Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 12 juillet 2013 à 14h00
Transparence de la vie publique — Article 1er

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Je dispose de quatre minutes et cinquante-cinq secondes, mais je vous rassure, monsieur le président, je ne vais pas les utiliser.

Je pense très sincèrement que, dans ce débat, on méconnaît totalement la réalité de la vie familiale des élus. Je ne défendrai pas le cas des parlementaires, car leur engagement national, les responsabilités qu’ils exercent et l’importance de leurs missions peuvent, comme l’a souligné hier Alain Anziani, expliquer quelques sacrifices.

Je pense à cette immense armée d’élus locaux qui sont frappés par ce texte : les maires, les présidents de conseil général, les conseillers généraux, les futurs conseillers départementaux dans un certain nombre de cas, si j’ai bien compris, vont voir s’afficher sur la place publique la quasi-totalité de leur situation patrimoniale personnelle et celle de leur famille.

L’éloignement géographique ou l’anonymat des grandes villes offrent une protection relative pour toute personne qui, n’ayant commis aucun délit, présente simplement la singularité d’un profil atypique.

Mais, dès lors que l’on est dans un cadre plus restreint, local en particulier, et l’on connaît le charme discret de la vie provinciale, la perspective de cette publicité entraînera – je le dis avec gravité – des cas de conscience familiaux qui conduiront des gens de qualité à s’écarter des responsabilités publiques et de tout mandat collectif, de peur d’exposer inutilement leurs proches et ceux auxquels ils sont attachés.

Nous avons tous constaté qu’il était de plus en plus difficile de trouver des candidats pour des postes de responsabilité associatifs, y compris dans le cadre professionnel ou consulaire, pour ne pas devoir nous interroger sur les effets pervers d’un dispositif qui va aboutir à renforcer ce que certains collègues ont déjà dénoncé avec raison, à savoir la professionnalisation absolue des mandats politiques locaux et nationaux, singulièrement les mandats parlementaires.

Seuls ceux qui auront fait le sacrifice de leur vie personnelle et professionnelle au service d’une ambition légitime, fondée sur le souci, tout aussi légitime, de défendre des idées, prendront le risque de s’exposer. Celui qui, au contraire, ayant entrepris une vie professionnelle normale, en dehors de tout engagement collectif, mais aussi en dehors de la fonction publique, aurait la tentation de se dévouer au service de ses compatriotes dans le cadre d’un mandat local, courant le risque d’exposer son environnement personnel immédiat, sera vraisemblablement contraint de s’abstenir, ce qui appauvrira encore le vivier de ceux qui sont susceptibles de prendre des responsabilités politiques.

Nous aurons donc de plus en plus des professionnels de la carrière élective et de moins en moins des personnalités reconnues pour leur réussite professionnelle qui acceptent de mettre leur expérience au service de leurs compatriotes.

C’est le choix du Gouvernement, mais j’ai tenu à intervenir en explication de vote pour pouvoir dire que, à mon sens, nous rendons un mauvais service à la vie locale.

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