Intervention de Jean-Pierre Godefroy

Réunion du 12 avril 2005 à 16h00
Droits des malades et fin de vie — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Jean-Pierre GodefroyJean-Pierre Godefroy :

Loin de moi l'idée de dire que ce texte n'apporte aucun progrès ! Il met fin à une certaine hypocrisie.

Plusieurs études épidémiologiques récentes indiquent que plus de 50 % des décès survenant dans les services de réanimation adultes ou pédiatriques sont précédés d'une décision d'arrêt ou de limitation des soins actifs. M. le ministre a reconnu lui-même que 10 000 à 15 000 machines sont débranchées chaque année, en France.

Ce texte apporte la sécurité juridique aux médecins, certes. Mais il est imparfait et incomplet. Nous détaillerons tous ces éléments au cours du débat.

Ce texte est imparfait, car, sur certains points précis, les solutions qu'il préconise peuvent être améliorées, notamment en ce qui concerne la codécision, la conservation des directives anticipées, l'accès aux soins palliatifs, la révision de la loi. Nous avons déposé des amendements sur tous ces sujets.

Ce texte est ensuite incomplet, car il ne propose qu'un laisser-mourir pour des patients en fin de vie. Aujourd'hui, des évènements de plus en plus fréquents révèlent que le droit français n'est adapté ni aux cas des personnes qui demandent lucidement le droit de mourir ni aux cas des soignants qui la procurent.

Alors que le texte dont nous débattons est inspiré par l'histoire de Vincent Humbert, il n'autoriserait pas celui-ci à obtenir l'aide qu'il demandait. Il entend sa demande de mourir, il la respecte. Toutefois, la seule possibilité qu'il lui offre pour y parvenir est de choisir sciemment de se laisser mourir, perdant ainsi progressivement sa lucidité et ne pouvant assumer pleinement son passage dans un monde meilleur auquel il aspirait, accompagné de ses proches, en paix avec lui-même. Qu'il renonce à son alimentation artificielle, et l'on pourra lui prescrire les doses de morphine nécessaires pour qu'il ne souffre pas pendant les jours, voire les semaines de son agonie.

La personne en état de dépendance faisant appel à une tierce personne pour tous les actes de sa vie - soins, toilette, nourriture, communication - n'a t-elle pas le droit de faire appel à cette même personne pour mettre fin à ses jours dans des conditions que la loi doit très strictement encadrer, dès l'instant où son corps l'en empêche ?

Le suicide n'est pas un acte délictuel, la personne échouant dans son entreprise n'étant nullement poursuivie. Pourquoi refuser cette dernière liberté à la personne totalement empêchée ou handicapée ? N'est-ce pas lui enlever un droit à disposer d'elle-même, pourtant reconnu à tous, parce qu'elle est handicapée et uniquement pour cela ? N'est-ce pas ajouter une souffrance à la souffrance que de ne plus être reconnu comme un individu égal aux autres, parce que la loi ne reconnaît pas à un tiers le pouvoir de se substituer à soi ?

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