’émancipation individuelle et collective. Telle est l’ambition qu’il nous faut avoir pour l’école.

Conscients de cet enjeu de démocratisation scolaire et confrontés, dans le même temps, aux conséquences des réformes de la droite, les personnels de l’éducation se sont mobilisés en nombre pour défendre une réponse de service public. De là sont nées des frustrations, une souffrance ordinaire liées à un sentiment de « travail empêché », mais aussi des réflexions sur la pratique et les métiers, qui ont nourri des attentes et des exigences en matière de transformation en profondeur du service public. Ces dernières ont trouvé un écho dans la refondation annoncée par le Gouvernement.

C’est, en effet, à ce haut niveau d’exigence qu’il faut se placer. Nous partageons ce choix, car l’heure n’est pas à « moins d’école », mais à « plus et mieux d’école ». Dès lors, il faut imaginer et bâtir le service public national d’éducation correspondant à ces ambitions.

Si nous approuvons la priorité accordée au primaire, la réaffirmation du collège unique ou la remise en chantier de la formation des enseignants, il nous semble que ce projet de loi ignore des dispositions essentielles qui auraient pourtant dû l’irriguer.

Quelles sont ces dispositions qui, selon nous, devraient nourrir notre débat ?

Oui, il y avait bien urgence à porter un coup d’arrêt à la révision générale des politiques publiques, contrairement à ce que la droite affirme. Il faut saluer la décision du Gouvernement de redonner des moyens, en termes de postes, à l’école. Mais, nous le savons, ces moyens, qui relèveront des prochaines lois de finances, ne suffiront pas à faire reculer mécaniquement les inégalités scolaires ; ils doivent s’appuyer sur l’engagement d’une réforme pédagogique profonde. C’est sous cet aspect que le projet de loi ne prend pas suffisamment la mesure des transformations à opérer et risque, peut-être, de manquer à son ambition de refondation.

La première de ces transformations consisterait à considérer que tous les enfants sont capables d’apprendre et de réussir, et à faire évoluer en conséquence le service public. Parce que les différences entre les élèves sont non pas naturelles, mais socialement construites, et que l’échec scolaire n’est pas une fatalité, l’affirmation de la capacité de tous les élèves à suivre les apprentissages scolaires doit être au fondement du projet éducatif.

La deuxième transformation porte sur le contenu des enseignements. Relever le défi des savoirs à enseigner à tous est une nécessité pour aller vers une société plus juste. À l’individualisation des parcours et des enseignements, il faut opposer une conception ambitieuse et émancipatrice de l’école, que recouvre le concept de culture commune, par la transmission des mêmes contenus à tous les élèves.

Suivre un cursus commun, que ce soit dans le cadre de la scolarité unique ou au travers des disciplines étudiées ensemble dans une même filière, n’interdisant évidemment pas la mise en œuvre de pédagogies différenciées et ouvrant la possibilité de découvrir de nouveaux centres d’intérêt jusqu’alors insoupçonnés, afin de faire l’expérience d’un apprentissage partagé : c’est cela aussi qui fonde le vivre ensemble.

Il est urgent de mettre en œuvre le « tous capables », l’appréhension de savoirs toujours plus complexes, l’ambition de transmettre une culture commune, qui posent l’exigence d’allongement de la scolarité obligatoire.

L’éducation nationale doit pouvoir disposer de plus de temps pour former les jeunes et prendre en charge, bien en amont du décrochage, les élèves qui rencontrent des difficultés. C’est pourquoi nous proposons d’instaurer une scolarité obligatoire de 3 à 18 ans. Cela permettrait d’ouvrir une réflexion globale sur les cycles et les rythmes, de dégager le collège de la pression de l’orientation, laquelle se joue aujourd’hui trop tôt et n’autorise pas le droit à l’erreur, faute de réelles passerelles.

La formation des enseignants est également essentielle à la refondation de l’école. Il est temps de rendre aux enseignants la maîtrise de leur travail et de leur donner les moyens de faire évoluer leurs pratiques pour assurer la réussite de tous les élèves. Cela implique une formation de haut niveau, construite selon un continuum conjuguant le disciplinaire et le professionnel, dans un système d’aller-retour en lien avec la recherche.

Pour que l’entrée dans le métier se fasse dans de bonnes conditions, et eu égard à la crise sérieuse du recrutement, que les emplois d’avenir ne résoudront pas, je continue de plaider en faveur de véritables pré-recrutements dès la licence. De plus, rappelons que les enseignants interviennent au sein d’équipes pluri-professionnelles, qu’il nous faut reconnaître et renforcer, et non pas diluer.

Seul un service public national peut être le garant de l’égalité d’accès aux savoirs sur tout le territoire. En effet, le poids des inégalités territoriales pèse fortement dans la réussite des élèves. Le maintien d’un cadrage et d’un pilotage nationaux forts n’exclut nullement les coopérations et les partenariats. Je pense notamment aux parents, qui doivent être considérés comme des acteurs à part entière de la réussite des élèves. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement tendant à instaurer un statut des délégués de parents d’élèves.

Mais ces partenariats ne doivent pas servir de paravent à un désengagement de l’État. Or, la mise en œuvre de la réforme des rythmes et les forts accents de territorialisation de plusieurs dispositions de ce projet de loi, qu’il s’agisse de la définition de la carte des formations professionnelles initiales, du parcours d’éducation artistique et culturel, du service public du numérique ou encore du service public de l’orientation tout au long de la vie, recèlent ce danger.

Voici, brossées à grands traits, les fondations sur lesquelles devrait s’appuyer, selon nous, une refondation du service public national d’éducation. Ces réflexions ont guidé les propositions que nous avons formulées en commission pour amender le texte issu de l’Assemblée nationale. Sous l’impulsion de notre rapporteur, la commission a apporté à celui-ci des améliorations, auxquelles nous avons pris toute notre part : je pense notamment à la notion du « tous capables », introduites à l’article 3A du projet de loi et inscrite parmi les principes généraux de l’éducation.

Sur la question des contenus d’enseignement, le projet de loi amende le socle commun de connaissances et de compétences issu de la loi Fillon, qui institutionnalisait le principe d’objectifs différenciés en fonction des élèves, avec ce socle comme minimum à garantir à tous et les programmes comme finalités pour les élèves « destinés » à la poursuite d’études. Mais, si l’on prétend supprimer cette distinction, pourquoi le projet de loi conserve-t-il le socle à côté des programmes ?

Je l’ai rappelé précédemment, la refondation passe à nos yeux par l’affirmation d’un même niveau d’exigence pour tous les élèves. C’est le sens de la réécriture de l’article 7 que nous avions proposée et dont une partie a été retenue. Cependant, un autre amendement adopté contre notre avis contredit cet objectif. Le présent débat devra permettre de trancher cette question.

Notre combat visant à privilégier une coopération État-région, plutôt qu’une mainmise de la région sur la carte des formations professionnelles initiales, a trouvé un début d’issue en commission par l’adoption d’un de nos amendements à l’article 18.

Enfin, notre travail pour replacer une formation initiale de haut niveau des enseignants au cœur de la refondation a permis d’inscrire dans le projet de loi que les écoles supérieures du professorat et de l’éducation assureront les actions de formation utiles aux étudiants se destinant au professorat et ne se contenteront pas de les organiser. Cette précision était utile, car le flou règne quant à la mission qui sera dévolue à ces écoles.

Ces premiers pas en appellent d’autres. Or nous constatons, à l’ouverture du débat en séance publique, que le Gouvernement revient, par voie d’amendements, sur des améliorations que nous avions apportées aux articles 7, 18 et 51. De plus, il propose de faire adopter, via ce texte, la réforme du service public de l’orientation inscrite aux articles 14 et 15 du projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires. Le débat qui va s’ouvrir maintenant est donc extrêmement important. J’estime que les enjeux liés à l’orientation scolaire, qui s’adresse à des jeunes gens en devenir, sont d’une telle spécificité qu’ils ne pourront trouver une réponse pleinement satisfaisante au sein d’un « service public de l’orientation tout au long de la vie » indifférencié, dont la région, de fait, deviendrait le maître d’œuvre.

On le voit, de nombreux points restent en discussion. Les débats de cette semaine détermineront donc l’appréciation finale de mon groupe sur le présent projet de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, quelle est l’école dont nous rêvons, que nous voulons ? Ce n’est pas celle que nous connaissons aujourd’hui, marquée par les évolutions intervenues ces dix dernières années.

En effet, le constat suivant est largement partagé ce soir : notre école va mal, le phénomène du décrochage s’aggrave, nombre d’élèves s’ennuient en classe sans que les résultats des autres s’améliorent.

La responsabilité de ce bilan est partagée. Les différentes politiques publiques menées depuis vingt-cinq ans n’ont pas donné les résultats escomptés, dans un pays qui fut jadis exemplaire, même s’il ne faut pas céder au mythe d’un âge d’or de l’école. Celle-ci ne joue plus le rôle d’ascenseur social, comme ce fut le cas dans le passé pour un grand nombre d’élèves, et la massification, réelle, n’a pas été synonyme de démocratisation.

Le groupe écologiste en appelle à une « autre » école pour notre pays, pour une autre société. Cela signifie que si nous approuvons le texte présenté sur divers points, d’autres suscitent parmi nous des interrogations.

En effet, si le texte issu des travaux de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication nous inspirait un relatif optimisme, grâce au travail très important mené par Mme la rapporteur, que nous remercions encore une fois, le sort réservé à certains amendements et l’apparition de quelques autres ont suscité des inquiétudes. Nous éprouvons donc ce soir une certaine perplexité, mais nous ne doutons pas que M. le ministre la dissipera.

Il ne s’agit pas seulement de la prise en compte de tel ou tel amendement auquel nous tenons beaucoup, mais, plus généralement, de la philosophie qui sous-tend certaines « apparitions » : je pense notamment à l’évocation, tout à l’heure, du rapport Gallois. Il conviendra de lever les malentendus.

Ce qui compte à nos yeux, c’est de progresser vers l’école de la bienveillance, une école qui éduque à la coopération plutôt qu’à la compétition. Nous n’avons pas besoin de mots ronflants, nous souhaitons simplement la mise en place de dispositifs concrets pour intégrer tous les élèves, y compris, cela a été dit tout à l'heure, ceux qui sont en situation de handicap, afin de faire d’eux les citoyens et les citoyennes de demain. Il nous appartient de penser l’école réellement tout au long de la vie et d’apprendre à nos enfants que l’apprentissage ne cesse pas après l’université.

De même, le phénomène majeur de la révolution numérique doit, selon nous, s’accompagner d’une refonte significative des méthodes pédagogiques, afin de favoriser le travail en équipe et la pluridisciplinarité. Mon collègue André Gattolin s’exprimera plus longuement sur ce point tout à l'heure.

Notre école a aussi vocation à former des citoyens et des citoyennes capables de penser par eux-mêmes, aptes à coopérer tout en étant autonomes, dotés d’un esprit critique et prenant plaisir à apprendre, même si les acquisitions passent par des moments délicats ou difficiles.

L’école que nous voulons doit préparer des êtres capables d’avoir un esprit d’initiative – l’initiative relève non pas uniquement de l’entreprise, mais aussi des associations ! –, attentifs à la vie en collectivité, où le « faire ensemble » serait plus valorisé que « l’avoir » et où le fétichisme du classement et de la performance serait remplacé par l’altruisme, la solidarité, l’attention à l’autre et la lutte contre toutes les formes de gaspillage, nos ressources communes n’étant pas inépuisables.

L’école que nous voulons doit promouvoir une vision humaniste de notre « vivre ensemble ». Tel était le sens d’un certain nombre de nos amendements qui avaient retenu l’attention de la commission, mais semblent avoir disparu…

Je ne reviendrai pas sur la question du décrochage, véritable scandale national. Non seulement ces jeunes qui quittent le système éducatif n’auront pas de diplôme, mais ils perdent beaucoup de leurs chances d’insertion dans la société.

Devant ce constat partagé, nous insistons sur le fait que notre école a besoin de changer en profondeur. Que l’on appelle cela « refondation », « vrai changement », « remise à plat des fondamentaux » ou « travail sur les fondements du système » nous importe peu. Le projet de loi tel que nous l’examinons aujourd'hui, enrichi par le travail de la commission, présente à nos yeux le mérite essentiel de tendre à construire une école nouvelle, et non pas à ériger les suppressions de postes en politique publique.

Selon nous, l’une des questions centrales est celle de la formation des enseignants.

Il n’est pas nécessaire de restaurer les écoles normales et les IUFM, même s’ils avaient des vertus, quoi que l’on ait pu en dire. Ce n’est pas avec les vieilles recettes du XIXe et du XXe siècles, assorties d’un clic de souris, que l’on fondera l’école du XXIe siècle !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Nous sommes capables de voir ce qui fonctionne dans d’autres pays au niveau du primaire : la réussite est bien meilleure quand il n’existe ni redoublement ni notation précoce. Quand allons-nous l’entendre ? Il est temps de s’attaquer à ces deux mythes. À cet égard, nous notons avec satisfaction les avancées du texte en ce sens.

Cela a été dit, les inégalités sociales se sont renforcées, et l’école joue un rôle totalement stratégique en matière de socialisation. Il faut donc mettre en place une scolarisation précoce dans les zones urbaines défavorisées, sans oublier les zones rurales ou périurbaines.

Par ailleurs, les écoles supérieures du professorat et de l’éducation doivent être des lieux structurés et structurants vivants, propres à donner un nouveau souffle à la formation de nos enseignants.

Enseigner est un métier : cela s’apprend, et ce tous les jours, tout au long de la vie. Monsieur le ministre, nous attirons votre attention sur la question de la formation continue des enseignants.

Enfin, pour ce qui nous concerne, nous tenons particulièrement aux projets éducatifs de territoire. À cet égard, nous aimerions revenir sur la façon dont ils ont été mis en place cette année, afin de donner un peu plus de souplesse au système. Nous souhaitons également que les contrats éducatifs locaux, créés en 1998 par une circulaire cosignée par de nombreux ministres, puissent inspirer des mesures allant dans le même sens.

En ce qui concerne les recrutements et les concours, nous estimons – nous l’avons déjà dit ici il y a quelques mois – que c’est à la fin de l’année de L3 que les choses devraient se jouer, mais nous n’avons pas réussi à vous convaincre. Nous comprenons bien les raisons qui ont poussé le monde des universités et d’autres acteurs à préférer une autre option, mais nous aimerions que soit inscrite dans le texte une clause de revoyure, afin d’examiner si organiser le concours en fin de L3 ne présenterait pas finalement plus d’avantages. En effet, les masters seraient ainsi plus cohérents et, nous sommes prêts à vous le démontrer, monsieur le ministre, cela ne coûterait pas plus cher à l’État. Nous insistons fortement sur ce point.

Concernant les langues régionales, là encore, ne regardons pas le XXIe siècle avec les lunettes du XIXe siècle : nous ne sommes plus en 1880.

Aujourd’hui, tout le monde parle français, et la diversité linguistique ne doit plus nourrir de craintes. Trente ans après les lois de décentralisation, nous savons que personne n’est menacé par la pratique des langues régionales.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Aussi avons-nous déposé quelques amendements qui, loin de mettre en danger l’unité de la République, visent uniquement à mettre en valeur notre patrimoine linguistique dans toute sa diversité et sa richesse. Nous pensons en outre qu’il est temps d’avancer dans la prise en compte de la langue des signes.

Pour conclure, si nous étions très satisfaits de la tournure prise par le texte à l’issue du travail accompli par la commission sous l’égide de Mme la rapporteur, qui a permis de nombreuses innovations et avancées, nous éprouvons ce soir quelques doutes. Parfois, les compromis les plus subtils risquent d’émousser les enthousiasmes les plus sincères… §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, sans nul doute, on ne pouvait continuer à assister passivement au spectacle déchirant de la dégradation de notre école ! Qui peut accepter que 150 000 jeunes sortent chaque année du système éducatif sans formation ? Comment se satisfaire que 25 % des élèves entrant au collège soient en difficulté ? La France peut-elle continuer à être le pays d’Europe ayant le plus mauvais taux d’encadrement des élèves ? Comment peut-on justifier la baisse, pendant les cinq dernières années, de 35 % à 11 % du taux de scolarisation en maternelle des enfants de moins de 3 ans ? Comment expliquer la suppression progressive des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, et des moyens indispensables pour aider les enfants porteurs de handicaps ? Doit-on continuer à ignorer la médiocrité de la formation des enseignants, le creusement des inégalités dans leur recrutement, la faiblesse et l’insuffisance des moyens en termes de remplacement des maîtres ? Comment pourrions-nous nous satisfaire des mauvais classements internationaux de notre institution scolaire, ainsi que de la médiocrité des résultats de nos élèves aux tests PISA, qui révèlent des lacunes insupportables dans plusieurs disciplines ?

Devant ce constat désolant, assez largement partagé sur les travées de cet hémicycle, il fallait mettre en œuvre une rénovation en profondeur de notre école. Le Président de la République, François Hollande, s’y était engagé, le ministre de l’éducation nationale, Vincent Peillon, le fait !

Il nous propose une loi qui s’attaque à toutes les régressions qu’a connues l’école au cours de ces dix dernières années. Il dessine une école tournée vers l’avenir, qui montre l’ambition de se repositionner aux premiers rangs, sur le plan international, en termes de politiques éducatives. Contrairement à ce que certains s’obstinent à affirmer, il s’agit bien d’une refondation.

En effet, c’est la première fois qu’un projet de loi d’orientation et de programmation constituant un engagement fort en faveur de l’école est présenté, qui plus est dans une période d’aléas financiers et de difficultés budgétaires majeures.

Ce texte n’est pas seulement une réforme du système éducatif ; il constitue bien une refondation de l’école républicaine, en ce sens que l’on part de la base, des fondations de l’école, de l’école primaire. C’est en cela que cette refondation est vraiment démocratique et égalitaire : elle concernera tous les élèves, en commençant par ceux de la maternelle.

Une réforme globale de l’éducation par une seule loi, qui constituerait, aux dires de l’opposition, la seule véritable refondation possible, n’a jamais existé, à aucune période, ni dans aucun pays, pas même sous Jules Ferry ! Il s’agit là non pas du point de vue subjectif du membre de la majorité gouvernementale que je suis, mais de celui d’un historien de l’éducation unanimement reconnu, M. Claude Lelièvre, professeur d’histoire de l’éducation à la Sorbonne.

Certes, la loi de 1989 voulue par Lionel Jospin était une grande loi d’orientation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Puis, la loi Fillon de 2005 fut une loi de programmation. Mais le texte qui nous est aujourd’hui présenté est le seul à rassembler les deux volets : l’orientation et la programmation.

Ce projet de loi de refondation de l’école de la République se situe dans la parfaite filiation des lois fondatrices qui se sont succédé pendant dix ans : la loi Paul Bert sur les écoles normales, en 1879, les lois Jules Ferry sur l’école laïque, gratuite et obligatoire, en 1881 et en 1882, la loi Goblet sur l’organisation de l’enseignement primaire, en 1886, et, enfin, le statut des enseignants, en 1889.

Ainsi, contrairement à ce que certains préconisent aujourd’hui, les fondateurs de l’école de la République n’ont pas débuté leur œuvre par les structures ou par le statut des enseignants, mais bien par la formation. De même, avec le présent texte, la refondation de l’école commence par la pédagogie, la formation des enseignants et la priorité donnée au début du parcours scolaire.

Le projet de loi de refondation de l’école de la République que vous défendez avec l’enthousiasme et la sincérité que l’on vous connaît, monsieur le ministre de l’éducation nationale, constitue un contrat renouvelé entre l’école et la nation : quand l’école avance, la République grandit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Il s’agit bien, aujourd’hui, de jeter les bases d’une rénovation en profondeur de l’école, de partager des valeurs et une vision, de développer des pédagogies de la confiance et de la réussite.

Il faut rompre avec cette vision essentiellement comptable qui a installé la défiance entre la communauté éducative et ceux qui sont chargés de gérer les moyens nécessaires au fonctionnement de l’institution scolaire.

Le constat de la dégradation étant établi, il convient désormais de proposer des solutions. Ce projet de loi de refondation apporte les réponses qu’attendaient les acteurs du monde éducatif : les élèves, les parents, les enseignants, les collectivités locales, le monde associatif, toutes celles et tous ceux qui comprennent le malaise dont souffre notre société, dans laquelle notre école est en train de perdre pied.

Dans ce contexte, qui peut contester qu’il soit urgent et nécessaire d’arrêter l’hémorragie des moyens humains ? À cet égard, 60 000 postes seront créés pendant le quinquennat, alors que 80 000 avaient été supprimés au cours des cinq dernières années et que 80 000 autres l’auraient été durant les cinq prochaines années si l’on avait poursuivi selon le schéma mis en place en 2007C’est donc d’un différentiel de 140 000 postes qu’il s’agit, avec la création de 60 000 postes et la non-suppression de 80 000 : voilà ce que l’on peut opposer à celles et ceux qui contestent l’amélioration des moyens !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Qui peut contester qu’il faille reconstruire la formation des enseignants ?

Certes, la mastérisation a assuré un bon niveau de formation intellectuelle des enseignants, mais à quel prix ? Les étudiants avaient une idée négative du métier d’enseignant, les nouveaux professeurs étaient affectés sans jamais avoir rencontré d’élèves dans une classe et, en matière de recrutement, les couches populaires étaient sous-représentées, car il faut avoir les moyens de poursuivre ses études jusqu’à bac+5 ! Il y avait donc pénurie de candidats au concours et le vivier se tarissait d’année en année de manière inquiétante.

Pourtant, la preuve a d’ores et déjà été apportée que l’on peut restaurer la confiance. On constate que les premières annonces, les premières mesures prises depuis mai 2012 par le Gouvernement ont amené une progression du nombre de candidatures au concours de 50 % en 2013.

Il faut donc revoir complètement la formation des enseignants, en lui apportant toute la professionnalisation dont elle manque cruellement aujourd’hui. Cette formation sera assurée au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, dans lesquelles pourra jouer la double commande de l’éducation nationale et de l’université.

Quant aux rythmes scolaires, ils ont largement fait débat. Qui peut aujourd'hui encore défendre la semaine de quatre jours, alors que toutes les études des spécialistes montrent qu’elle est néfaste pour les enfants ? Il fallait donc mettre en place de vrais rythmes scolaires. La semaine de quatre jours et demi, avec des horaires allégés, constitue une première réponse au mécontentement exprimé en 2008 par l’ensemble de la communauté éducative, lors du passage forcé à la semaine de quatre jours.

Cette nouvelle organisation permettra de donner une véritable place aux activités périscolaires, qui sont souvent animées par les associations d’éducation populaire, nombreuses dans nos quartiers et dans nos communes. Les associations laïques, les clubs sportifs et, d’une manière générale, le monde associatif pourront retrouver un rôle éducatif essentiel, au service du développement et de l’éducation de nos enfants. Les communes ou les communautés de communes qui assureront la responsabilité et l’organisation de ces nouveaux temps éducatifs seront ainsi des partenaires à part entière de la communauté éducative.

On comprend d’ailleurs assez mal pourquoi se manifeste quelque frilosité à mettre en œuvre, dès la rentrée de 2013, des rythmes dont tous s’accordent à dire qu’ils constituent la bonne solution pour les enfants. Cela revient à dire aux enfants de notre pays que nous savons ce qui est bon pour eux, mais que nous leur demandons d’attendre la rentrée de 2014 pour en bénéficier ! En tous cas, les aides financières promises par l’État sous forme d’un fonds d’amorçage sont prévues dans le texte qui nous est soumis.

En résumé, le projet de loi donne la priorité à l’école primaire d’une manière totalement inédite, prévoit un effort considérable en termes de postes supplémentaires, avec un engagement sur cinq ans, instaure des rythmes scolaires adaptés aux besoins reconnus des enfants, ainsi qu’une vraie formation initiale et continue des maîtres, comporte des engagements en matière de scolarisation des enfants de moins de 3 ans, programme des moyens adaptés pour les élèves en difficulté et les enfants porteurs de handicaps, vise à lutter contre le décrochage scolaire et contre l’illettrisme, à promouvoir la santé, à créer un véritable service public du numérique éducatif, à nouer un partenariat affirmé avec les collectivités territoriales, à améliorer la place des parents dans l’école, à instituer l’enseignement de la morale laïque…

Tels sont, mes chers collègues, quelques-uns des nombreux aspects de ce projet de loi de refondation de l’école. Au-delà de ces engagements, il procède de la volonté de promouvoir une école qui éduque, qui enseigne, qui forme les citoyens de demain et qui rassemble les membres d’une collectivité, une école qui appartienne à la nation tout entière et qui la représente.

Notre école républicaine a certes besoin de moyens, mais aussi de valeurs à enseigner et à diffuser auprès de notre jeunesse. Notre école doit être réformée pour combattre et vaincre les inégalités, pour aider les plus démunis au lieu d’aggraver les écarts qui se creusent entre nos concitoyens, pour construire le socle commun de connaissances, de compétences et de culture auquel chacun des enfants de notre pays a droit. Elle doit constituer un creuset pour la justice et former des citoyens libres et égaux.

Le groupe socialiste se félicite de l’ouverture d’un grand débat démocratique, grâce à la concertation qui a été lancée dès l’été dernier ; aujourd’hui, le moment est venu pour le Sénat d’y prendre toute sa part. Les travaux de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication ont été très constructifs : près de cent trente amendements ont été adoptés, dont certains émanaient de l’opposition.

MM. Jacques Legendre et Jean-Claude Carle le contestent.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Monsieur Legendre, dix-huit amendements venaient de l’UMP et dix-sept de l’UDI-UC !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Comme ils l’ont fait en commission, les sénateurs socialistes apporteront leur contribution positive au débat en présentant quelques amendements, relatifs notamment à la santé scolaire et aux écoles supérieures du professorat et de l’éducation.

Mes chers collègues, ce projet de loi est très attendu par tous les acteurs du système éducatif. Ce débat devrait passionner notre pays, car il prépare son avenir !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, les derniers chiffres du Conseil d’analyse économique, le CAE, font apparaître que, au début de l’année 2013, 17 % des jeunes de 15 à 29 ans ne fréquentent ni l’école ni l’université, ne bénéficient d’aucune formation et n’ont pas intégré la vie professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Monsieur Assouline, nous espérons beaucoup de ce texte !

Aujourd’hui, plus de 150 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans validation de leurs acquis, alors que le niveau d’étude et l’obtention d’un diplôme professionnalisant sont les clés de la réussite. Dans la majeure partie des cas, ces jeunes sont issus des catégories sociales les plus défavorisées de notre pays. D’ailleurs, l’OCDE classe la France au vingt-septième rang sur trente-quatre pays du point de vue de l’équité scolaire : dans notre pays, l’incidence de l’appartenance sociale sur les résultats scolaires est particulièrement forte.

En outre, le taux de scolarisation des 15-19 ans a baissé au cours des quinze dernières années, ce qui est alarmant quand on sait combien l’insertion professionnelle de ces jeunes est difficile : en France, 71 % d’entre eux sont sans emploi ou inactifs, alors que ce taux est de 57 % en moyenne dans les autres pays de l’OCDE.

Mes chers collègues, tous ces chiffres vous paraissent peut-être fastidieux à entendre, mais il m’a semblé nécessaire de les mentionner pour jeter les bases de ce débat. Nous nous accordons tous à reconnaître qu’ils sont inquiétants, de même que nous reconnaissons tous l’impérieuse nécessité de trouver rapidement des solutions pour que nos jeunes puissent s’insérer dans la vie professionnelle. L’école de la République doit donner à tous les mêmes chances !

Notre pays traverse une crise économique sans précédent et ces jeunes sont les plus touchés par le chômage ; les dernières études européennes et internationales en font le triste constat.

Quant au Conseil d’analyse économique, il estime que « si la crise a affecté l’ensemble des pays développés, nombre de nos voisins européens connaissent des taux d’emploi des jeunes nettement supérieurs au nôtre ». C’est donc qu’il existe des solutions ! Le CAE met notamment en évidence deux grandes raisons de la situation française : l’enseignement professionnel par l’alternance entre emploi et études est trop peu développé et les moyens alloués à l’accompagnement vers l’emploi des jeunes les plus en difficulté sont insuffisants.

Le projet de loi a l’ambition de définir « les objectifs de la refondation en matière d’élévation du niveau de connaissances, de compétences et de culture de tous les enfants, de réduction des inégalités sociales et territoriales et de réduction du nombre des sorties du système scolaire sans qualification ». Très bien, mais il reste maintenant à y parvenir ! Or je crains malheureusement que ce texte ne tienne pas ses promesses : les bonnes intentions ne suffiront pas.

Le projet de loi donne la priorité à l’école primaire. Je suis bien évidemment d’accord avec cette orientation : c’est dès le cours préparatoire que tout doit être mis en œuvre pour la réussite de tous. L’école doit donner les mêmes chances à tous les élèves : elle doit être une chance, pas un facteur d’inégalité ! À cet égard, tout se joue dès le primaire. Or les écarts sont encore trop grands aujourd’hui ; pis, ils s’aggravent. Nous constatons malheureusement tous les jours que, d’un territoire à l’autre, d’un établissement à l’autre, d’une famille à l’autre, les élèves n’ont pas tous les mêmes chances de réussite.

Cette situation n’est pas acceptable. C’est pourquoi je regrette que la mixité sociale et l’éducation prioritaire, en particulier, ne soient pas abordées par le projet de loi, non plus que les difficultés relatives à la carte scolaire. S’agissant de cette dernière question, le rapport de la mission d’information du Sénat sur la carte scolaire préconisait notamment, en juin 2012, de développer une pédagogie de la mixité sociale, de repenser l’offre de formation, ainsi que l’attribution des dotations aux établissements, et de réviser les procédures d’affectation et de dérogation. Or rien ne nous est proposé sur ces points.

Les inégalités ne font d’ailleurs que s’accroître au fur et à mesure du parcours scolaire des élèves. Aujourd’hui, près de 20 % des élèves de 15 ans sont en grande difficulté face à l’écrit et un nombre toujours croissant d’élèves arrivent en sixième avec des problèmes de lecture. Si des élèves ne maîtrisent pas la lecture et l’écriture à l’arrivée au collège, comment espérer que leur scolarité ultérieure se déroule sans problème ? Or aucune mesure concrète n’est proposée pour lutter contre l’illettrisme, pourtant déclaré grande cause nationale de 2013, alors même que le projet de loi vise à redéfinir le socle commun.

En ce qui concerne la formation des enseignants, si l’intention d’engager une réforme de leur formation initiale est louable, qu’en sera-t-il de son application et des moyens qui lui seront alloués, ainsi que de la formation continue ? Je suis sceptique quant à son efficacité réelle.

Rien non plus n’est proposé en matière de statut des enseignants. Le projet de loi comporte malheureusement bien trop de déclarations d’intention, qui seront loin d’être suffisantes pour faire face aux difficultés de notre système éducatif.

C’est pourquoi les sénateurs du groupe UDI-UC ont déposé une série d’amendements visant à mieux défendre les principes fondateurs de l’école et à améliorer son organisation, à renforcer le rôle des collectivités territoriales, à valoriser l’apprentissage et la formation professionnelle et à mieux prendre en compte les élèves en situation de handicap.

Les récents débats sur la réforme des rythmes scolaires ont montré de façon évidente que les communes et les intercommunalités comptent parmi les acteurs principaux de l’éducation de nos enfants ; elles doivent donc y être pleinement associées.

À ce propos, monsieur le ministre, je déplore la méthode employée pour modifier les rythmes scolaires ; cette réforme aurait dû être intégrée dans le présent projet de loi, comme il était prévu à l’origine. Tous, dans nos départements, nous constatons qu’elle sera très difficile à mettre en œuvre et que le manque de moyens alloués au temps périscolaire créera une nouvelle fois de nombreuses inégalités entre les collectivités territoriales. Le financement de ce dispositif n’a pas été évalué, ce qui pose un problème majeur aux municipalités.

Monsieur le ministre, comme je vous l’ai indiqué lors de votre audition par la commission de la culture, je suis, malgré ma réelle bonne volonté, dans l’impossibilité matérielle de mettre en œuvre cette réforme dans de bonnes conditions, les caractéristiques de mon pôle scolaire, situé en zone rurale et tributaire des transports scolaires, ne s’y prêtant pas : en raison des impératifs liés aux transports scolaires, l’amplitude horaire restera la même qu’aujourd’hui, avec une demi-journée supplémentaire qui accroîtra la fatigue des enfants.

La réflexion aurait été préférable à la précipitation. Cette réforme faisait l’unanimité dans l’esprit, mais, parce que l’on n’a pas pris le temps de la concertation avec les acteurs concernés, elle est aujourd’hui rejetée par le plus grand nombre !

Par ailleurs, je m’étonne que l’apprentissage et la formation professionnelle ne soient pas mis en avant, alors qu’ils peuvent être un levier puissant pour permettre à nos jeunes de s’insérer efficacement dans le monde du travail.

C’est ainsi que le projet de loi n’autorise plus les enseignements complémentaires préparant les élèves à des formations professionnelles, qui peuvent être proposés dès la classe de quatrième. Vouloir maintenir à tout prix un élève dans un parcours où il ne s’épanouit pas, c’est prendre le risque qu’il décroche et quitte le milieu scolaire. Au contraire, la formation ou l’apprentissage lui permettrait d’apprendre à connaître le monde de l’entreprise ; l’enseignement agricole est le meilleur des exemples à cet égard.

Mon inquiétude porte sur l’avenir des classes de quatrième de l’enseignement agricole, que l’article 33 du projet de loi met en péril. Si je me réjouis que le Gouvernement ait déposé un amendement visant à les prendre en compte, je regrette un peu de ne pas avoir été entendue sur ce sujet en commission. Cela étant, l’essentiel est que cet amendement existe.

Toujours à propos de l’enseignement agricole, la régionalisation de la formation professionnelle soulève également des questions. Comment s’articulera-t-elle avec le présent projet de loi et les lois à venir sur la décentralisation et sur le monde agricole ? De nombreuses zones d’ombre subsistent.

Le collège unique, au sens strict du terme, n’est pas la solution. Le collège doit être multiple et permettre aux élèves de trouver leur voie. Pour cela, il convient, au-delà du socle, de favoriser les parcours différenciés, parmi lesquels l’apprentissage. Il faut promouvoir la diversité des intelligences !

L’important, c’est que l’orientation des jeunes soit choisie et non subie, ce qui suppose que les enseignants, les parents et les enfants y soient pleinement associés et disposent d’une information complète.

Certains secteurs souffrent d’un véritable déficit d’image, alors qu’ils sont pourvoyeurs d’emplois et forment à des métiers en situation de pénurie de main-d’œuvre. C’est pourquoi je m’inquiète de la suppression du dispositif d’initiation aux métiers en alternance mis en place au bénéfice des jeunes de 15 ans sous statut scolaire par la loi du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance, la sécurisation des parcours professionnels et le partage de la valeur ajoutée, dite loi Cherpion. Ce dispositif répond à un besoin spécifique des jeunes de moins de 16 ans achevant leur parcours au collège et ayant une idée claire de leur projet professionnel.

L’apprentissage est une voie d’excellence : huit jeunes sur dix qui l’empruntent trouvent un emploi au terme de leur formation. Je pense donc qu’il faut maintenir le dispositif en question, qui est ancré dans la réalité des besoins des élèves. Sa suppression conduirait à des situations incohérentes : à la fin de leur troisième, des jeunes ayant acquis le socle commun de connaissances ne pourraient plus commencer une formation par l’apprentissage avant d’avoir atteint l’âge de 15 ans. Or l’apprentissage et la formation professionnelle préparent à plus de 500 métiers dans l’hôtellerie, l’informatique, le paramédical, l’artisanat et le bâtiment, tous secteurs dans lesquels les employeurs ont beaucoup de mal à recruter.

Cette filière constitue une possibilité supplémentaire offerte aux jeunes, l’emprunter n’est nullement une obligation ; elle ne représente ni un choix de seconde zone ni un choix par défaut. La place qui lui est accordée dans le système éducatif français est injuste au regard de ses performances et discriminatoire envers les jeunes qui ont opté pour ces parcours. Ces derniers se rendent bien compte que leur formation n’est pas toujours mise en avant, quand elle n’est pas dépréciée. Au bout du compte, pourtant, ils font partie de ceux qui trouvent un emploi.

Monsieur le ministre, votre projet de loi comporte bien trop de déclarations d’intention et ne prévoit pas assez de moyens pour les mettre en œuvre. En outre, il souffre de nombreux manques. Quant à la prétendue concertation destinée à le préparer, elle a été menée dans la précipitation, pendant les vacances d’été et alors même que le texte était pour ainsi dire rédigé !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous êtes de mauvaise foi : c’est la plus grande concertation jamais réalisée !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Mme Françoise Férat. Enfin, la réforme des rythmes scolaires n’a pas été débattue devant le Parlement et elle est imposée aux collectivités territoriales sans qu’on leur donne les moyens de la mettre en œuvre. Je regrette que, une fois encore, aucune réelle concertation n’ait été conduite avec les acteurs concernés.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le constat est sans appel : l’école est devenue, dans notre pays, le lieu de reproduction des inégalités sociales, tant et si bien que la France figure parmi les pays de l’OCDE où le lien entre les origines sociales et culturelles des parents et les résultats de leurs enfants est le plus caractérisé. Ce triste constat suffit à lui seul pour conclure que l’école de la République est en crise, et ce depuis trop longtemps, ajouterai-je.

Les moyens humains et financiers consacrés à l’école ne sont pourtant pas négligeables, diront certains. Alors, à qui la faute ? Peu importe, ai-je envie de répondre. J’aurai l’occasion de revenir sur ce point au cours de nos débats.

Le moment est venu d’entamer la refondation de l’école, de revenir aux fondamentaux, de fixer des objectifs à la fois ambitieux et raisonnables, de permettre à l’école de renouer avec son rôle d’ascenseur social et sa mission de transmission des connaissances, des savoirs et des valeurs républicaines.

Pour y parvenir, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut entrer dans le concret, celui du fonctionnement d’une école, de la vie quotidienne d’une classe, de la relation à la fois complexe et merveilleuse qui s’établit entre le maître et l’élève. Faut-il le rappeler ici, cette relation est fondée sur la transmission et l’échange. Dans la pratique, et dans le meilleur des cas, les deux principaux acteurs, le maître comme l’élève, reçoivent, et aucun ne doit perdre.

Aussi l’école a-t-elle besoin, avant tout, d’enseignants en nombre suffisant et dotés d’une solide formation. Ce métier, qui compte parmi les plus beaux, s’apprend : n’est pas pédagogue qui veut ! En effet, si la pédagogie a longtemps été définie comme l’art d’éduquer, elle est devenue une science, celle de l’éducation, qui rassemble les méthodes et pratiques d’enseignement et d’éducation, met en exergue toutes les qualités requises pour transmettre un savoir ou un savoir-faire. En un mot, il est nécessaire d’apprendre à apprendre !

C’est pourquoi aucune refondation de l’école ne sera possible sans le concours et l’engagement des enseignants : leur formation doit être professionnalisée et à la hauteur des enjeux, leur métier revalorisé aux yeux de la société, tout comme leur salaire, qui doit refléter la confiance et les attentes très fortes que nous plaçons en eux.

Nous devons reconstituer un corps d’enseignants motivés, responsabilisés, engagés, soutenus financièrement et moralement, un corps d’enseignants qui aiment leur métier et qui, tout simplement, croient en leur mission quotidienne au service des élèves et de la République.

Les nouvelles écoles supérieures du professorat et de l’éducation devront jouer un rôle clé dans le nouveau dispositif, puisqu’elles auront la noble charge de former et de préparer tous les enseignants, de la maternelle à l’université, ainsi que le personnel d’éducation. Elles contribueront aussi à la formation continue pour adapter les méthodes d’enseignement et les connaissances aux évolutions de la société.

La refondation de l’école passe par la priorité donnée à l’école maternelle et à l’école élémentaire. Bien des choses se jouent, en effet, en matière d’apprentissage des savoirs et de transmission des valeurs, dès les premiers pas de la scolarisation ! Nous partageons, monsieur le ministre, votre volonté de développer la scolarisation dès l’âge de 2 ans, alors que son taux a fortement chuté en dix ans, passant de 35 % à 11 %.

Sans passer en revue l’ensemble des moyens nécessaires – la discussion des amendements sera l’occasion d’entrer dans le détail –, je souhaite toutefois insister sur certains choix qu’il convient de faire.

J’évoquerai d’abord l’aide personnalisée aux élèves en difficulté, qui doit être revue, car on ne peut pas continuer à la dispenser pendant la pause du déjeuner, tôt le matin ou tard le soir, c’est-à-dire à des horaires incompatibles avec l’attention et la concentration.

Une autre décision incontournable concerne les RASED, qui doivent absolument être rétablis.

Quant à la révision des programmes, elle doit s’accompagner de l’instauration d’un vrai parcours culturel et artistique, tout comme du renforcement de la place du sport à l’école. Art et culture contribueront ainsi, aux côtés des autres matières, à une meilleure transmission des connaissances essentielles pour la réussite éducative et, plus encore, pour le « vivre ensemble ».

Enfin, je partage, monsieur le ministre, votre objectif de mettre en place un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance renforçant l’offre pédagogique. Il s’agira, notamment, de permettre aux élèves en situation de handicap et à ceux qui ne peuvent être scolarisés de se rapprocher de l’école, en bénéficiant de ressources adaptées, afin de tendre vers une école réellement inclusive. Ce service devra venir s’ajouter à l’enseignement classique, sans s’y substituer. Comme je l’ai indiqué, le fondement de l’apprentissage doit reposer avant tout sur la relation entre l’enseignant, l’élève et ses pairs.

Avant de conclure, et parce que nous sommes au Sénat, je souhaite dire quelques mots du rôle clé joué par les collectivités territoriales dans notre système éducatif, qu’il s’agisse des communes, pour l’école primaire, ou des départements et des régions, pour le secondaire. Chacun sait ici que ces collectivités s’investissent autant qu’elles le peuvent dans l’éducation. C’est pourquoi je salue la création du fonds d’aide aux communes pour la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Monsieur le ministre, il faut leur laisser du temps pour s’organiser ! Le temps passé à l’école par les enfants doit être un temps d’apprentissage de qualité, aménagé sans précipitation et avec les moyens nécessaires.

Monsieur le ministre, j’ignore, à ce stade, si le Sénat approuvera votre projet de loi, amendé par la commission de la culture du Sénat, dont je félicite la rapporteur pour le travail qu’elle a accompli. La majorité des membres du RDSE espèrent qu’il sera adopté, même si, à nos yeux, il peut encore être amélioré. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons déposé près de quatre-vingts amendements.

Quoi qu’il en soit, vous savez pouvoir compter sur les radicaux de gauche pour soutenir l’école de la République, une école publique et laïque de qualité, afin de lui permettre de retrouver toute sa place dans la préparation de l’avenir de la France. Combattre la grave crise morale que traverse notre pays, c’est aussi redonner force et vigueur à notre école. C’est en refondant l’école que nous redonnerons espoir à la jeunesse ! §

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, afin de compléter l’intervention de Corinne Bouchoux sur les objectifs du projet de loi, je souhaite appeler l’attention sur la section de ce texte consacrée à l’éducation aux usages du numérique, rebaptisée à juste titre par nos collègues de l’Assemblée nationale « service public du numérique éducatif ».

Je ne reviendrai pas sur le bilan des différents plans de développement des usages du numérique à l’école. Le rapport de notre collègue Françoise Cartron est très clair sur le sujet. En ce qui concerne la formation des enfants et des adolescents à l’utilisation des outils numériques, la France reste en retard, malgré un taux moyen d’équipement relativement satisfaisant, qui masque toutefois d’importantes disparités entre zones urbaines et zones rurales, ainsi qu’au sein des zones rurales.

Compte tenu de la réalité des moyens déployés pour faire face à ce retard et des difficultés de l’institution scolaire à intégrer la dimension numérique dans l’enseignement, le groupe écologiste recommande de s’inscrire dans une vision plus réaliste et pragmatique et, en même temps, plus inventive de l’apport des nouvelles technologies de l’information à l’enseignement.

À ce stade, la plus-value de l’intégration des nouvelles technologies du numérique dans les enseignements réside principalement dans les possibilités qu’elles ouvrent en termes de changements pédagogiques. En effet, ces nouveaux services numériques ne doivent pas seulement offrir un « outil de plus », à utiliser comme les autres parmi l’offre fournie par l’institution scolaire. Ils doivent servir de base à une refonte critique des approches pédagogiques, favorisant l’innovation et les expérimentations, au profit du travail collaboratif entre les élèves, ainsi qu’entre les enseignants. C’est le sens des amendements qui ont été déposés tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat par les parlementaires écologistes.

Utiliser uniquement les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement, les TICE, comme un nouveau support au service de pédagogies anciennes serait contre-productif et ne répondrait pas aux enjeux de la révolution numérique dans le secteur éducatif.

De la même manière, la proposition de favoriser l’usage de logiciels libres et de formats ouverts pour les ressources pédagogiques et les contenus numériques va dans le sens d’une extension de l’interactivité des outils mis à disposition des élèves et des personnels, alors que les logiciels dits « propriétaires » entravent, au contraire, le libre accès aux savoirs et la mutualisation des contenus.

Parallèlement, il convient de relativiser l’apport des nouvelles technologies dans l’enseignement. Pour nous, la plus grande des interactivités, en matière d’éducation, reste d’abord celle qui s’établit entre un enseignant et chacun des élèves à l’intérieur d’une salle de classe. Aucune technologie, aussi innovante soit-elle, ne peut se substituer à cette relation singulière.

S’il est important que l’école valorise les usages numériques dans le cadre des apprentissages, notamment pour améliorer le suivi personnalisé des élèves, il faut néanmoins se garder de faire des outils technologiques l’alpha et l’oméga de toute forme de modernisation des pratiques éducatives, car, dans les faits, les enseignants restent le plus souvent des praticiens des nouvelles technologies bien moins expérimentés que leurs élèves. Chacun connaît l’écart générationnel qui existe en matière d’appropriation des nouvelles technologies de l’information et de la communication.

En ce qui concerne la mise en œuvre du plan pour le développement des usages du numérique à l’école, j’observe que le portail unique de référencement de l’ensemble des ressources pédagogiques n’a toujours pas vu le jour. La faute en revient à un dispositif extrêmement lourd, peu ergonomique et contraint par les conditions posées par les éditeurs de manuels pédagogiques. Ce serait pourtant un outil essentiel à mettre au service de la communauté éducative.

Surtout, le numérique ne peut ni ne doit se substituer à l’éducation aux médias, au sens large du terme, telle que mise en œuvre dans les établissements, sur la base du volontariat des enseignants, depuis une trentaine d’années.

Or, j’ai déjà alerté la commission de la culture sur le fait que le Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information, le CLEMI, créé en 1983 par l’universitaire Jacques Gonnet, auquel je rends hommage, et chargé d’accompagner cette politique, a vu, ces dernières années, ses moyens humains et financiers limités, quand ils n’ont pas été tristement amputés.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

La faiblesse des budgets consacrés à cette mission ne permet plus de propager et d’étendre les expérimentations et les initiatives très riches conduites par le CLEMI. Je pense notamment au travail essentiel mené en direction des enseignants stagiaires, afin qu’ils ne soient pas démunis en matière d’éducation aux médias d’actualité, que ceux-ci soient numériques ou pas ! En effet, on aurait tort de considérer que l’accès à une vidéo sur internet peut remplacer le visionnage d’un journal télévisé ou la lecture analytique d’un article pour l’apprentissage du décryptage de l’information.

Mes chers collègues, le numérique éducatif représente sans conteste une voie de transformation des méthodes pédagogiques de l’enseignement. Pour autant, et au vu des contraintes financières subies par l’État et les collectivités locales, le groupe écologiste reste lucide quant à l’impact des mesures proposées au travers du présent projet de loi. Ce n’est que par un ensemble de dispositions, encore à développer et à améliorer, que nous pourrons véritablement renforcer et adapter aux temps présents le service public de l’enseignement dans notre pays. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

(Sourires.) Il est vrai que le simple manque d’outils scripteurs pour l’apprenant en ZEP, que peine à reconnaître la DGESCO, ne facilite pas la mise en œuvre efficace de ces projets ! Espérons que le maintien des ATSEM, auxquels viendront bientôt s’ajouter des adultes surnuméraires, permettra enfin la concrétisation des objectifs qui leur sont assignés. Sinon, les apprenants se verront contraints de rejoindre la cour de récréation pour y jouer avec un référentiel bondissant.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, la mise en place des PPRE dans les réseaux ECLAIR pilotés par les DASEN, bientôt renforcée par l’instauration du PET, peine à produire ses effets. §

Voilà ce qu’est devenu le système « éducation nationale » ! Seuls les initiés, les « sachants », s’y retrouvent, tandis que les autres acteurs, parents, élus ou même enseignants, n’y comprennent plus rien.

En conséquence, aucun objectif assigné au système éducatif n’a été atteint depuis vingt ans. Chaque année, notre école est plus inéquitable et plus inefficace, comme l’attestent toutes les enquêtes nationales ou internationales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Pourtant, les objectifs assignés à l’éducation nationale sont assez simples à définir.

Premièrement, l’école doit apprendre à lire, à écrire et à compter à tous les élèves. Or, aujourd’hui, le nombre d’élèves quittant le système éducatif avec de graves lacunes scolaires est inacceptable pour notre pays. Ainsi, 40 % des élèves qui entrent au collège connaissent des difficultés en lecture, en calcul ou en écriture.

À ce propos, je me réjouis que le Président de la République ait fait de l’éducation la priorité de son quinquennat et que le Gouvernement ait érigé la lutte contre l’illettrisme en grande cause nationale de l’année 2013.

Deuxièmement, l’école a pour mission de détecter les talents, aussi divers soient-ils, dans les domaines des arts plastiques, de la musique, des sciences, de l’histoire, etc. Les talents sont multiples et la sensibilité de chacun doit pouvoir être accompagnée et valorisée par l’école.

Troisièmement, l’école doit assurer la mise en adéquation des formations scolaires proposées avec les débouchés professionnels. C’est le meilleur moyen de prémunir la jeunesse contre le fléau du chômage, qui conduit un jeune sur quatre, au terme de son cursus scolaire, à pousser la porte non pas d’une entreprise ou d’une administration, mais de Pôle emploi !

Monsieur le ministre, venons-en au projet de loi que vous nous présentez. Je le dis clairement : ce texte est pavé de bonnes intentions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Que l’on me permette de saluer le travail de Mme le rapporteur, Françoise Cartron. Même si je ne suis pas d’accord avec elle sur plusieurs points et si nos avis sont souvent divergents, je veux rendre hommage à son implication et à son engagement au service de l’école.

La première bonne intention que je tiens à souligner, c’est la priorité accordée au primaire, dont je me félicite. En effet, le primaire, terreau de la construction des inégalités et du décrochage scolaire, a été le grand oublié des réformes précédentes.

Autre bonne intention, la volonté de donner davantage aux élèves les plus en difficulté, qui se traduit par la mesure intitulée « plus de maîtres que de classes », laquelle témoigne, monsieur le ministre, de votre détermination à lutter contre le décrochage scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Nous savons que l’amélioration de la performance globale de notre système éducatif passe par la diminution du pourcentage d’élèves rencontrant de grandes difficultés scolaires dans notre pays. J’expliquerai ultérieurement pourquoi, si je partage cet objectif, je suis en désaccord avec les mesures que vous proposez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation relève également d’une bonne intention. Évidemment, il est fondamental de reconstruire la formation des enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Mon cher collègue, j’ai été le premier à dénoncer les mesures prises à cet égard et à interroger le prédécesseur de M. le ministre à l’occasion d’une séance de questions cribles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Mes chers collègues, dans ce domaine, nous avons tous une part de responsabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En proposant de créer les ESPE, vous prenez en compte le fait que la formation initiale des enseignants peut améliorer de manière significative leur pratique en salle de classe et, par voie de conséquence, l’apprentissage des élèves.

Enfin, il y a consensus sur la réforme des rythmes scolaires. Il est assez rare que tous les rapports soulignent la nécessité d’une telle réforme.

Cela étant, monsieur le ministre, je ne voterai pas le présent projet de loi en l’état.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je vais m’en expliquer en reprenant les quatre axes que je viens d’évoquer, qui constituent les principaux piliers de la refondation de l’école que vous proposez.

Afin d’éclairer mon propos, je souhaite tout d’abord rappeler le contexte dans lequel vous nous présentez ce projet de loi.

Premièrement, vous êtes ministre de l’éducation nationale en une période où la prise de conscience de l’iniquité dramatique de notre système éducatif et de sa trop faible efficacité émerge. De ce point de vue, vous êtes ministre au bon moment, si tant est qu’il y ait un bon moment, rue de Grenelle, pour engager une réforme profonde du système éducatif.

M. le ministre sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Deuxièmement, vous bénéficiez d’un climat politique favorable puisque, comme l’a souligné mon collègue Benoît Apparu à l’Assemblée nationale, votre majorité accuse la droite d’avoir bradé le système éducatif. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. Jean-Claude Carle. Troisièmement, vous êtes issu du milieu enseignant, dont vous étiez et vous demeurez, je l’espère, apprécié et respecté. Pour ma part, j’ai du respect pour votre fonction, votre personne et votre engagement.

Mme Dominique Gillot applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Quatrièmement – c’est certainement le point le plus important –, l’éducation est la priorité du quinquennat de François Hollande. De ce fait, vous bénéficiez d’une importante marge de manœuvre, y compris budgétaire, pour réformer l’école.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Tous les voyants sont donc au vert pour réformer profondément et efficacement l’école. Cependant, vos choix m’interpellent.

Commençons par la réforme des rythmes scolaires. Ce n’est pas parce que le sujet fait consensus qu’il est efficace de le traiter maintenant. Dans un pays où 20 % des élèves sortent sans diplôme du système éducatif, la priorité budgétaire devait-elle être donnée à cette réforme ? Depuis des mois que nous parlons de celle-ci, l’accent est mis sur les activités périscolaires. Or, selon moi – je l’ai écrit –, la lutte contre l’illettrisme, le décrochage scolaire et les inégalités scolaires suppose la mise en œuvre de mesures politiques centrées sur la maîtrise des fondamentaux.

L’une des questions centrales de l’enseignement dispensé en primaire est celle du temps d’enseignement disponible.

Pour lutter efficacement contre les inégalités scolaires, il faut renforcer le temps dédié à l’apprentissage des fondamentaux, notamment pour les élèves les plus en difficulté. C’est pourquoi je m’inquiète de l’accent mis sur les activités périscolaires ou sur d’autres enseignements, comme l’éducation aux arts plastiques, l’introduction de l’apprentissage d’une langue étrangère ou de cours de morale laïque dès le cours préparatoire. En effet, quel bénéfice pourrait en retirer un jeune qui ne maîtrise pas les fondamentaux ? Ces enseignements limiteront nécessairement encore plus le temps alloué à l’apprentissage des fondamentaux. Cela ne va pas dans le bon sens, me semble-t-il.

Personnellement – mais ce point de vue est largement partagé –, j’aurais consacré la marge budgétaire dont vous bénéficiez non à la réforme des rythmes scolaires, mais à des actions plus efficaces à destination des élèves et des écoles les plus en difficulté. Mais surtout, monsieur le ministre, vous vous êtes trompé sur la méthode ; j’y reviendrai.

Pour ce qui concerne maintenant la réforme de la formation des enseignants, je suis favorable à la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, mais l’important, c’est le contenu des enseignements dispensés en leur sein. C’est de ce point que le Parlement devrait débattre. Or, à ce jour, nous n’avons aucune idée de la nature de ces enseignements. Les pédagogies enseignées répondront-elles aux attentes des enseignants sur le terrain ? Les enseignements prodigués donneront-ils des outils concrets à des enseignants dont la moitié de la classe est parfois en grande difficulté scolaire ? Ces enseignants pourront-ils être soutenus pédagogiquement lorsqu’ils éprouveront des difficultés à faire progresser leurs élèves ? Telles sont les questions que nous nous posons. Monsieur le ministre, force est de le constater, nous avons besoin d’éclaircissements sur ces points.

J’en viens à la priorité donnée au primaire, à propos de laquelle nous avons une divergence profonde. Pour moi, l’enseignement primaire, c’est l’école maternelle et l’école élémentaire. Agir au stade de l’école élémentaire, c’est déjà tard. Pour prévenir le décrochage scolaire, il faut renforcer la préparation à l’apprentissage des savoirs fondamentaux à l’école maternelle, notamment en grande section.

De nombreux pays nous envient notre école maternelle, dites-vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

On nous l’envie certainement en tant que structure d’accueil, mais pas comme structure de préparation à l’apprentissage des savoirs fondamentaux.

Mes chers collègues, l’écart de performance scolaire entre les élèves, déjà extrêmement important dès l’entrée au cours préparatoire, ne cesse de s’accroître par la suite. La maternelle est le terreau de la construction du décrochage et des inégalités scolaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je regrette donc qu’une véritable redéfinition de la mission assignée à l’école maternelle ne figure pas dans le présent projet de loi.

Cette mission est simple à définir : l’école maternelle doit résorber les inégalités de départ, afin de mettre tous les élèves sur un pied d’égalité au moment de l’entrée à l’école élémentaire. Cela suppose de renforcer le temps d’apprentissage des élèves pour qui l’école maternelle est la seule structure de développement cognitif. En clair, pour lutter efficacement contre les inégalités scolaires, il faut « primariser » la grande section de l’école maternelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La préparation à l’apprentissage des savoirs fondamentaux est tellement importante pour lutter contre les inégalités scolaires que je propose l’intégration de la grande section de maternelle à l’école primaire et, en conséquence, l’instauration de l’obligation de scolarisation à l’âge de 5 ans.

Dois-je vous rappeler, mes chers collègues, que, lors de l’élaboration de la loi Jospin, en 1989, puis de la loi Fillon, en 2005, le souhait de la représentation nationale était de faire de la grande section de maternelle le premier lieu d’apprentissage des savoirs fondamentaux ?

Aujourd’hui, l’école maternelle prépare trop peu à l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur le ministre, en souhaitant sanctuariser l’école maternelle avec un cycle unique, non seulement vous remettez en cause le souhait exprimé par la représentation nationale depuis vingt-cinq ans, mais encore vous commettez une erreur fondamentale.

Enfin, s’agissant de la mesure « plus de maîtres que de classes », plusieurs études ont démontré que l’ajout d’un enseignant surnuméraire dans une classe ne donnait pas forcément de résultats. Quelles sont les principales causes de cette situation ? J’en citerai deux.

Tout d’abord, l’enseignant en place délègue à l’enseignant surnuméraire, souvent inexpérimenté, le soin de s’occuper de ses élèves les plus en difficulté ; cela contribue à accroître encore un peu plus les inégalités scolaires.

Par ailleurs, les différences de pratiques pédagogiques entre les deux enseignants conduisent à « embrouiller » les élèves.

Concrètement, pour que cette mesure produise des effets, elle doit être strictement définie et encadrée. J’espère, monsieur le ministre, que ce dispositif sera évalué et que vous viendrez rendre compte devant la représentation nationale de ses résultats.

J’aurais également souhaité que soit instauré un soutien pour les enseignants qui rencontrent des difficultés à faire progresser leurs élèves. Je proposerais volontiers la mise en place d’un tutorat, qui pourrait être exercé par les inspecteurs de l’éducation nationale ou par les conseillers pédagogiques, dont les missions devraient être redéfinies afin qu’ils soient plus présents sur le terrain et se consacrent moins à des tâches administratives.

Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi de vous faire part de mon désaccord sur la méthode.

Depuis des décennies, chaque ministre chargé de l’éducation, quelle que soit son appartenance politique, qu’il s’agisse par exemple de M. Jospin, qui avait compris le rôle majeur du cycle des apprentissages fondamentaux, ou de M. Fillon, qui savait l’importance du socle commun, souhaite améliorer les choses. Mais, malgré leur volonté, notre système est de plus en plus inefficace et inéquitable.

Cela tient, à mon sens, à trois raisons majeures.

Premièrement, dans notre pays, les corporatismes sont forts. S’ils sont des piliers de notre démocratie, ils privilégient parfois des intérêts catégoriels, aux dépens de l’intérêt général. Soyons clairs, je parle de tous les corporatismes, ceux des enseignants, bien sûr, des parents, de l’administration de l’éducation nationale, mais également, mes chers collègues, celui des élus que nous sommes, pas toujours cohérents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Deuxièmement, votre ministère est fortement imprégné par la culture de la circulaire qui entend tout réglementer, de la même manière, partout dans le pays. Pourtant, les situations sont multiples : si la France est une, elle n’est pas uniforme. En matière d’éducation, monsieur le ministre, l’intérêt général doit prendre en compte la diversité des territoires.

Troisièmement, l’organisation et la gestion des ressources humaines ne sont plus adaptées à une société qui exige souplesse et réactivité.

Je crois que, concernant la réussite des élèves, vous pouviez faire entrer le système éducatif dans une culture du résultat. Ainsi, en faisant du primaire et de la lutte contre l’illettrisme votre priorité, vous pouviez fixer un objectif en matière d’amélioration de la maîtrise de la lecture par les élèves avant la fin du quinquennat de François Hollande. Sur ce point, les évaluations PIRLS qui seront réalisées en 2016 viendront d’ailleurs sanctionner votre action. L’éducation ne s’inscrit pas toujours dans le temps long.

Ces éléments me conduisent à penser qu’il faut changer de méthode et que nous ferons avancer les choses à l’échelon local, grâce notamment à la multiplication d’expérimentations évaluées. Il est urgent de passer des compétences séparées à des compétences véritablement partagées. En un mot, il faut passer de la culture de la circulaire à celle du contrat, du partenariat, de la proximité.

En conclusion, comme le disait Socrate voilà vingt-cinq siècles, « le savoir est la seule matière qui s’accroît quand on la partage ». Or aujourd’hui le partage est par trop inéquitable. Notre système éducatif laisse trop d’enfants au bord du chemin, il pénalise le développement de notre économie. Mais surtout, cette situation hypothèque la cohésion sociale de la nation.

Réussir le partage du savoir, c’est le grand défi qui s’impose à vous, monsieur le ministre, mais aussi à nous, car l’école n’est le monopole de personne ; elle n’est ni de droite ni de gauche, elle appartient à la nation tout entière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L’école est un sujet qui, trop souvent, divise, du fait d’approches idéologiques, alors que les réalités actuelles devraient, au contraire, nous inciter à engager un débat constructif, mus par un unique intérêt : l’avenir de tous nos enfants.

Mais des paroles aux actes, il y a un abîme ! J’en veux pour preuve le refus systématiquement opposé, ce matin et cet après-midi, par la commission à tous les amendements extérieurs.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Dans le passé, vous n’avez jamais accepté autant d’amendements de l’opposition que nous !

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Monsieur le président, monsieur, madame les ministres, mes chers collègues, le Président de la République a souhaité donner la priorité, au travers de la refondation de l’école, à la jeunesse et à l’éducation. C’est une véritable ambition, affirmée dans l’intérêt des élèves, et tel est bien l’essentiel !

Il s’agit de réaffirmer les principes fondateurs de notre système public de l’éducation, dans un esprit de justice, d’égalité et de solidarité ; c’est un véritable projet de société.

Monsieur le ministre, je me réjouis des trois orientations essentielles de votre projet de loi : la création de 60 000 postes, la réaffirmation du rôle fondamental de l’école maternelle en tant que facteur de réussite scolaire et d’égalité des chances, la création des ESPE. Avec cette dernière mesure, le texte tend à recréer une formation initiale pour les futurs enseignants et à replacer la pédagogie au centre de leur métier.

L’objectif de la refondation est clair : permettre la réussite de tous les élèves. Or, aujourd’hui, le déterminisme social pèse très lourd, et notre école n’assume plus, malheureusement, son devoir républicain, qui est de permettre à tous les enfants de développer leur potentiel.

Au-delà des notes, la réussite scolaire doit signifier aller à l’école sans la peur au ventre, avec plaisir ! J’insiste sur ce point, car le mot « plaisir » est trop peu utilisé quand on parle de l’école… Bien sûr, il doit être associé au mot « travail » ; nous avons eu sur ce point une discussion en commission.

Pour lutter contre le développement d’un climat de violence et d’agressivité, vous avez, monsieur le ministre, renforcé la présence d’adultes à l’école en créant un nouveau métier, celui d’assistant de prévention et de sécurité.

Évidemment, la réussite éducative n’est pas du seul ressort de l’école, elle dépend aussi de l’environnement de l’enfant, de ses éventuels problèmes familiaux ou de santé, de son accès ou non à la culture et au sport : autant de facteurs qui peuvent jouer sur la réussite des enfants, notamment de ceux qui vivent dans des milieux socioculturels défavorisés, ainsi que vous l’avez très bien souligné, madame la ministre, le 15 mai dernier, lors de la première journée nationale de la réussite éducative.

Dans cette perspective, j’ai choisi de m’arrêter sur l’un des éléments les plus prégnants qui participent de cette réussite : la santé, le bien-être de l’enfant.

« Les maîtres d’école [étant] des jardiniers en intelligences humaines », comme le relevait Victor Hugo, un enfant a besoin d’être placé dans un terreau qui soit le plus sain possible, d’être nourri et soigné, pour se développer et grandir. Un enfant qui a faim, qui voit ou entend mal ou qui ne dort pas assez ne peut se concentrer ou travailler correctement.

Or notre pays a la chance de disposer d’un dispositif unique et précieux, à savoir le système de santé scolaire, même si celui-ci connaît des difficultés. Il faut toutefois noter que ses personnels ont bénéficié d’avancées depuis l’élection de François Hollande : je pense à la revalorisation indiciaire des médecins effective depuis août 2012 et au passage des infirmiers scolaires en catégorie A. Cependant, il reste encore à combler un déficit de recrutement.

En matière de santé, je voudrais insister sur deux points : d’une part, un suivi de la santé d’élèves particulièrement ciblés par un médecin, avec présence obligatoire des parents, afin de permettre un temps d’échange et de soutien à la parentalité, plutôt qu’un bilan systématique, effectué en grande partie par des infirmiers ; d’autre part, l’éducation à la santé et aux comportements responsables.

Une telle action éducative mériterait d’être incluse dans l’emploi du temps des élèves et adaptée à leur âge, mieux qu’elle ne l’est aujourd'hui par les comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté, qui ne fonctionnent que très inégalement, selon les bonnes volontés des uns et des autres.

J’ai déjà évoqué les difficultés rencontrées par les enfants de familles défavorisées, mais il me paraît important de rappeler ici que, dans notre pays, 10 % des enfants de moins de 15 ans sont victimes de maltraitance physique, psychologique et/ou de carences affectives, et ce dans tous les milieux, selon Anne Tursz, pédiatre et directrice de recherche à l’INSERM. Comment apprendre dans de telles conditions ?

Avec des missions redéfinies – je pense notamment à la prise en charge des enfants en situation de handicap –, le service de santé de l’école devrait être à même de détecter et de prévenir de telles maltraitances, en travaillant en coordination avec le ministère de la santé et les collectivités locales, au travers de la protection maternelle et infantile et des agences régionales de santé. Il devrait en outre, dans cette perspective, être doté de logiciels adaptés, dont les données soient prises en compte et analysées, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Monsieur le ministre, pour lutter contre les inégalités sociales, accentuées par la précarisation de la société, qui conduit à la résurgence de la malnutrition et de maladies qu’on croyait oubliées, comme la gale et la tuberculose, pour prévenir les troubles d’apprentissage et de comportement – je pense au suicide des jeunes –, pour porter cette ambition républicaine de la refondation de l’école, nous avons besoin de ces professionnels de santé, maillon indispensable à la réussite de nos enfants. Il y va de l’avenir de notre pays ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous nous félicitons que le projet de loi de refondation de l’école accorde une priorité à l’école primaire et porte une attention particulière à la maternelle.

C’était devenu une nécessité, après les réductions drastiques des moyens et du nombre de postes d’enseignant découlant de la RGPP mise en œuvre par l’ancienne majorité. L’école maternelle était devenue une variable privilégiée de l’ajustement budgétaire du ministère de l’éducation nationale, en dépit de son rôle décisif dans la lutte contre l’échec scolaire et les inégalités, particulièrement pour les enfants issus d’un milieu social défavorisé.

Je prendrai un exemple concret pour illustrer mon propos. Dans ma ville d’Auray, dans le Morbihan, pour décider la fermeture d’une classe, le taux d’élèves de moins de 3 ans présents à la rentrée est fixé à 15 % de l’ensemble des effectifs dans une école, et à 25 % dans d’autres. Mes chers collègues, je puis vous assurer qu’une telle mesure, très peu républicaine, a bien été mise en œuvre !

La scolarisation précoce en maternelle a une incidence positive sur le niveau de compétence des élèves, ainsi que sur la probabilité de redoublement.

Si nous partageons les objectifs du projet de loi concernant la réaffirmation du rôle de la maternelle et la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, avec la programmation de nouveaux moyens, nous aurions souhaité qu’ils soient énoncés avec plus de force encore.

La scolarisation des moins de 3 ans, particulièrement bénéfique pour les enfants issus des milieux populaires, a un effet positif en termes d’acquisition du langage, de compréhension orale et de familiarisation avec l’écrit.

Pourtant, c’est elle qui a subi le plus durement les conséquences de la RGPP. Ainsi, en 2000, un enfant sur trois âgé de 2 à 3 ans fréquentait l’école maternelle – et même un sur deux en Bretagne, où la scolarisation précoce était plus importante –, contre seulement un sur cinq aujourd'hui, et ce sans tenir compte de l’existence ou nom de crèches ou de pôles multi-accueil.

Le projet de loi prévoit donc la création de 3 000 postes sur la totalité du quinquennat pour développer l’accueil des moins de 3 ans. C’est un progrès indéniable, qu’il est juste de souligner. Néanmoins, avec plus de 36 000 communes et plus de 15 000 écoles maternelles publiques en France, la portée de cette mesure risque d’être insuffisante.

Nous nous félicitons également que soit mentionnée dans la loi la nécessité de mettre en place des conditions d’accueil adaptées aux spécificités des moins de 3 ans. La scolarisation des enfants de 2 à 3 ans ne se conçoit que dans de bonnes conditions d’accueil, permettant la prise en compte de la diversité des états de développement d’aussi jeunes enfants.

Par contre, l’article 5 du projet de loi, qui tend à récrire l’article du code de l’éducation relatif à la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, ne fait que reformuler, avec des mots différents, ce qui se pratique déjà : la scolarisation précoce s’effectue en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, qu’il convient d’ailleurs de définir de manière objective et réaliste. Je sais que certains quartiers urbains sont ciblés, mais de petites communes rurales méritent aussi qu’on leur porte une attention particulière.

Nous souhaitons, pour notre part, aller plus loin en rendant possible, à terme, la scolarisation de tous les enfants de 2 ans dont les parents en feront la demande. L’article 40 de la Constitution nous empêche de proposer l’adoption d’une telle disposition, mais nous affirmons que l’État doit garantir ce droit.

Nous formons aussi le vœu qu’un module spécifique de formation soit dispensé aux enseignants qui prennent en charge ces jeunes enfants, en plus d’une formation initiale et continue adaptée aux enjeux de la maternelle dans son ensemble.

Concernant les enfants de classe maternelle âgés de 3 ans et plus, le projet de loi apporte quelques avancées et fixe des objectifs que nous partageons : création d’un cycle unique pour la maternelle, mettant fin à la « primarisation » de l’école maternelle, affirmation des missions spécifiques de l’école maternelle, développement sensoriel, moteur et social, développement de l’estime de soi, épanouissement affectif, introduction – à notre demande – de l’objectif de développer l’envie et le plaisir d’apprendre, instauration d’une formation spécifique, tant continue qu’initiale, pour les enseignants d’école maternelle.

En revanche, nous ne pouvons que nous étonner, monsieur le ministre, que le projet de loi ne prévoie pas de rendre obligatoire l’instruction dès 3 ans.

Le constat partagé du rôle fondamental de l’école maternelle avait réuni toute la gauche du Sénat autour de la proposition de loi n° 447 de notre rapporteur, Françoise Cartron, visant à instaurer la scolarisation obligatoire à 3 ans, contre 6 ans actuellement. Nous avions passé une soirée mémorable et très animée à débattre de cette question avec M. Chatel, le précédent ministre de l’éducation nationale…

Avant tout symbolique, une telle mesure aurait permis de reconnaître à leur juste valeur les apports fondamentaux de la maternelle à notre système scolaire, sans incidence sur les finances de l’État, puisque plus de 99 % des enfants de 3 à 6 ans sont déjà scolarisés en France.

Nous partageons donc, monsieur le ministre, vos objectifs concernant la scolarisation des enfants de 2 à 3 ans ; néanmoins, nous aurions souhaité encore plus d’ambition, tant le précédent quinquennat a été marqué par un recul brutal et dévastateur !

Nous aurions souhaité la création de davantage de postes, bien sûr, mais surtout une avancée symbolique d’une véritable refondation progressiste de l’école de la République : l’extension de 3 ans à 18 ans de l’obligation scolaire. §

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, l'école de la République est chargée d'une noble mission, celle de transmettre le savoir aux jeunes générations.

Or l'école du XXIe siècle est en crise dans notre pays. Ce constat est bien souvent rappelé au travers d'évaluations nationales et internationales, notamment l'enquête PISA, qui concerne les pays membres de l'OCDE. Près de 150 000 élèves quittent chaque année le système scolaire sans réelle qualification, ce qui est inacceptable.

Le projet de loi qui nous est présenté ne traite pas du système éducatif dans son ensemble et ne propose aucune grande réforme, ce que nous pouvons regretter. Je me limiterai à évoquer quelques points qui me paraissent importants.

Monsieur le ministre, vous avez fait de l'école primaire une priorité ; cela est légitime, puisqu'il s'agit du niveau scolaire où l'avenir de l'enfant se construit. Pourtant, quelle est la classe à privilégier : la dernière année de l'école maternelle ? Le cours préparatoire ?

La relance de l'idée de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans voulue par la nouvelle majorité ne tient pas compte des disparités territoriales et économiques entre collectivités. Les enfants de 2 ans doivent être accueillis dans de bonnes conditions. À Melun, nous avons fait nos calculs : le coût de l'ouverture d'une classe de maternelle nouvellement équipée s'élèverait à plus de 50 000 euros – salaire de l’agent territorial spécialisé des écoles maternelles inclus –, dépense à laquelle il convient de rajouter les frais liés à la réforme des rythmes scolaires.

Admettez que ce sont là des dépenses importantes, d'autant que l'utilité de la scolarisation précoce des enfants n'a jamais été démontrée, comme l’a souligné en 2008 le rapport de mes collègues Monique Papon et Pierre Martin, qui concluait que les jardins d'éveil apparaissaient finalement mieux adaptés aux besoins des jeunes enfants.

Il me semble qu’il vaudrait mieux insister sur la grande section des écoles maternelles et rendre la scolarité obligatoire pour les enfants de 5 ans, qui pourraient ainsi être mieux préparés aux apprentissages. Ce serait un moyen d'éviter le redoublement des élèves en difficulté. Les élèves les plus lents pourraient continuer à acquérir la lecture en première année du cours élémentaire.

La définition par la loi Fillon de 2005 du socle commun de connaissances et de compétences a constitué une réforme ambitieuse. Une refondation de l'école devrait remettre en perspective la maîtrise de ce socle commun par chaque élève. Une bonne connaissance de la langue française s'impose pour maîtriser les techniques usuelles de l'information et de la communication, si importantes de nos jours. À l'heure où le numérique modifie l'accès à l'information et aux connaissances, les élèves ont besoin de repères, de bases solides et communes pour réussir et, bien au-delà, pour préparer leur avenir professionnel.

Sans détailler l'ensemble des fondamentaux, je soulignerai que la connaissance d'au moins une langue étrangère, à laquelle les élèves sont sensibilisés dès le cours préparatoire, semble primordiale dans une société de plus en plus mondialisée. Il est en effet préoccupant que les élèves français aient autant de mal à maitriser une langue étrangère, notamment l'anglais, qui est la langue la plus couramment parlée dans le monde.

Par ailleurs, pourquoi ne pas promouvoir, dans les académies limitrophes d'un pays étranger, la familiarisation avec la langue de celui-ci, voire son apprentissage, l'objectif étant de favoriser à terme l'intégration et la collaboration culturelle et économique avec ces territoires voisins ? Je présenterai un amendement en ce sens.

La réforme des rythmes scolaires est nécessaire, mais elle exige une réflexion et une concertation. C'est de manière globale et sur l'année qu'il convient de repenser les nouveaux rythmes, et non sur une base hebdomadaire.

Monsieur le ministre, en demandant aux communes d'appliquer la réforme des rythmes scolaires dès 2013, faute de quoi elles ne bénéficieront pas de la même aide financière, vous avez semé un vent de panique parmi les collectivités locales. §Quelle que soit la date de sa mise en œuvre, cette réforme pèsera sur le budget des communes.

En outre, si nous voulons alléger la journée scolaire et donner aux élèves la possibilité de s’initier à la musique, aux arts plastiques ou à la pratique d'un sport, il faut que tous soient concernés. S’en remettre aux collectivités locales, qui n'ont pas toutes les mêmes moyens, aboutirait à une rupture de l'égalité. Même si des projets éducatifs territoriaux doivent être élaborés, il faut que l'État prenne en charge les activités périscolaires – ou, tout au moins, y participe –, pour que tous les enfants puissent en bénéficier de façon équitable.

Monsieur le ministre, vous avez sanctuarisé le collège unique. Certes, il est important que tous les enfants de France soient scolarisés dans des conditions analogues, mais les parcours doivent être différents selon l'enfant, ses compétences, ses aptitudes, ses goûts. Une orientation devrait être proposée à chaque élève, sans que les choix se fassent par défaut.

Je déplore votre volonté de supprimer le dispositif, introduit par la loi Cherpion, d'initiation aux métiers en alternance pour les jeunes de 15 ans, qui répond à une véritable demande de diversification des parcours à partir de la quatrième. Pourquoi, monsieur le ministre, vouloir supprimer ce dispositif ?

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre

Ce n’est pas ce que nous faisons !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Je l’espère, car il s’agit d’une filière d'excellence, qui permet à de nombreux élèves, sous statut scolaire, d'entrer dans la voie professionnelle et de se réconcilier avec l'école par la réussite, facteur déclenchant qui les incite à continuer leurs études.

Gardons à l'esprit que la réussite scolaire passe aussi par le bien-être des élèves au sein des structures éducatives. Telle est l'ambition – ou telle était l'ambition, devrais-je dire – des internats d'excellence, notamment celui, souvent cité en exemple, de Sourdun, dans mon département de la Seine-et-Marne. Or, ces internats d'excellence n'auront constitué qu'un bref épisode dans l'histoire de la relance des internats. Leur mort annoncée par le Gouvernement, au motif qu’ils seraient trop coûteux, paraît inéluctable, alors qu'ils ont permis à de nombreux jeunes issus de milieux défavorisés d'étudier dans un contexte propice à la concentration et à la réussite, les conduisant le plus souvent à faire de bonnes études. Je déplore leur suppression, alors que ce dispositif – un des fleurons de la politique scolaire de Nicolas Sarkozy – a permis, à la rentrée de 2012, d'accueillir 4 173 élèves, dont je partage aujourd'hui la déception.

Monsieur le ministre, une réforme du lycée a été entreprise par votre prédécesseur, mais il faut savoir faire un bilan et revenir sur certains points si cela s’impose. Depuis un grand nombre d’années, le constat est flagrant : les meilleurs élèves optent pour la série S, sans tenir compte de leurs capacités ou de leurs projets. Je suis déjà intervenue dans d'autres circonstances pour souligner la nécessité de revaloriser la série L.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Il n'est pas acceptable, en effet, que ceux qui ont le projet de suivre une formation littéraire choisissent de passer le bac S. Il en va de même pour ceux qui s’orientent vers un IUT après un bac S : il faut laisser la place aux bacheliers issus des filières technologiques.

Pour terminer, je voudrais insister sur les différences existant entre les territoires qui composent notre pays. On ne peut pas imposer partout les mêmes solutions pour atteindre les mêmes objectifs, à savoir l’acquisition par chacun du socle commun de connaissances et d’une qualification : il faudrait faire du sur-mesure ; en l'occurrence, le maître-mot est « autonomie », avec une évaluation a posteriori.

En prônant l'égalité, la majorité gouvernementale fait de la démagogie, le risque encouru étant l'échec. Notre système éducatif mérite une réflexion approfondie. L'enjeu, c'est l'avenir de notre jeunesse, et le projet de loi n'accomplit pas la grande réforme annoncée. Le groupe UMP défend une autre conception de l'école. §

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, cette semaine, nous débattons, au-delà même de ce texte, d’une politique : celle qui fait de l’avenir de notre jeunesse la priorité, celle qui fait de la refondation de l’école de la République un préalable nécessaire, parce qu’il ne saurait y avoir de sursaut économique et social sans renouveau de notre système éducatif, l’école étant, comme l’a rappelé François Hollande, « le lieu même où se prépare la France de demain ».

Or, ces dernières années, des moyens considérables lui ont été retirés, la déstabilisant dans ses fondations et dans ses fondamentaux, sans que l’on se soucie du sort des « vaincus ».

Notre dette éducative est immense. Comme l’ont rappelé mes collègues, trop de jeunes sortent du système scolaire sans qualification, trop d’enfants entrant au collège sont déjà en difficulté. Au final, un jeune sur quatre ne trouve pas d’emploi. Cette dette est d’autant plus insupportable que l’école est devenue le lieu de la reproduction presque automatique des inégalités sociales en inégalités scolaires.

Alors, afin que vive la belle promesse d’égalité, il convient de consolider durablement ce pilier de la République et de repenser l’école de demain, de lui donner un sens.

Redonner un sens, c’est avant tout fixer un cap et réaffirmer nos valeurs communes. Dans cet esprit, monsieur le ministre, vous fixez des objectifs clairs et ambitieux : tous les élèves devront maîtriser les instruments fondamentaux de la connaissance en fin d’école primaire ; l’écart de maîtrise des compétences entre les élèves de l’éducation prioritaire et les autres devra être sensiblement réduit, tout comme le nombre d’élèves sortant du système éducatif sans qualification.

Dans cette perspective, notre commission a voulu inscrire la mission de démocratisation de notre système public d’éducation non seulement dans le corps de la loi, mais bien au fronton de celle-ci. Sur proposition de Mme la rapporteur, dont je salue l’ampleur du travail, un nouvel article 3A assigne à l’éducation nationale la mission de lutter contre les inégalités et fixe un objectif de mixité sociale.

Mais redonner du sens, c’est bien entendu commencer par le début : par la priorité accordée à l’école primaire, grande sacrifiée de ces dernières années, par la reconnaissance et le renforcement de l’école maternelle, qui représente le lieu privilégié de prévention de l’échec scolaire, par la création de 60 000 postes, dont la majeure partie seront affectés au premier degré, là où les besoins sont les plus criants. Commencer par le début, c’est aussi rétablir une formation des enseignants, avec la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation et le retour de l’année de stage.

Redonner du sens, c’est également mieux reconnaître et mieux définir le rôle des partenaires de l’école. L’école se construit avec les parents d’élèves – notre commission s’est attachée à le rappeler –, avec les collectivités territoriales et, plus généralement, par le dialogue et la coopération entre toutes les parties prenantes. Un amendement du groupe socialiste est ainsi venu mentionner les associations éducatives complémentaires comme membres de la communauté éducative.

Ce partenariat, cette complémentarité vont prendre toute leur dimension avec la réorganisation de la semaine sur cinq jours. Cette mesure est délicate à mettre en œuvre, mais une telle organisation est mieux adaptée au rythme de l’enfant et nécessaire au bon fonctionnement d’un système que l’on essaie de rebâtir. À ce sujet, je ne résiste pas, monsieur le ministre, au plaisir de vous dire que, dans le département des Landes, nous serons de bons élèves : plus de 70 % des communes mettront en place la semaine de cinq jours en 2013.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

Redonner du sens, c’est enfin faire de l’école un lieu d’ouverture pour les enfants plutôt qu’un lieu de compétition. Il s’agit, plus globalement, de préparer les élèves à s’intégrer dans leur future vie en société.

Le Conseil supérieur des programmes, organe de décision indépendant, rénovera les enseignements et les apprentissages en réintroduisant la transmission des valeurs citoyennes. L’éducation artistique, culturelle, l’apprentissage des langues vivantes participeront aussi à cette ouverture indispensable sur le monde.

À cet effet, la création d’un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance permettra aux enseignants d’innover et de rénover leur approche pédagogique. En parallèle, les apprentissages au numérique et par le numérique à toutes les étapes de la scolarité seront renforcés.

C’est parce que nous avons la volonté que l’école redevienne un pilier de la République, c’est parce que nous avons l’ambition de l’excellence pour tous, c’est parce que nous connaissons l’importance du rôle de l’école dans la réduction des inégalités sociales et dans la construction d’une citoyenneté que nous sommes fiers de soutenir ce projet de loi. À titre personnel, je suis fière de participer à l’élaboration de ce texte progressiste, je suis fière de l’importance que nous accordons à l’éducation et à l’avenir de notre jeunesse. Je serai fière de voter ce texte et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 22 mai 2013, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (441, 2012-2013) ;

Rapport de Mme Françoise Cartron, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (568, 2012 2013) ;

Texte de la commission (n° 569, 2012-2013) ;

Avis de Mme Claire-Lise Campion, fait au nom de la commission des affaires sociales (570, 2012-2013) ;

Avis de M. Claude Haut, fait au nom de la commission des finances (537, 2012-2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 22 mai 2013, à zéro heure trente.