Il a pourtant rappelé avec force tous les dangers inhérents au projet gouvernemental. Je constate d’ailleurs que M. le ministre – il est dans son rôle ! – s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Mais si M. le ministre avait été fidèle au projet du Gouvernement, il aurait dû s’opposer à cet amendement. En effet, le projet de loi organique initial prévoyait une définition du conflit d’intérêts qui était inapplicable. De plus, cette définition portait en germe des éléments de tension permanente entre l’opinion et le Parlement, tension qui aurait été organisée et entretenue par les responsabilités et les pouvoirs confiés à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Cette haute autorité, en effet, a la faculté de rendre publiques des appréciations. Par conséquent, elle peut contribuer à entretenir un débat se faisant au détriment de la vie parlementaire.
Nos compatriotes ont du mal à comprendre – mais je suis dans le même cas – ce qu’est un conflit d’intérêts. Ils ne savent pas exactement – qui le sait ? – où s’arrête le conflit d’intérêts, qui est une entorse à une déontologie, et où commence le délit pénal de prise illégale d’intérêts, de trafic d’influence, voire de corruption.
C’est exactement sur cette confusion, ouverte par la rédaction initiale du texte, que Christian Cambon a exprimé ses craintes dans son intervention. Je vous le rappelle, mes chers collègues, dans le projet de loi initial, des conflits d’intérêts pouvaient naître entre différents intérêts publics. Le point de vue d’un parlementaire qui est aussi élu local – ce cas de figure se présentera certes de moins en moins… – ou l’apparence d’un conflit entrent dans cette définition du conflit d’intérêts ! Ainsi, il suffit qu’un parlementaire soit actionnaire d’une société pour considérer que chacune de ses prises de position se fait par rapport à cette participation, fût-elle modeste.
L’amendement n° 114 permet donc d’en revenir à une définition plus raisonnable : cette dernière montre, de manière très claire, que le conflit d’intérêts ressortit à la déontologie, c’est-à-dire au comportement maîtrisé d’une profession ou d’un corps qui s’organise pour que chacun de ses membres puisse avoir confiance dans le regard et la décision de l’autre. Les deux aspects sont liés, mes chers collègues. Si le conflit d’intérêts devient une sorte de procès d’intention permanent, puisque même l’apparence pourrait être retenue, nous nous regarderons tous avec suspicion.