Intervention de Josselin de Rohan

Réunion du 13 juillet 2011 à 9h30
Réserves militaires et civiles — Discussion en deuxième lecture et adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Josselin de RohanJosselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, rapporteur :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avions adopté cette proposition de loi le 30 mars dernier. Hier, l’Assemblée nationale a voté à son tour ce dispositif. Elle a retenu six amendements qui améliorent la qualité du texte sans en modifier le fond. Je vous propose en conséquence, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d’adopter le texte issu de l’Assemblée nationale de sorte que ce dispositif puisse être opérationnel à la fin de l’année.

Je suis d’accord avec vous, monsieur le secrétaire d’État, en étudiant la question des réserves sous l’angle des situations de crise, nos collègues Michel Boutant et Joëlle Garriaud-Maylam sont partis de la bonne question. Sans le remarquable rapport qu’ils ont rédigé, cette proposition de loi n’aurait jamais vu le jour.

Les crises sont des moments de vérité, des circonstances où les forces d’active des armées, des services de police et de secours sont mises à l’épreuve, une épreuve où leurs capacités peuvent être saturées par la durée ou l’intensité de la crise. C’est dans ces instants que, pour les armées professionnelles aux effectifs nécessairement restreints, les forces d’appoint que constituent les réserves prennent tout leur sens.

Les armées ont besoin de réservistes formés, capables de remplacer, dans les états-majors ou dans les forces de soutien, les militaires d’active partis en opération.

Ce qui est vrai en matière militaire l’est également pour ce qui concerne les crises de nature civile.

Les catastrophes en tout genre, Katrina aux États-Unis, Fukushima au Japon, nous montrent que les États modernes ne sont pas à l’abri d’événements majeurs qui saturent les capacités des forces actives et des services publics et exigent la mobilisation de réservistes aguerris. C’est dans ces moments que l’on voit si un dispositif comme les réserves fonctionne ou pas. De ce point de vue, le travail extrêmement approfondi de nos collègues, qui ne se sont pas limités à cette proposition de loi, mais qui ont évalué la politique des réserves dans son ensemble, n’a pas manqué de susciter des inquiétudes.

Pour dire la vérité, nous ne sommes pas sûrs que si, demain, la France connaissait le même drame que le Japon, si nous avions à revivre une vague d’attentats frappant l’ensemble du territoire national, tout en intervenant, massivement et dans la durée, sur plusieurs théâtres d’opération, comme actuellement en Libye et en Afghanistan, nous pourrions compter sur un dispositif de réserve pleinement opérationnel.

La proposition de loi est née de cette inquiétude. Son intérêt est d’être parti de la question du besoin des forces d’active.

Il nous faut une réserve de professionnels à temps partiel. Pour cela, il faut oublier les schémas anciens de la mobilisation générale, de la nation en arme, pour mettre en place une réserve professionnalisée, entraînée et intégrée aux forces actives. Or l’organisation actuelle des réserves conserve, à certains égards, les traces de cette réserve de conscription. La professionnalisation des armées aujourd’hui achevée, nous devons franchir une étape dans la professionnalisation des réserves.

La proposition de loi y contribue, en renforçant la réactivité et la fiabilité du recours aux réservistes en cas de crise majeure. Mais ce travail n’est qu’une première étape.

Je crois que ce texte doit être accompagné d’une remise à plat de la politique des réserves qui permette, dans un premier temps, de préciser les besoins, les emplois et le format des réserves dont les pouvoirs publics ont besoin.

Vous avez évoqué l’ouverture de plusieurs chantiers, monsieur le secrétaire d’État. Ceux-ci ne doivent toutefois pas éluder des questions essentielles sur les missions, le format, les employeurs et la gestion quotidienne des réserves.

La politique des réserves gagnerait à sortir d’un certain flou. Une modernisation des réserves ne sera possible que si l’on répond sans ambiguïté à au moins trois questions simples : à quels emplois sont destinés les réservistes ? Combien faut-il d’effectifs et pourquoi ? Que fait-on pour soutenir l’effort des entreprises et des administrations qui emploient des réservistes ?

Voilà des sujets sur lesquels il serait souhaitable que vous puissiez faire le point. En attendant, je vous invite, mes chers collègues, à adopter ce texte.

Cela étant, je profite de cet instant pour saluer nos soldats, en particulier ceux qui sont au feu en Afghanistan et en Libye, ainsi que nos réservistes.

Dans une société qui valorise plus que jamais la sphère privée, l’engagement dans les réserves suppose des arbitrages délicats avec son métier et sa famille. Je salue cet engagement au service de la collectivité. « Un réserviste est deux fois citoyen », disait Churchill. Il avait raison !

Au moment où vous entrez au Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, avec notamment la charge de ce dossier, et au moment où, pour ma part, j’entrerai bientôt, sinon dans la réserve de la République, du moins dans la « deuxième section » du Parlement

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