Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le 24 septembre 2003, Mme Marie Humbert, après avoir signalé son intention, injecte une dose de barbituriques à son fils âgé de vingt-deux ans afin de l'aider à mourir comme il le demandait. Son geste échoue, et l'équipe du Dr Chaussoy, chef du service de réanimation du centre héliomarin de Berck-sur-mer, tente de le réanimer. Deux jours plus tard, le Dr Chaussoy, après avoir pris connaissance du dossier médical du jeune patient, décide, avec son équipe, de débrancher le respirateur et de répondre à son attente.
Le débat sur l'euthanasie est relancé en France !
Si nous discutons aujourd'hui de cette proposition de loi, c'est grâce à Vincent Humbert et à sa mère, dont le parcours exemplaire a ému la France entière. Pourtant, disons-le d'emblée, ce texte n'aurait été d'aucune utilité à Vincent et il n'apporte aucune solution aux autres personnes - et il en existe ! -, qui souhaiteraient prendre la même décision. Il est en effet essentiellement limité aux personnes en fin de vie, celles dont la mort doit intervenir à brève échéance. C'est une légère avancée, mais qui est déjà très largement reconnue par la loi Kouchner du 4 mars 2002.
En outre, cette proposition de loi est insuffisante, car elle élude la question fondamentale qui en est à l'origine : le choix de sa mort.
Selon l'anthropologue Louis-Vincent Thomas, « chaque société a la mort qu'elle mérite ». Dans notre civilisation occidentale, la mort a perdu en quelques décennies son caractère social et familial. En outre, les souhaits de nos contemporains à son égard ont radicalement changé : on meurt non plus chez soi entouré de sa famille et de ses amis, mais le plus souvent à l'hôpital entouré d'inconnus ; si 70 % de nos concitoyens déclarent vouloir mourir paisiblement chez eux, 70 %, et même 80% en milieu urbain, meurent à l'hôpital.
Comme tous les êtres humains, nous aimons la vie et nous la souhaitons aussi longue que possible. Dans la lutte pour prolonger la vie, les hommes ont remporté des succès. Dans ce parcours de la vie et de la mort, au-delà des préjugés, l'important est de respecter la liberté de choix de chacun.
Quoi qu'on en dise, il faut le reconnaître, ce texte concerne clairement la question de l'euthanasie.
Parler de fin de vie, c'est aussi parler d'euthanasie ; il faut l'admettre, même si ce terme ne plait pas. Beaucoup refusent le mot « euthanasie ». C'est en fait un mot très récent dans la langue française. Dans la première édition de son dictionnaire, en 1863, Littré le définit comme « la bonne mort, douce et sans souffrance », ce qui correspond à sa racine grecque euthanasia.
Dans son édition de 1982, le dictionnaire Flammarion est plus précis et très intéressant : l'euthanasie est « une mort douce provoquée par la morphine, les barbituriques, qui évitent à un malade incurable des douleurs intolérables ». C'est un peu ce que l'on retrouve dans la proposition de loi, mes chers collègues.