Intervention de Stéphane Mazars

Réunion du 27 mai 2013 à 21h00
Adaptations au droit de l'union européenne dans le domaine du développement durable — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Stéphane MazarsStéphane Mazars :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collèges, le projet de loi que nous examinons ce soir est difficilement identifiable si l’on s’en tient à son seul titre. En réalité, les termes utilisés recouvrent des dispositions très diverses. On trouve dans ce texte des mesures relatives aussi bien aux conditions de travail des gens de mer, à la responsabilité des armateurs, à l’exercice de la profession de vétérinaire qu’à la prévention des risques industriels, aux transports ou encore à l’énergie. Chacune de ces mesures soulève des enjeux importants qu’il est impossible d’évoquer en quelques minutes à cette tribune.

Aussi, j’ai fait le choix de m’attarder sur certaines des dispositions relatives à l’énergie et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, en raison du débat en cours sur la transition énergétique et de la forte implication des politiques européennes sur cette question de fond.

Plusieurs points du projet de loi participent à la réalisation du triple objectif fixé par l’Union européenne pour 2020 visant à réduire de 20 % nos émissions de gaz à effet de serre, à améliorer de 20 % notre efficacité énergétique et à produire 20 % d’énergie à partir de sources renouvelables.

L’article 29 transpose l’article 8 de la directive du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique en rendant obligatoire la réalisation d’audits énergétiques pour les grandes entreprises de manière indépendante, et ce au plus tard pour le 5 décembre 2015. La compétitivité des entreprises sera assurée aussi par la réalisation d’économies sur leur facture énergétique. Ce sont environ 5 000 entreprises qui seront concernées par ces dispositions. Ces audits réalisés tous les quatre ans seront l’occasion d’identifier des points d’amélioration de la performance énergétique desdites entreprises.

Les transpositions effectuées permettront également de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports. Le report modal est notamment encouragé par la modulation des péages en fonction du niveau d’émissions polluantes des poids lourds et de la congestion du trafic.

Par ailleurs, la réduction des émissions de gaz à effet de serre est également favorisée par la transposition en droit national de l’objectif de 10 % de la part d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie dans le secteur des transports d’ici à 2020. En outre, les fournisseurs de carburants devront réduire de 10 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2010.

La ratification de l’ordonnance du 14 septembre 2011 nous donne surtout l’occasion de nous féliciter de l’application de critères de durabilité aux biocarburants et aux bioliquides. Les avantages fiscaux dont ils bénéficient, à savoir la réduction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ou la réduction de la taxe générale sur les activités polluantes, seront conditionnés au respect de ces critères.

Désormais, ces biocarburants doivent présenter un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 35 % par rapport aux carburants et combustibles fossiles. Ce taux devra être porté à 50 % en 2017 et à 60 % en 2018. Les biocarburants et bioliquides ne doivent plus être produits à partir de matières premières provenant de terres de grande valeur en termes de biodiversité, présentant un important stock de carbone ou ayant le caractère de tourbières. Enfin, ils ne doivent pas être produits à partir de matières premières qui ne respectent pas les bonnes conditions agricoles et environnementales applicables dans le cadre de la politique agricole communautaire.

La transposition de ces critères de durabilité n’est qu’une étape. Un projet de directive actuellement en discussion fait l’objet de fortes attentes, car il devrait permettre de réduire les impacts des changements d’affectation des sols. Il en va de même pour la deuxième génération des biocarburants, dont il faut rappeler qu’elle ne constitue pas l’unique solution pour renforcer la part des énergies renouvelables dans le secteur des transports. On peut mieux faire, et l’énergie électrique doit prendre toute sa place.

En effet, l’utilisation d’électricité d’origine renouvelable dans les transports et l’amélioration de son efficacité énergétique constituent également des leviers utiles pour la décarbonisation. Les systèmes de transport intelligents – la directive-cadre relative à ces systèmes est transposée à l’article 26 du projet de loi – doivent jouer un rôle déterminant. Ces objectifs sont d’autant plus essentiels que nous sommes dans l’incapacité de respecter les seuils d’émission de polluants atmosphériques.

Je tiens à saluer le travail de la commission du développement durable et de son rapporteur, ainsi que celui de M. Courteau, rapporteur pour avis. S’agissant d’un texte particulièrement technique aux dispositions très hétéroclites, les rapporteurs n’ont disposé que d’un délai restreint – tous les orateurs l’ont relevé – pour apporter quelques corrections à ce projet de loi de transposition et en améliorer la qualité.

L’Union européenne ne manque pas d’ambition à l’heure de définir la politique européenne énergétique et climatique. Cependant, le chemin sera long pour mener à son terme l’Europe de l’énergie, capable de mobiliser les capacités de production diversifiées nécessaires à un approvisionnement sûr et respectueux du climat et de notre environnement. Les moyens ne sont pas à la hauteur de ces ambitions, reconnaissons-le. L’absence d’une vision globale et commune de la politique européenne en la matière est dommageable et a des conséquences parfois absurdes.

Alors que l’Union européenne s’impose des objectifs contraignants pour lutter contre le changement climatique, elle relance ses centrales au charbon, car cette source d’énergie, pourtant beaucoup plus polluante, coûte bien moins cher que le gaz. Pour l’heure, le Conseil européen du 22 mai dernier a évoqué l’exploitation du gaz de schiste. Où en est-on de ce dossier, qu’il convient d’aborder sereinement et sans passion ?

Je rappelle que le RDSE est favorable à l’exploitation des gaz de schiste, mais pas par la technique de la fracturation hydraulique, bien trop polluante. Cela signifie, comme l’ont indiqué non seulement le rapport Gallois, mais aussi le Président de la République, que la priorité doit être donnée à la recherche pour trouver des alternatives permettant peut-être, à terme, l’exploitation des gaz de schiste sans porter atteinte à l’environnement. Telle est la position du Gouvernement, et nous la partageons.

Quant aux centrales à gaz, elles sont menacées, alors qu’elles permettent de compenser l’intermittence des énergies renouvelables que l’on veut par ailleurs promouvoir. Mes chers collègues, si le choix du mix énergétique relève de la souveraineté des États membres, nous ne pouvons pas faire l’impasse sur la nécessaire complémentarité des capacités de production et sur le développement des interconnexions pour assurer notre sécurité énergétique.

Madame la ministre, en attendant les conclusions du débat national sur la transition énergétique et en espérant que les prochaines transpositions de directives seront réalisées de façon moins précipitée et avec davantage de cohérence, le groupe du RDSE apportera son soutien à l’ensemble des dispositions du projet de loi.

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