Il ne faut toutefois pas se faire d'illusions : le quatrième paquet ferroviaire sera adopté après les élections européennes. Dans ce contexte, la proposition de résolution européenne de Roland Ries témoigne avec force d'une volonté d'encadrer l'ouverture à la concurrence du ferroviaire, afin que ni les usagers, ni les contribuables, ni les personnels ne soient lésés. Je vous renvoie à la théorie des marchés contestables, qui s'applique bien plus efficacement au secteur ferroviaire que celle de la concurrence pure et parfaite.
Les propositions d'encadrement de la concurrence figurent dans le rapport de Roland Ries : laisser aux États-membres la liberté d'opter ou non pour une structure verticalement intégrée, sous réserve que les sillons soient attribués de manière impartiale ; affirmer le principe de réversibilité de ce choix ; maintenir l'étanchéité des flux financier du gestionnaire d'infrastructures à destination des opérateurs de transport, sans interdire les mouvements de cheminots ; autoriser le ministre des transports à superviser le fonctionnement du gestionnaire d'infrastructures et des opérateurs, quel que soit le mode d'organisation retenu.
Chaque État membre devrait en outre avoir la faculté d'ouvrir un marché de délégation de service public, incluant réseaux rentables et déficitaires - ce qui n'est pas possible dans le schéma retenu à Bruxelles. Sixième proposition : autoriser les États membres à organiser des enchères pour l'ouverture d'une ligne commerciale à la concurrence, et des enchères négatives pour les réseaux dont le maintien est motivé par des nécessités de service public. Enfin, maintenir la faculté ouverte aux autorités organisatrices d'organiser les transports ferroviaires en régie et imposer systématiquement la reprise du personnel en fonction des entreprises non retenues au terme des procédures de délégation de service public.
Les dispositions complémentaires de notre rapporteur sont bienvenues : elles mettent l'accent sur la sécurité, sur le volet social, et sur la liberté laissée aux autorités nationales de fixer des obligations de service public, en vertu du principe essentiel de subsidiarité. Il propose en outre d'affirmer la place du wagon isolé dans le système ferroviaire. Mireille Schurch et moi-même avons jadis envisagé de faire reconnaître par l'Europe que le wagon isolé était une mission d'intérêt général, ce qui le rendrait éligible à des financements publics.
Si la Commission européenne et le Parlement européen persistent dans leur volonté d'adopter le quatrième paquet ferroviaire, la proposition de résolution européenne de Roland Ries telle qu'amendée par Jean-Jacques Filleul fera valoir l'absolue nécessité d'encadrer fortement l'ouverture à la concurrence : si elle advient, l'encadrer est le seul moyen de nous prémunir des excès de l'ultralibéralisme.