Intervention de Yannick Vaugrenard

Réunion du 18 juillet 2013 à 9h45
Séparation et régulation des activités bancaires — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Yannick VaugrenardYannick Vaugrenard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires arrive au terme de son parcours législatif. C’est donc une des principales promesses du Président de la République qui trouve aujourd’hui sa concrétisation, particulièrement dans l’objectif d’efficacité qu’il s’était fixé.

Je tiens à dire ma satisfaction devant la qualité et la rigueur du travail accompli par les deux chambres du Parlement, et à féliciter le ministre et ses services, ainsi que mes collègues rapporteurs du Sénat, pour la qualité de leur écoute,

Je veux aussi remercier particulièrement la commission des finances et son rapporteur, Richard Yung, pour l’attention et la bienveillance manifestées à l’égard des propositions de la commission des affaires économiques.

Le texte initial a été grandement amélioré au cours de la navette parlementaire, dans le sens d’une régulation à la fois plus exigeante et plus fine du secteur financier. Des équilibres satisfaisants ont été trouvés entre, d’un côté, la nécessité de lutter contre les dérives spéculatives à l’origine de la crise financière que nous avons connue, et, de l’autre, la nécessité de préserver la souplesse et l’efficacité des mécanismes de financement indispensables à la compétitivité et à la croissance de notre économie. Des progrès ont également été accomplis en matière de protection des droits des usagers des banques.

En tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques du Sénat sur ce texte, je voudrais en particulier dire ma satisfaction de constater que les mesures que j’ai proposées et défendues, avec le soutien de la commission, ont été retenues dans le texte final.

L’une de ces mesures visait à mieux encadrer les rémunérations dans le secteur de la finance.

J’ai proposé, en première lecture, deux dispositions allant dans ce sens. La première vise à impliquer personnellement les dirigeants et les traders en cas de résolution bancaire, au travers d’un mécanisme de renoncement à leur rémunération variable. La seconde consiste à introduire la règle du say on pay dans le secteur bancaire en l’étendant, au-delà des dirigeants eux-mêmes, à l’ensemble des preneurs de risques au sein des banques.

Je regrette cependant l’abandon du projet de réforme sur la gouvernance des entreprises, qui aurait dû généraliser en France ce principe du say on pay, mais je me réjouis que, sur notre initiative, cette forme de contrôle des rémunérations par l’assemblée générale des actionnaires puisse au moins s’exercer dans les établissements de crédit. Espérons que ce projet adopté pour les banques ait un effet d’entraînement suffisant sur les dirigeants des autres grandes entreprises, sans quoi le législateur devra, je pense, se pencher à nouveau sur cette question particulièrement sensible en période de crise économique, financière et sociale.

Indépendamment de cela, j’estime toutefois que, dans un prochain texte, il faudra aller plus loin et faire en sorte que le vote de l’assemblée générale des actionnaires intervienne avant et ne soit non pas simplement consultatif, mais décisionnel.

L’autre disposition défendue par la commission des affaires économiques concerne le plafonnement spécifique des frais d’incidents bancaires pour les publics les plus fragiles.

La commission mixte paritaire a rétabli le dispositif que le Sénat avait voté. Nous nous en réjouissons, car un plafonnement homogène, applicable de la même manière à tous les clients des banques, aurait abouti à un effet pervers, nuisible aux ménages les plus en difficulté. Les banques, on le sait, auraient fait tout leur possible pour que le niveau du plafond par opération et celui du plafond global soient déconnectés du coût réel des interventions réalisées lors des incidents de compte, et soient fixés au niveau le plus élevé. Les plus fragiles n’auraient donc tiré aucun bénéfice d’un tel dispositif, ou trop peu, tandis que, désormais, plusieurs centaines de milliers de personnes pourront profiter du plafond bas !

Pour conclure, j’attire l’attention sur le fait que la portée réelle des dispositions que nous allons adopter dépendra en grande partie des seuils qui seront fixés par décret, notamment pour ce qui concerne la filialisation des activités de comptes propres.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je crois pouvoir dire, en reprenant un terme rubistique, que nous avons collectivement marqué un « bel essai ».

Je souhaite que les choix du Gouvernement, notamment s’agissant de la voie réglementaire, transforment cet essai et fassent du texte que nous allons adopter définitivement aujourd’hui une réforme vraiment ambitieuse, qui constituera un modèle pour les autres pays européens.

Monsieur le ministre, le Parlement suivra avec attention les mesures d’application de cette loi. Je souhaite, pour ma part, qu’un rapport d’étape sur la mise en œuvre de ce texte soit réalisé dans le cadre des activités de contrôle du Sénat, et ce dans l’intérêt tant du législateur et de l’exécutif que de notre économie en général. §

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