Voilà l’une des situations critiques organisées par le projet de loi organique que nous présente le Gouvernement, qu’il ait été ou non modifié par la commission des lois : au moment de l’élection, qu’il s’agisse d’une élection législative, sénatoriale, municipale, départementale ou régionale, notre législation va instituer une inégalité de statut entre les candidats, que j’avais évoquée vendredi dernier.
Si nous avions la certitude que le tampon « bon pour honnêteté reconnue » délivré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie politique valait quelque chose, nous pourrions dire que le candidat sortant, qui s’est soumis à l’obligation de publication de son patrimoine, de ses revenus, de ses intérêts et a donc obtenu le label « bon pour le service honnête », dispose d’un avantage. Vis-à-vis de ses concurrents, ce serait même une forme de déloyauté, puisqu’il serait reconnu honnête, alors que ses concurrents, n’étant pas soumis à la même obligation, ne bénéficieraient pas du label délivré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et pourraient être soupçonnés, n’ayant pas apporté la preuve de leur honnêteté, de ne pas être honnêtes.
En réalité, la plupart de nos compatriotes vont retenir la situation inverse : le candidat sortant sera transparent et on pourra lui reprocher d’être trop investi dans l’économie privée ou, au contraire, de ne rien y connaître du tout, d’avoir accumulé du bien au terme de sa carrière professionnelle ou, au contraire, de ne pas en avoir accumulé, etc. Quelqu’un sera toujours mécontent et le candidat sortant sera donc en situation de faiblesse.
L’argument de M. Anziani est totalement pertinent : il est impossible de demander à une commission de délivrer des labels à des milliers de candidats. Nous voyons en effet à chaque élection qu’il y a, à la fois, moins d’électeurs et plus de candidats. Les dossiers seraient donc trop nombreux.
Je ne me priverai pas, cependant, du plaisir de souligner une contradiction du projet de loi organique, qui instaure une inégalité devant le suffrage universel entre les candidats « transparents » et les autres.
À ceux qui sont transparents, le label ne conférera pas pour autant une probité absolue aux yeux des électeurs. En effet, ces derniers se souviendront toujours que M. Cahuzac a fait toutes les déclarations à la commission administrative compétente, ce qui ne l’a nullement empêché de mener des activités parallèles, auxquelles cette commission a été absolument incapable, hélas, de mettre fin en temps et en heure.