Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 9 juillet 2013 à 14h30
Transparence de la vie publique — Demande de renvoi à la commission

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Dans son intervention, Alain Anziani rappelait l’affaire du Mediator. Précisément, cette affaire a été rapidement réglée, et sans qu’il faille changer la loi.

Au Parlement, regardons les choses de près. Même les cavaliers masqués du petit matin ne peuvent aboutir sans l’intervention ou le consentement de l’exécutif.

L’affaire Tapie nous renvoie à un exemple récent. En février 2007, au cours de la campagne présidentielle, alors que nous examinions la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs, un amendement nous a soudainement été soumis qui visait à élargir le champ d’utilisation de la procédure d’arbitrage et, bien évidemment, à la sécuriser. On a vu ce qui s’est passé par la suite…

Le bon sens et l’honnêteté voudraient donc qu’avant de désigner, dans l’urgence, les responsables à la vindicte publique et de bricoler à la hâte des remèdes législatifs destinés à faire tomber la fièvre, on prenne le temps du diagnostic, de l’inventaire des moyens de traitement déjà disponibles et de leurs marges d’amélioration, car il y en a.

Le bon sens et l’honnêteté intellectuelle voudraient que l’on s’interroge sur la nature du processus de décision démocratique, sur ce que signifie « intérêt général », plutôt que de se contenter de psalmodier qu’il n’est pas la somme des intérêts particuliers, ce qui ne permet guère d’avancer.

Le bon sens et l’honnêteté intellectuelle voudraient, corrélativement, que l’on définisse en quoi consiste le « conflit d’intérêts » pour un parlementaire, les limites de la notion, ses rapports avec les « manquements au devoir de probité » du code pénal : « prise illégale d’intérêts », « favoritisme », « trafic d’influence ».

Les conditions dans lesquelles ces projets de loi ont pu être examinés par la commission des lois, je n’y insiste pas, mériteraient à elles seules cette demande de retour à la commission, d’autant que celle-ci, comme cela a été rappelé plusieurs fois, a produit, voilà deux ans à peine, un rapport suffisamment fouillé pour servir de point de départ à notre réflexion.

Malheureusement, M. le rapporteur en a retenu surtout les propositions allant dans le sens répressif, en évitant soigneusement d’en épouser la logique et l’essentiel, à savoir l’absence de publicité des déclarations, contrairement à ce qui nous est proposé aujourd’hui. La commission des lois tend même à revenir sur la légère réduction que l’Assemblée nationale a introduite.

Ainsi, intérêts matériels et intérêts moraux, décisions particulières et décisions de portée générale, activités professionnelles, mandats électifs et associatifs, se trouvent-ils mêlés dans le même grand sac des intérêts potentiellement en conflit. C’est de ce grand sac que sont censés sortir le génie et la lumière, et le triomphe de la morale !

Le plan de travail de la commission des lois, si vous acceptez ma proposition de renvoi, est très simple à dresser.

Tout d’abord, il convient d’établir le diagnostic : la vie politique française est-elle réellement si corrompue qu’elle a besoin de la présente ordonnance de coin de table ? Je me contenterai ici de remarquer que le président de la Commission pour la transparence financière de la vie politique, quand nous l’avons interrogé, nous a déclaré qu’en vingt-cinq ans d’examen, sur 25 000 dossiers, seules 14 personnes ont été concernées…

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