Intervention de Richard Yung

Réunion du 26 juin 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Richard YungRichard Yung :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires est donc de nouveau soumis au Sénat, après une deuxième lecture à l’Assemblée nationale riche en débats.

Après son examen en première lecture par l’Assemblée nationale puis le Sénat, qui l’a adopté, comme vient de le rappeler M. le ministre, sans opposition, ce projet de loi comprend quatre-vingt-douze articles. En seconde lecture, l’Assemblée nationale était saisie de soixante et onze d’entre eux. Elle en a voté trente-six conformes et en a modifié trente-cinq, ceux que nous allons examiner aujourd’hui.

Au total, les divergences entre les deux chambres sont réduites au minimum, ce qui nous donne l’espoir de pouvoir parvenir à un accord, le cas échéant, en commission mixte paritaire.

Monsieur le ministre, nous nous félicitons, comme lors de la première lecture, d’avoir pu accomplir avec vous et votre cabinet un travail coopératif et itératif de qualité.

Les deux titres les plus emblématiques du projet de loi ont été adoptés conformes par l’Assemblée nationale.

Il s’agit d’abord du titre Ier, relatif à la séparation des activités. Les banques seront ainsi tenues de créer une filiale pour leurs activités pour compte propre. Cette filiale sera solide et capitalisée sur une base différente par rapport à sa maison mère. Elle devra pouvoir mourir sans intervention de la maison mère ou, pis encore, du contribuable. Ainsi, le gouverneur de la Banque de France ne recevra plus de coup de téléphone, le vendredi soir, de la part d’un président de banque menaçant de mettre la clef sous la porte, avec les conséquences que l’on peut imaginer. Cela permettra à la maison mère de se recentrer sur ce qui doit être la véritable activité d’une banque : recueillir des dépôts et prêter de l’argent aux entreprises, pour financer leur cycle de production, et aux particuliers, notamment pour acheter des biens immobiliers. Nous avons rencontré ce matin le président de la Banque centrale européenne, M. Mario Draghi : il a notamment souligné que les banques ne prêtent plus au secteur industriel, en particulier aux petites et moyennes entreprises, ce qui est extrêmement préoccupant.

Le titre II, relatif à la gestion des faillites bancaires, a été quasiment adopté conforme. Il représente aussi un formidable progrès de notre droit financier.

Précédemment, nous ne disposions pas des instruments nécessaires pour gérer les faillites bancaires : le contribuable devait nécessairement être sollicité si nous voulions éviter une crise systémique. Dieu merci, nous n’avons jusqu’à présent pas été confrontés à une telle situation, même si nous avons connu un ou deux cas de banque se trouvant dans une position délicate. J’ajoute que la réglementation européenne qui se met actuellement en place s’inspire des dispositions dont nous discutons aujourd’hui.

Sur ces deux points, qui sont sans doute les plus importants du projet de loi, il y a donc convergence de vues entre le Sénat et l’Assemblée nationale.

Cette dernière a par ailleurs poursuivi et complété le travail du Sénat.

En première lecture, la Haute Assemblée avait adopté, sur l’initiative de plusieurs de nos collègues, des amendements visant à lutter contre les dérives financières que nous connaissons tous : paradis fiscaux, trading à haute fréquence, rémunérations excessives, blanchiment d’argent.

Le Sénat a d’abord introduit l’article 4 bis, relatif à la lutte contre les paradis fiscaux et à la transparence des activités bancaires « pays par pays ».

En première lecture, nous avions adopté un dispositif obligeant les banques à publier chaque année des données sur leur implantation dans chaque territoire. Cette obligation fait partie de l’arsenal anti-paradis fiscaux, qui permettra d’identifier les implantations relevant de l’opportunisme fiscal, expression que je préfère à celle d’optimisation fiscale. Une obligation similaire a été introduite dans la directive CRD IV. Tous les établissements de l’Union européenne sont donc sur un pied d’égalité. De fait, l’un des soucis qui avaient été exprimés tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale portait sur la différence de traitement entre les banques françaises et celles des autres pays européens.

En deuxième lecture, l’Assemblée nationale a complété cet article en soumettant les grandes entreprises aux mêmes obligations d’information. Sous l’impulsion de la France, le Conseil européen du 22 mai a entériné cette importante avancée. Le projet de loi procède donc à une transposition par anticipation.

De même, l’Assemblée nationale a adopté une disposition permettant la transmission d’informations bancaires au fisc en vue d’appliquer les accords d’échanges automatiques d’informations à des fins fiscales.

L’article 4 quinquies B relatif à l’encadrement du marché des matières premières agricoles, qui avait été introduit sur l’initiative de notre collègue Yvon Collin, a également été enrichi.

L’Assemblée nationale a introduit une disposition obligeant les banques à indiquer dans leurs rapports annuels les moyens mis en œuvre afin d’éviter d’exercer un effet significatif sur les cours des matières premières agricoles. Elle a aussi interdit la constitution de stocks de matières premières agricoles en vue de manipuler les cours.

S’agissant des rémunérations dans le secteur bancaire, le Sénat avait inséré, sur l’initiative de Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, l’article 4 decies, visant à obliger les entreprises à consulter annuellement l’assemblée générale sur les rémunérations des dirigeants et des « preneurs de risques », c’est-à-dire ceux qui pèsent sur les décisions importantes ou stratégiques de la banque.

L’Assemblée nationale a prolongé cet encadrement. Elle a tout d’abord indiqué que cette consultation porterait sur l’enveloppe globale des rémunérations versées au titre de l’exercice écoulé, à l’image de ce qui vient d’être inscrit dans le code de bonne conduite adopté par l’Association française des entreprises privées, l’AFEP, et le MEDEF.

Je pense que nous aurons l’occasion de revenir sur cette question. En particulier, ne conviendrait-il pas que l’assemblée générale débatte non pas ex post, c’est-à-dire sur les rémunérations de l’année écoulée, mais ex ante, pour se prononcer l’enveloppe globale des rémunérations pour l’année à venir ?

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