Intervention de Alain Richard

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 10 septembre 2013 : 1ère réunion
Interdiction du cumul des mandats — Audition de M. Pierre Avril professeur émérite de droit public M. Olivier Beaud professeur de droit public Mme Julie Benetti professeur de droit public et M. Dominique Rousseau professeur de droit public

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Je veux ajouter quelques réflexions et quelques interrogations qui n'ont, me semble-t-il, pas été abordées jusqu'à présent.

À propos de la différenciation entre l'Assemblée nationale et du Sénat, j'ai une simple remarque : la seule véritable justification du bicamérisme, c'est la double délibération, la valeur ajoutée qu'il donne à la délibération, quelle que soit l'origine élective des assemblées et il est vain de chercher d'autres justifications. Le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales mais il représente le peuple français ; si on basculait sur un système où le Sénat ne représente que les collectivités territoriales, on aboutirait au système allemand où lorsqu'un élu du Bundesrat perd son siège local, il perd en conséquence son siège au Bundesrat.

J'ai une autre observation. Le cumul a une raison fonctionnelle : il apporte une expertise locale. Dans n'importe quel débat, 90 % des arguments échangés s'enracinent dans une expérience locale.

Il faut faire de la science politique et analyser si une minute de plus sera consacrée au mandat de parlementaire lorsque l'interdiction du cumul des mandats sera effective. Je ne le pense pas car la première préoccupation de l'élu est d'être identifiée par ses électeurs. Lorsque les parlementaires n'auront plus de mandat local, ils devront consacrer au moins autant de temps à leur circonscription mais comme ils n'exerceront pas de mandat local, ils joueront un peu la « mouche du coche » : ils seront présents pour se faire connaître. « All politics is local », toute politique est locale disent les américains : c'est vrai aussi en France.

En ce qui concerne le renouvellement du personnel politique, je partage l'analyse de mon collègue Gaëtan Gorce : j'ai un doute sur le fait que cela va provoquer un appel d'air et vu les conditions dans lesquelles il se produira, ce seront les collaborateurs de parlementaires qui remplaceront les parlementaires qui cumulent aujourd'hui leur mandat avec des mandats locaux.

Enfin, combien d'élus locaux ont une activité professionnelle ? Si on comparait le cumul d'un mandat local avec un mandat parlementaire et le cumul d'un mandat parlementaire avec l'exercice d'une profession, on risquerait être surpris sur qui du mandat local ou de la profession prend le plus de temps. Ayant connu les deux situations, je peux dire que l'activité professionnelle dont le cumul est pourtant autorisé avec un mandat parlementaire est autrement plus prenante que le mandat local.

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