La loi du 5 juillet 2011, dans son esprit comme dans sa lettre, criminalise en quelque sorte la maladie mentale et dénature profondément la psychiatrie, réduite à une fonction de régulation des troubles sociaux, quand elle a, à l’évidence, une mission radicalement différente : aider à la guérison et permettre à tous nos concitoyens de trouver une place dans la société.
À titre d’exemple, alors que la logique juridique veut que les mesures libératoires soient exécutoires, puisqu’il peut, par exemple, s’agir de mettre fin à une mesure privative de liberté décidée de manière arbitraire, la loi de 2011 a introduit un droit d’appel suspensif, à l’initiative du procureur de la République, à l’encontre d’une décision de mainlevée de la mesure privative de liberté prononcée par le juge.
Pourtant, sauf erreur de ma part, l’effet non suspensif des recours est un principe de portée générale, il a un caractère fondamental, en liaison étroite avec la présomption de légalité des actes administratifs dont résulte leur force exécutoire immédiate.
Cette faculté offerte au procureur, qui demeure aujourd’hui encore, faute de réforme d’ampleur, sous l’autorité directe du procureur général, et donc du ministère de la justice, pourrait avoir pour conséquence de priver une personne de sa liberté pendant quatorze jours supplémentaires !t
On est loin, à mon sens, de la volonté exprimée par le juge constitutionnel. Ne s’agit-il pas, en réalité, de considérer les personnes atteintes de troubles mentaux comme potentiellement très dangereuses, en tout cas plus que la moyenne de nos concitoyens, pour que l’on en vienne à maintenir à leur encontre un régime dérogatoire du droit commun, et profondément défavorable ?
Je dois d’ailleurs dire que je fais miens les arguments avancés, à raison, par notre collègue Christiane Demontès, qui, défendant en 2011 un amendement en tout point similaire à celui-là, déclarait : « Nous continuons notre combat contre un texte sécuritaire […] Le mécanisme prévu ici est d’une énormité sans précédent. L’autorité administrative pourrait adresser injonction au Parquet ; voilà qui traduit la méfiance du Gouvernement envers les magistrats et crée un dangereux précédent, manifestement contraire au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs et à l’article 64 de la Constitution ».
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter cet amendement.