Le montant des erreurs et anomalies de portée financière est apprécié à travers des tests dits de « re-liquidation », consistant à recalculer le montant des prestations servies huit mois après la liquidation, lorsque les contrôles ont produit la plupart de leurs effets. Nous vérifions la permanence des méthodes employées d'un exercice à l'autre et la correcte détermination des résultats des tests en fonction des règles nouvelles définies par la Cnaf. En 2012, comme en 2011 et en 2010, ils confirment l'usage d'une méthodologie nationale. La baisse significative des erreurs et anomalies de portée financière justifie le changement de position de la Cour. Elle s'explique par les efforts importants accomplis pour s'assurer de la fiabilité des données relatives à la situation des allocataires, mieux détecter les anomalies, intentionnelles ou non, maîtriser les risques liés à l'identification des allocataires pour éviter les doublons, échanger des informations avec la direction générale des finances publiques (DGFIP) et Pôle emploi, afin de contrôler les ressources et les allocations chômage. Ces efforts marquent des progrès. Mais ils ne sont pas suffisants. La Cnaf s'est concentrée sur la fiabilité des données transmises par les allocataires, sans prendre en compte suffisamment les erreurs internes liées au traitement de ces données par ses services. Son dispositif de contrôle interne est insuffisant, tant dans sa conception que dans son pilotage. La couverture des prestations est trop partielle. Pour les prestations couvertes, il est inadapté aux tâches de gestion du risque et manque d'objectifs chiffrés. Le nombre de contrôles est en recul par rapport à l'année précédente.
Au total, le montant accumulé des erreurs et anomalies de portée financière demeure très élevé (1,15 milliard d'euros). C'est pourquoi la nouvelle convention d'objectifs et de gestion 2013-2017 renforce les efforts de maîtrise des risques financiers, y compris ceux qui découlent des erreurs d'origine interne aux CAF. De profondes évolutions doivent encore intervenir. Le data mining ou profilage des données à contrôler a été mis en oeuvre en 2011 pour améliorer le contrôle sur pièces et sur place des données présentant les risques les plus élevés. Or les contrôles sur pièces et sur place ne constituent qu'une part limitée, en 2012, des actions de contrôle mis en oeuvre par les CAF. L'effort de data mining doit être relativisé. Il n'a produit en 2012 que 78 millions d'euros de rappels et d'indus sur un total de 234 millions d'euros d'indus et de rappels dus aux contrôles sur place et 22 millions d'euros pour les contrôles sur pièces, qui ont eu pour corollaire une diminution des contrôles des agences comptables sur les actes de liquidation des services ordonnateurs. Le rendement financier a donc baissé en valeur absolue. Fin 2012, la Cnaf a étendu la technique du data mining au contrôle de cohérence des ressources et des allocations chômage déclarées par les allocataires, que nous ne pourrons évaluer que dans notre rapport 2013.
Donc, des progrès ont été enregistrés, mais il reste des éléments à améliorer.
Quant à la branche AT-MP, nous n'avons pu certifier ses comptes pour 2012, mais notre position a évolué. Nous sommes passés d'un refus de certifier en 2010 à une impossibilité de certifier.
M. Antoine Durrleman, président de la 6e chambre de la Cour des comptes. - C'est un progrès. L'an dernier, nous avions un désaccord comptable majeur avec le producteur des comptes, c'est-à-dire le directeur général de la Cnam, responsable de la branche AT-MP, qui considérait qu'il n'y avait pas lieu de provisionner les risques liés à ces contentieux. Cette année, il a accompli un changement copernicien, en acceptant d'entrer dans la logique du provisionnement, ce qui marque un progrès tangible, réel et sérieux. Il n'est pas pour autant complètement satisfaisant, dans la mesure où nous ne sommes pas sûrs que ces provisions importantes soient bien calculées. Le processus de remontée d'informations depuis les caisses primaires d'assurance maladie (Cpam) n'est pas construit. Or, il y a plus de 50 000 contentieux. La Cnam en est bien consciente, qui met en place un système d'information spécifique, devant offrir une vision précise du mode de calcul des provisions en 2014.
Nous espérons que l'année prochaine ces progrès nous conduiront à certifier les comptes, même si nous devrons probablement exprimer des réserves.
M. Jean-Pierre Viola, conseiller-maître, rapporteur général de la 6e chambre de la Cour des comptes. - La gestion du contentieux est suivie sur un simple tableur qui retrace les seuls flux de gestion, sans mémorisation des données. Quand la Cnam a voulu rechercher celles du 31 décembre 2011, elles n'étaient pas disponibles. Elle s'est fondée sur les déclarations des Cpam, mais nos travaux ont fait apparaître beaucoup d'anomalies dans le calcul de ces données. De plus, la Cnam n'a pas fait intervenir l'audit interne pour fiabiliser les données et déterminer leur marge d'incertitude. Nous ne savons pas si elles sont sous-évaluées de 10 % ou surévaluées de 50 %. Faute de connaître cette marge d'erreur, nous ne pouvions certifier.