Intervention de Fleur Pellerin

Réunion du 26 juin 2013 à 15h00
Séparation et régulation des activités bancaires — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Fleur Pellerin, ministre déléguée :

Monsieur Foucaud, vous avez indiqué que la transformation du Fonds de garantie des dépôts en Fonds de garantie des dépôts et de résolution ne pouvait avoir de sens que si le fonds voyait son montant accru. Ce sera effectivement le cas : le montant, qui est aujourd'hui de 2 milliards d’euros, sera progressivement porté – j’aurai l’occasion d’y revenir – à 10 milliards d’euros jusqu’à 2020. Cela permettra d’assurer la montée en charge et les nouvelles missions de ce fonds de garantie.

Monsieur de Montesquiou, je vous remercie de votre intervention. Vous avez souligné la qualité du travail que l’exécutif a mené en commun avec le législatif. Vous m’avez également posé plusieurs questions, et je vais m’efforcer de vous répondre.

Vous avez évoqué l’accès des collectivités locales au crédit bancaire. Depuis sa prise de fonctions, le Gouvernement – je pense en particulier à l’action de Pierre Moscovici – a beaucoup œuvré pour multiplier les solutions visant à permettre aux collectivités de retrouver un accès au crédit, ce qui leur est nécessaire pour le financement de leurs investissements. Vous savez que beaucoup de projets d’investissements sont extrêmement structurants ; je suis d’ailleurs bien placée pour le savoir, avec le très haut débit. Il s’agit d’un point essentiel : les collectivités locales représentent 70 % de l’investissement public.

Plusieurs mesures fortes ont été prises.

Tout d’abord, je pense à la création d’une banque publique des collectivités locales, qui a été confiée à la Banque postale, avec l’appui de la Caisse des dépôts et consignations.

Ensuite, une enveloppe exceptionnelle de 20 milliards d’euros sur le fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations sera ouverte pour assurer les financements de long et très long terme. Cette enveloppe pourra, en particulier, être mobilisée pour le financement des investissements en matière de déploiement du très haut débit fixe, avec des taux attractifs, des maturités longues et, dans certains cas, des différés de remboursement extrêmement intéressants pour les collectivités territoriales.

Par ailleurs, les banques ont renouvelé leur engagement à rester présentes dans leur offre de crédit aux collectivités locales.

Enfin, le projet de loi offre la possibilité aux collectivités de créer une agence de financement présentant une alternative au financement bancaire.

Les résultats se font d’ores et déjà sentir puisque tous les indicateurs témoignent de l’accès retrouvé des collectivités territoriales au crédit.

En ce qui concerne les emprunts toxiques des collectivités territoriales, vous avez rappelé à raison que le projet de loi comportait des mesures pour l’avenir. Pour le passé et l’héritage, Pierre Moscovici a eu l’occasion de souligner à l’Assemblée nationale ce qu’était le travail mené par le Gouvernement. Depuis lors, il a publiquement annoncé que, en concertation avec les collectivités concernées et leurs associations représentatives, une solution serait proposée. Elle reposera sur un fonds, auquel les banques seront notamment appelées à contribuer, permettant d’aider les collectivités territoriales concernées.

Dans le même temps, le Gouvernement proposera également à l’automne une disposition législative pour éviter les conséquences, potentiellement très lourdes pour les finances publiques, du jugement du tribunal de grande instance de Nanterre rendu en février dernier.

Le Gouvernement est donc bien saisi du sujet et travaille à une solution dans la concertation.

En ce qui concerne l’article 4 bis et la mesure de transparence pays par pays, je vous confirme – mais j’aurai l’occasion d’y revenir tout à l’heure – que les dispositions du projet de loi entreront bien en vigueur en même temps que les dispositions identiques que la France a pu faire inscrire dans le droit communautaire. Nos banques et nos entreprises ne seront donc pas lésées et placées dans une position de faiblesse par rapport à leurs concurrentes européennes. C’est un point extrêmement important pour le Gouvernement.

Enfin, je dirai un mot de l’article 14 et du contrôle de la gouvernance des banques. Le Gouvernement a conscience de la sensibilité du sujet, mais il juge cette mesure absolument indispensable pour tirer vraiment les conséquences de la crise financière. Je tiens à vous rassurer, le dispositif prévoit bien que les décisions de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, pourront faire l’objet d’un recours devant le juge. Il y a donc bien des garanties, et l’ACPR ne pourra pas faire preuve d’arbitraire.

Voilà, monsieur le sénateur, les réponses que je peux apporter à vos questions.

Monsieur Fortassin, vous m’avez interrogée sur la mesure de transparence pays par pays et sur l’entrée en vigueur du dispositif. Le Gouvernement a soutenu un amendement pour étendre cette mesure aux grandes entreprises. Il s’agit de montrer une volonté politique forte. Le Président de la République a d’ailleurs défendu cette idée auprès de ses homologues, qui l’ont reprise à leur compte lors du Conseil européen du 22 mai dernier. Toutefois, nous souhaitons rester fidèles à notre logique, qui vise à ne pas pénaliser les entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes européennes. Je sais que beaucoup d’entre vous sont attachés à ce principe. C’est pourquoi le projet de loi prévoit que la mesure n’entrera en vigueur qu’avec les dispositions équivalentes du droit communautaire. Le débat avance suffisamment bien à Bruxelles pour que la question aboutisse rapidement.

Je dirai un mot sur la péréquation, et je ferai une incise très rapide sur le déploiement du très haut débit, car le sujet n’entre pas dans le champ du texte que nous examinons aujourd’hui.

Le Gouvernement a mis en place, ce qui n’avait pas été fait précédemment, des crédits destinés à la péréquation afin que tous nos concitoyens, et non pas seulement les habitants des zones très denses, et donc rentables, aient accès au très haut débit à l’horizon de dix ans. C’est un engagement pris par le Président de la République. Il y aura donc bien 3 milliards d’euros de subventions pour assurer la péréquation entre les zones denses et celles qui le sont moins.

Ces 3 milliards d’euros seront financés par les opérateurs via l’acquisition de licences de téléphonie mobile leur permettant d’utiliser la bande de fréquence de 1 800 mégahertz pour déployer le très haut débit mobile, la 4G. D’une certaine façon, les opérateurs seront mis à contribution pour assurer la péréquation au profit de nos concitoyens habitant les zones les moins bien pourvues aujourd’hui en matière de haut débit.

Monsieur Gattolin, vous avez vous aussi évoqué la mesure de transparence pays par pays. Je vous confirme le rôle essentiel de nos débats et la position de la France dans l’avancée des travaux européens. C’est bien parce que le parlement français a pris l’initiative que nous avons pu débloquer l’insertion de la mesure dans la directive CRD IV. C’est donc une belle victoire collective pour la France, qui doit beaucoup à la coordination entre l’exécutif et le Parlement dont je me félicitais en début d’intervention.

Monsieur de Montgolfier, je dois vous contredire sur un point. Vous avez indiqué que les obligations de transparence pays par pays pour les banques entreraient en vigueur en France avant la directive CRD IV. Tel ne sera pas le cas. La directive CRD IV, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2014, prévoit bien que certaines informations devront être rendues publiques dès 2014. Ce sont les mêmes que celles qui sont prévues par la loi française. Je tiens à vous rassurer, il y aura bien alignement de l’entrée en vigueur des deux réglementations.

Vous m’avez interrogée sur le Fonds de garantie des dépôts et de résolution. En aucun cas la garantie des épargnants ne sera remise en cause. C’est un point extrêmement important ! Les épargnants seront toujours intégralement garantis jusqu’à 100 000 euros. Le fonds sera abondé de 2 milliards à 10 milliards d’euros afin d’accompagner l’évolution de ses missions. Il conservera la possibilité, en cas de besoin, d’appeler des fonds complémentaires auprès du secteur bancaire.

J’y insiste, la garantie des dépôts ne sera pas remise en cause. Au contraire, les débats européens dont je vous ai rendu compte ne font que la renforcer.

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