Intervention de Daniel Soulage

Réunion du 6 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention, courte et ciblée, s'articulera autour de trois points : les biocarburants, le déficit chronique du FFIPSA et l'assurance récolte.

Premier point, le projet de loi d'orientation agricole, que nous sommes sur le point d'adopter, jette enfin les bases de la politique française de développement des biocarburants. Bientôt, cette loi déterminera les taux d'incorporation obligatoire que je souhaite aujourd'hui rappeler : 5, 75 % du total des carburants à la fin de l'année 2008, 7 % à la fin de l'année 2010 et 10 % à la fin de l'année 2015.

Le groupe UC-UDF du Sénat, qui a toujours été attaché à la valorisation de cette filière, s'en est félicité lors de l'examen du projet de loi dans notre assemblée. Cependant, pour que l'ambition affichée de donner de nouveaux débouchés à l'agriculture tout en concourant à la préservation de notre environnement soit une vraie réussite, ces objectifs doivent être atteints à partir de la production française. Ce serait un comble d'avoir à importer des biocarburants pour assurer les taux d'incorporation affichés !

Pour cela, nous devons, dès aujourd'hui, pouvoir décliner, pour chaque filière, diester ou éthanol, des objectifs en termes de volume de production et de surface. C'est à ce prix que la production française de biocarburants s'assurera des débouchés solides dans les années à venir. A cela doit, bien entendu, s'ajouter une politique industrielle ambitieuse. Je sais que le Gouvernement a pleinement de la conscience de la situation. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser cette politique ?

S'agissant, enfin, du FFIPSA, je n'ai pu participer au débat organisé dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, monsieur le ministre, lorsque le BAPSA a été supprimé, votre prédécesseur s'était engagé à ce que nous puissions continuer à discuter du financement des prestations sociales agricoles dans le cadre de l'examen des crédits de l'agriculture. C'est la raison pour laquelle je souhaite rappeler à cette tribune la situation plus que préoccupante de ce fonds, situation qui a d'ailleurs été constatée par la Cour des comptes.

Le FFIPSA cumule les handicaps : son bilan d'ouverture, au ler janvier 2005, fait apparaître une dette sur l'État de 3, 2 milliards d'euros résultant des déficits cumulés du BAPSA. A cela, il faut ajouter un déficit structurel d'environ 1, 9 milliard d'euros pour 2005 et, vraisemblablement, pour 2006.

Au total, le besoin de financement cumulé de ce fonds, qui assure la couverture des risques « maladie » et « accident » ainsi que l'assurance vieillesse de base des non-salariés agricoles, atteint environ 6 milliards d'euros. Comment un tel déficit va-t-il pouvoir être couvert ? C'est une question essentielle pour le monde agricole, très inquiet de la suppression de la subvention d'équilibre que l'État versait traditionnellement au BAPSA.

En novembre 2005, le comité de surveillance du FFIPSA a appelé le Gouvernement à prendre ses responsabilités face à cette situation. Il a notamment proposé que soient envisagés une diversification des ressources, une renégociation des règles de compensation démographique et le recours à un emprunt dont l'État prendrait en charge les annuités.

M. Copé s'est engagé devant l'Assemblée nationale à prendre en charge partiellement la créance figurant au bilan d'ouverture du FFIPSA, ainsi que la diversification des ressources et la réforme des règles de compensation démographique préconisées par le comité de surveillance présidé par Yves Censi. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, a réaffirmé au Sénat sa détermination à trouver un financement pérenne.

Devant l'ampleur du déficit, augmenter l'autorisation de découvert du FFIPSA est loin d'être satisfaisant. Monsieur le ministre, l'État sur ce sujet manque à ses devoirs lorsqu'il n'assure pas, comme il aurait dû le faire, l'équilibre de ce fonds. Ce n'est pas moi, simple parlementaire rural, qui le dis, c'est la Cour des comptes !

Même si le FFIPSA n'est plus rattaché aux crédits du ministère de l'agriculture, vous êtes l'avocat de l'agriculture et des agriculteurs, qui comptent sur vous. C'est la raison pour laquelle j'aimerais connaître votre position sur ce sujet et les actions qui vont être prises par les différents ministères concernés pour assurer la pérennité du financement de ce fonds.

Enfin, un dernier point me semble primordial à souligner dans la nouvelle présentation des crédits de la mission agriculture, l'assurance récolte. Vous doublez les crédits affectés à ce dispositif, ce n'est pas négligeable, et même très important, dans un budget que nous savons contraint.

Je me réjouis de la volonté affichée du Gouvernement d'accompagner son développement et de favoriser son extension. Toutefois, pour rendre l'assurance récolte réellement attractive aux agriculteurs et aux assureurs, il convient d'agir à un double niveau.

Premièrement, il faut mener une politique incitative par le biais de la prise en charge d'une partie des primes d'assurance. C'est ce que vous avez fait en 2005 et cela a porté ses fruits, puisque 65 000 contrats ont été signés ; on ne peut que vous en féliciter. Or, les crédits débloqués pour 2006 sont pour l'instant insuffisants à cette prise en charge partielle. Non seulement ces aides doivent être maintenues, mais elles doivent l'être à un niveau identique à celui de cette année.

Deuxièmement, il faut prévoir un mécanisme de réassurance pour que les assureurs continuent de proposer ce type de contrat. A l'heure actuelle, les assureurs ne pourront pas aller beaucoup plus loin, le risque étant trop important.

Allégement des primes et réassurance garantie par l'État, tels sont les deux principes qui fondent les techniques d'assurance dans le monde entier. Il ne peut en être autrement chez nous.

Pour ma part, vous savez que je suis, depuis de nombreuses années, un ardent défenseur de l'assurance récolte. Je déposerai donc à nouveau, sur les articles non rattachés, et comme sur le projet de loi d'orientation agricole, un amendement demandant la garantie de l'État en matière de réassurance. C'est, à mon sens, la condition sine qua non pour que l'assurance récolte, après un bon début, arrive à l'objectif que vous avez fixé, c'est-à-dire environ 200 000 contrats.

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