Or la consommation constitue, avec l’investissement, un moteur puissant de notre économie. Ce projet de loi arrive donc à point nommé devant notre assemblée.
Afin de contribuer au retour de la confiance, gage d’une consommation plus dynamique, il doit améliorer la protection des consommateurs, mieux encadrer les nouveaux modes de consommation et se préoccuper des plus fragiles, pour qui l’accès à certains biens et services de première nécessité est de plus en plus difficile.
Dans le même temps, nous savons bien qu’une reprise durable de la croissance repose aussi sur la compétitivité de nos entreprises et leur capacité à investir et à innover. Nous devons donc trouver le point d’équilibre entre davantage de protection pour les consommateurs et un environnement de contraintes réglementaires raisonnables pour les entreprises.
Le groupe UDI-UC a été largement sollicité par l’ensemble des acteurs de terrain. Nous avons beaucoup reçu et écouté. En règle générale, notre regard sur le projet de loi a été bienveillant et constructif, à la recherche de ce point d’équilibre.
C’est ainsi que nous avons été, par exemple, sensibles aux arguments des fédérations du commerce. Nous vous proposerons donc de réajuster le dispositif qui oblige à rembourser une marchandise avant même que le vendeur ne soit parfaitement assuré qu’elle lui a bien été renvoyée, et en bon état.
Nous avons aussi jugé que certaines amendes prévues par le texte présentaient parfois un caractère excessif. Nous vous proposerons notamment de revoir celles qui sont prévues à l’article 10 dans le cas d’une annulation de livraison d’un bien ou de fourniture d’un service. En effet, vouloir punir certains comportements délictueux ne doit pas aboutir à mettre en péril la survie économique d’une entreprise.
De même, concernant le « délai Châtel », il nous a semblé qu’une durée de deux ans était un compromis raisonnable, qu’il fallait maintenir. Le secteur de la vente à distance, très présent dans mon département, m’a alerté sur la manière dont certaines familles au budget serré étalent leurs achats de rentrée ou d’équipement en utilisant ponctuellement une carte d’enseigne et sur la difficulté qu’elles pourraient rencontrer pour la souscrire à nouveau périodiquement. Au départ, j’étais plutôt favorable à un délai d’un an. Cependant, après avoir entendu les arguments exposés et les exemples donnés, nous estimons qu’un laps de temps de deux ans constitue un bon compromis.
Dans le même temps, nous sommes restés très attentifs au consommateur. En effet, notre groupe soutient résolument une autre mesure, qui est un peu le pendant de la précédente : je veux parler du raccourcissement à cinq ans de la durée des plans de redressement personnel pour les personnes surendettées. Pendant la durée du plan, elles n’ont plus que quelques centaines d’euros de reste-à-vivre par mois ; dès lors, cinq ans, c’est déjà bien long pour des familles qui doivent, après avoir fait cet effort, reconstruire un projet de vie pour l’ensemble de leurs enfants, et ce avec des moyens extrêmement réduits. Cinq ans me paraissent suffisants pour leur permettre d’évacuer leurs difficultés financières, de régler bon nombre de problèmes et d’éteindre leurs dettes de consommation.
Bien évidemment, dans cette lutte contre les abus en matière d’octrois de crédits excessifs, la création, à l’article 22 bis, du registre national des crédits est un outil précieux. Il y a plus de dix ans que notre famille politique porte cette demande au Parlement ! Le 26 avril 2012, je déposais encore une proposition de loi à ce sujet, tandis qu’en novembre de la même année une proposition de loi du groupe UDI était rejetée à l’Assemblée nationale.
Toutefois, nous avions alors avancé puisque vous reconnaissiez, monsieur le ministre, que ce fichier positif serait « un moyen concret de lutter contre le surendettement et que le Gouvernement y était désormais favorable » ; vous en apportez d’ailleurs la preuve aujourd’hui.
Je le dirai très simplement : indépendamment des tribulations législatives et politiques de nos demandes, nous nous félicitons que ce dispositif figure dans ce projet de loi. Il s’agit d’une avancée majeure, car les travaux de notre groupe de travail sur le surendettement ont mis en lumière que, au-delà des personnes qui entrent dans une procédure de surendettement, il y a désormais un phénomène plus général de « malendettement », qui traduit la fragilisation financière des classes moyennes. La fuite en avant par le crédit renouvelable n’en est que l’un des révélateurs.
La Banque postale le constate aussi à travers son taux élevé de refus de rachats de crédits. Elle ne donne pas suite à 60 % des dossiers qu’elle reçoit, les emprunteurs qui les déposent étant déjà trop endettés pour qu’un rachat de crédits puisse les aider.
Savoir stopper la spirale du crédit de trop, avant l’incident de paiement, est donc bien devenu une véritable nécessité.
C’est pourquoi notre souci, dans ce débat, est de construire un dispositif simple et efficace. Or il faut bien avouer que, malgré le travail tout à fait pertinent de la commission des affaires économiques et de ses rapporteurs, le texte actuel conduit à s’interroger sur la faisabilité de sa mise en œuvre. Bien sûr, il est incomplet puisqu’il ne recensera pas les crédits immobiliers. Mais c’est un bon début, et rien n’empêche de penser que nous pourrons combler cette lacune ultérieurement.
Ce qui nous inquiète davantage, c’est l’économie même du dispositif de l’article 22 bis, qui nous apparaît encore bien trop complexe pour être rapidement opérationnel. Voilà pourquoi nous avons cherché à l’améliorer.
En introduisant l’article 22 septies, notre commission a justement souhaité apporter une simplification en réduisant à deux le nombre de décrets d’application. Nous nous proposerons de compléter son travail en toilettant l’article 22 bis de tous les autres décrets qui restent apparents dans le texte.
Nous avions prévu de ramener à deux ans, plutôt que trois, le délai de publication des décrets d’application, sachant qu’il faudra ensuite aux établissements de crédit environ deux ans et demi, en moyenne, pour procéder aux ajustements techniques nécessaires et sachant aussi que, bien sûr, tous ces délais s’additionnent. Curieusement, cet amendement est tombé sous le coup de l’article 40. C’est bien dommage, car cette addition de délais, qu’il convient de réduire, ne correspond ni au temps du consommateur ni à celui de la crise. Il nous faut faire en sorte que chaque mois gagné permette un meilleur accompagnement des milliers de ménages qui ont besoin d’être mieux protégés.
Pour accélérer encore l’efficacité immédiate du fichier, nous vous proposerons de reprendre le stock de crédits existants, afin que le registre national dispose d’emblée de l’historique des crédits souscrits. Comment pourrions-nous justifier devant l’opinion et les ménages les plus fragiles qu’il faille attendre encore vingt-quatre ou trente-six mois, le temps de la montée en puissance du fichier ? Aider les personnes en difficulté financière, c’est agir en urgence dans la crise, et non se fixer un objectif à l’horizon de six, huit ou dix ans !
Désormais, monsieur le ministre, nous portons collectivement cette responsabilité. Une fois le « fichier positif » voté, il doit être utile très vite.
Voilà pourquoi nous souhaitons que ce fichier recense aussi tous les rachats de crédits et prenne en compte le montant de tous les crédits renouvelables, y compris les réserves non utilisées : cela permettra d’aider les personnes au bon moment, et non lorsqu’il est déjà trop tard, et de responsabiliser définitivement les établissements de crédit.
Certes, le fichier positif ne sera pas un remède miracle contre toutes les fragilités financières de nos concitoyens. D’autres mesures seront également utiles dans ce combat contre le malendettement et le surendettement. Nous vous en proposerons.
Cependant, l’exemple de la Belgique, l’expérience de la fondation CRESUS et nos auditions au sein du groupe de travail me conduisent à penser que ce répertoire est réalisable techniquement, viable financièrement, respectueux de nos libertés et surtout, ainsi amendé, utile socialement, ce qui est l’essentiel.
Je souhaite que le Sénat soit sensible à nos arguments et que nos amendements puissent être adoptés.
C’est d’ailleurs en fonction du sort réservé aux amendements que l’UDI-UC aura présentés, en particulier sur l’action de groupe, le registre national et le crédit à la consommation, que nous déterminerons notre position sur l’ensemble de ce texte. §