Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 15 juillet 2013 à 15h10
Transparence de la vie publique — Vote sur l'ensemble

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Il est toujours extraordinairement difficile de résumer en quelques minutes de très longs débats. Incontestablement, le sujet qui nous occupe aujourd’hui méritait d'être évoqué.

Je vous l’accorde, monsieur Anziani, chaque loi intervenue dans ce domaine a été précédée d'une difficulté. Pour autant, jamais ces difficultés m’ont trouvé leur source au Parlement.

En 1988, le financement de la campagne présidentielle et celui des partis politiques furent à l'origine du premier texte de loi sur la transparence de la vie politique, qui comportait en outre, dans un troisième volet, une obligation de dépôt patrimonial.

Je me réjouis de ce troisième volet, car, après vingt-cinq ans de pratique, les chiffres communiqués par M. Sauvé, vice-président du Conseil d'État, nous apprennent que quatorze cas seulement ont été déférés au parquet, dont six seulement concernaient des parlementaires, et qu’aucune condamnation n’a été prononcée. Nous devrions donc essayer de nous libérer de ce masochisme qui consiste à vouloir battre notre coulpe pour des fautes, des délits ou des crimes que nous n’avons pas commis.

Vous avez parlé des affaires Woerth-Bettencourt, monsieur Anziani. Je ne sais pas quelles suites leur seront données – par expérience personnelle, je suis d'une grande prudence en la matière, et j’attends toujours les décisions définitives –, mais toujours est-il que ni Éric Woerth, alors ministre du budget, ni André Bettencourt, dont je salue la mémoire, ni son épouse n’étaient parlementaires au moment des faits.

Les parlementaires ne sont pas au cœur des affaires ; pourtant, ils sont bel et bien désignés aujourd’hui à la vindicte populaire, sans aucune protection, alors que le Gouvernement aurait dû les défendre en précisant qu’il y avait certes eu un mensonge d'État, mais que celui-ci émanait d’un homme en charge de responsabilités gouvernementales, et non d'un parlementaire.

Dans le temps qui me reste, je voudrais exprimer ma déception, monsieur le président et rapporteur de la commission des lois, à l’idée que la question des statuts respectifs des pouvoirs législatif et exécutif n’ait pas été abordée. C’est pourtant là un enjeu majeur de la Ve République.

S'agissant de la loi organique, exigée par l'article 25 de la Constitution pour ce qui concerne les parlementaires – nous parlerons ultérieurement de la loi ordinaire –, je considère que ses dispositions auront pour seul effet d'affaiblir le statut du parlementaire, avec une suspicion de culpabilité de la part des médias à laquelle il lui sera difficile d'échapper. En termes judiciaires, il n'y aura sans doute jamais, sauf brebis galeuse statistiquement toujours possible, de condamnation. En revanche, il y aura, sur le terrain médiatique, des demandes d'explication permanentes, qui constitueront autant de soupçons de culpabilité.

C'est la raison pour laquelle je m'étais pleinement associé à l'initiative qui proposait de restituer publiquement les seules variations du patrimoine inexplicables. Certaines évolutions sont parfaitement explicables et seules celles qui ne le sont pas auraient été rendues publiques, en prenant soin de rappeler a contrario que 99 % des dossiers n’appellent aucune remarque.

Si vous aviez retenu cette idée, vous auriez répondu aussi bien aux citoyens qu’aux détracteurs professionnels de la vie parlementaire, dont nous connaissons la longue filiation, et vous auriez défendu les parlementaires, en rappelant que, plus de 99 fois sur 100, leur situation est parfaitement irréprochable.

Or vous avez préféré agir autrement, et la publication aura nécessairement comme conséquence la multiplication des affaires médiatiques.

Je le répète, la transparence, telle la ligne d’horizon, est fictive et recule chaque fois que l’on avance. À la communication de tout chiffre correspondra une demande d’explication supplémentaire, laquelle entraînera une nouvelle demande de justification.

Ensuite, l’oubli s’imposera, mais, entre-temps, le mal aura été fait. Comme nous l’avons longuement rappelé, dans la compétition à l’accès au mandat, le sortant souffrira de ces explications interminables et à rebondissements, alors que son détracteur bénéficiera de la virginité que la loi lui assure et pourra le soupçonner de comportements frauduleux.

En conclusion, le présent projet de loi organique affaiblit le Parlement, alors que c’est l’exécutif qui est à l’origine des difficultés que nous connaissons aujourd’hui.

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