Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de féliciter à mon tour le président et le rapporteur de la commission d’enquête, MM. Jean-François Humbert et Jean-Jacques Lozach, pour la qualité des échanges qu’ils ont animés, des auditions qu’ils ont organisées et du rapport qu’ils ont rédigé. Après avoir participé à de nombreuses réunions à leur côté, je crois que, en six mois, nous avons fait du bon travail pour faire avancer efficacement la lutte contre le dopage.
Si ce combat est une priorité, ce n’est pas en réponse à un phénomène médiatique, mais tout simplement en vertu de notre responsabilité vis-à-vis des sportifs qui mettent gravement en danger leur santé, et quelquefois leur vie ; c’est aussi au nom de la lutte contre la triche, qui bafoue l’éthique sportive et ruine tous les principes universels et intemporels du sport et, bien souvent, de l’olympisme.
Les avancées réalisées au cours des dernières décennies grâce aux précédents ministres des sports, notamment Marie-George Buffet et, plus récemment, Jean-François Lamour, ont conduit à la mise en place d’un véritable arsenal juridique et matériel permettant de mieux contrôler les pratiques sportives et de lutter plus efficacement contre les pratiques dopantes.
Pour ma part, j’ai eu le privilège d’être le rapporteur, dans cet hémicycle, de plusieurs projets de loi sur ce sujet. Je pense en particulier au projet de loi relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs, présenté par Jean-François Lamour en 2005 : ce texte important a consacré l’indépendance de l’Agence française de lutte contre le dopage.
J’ai également été le rapporteur du projet de loi autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport, en 2007, et du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants, en 2008, qui permettait de faciliter la tâche des enquêteurs, en particulier des gendarmes, pour remonter les filières de produits dopants.
L’autorité reconnue à l’Agence française de lutte contre le dopage et les moyens qui lui ont été accordés, associés à la compétence, mondialement reconnue, du laboratoire national de Châtenay-Malabry, ont permis de mettre au jour certaines pratiques dopantes qui gangrenaient le sport depuis des années.
À ce point de mon propos, et puisqu’il se trouvait, il y a quelques instants, dans les tribunes du public, je tiens à rendre un hommage mérité à l’ancien président de l’AFLD, Pierre Bordry : par son action, il a su assurer pleinement l’autonomie de l’Agence dès sa création.
Je tiens également à rappeler que le dopage est un phénomène général. De fait, il n’est pas limité à certains sports, comme le cyclisme, contrairement à ce que la presse mondiale laisse trop facilement croire. Par ailleurs, il est bon de souligner qu’il touche aussi le monde amateur, dans sa globalité, et même les jeunes sportifs.
Du reste, on peut souhaiter que les sports de masse, qui drainent des sommes d’argent supérieures à ce que génère le cyclisme, fassent l’objet de contrôles plus approfondis et indépendants, et que les résultats soient mieux médiatisés.
Notre commission d’enquête formule dans son rapport soixante propositions concrètes destinées à améliorer la lutte antidopage. Le groupe UMP, au nom duquel j’interviens ce soir, les approuve et les soutient largement. Pour ma part, je désire insister plus particulièrement sur les propositions relatives à la prévention et au contrôle, car je considère que, dans les textes précédents, la prévention a quelquefois été un peu oubliée.
Plusieurs de nos propositions visent clairement à approfondir la prévention du dopage : nous suggérons notamment de confier un poids accru à l’Agence française de lutte contre le dopage pour en faire l’acteur clé de cette lutte, son changement d’appellation pouvant être, d’ailleurs, un élément de publicité évident.
Comme M. Jean-François Humbert l’a souligné, la prévention est la clé du succès : elle permettra de mieux informer les pratiquants d’une activité sportive des conséquences à court, moyen et long terme d’une pratique dopante, même à faible intensité.
S’adresser aussi aux non-licenciés est essentiel, car la lutte antidopage n’a pas seulement pour enjeu la sanction de la triche et de ses conséquences sur le plan de l’éthique sportive ; elle vise aussi et surtout la prévention de maladies et de pathologies graves chez des sportifs ou d’anciens sportifs, professionnels ou amateurs, qui, pour réussir une performance, mettent leur vie en danger.
Par ailleurs, la prévention dès le plus jeune âge, par exemple dans l’enseignement secondaire, est à mes yeux tout à fait nécessaire. En effet, c’est à cet âge que, se croyant invulnérable, on peut commencer à être tenté d’utiliser des moyens illégaux pour briller, se distinguer, et, pourquoi pas, être repéré par des grands clubs ou par des équipes professionnelles, quand on n’est pas aussi - hélas, cela arrive - mal conseillé par des éducateurs peu scrupuleux.
Agir dès le second degré est donc un acte nécessaire d’éducation et de santé publique.
Donner à l’AFLD la possibilité d’interdire aux sportifs de collaborer avec certains médecins ayant participé à des pratiques dopantes est également une excellente idée. Cette mesure permettrait de mettre un terme à un véritable marché de niche, sur lequel certains praticiens sont passés maîtres ; il existe des exemples célèbres, celui du docteur Ferrari étant le plus connu.
Mes chers collègues, la médecine a pour but de guérir et de soigner, pas de transformer les athlètes en machines de guerre : les docteurs Mabuse doivent être ciblés, et leur activité impitoyablement brisée !
Enfin, la validation, par le ministère des sports, des calendriers sportifs pour que l’on puisse vérifier qu’ils sont raisonnables et plus proches des possibilités physiques, serait évidemment une avancée fondamentale. Comment peut-on encore croire que les calendriers de plus en plus chargés, au point de devenir délirants, comme l’a dit Jean-Jacques Lozach, ne mettent pas en danger les sportifs de toutes les disciplines, individuelles ou collectives, en les poussant à tirer toujours plus sur leurs capacités physiques et à utiliser des produits dopants ?
La création d’un droit au repos est également une proposition à étudier. Du reste, par le passé, j’ai toujours prôné un plus grand nombre de jours de repos sur le Tour de France.
En ce qui concerne les contrôles, je soutiens la proposition consistant à favoriser la surveillance des manifestations sportives se déroulant en France par l’AFLD, en lieu et place des fédérations. Considérer par défaut toute compétition sportive comme nationale forcera les fédérations sportives internationales à prendre leurs responsabilités et à assurer un meilleur contrôle des événements sportifs qu’elles auront pris sous leur propre responsabilité.
Je pense en particulier à la prochaine coupe d’Europe de football, dont vous savez qu’elle aura lieu en France, en 2016, ainsi qu’aux futures coupes du monde de football, à commencer par celle qui se déroulera au Qatar, et au sujet de laquelle il y a beaucoup à dire.