Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 12 juillet 2013 à 9h30
Transparence de la vie publique — Article 1er

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

On découvre – c’est l’intérêt de nos échanges ! – que ce projet de loi organique répond peut-être à une crise ponctuelle, extérieure au Parlement, mais qu’il va placer celui-ci dans une situation complètement nouvelle en ce qu’il affectera la loyauté des campagnes électorales, et cela dès les élections sénatoriales de 2014.

Comment peut-il y avoir loyauté de la campagne quand la mécanique que vous mettez en place permet à quiconque – y compris, si nous suivons certains de nos collègues, à des personnes, au demeurant tout à fait respectables, mais qui ne sont ni électeurs ni citoyens français – d’interpeller publiquement la Haute Autorité, en créant un événement médiatique largement artificiel, auquel celle-ci ne pourra pas répondre dans un délai compatible avec les échéances électorales ? Le candidat sortant se retrouvera dans une situation parfaitement déséquilibrée vis-à-vis de ses challengers, qui lui demanderont de rendre des comptes.

Imaginons simplement le cas d’un malheureux député ou sénateur sortant qui détient un portefeuille d’assurance vie dans lequel sont intégrées, par exemple, des actions Michelin. Manque de chance pour lui, il est dans une circonscription ou un département où l’entreprise Michelin, grande entreprise française, vendant des produits dont la qualité est reconnue dans le monde entier, qui est un atout de notre pays, mais qui, comme de nombreuses firmes industrielles, est soumise à des impératifs de réorganisation pour anticiper les difficultés, supprime des emplois.

Ce parlementaire aura beau être un actionnaire absolument marginal, détenir des actions qui sont en fait gérées par un tiers – le Crédit mutuel, le Crédit agricole ou que sais-je encore –, sans avoir le moindre droit de regard sur cette gestion, il n’en sera pas moins, du fait de l’existence de la déclaration consultable, publiquement pris à partie. Et ses challengers, dispensés de toute obligation de publication, auront alors beau jeu de s’écrier : « Moi, jamais je n’accepterais de confier mes économies à un industriel buveur du sang des prolétaires, qui bâtit sa fortune en supprimant des emplois pour des bénéfices boursiers ! »

Ainsi, mes chers collègues, nous allons fausser les campagnes : comme je l’ai souligné en me référant à l’article II de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la protection de la vie privée permet la protection de la loyauté des débats !

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