Faire figurer la réserve parlementaire dans le « jaune » budgétaire, comme le propose Mme le ministre dans son amendement n° 185, aboutirait à noyer le poisson. En revanche, là où elle a raison, c’est que ces amendements identiques auraient été beaucoup plus pertinents dans le cadre de la loi ordinaire plutôt que dans la loi organique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai moi-même déposé deux amendements relatifs à la réserve parlementaire sur le projet de loi ordinaire.
Je tiens à souligner que ce n’est pas moi qui ai voulu faire comme Dupont ou Durand. Mes deux amendements portent le numéro 1 et le numéro 2, ce qui prouve que c’est sur ma propre initiative et avant d’autres que j’ai déposé ces amendements, que je prépare d’ailleurs depuis deux ou trois mois.
Cela étant, puisque, manifestement, le Sénat s’apprête à voter les amendements identiques n° 23 rectifié et 88 rectifié dans le cadre du projet de loi organique, je vais vous donner les arguments que j’aurais pu développer lors de l’examen du projet de loi ordinaire et expliquer ce qui me paraît quelque peu discutable.
Je souscris bien évidemment au principe de transparence. Reste que plusieurs problèmes se posent : je pense à l'équité et à la finalité de la réserve parlementaire.
Comme notre collègue Jacqueline Gourault, je suis profondément scandalisé par le fait que certains, profitant de l’absence de toute publicité quant à ses bénéficiaires, aient puisé dans la réserve parlementaire, dans des proportions démesurées, délirantes, pour arroser au maximum leur petit jardin. En outre, je ne suis pas d'accord avec certains propos qui ont été tenus, selon lesquels la réserve parlementaire serait destinée à récompenser l'assiduité des sénateurs et des députés. C’est ce qui me conduit à dire qu'il faut plus d'équité dans son attribution.
L'assiduité, c’est une chose, être bien vu par son parti, c’en est une autre. Or tant que ce seront les groupes politiques qui répartiront la réserve parlementaire, ils auront moyen de faire pression sur les parlementaires et de porter atteinte à leur indépendance et à leur souveraineté.
Indépendamment de cela, la réserve n'est pas faite pour faire plaisir au parlementaire Dupont ou au parlementaire Durand ; elle est faite pour redistribuer équitablement aux territoires des subventions de l'État.
À supposer qu’une commune ait à sa tête un sénateur ou un député particulièrement actif et assidu au Parlement, il n’y a aucune raison que ses habitants bénéficient d’un gonflement de la réserve parlementaire et donc paient moins d'impôts locaux que ceux d’une autre commune, située à l’autre bout du département ou même dans un autre département, dont le parlementaire élu, au motif qu’il serait moins présent ou moins populaire auprès de son parti politique, ne disposerait pratiquement d’aucune réserve parlementaire.
Ce qui est très important, c'est que celle-ci soit attribuée et répartie à égalité entre les parlementaires. Je le répète, il n’y a aucune raison que, parce que leur maire serait président du Sénat, les habitants de telle commune paient moins d'impôts locaux que ceux d'autres communes, tout simplement parce que leur collectivité perçoit plus de réserve parlementaire.
Le premier reproche que je ferai aux auteurs de ces deux amendements, c'est qu’ils n’imposent pas une égalité de traitement entre les parlementaires.