J’ai eu l’agrément de participer à cette instance dès sa création, il y a trente-cinq ans – il s’agissait d’une conséquence de la loi de 1978, à laquelle nous tenions particulièrement. Par la suite, j’ai pris part à ses travaux à plusieurs reprises, et je peux dire que la commission de codification est une véritable référence. Je l’ai d’ailleurs observé, chaque fois que j’ai pu en être témoin : le travail de révision opéré par le Conseil d’État en fin de parcours démontre que la codification préalablement accomplie a été parfaitement bien menée. Je n’aurai donc qu’un petit message à adresser à Mme la ministre : face à la pénurie d’effectifs, et compte tenu des efforts de répartition qu’il faut consentir, veillons à préserver les moyens humains de cette fabrique de la loi.
Le présent texte vise naturellement l’unification de notre droit, à partir de composantes qui n’ont pas forcément atteint complètement la cohérence. L’expérience a montré que, lorsque ce travail a été mené, c’est-à-dire lorsqu’on a réussi à recenser l’ensemble des textes visés, se font jour des différences historiques dont plus personne ne retrouve la justification.
Dans le cas des rapports administration-public, des écarts subsistent pour ce qui concerne les procédures d’examen des dossiers et de préparation de décisions qui s’appliquent dans les différents départements ministériels. Le travail de codification permettra d’expliquer ces différences ou, mieux encore, de les surmonter.
Dans la matière très particulière dont nous parlons, à savoir les procédures administratives abordées dans leur lien au public, par l’issue qu’elles apportent à la société dans son ensemble, la jurisprudence administrative joue un rôle essentiel. J’imagine que cette évolution ne se fera pas sans quelques réticences – c’est ce que j’ai encore entendu il y a quelques semaines, au sein de la commission de codification. Malgré tout, il faut dépasser le petit sens particulier de la propriété que peuvent encore éprouver quelques membres du Conseil d’État, pour que cette jurisprudence soit transférée dans des règles de droit positif. C’est ce travail qui a été mené, il y a quinze ans, pour créer le code de justice administrative, et dieu sait si ce document a rendu service !
Au sujet du périmètre et du champ d’application, Hugues Portelli a dit ce qu’il fallait dire. Toutefois, pour parler d’expérience, et en gardant à l’esprit la modestie qu’imposent ces travaux, je ne suis pas certain qu’il soit raisonnable de chercher à conclure de manière formelle au moment de la loi d’habilitation sur ce que sera le champ d’application final. En effet, ce dernier résultera également du travail de codification et de sa logique.
L’application de l’article 38 de la Constitution a déjà connu un net progrès, qui a abouti à un véritable système de validation a posteriori des codifications par ordonnance. Le projet de loi de ratification peut fournir l’occasion de compléter ou d’adapter des éléments du champ d’application qui ont émergé lors du travail de codification.
À cet égard, madame la ministre, – du fait, là aussi, des épisodes auxquels j’ai pu prendre part – je souhaiterais vous faire une suggestion, ainsi qu’aux services qui travaillent sur ce projet. Il me semble utile, notamment lorsqu’on travaille à droit non constant – ce qui est évident souhaitable en la matière –, qu’au moins un rendez-vous intermédiaire soit organisé entre les codificateurs et les commissions.