Cet amendement de repli vise à supprimer le « loyer médian de référence minoré », qui instaure un plancher et pourrait entraîner un renchérissement des loyers, impliquant à terme des départs forcés pour certaines familles. En effet, comme nous vous l’avons indiqué, rien ne permet aujourd’hui de verrouiller de manière pérenne le dispositif. Le risque existe de voir disparaitre les loyers qui aujourd’hui sont inférieurs de 30 % au loyer médian, puisqu’il existe une possibilité pour le bailleur d’actionner la réévaluation de loyers.
Ce risque a été dénoncé par de nombreuses associations de consommateurs et de protection des locataires. Il nous semble judicieux de les écouter et de prendre en considération leurs critiques et leurs craintes.
Prenons l’exemple parisien. En 2012, 32 000 logements ont des loyers inférieurs au loyer de référence minoré. Certes, on peut évoquer la qualité dégradée, voire l’insalubrité de certains logements. Mais la sédentarité des locataires est le principal facteur explicatif du montant de ces loyers.
Ainsi, selon l’OLAP, un logement occupé depuis plus de 10 ans par le même locataire a en moyenne un loyer inférieur de 20 % au loyer moyen de l’ensemble des locations, donc un loyer potentiellement inférieur de 30 % au loyer médian. Dès lors, la question de la réévaluation de ces loyers se pose. En effet, la loi permet au propriétaire, en contradiction d’ailleurs avec le décret, de réévaluer, lors d’une relocation ou d’un renouvellement de bail, à hauteur du loyer médian minoré. Les taux d’effort de ces ménages risquent alors d’augmenter, poussant ainsi ceux dont la contrainte budgétaire est trop forte à émigrer vers des zones moins tendues.
Certes, la possibilité de réajuster le loyer au niveau du loyer de marché, dans le cas d’une sous-évaluation manifeste, existe déjà dans le cadre de la loi actuelle du 6 juillet 1989 au moment du renouvellement de bail. Cependant, le propriétaire doit alors apporter la preuve de cette sous-évaluation manifeste. En 2012, à Paris, 3, 2 % des propriétaires ont eu recours à cet article. Nous craignons qu’avec ce nouveau dispositif, les tentatives de réajustements soient beaucoup plus nombreuses.
De plus, il y a encore trop d’inconnues dans le dispositif proposé. À cet égard, la question du zonage est déterminante. Plus le découpage sera fin, plus les loyers de référence correspondront aux caractéristiques réelles du marché local.
Dans l’hypothèse d’un large découpage du territoire, les loyers médians de référence risquent d’être trop élevés pour les quartiers les moins chers et trop bas pour les quartiers les plus chers. Or nous n’avons pas d’informations précises sur les zonages envisagés.
Enfin, seule la construction de logements dans les zones tendues résoudra les problèmes structurels du marché locatif. Les mesures d’encadrement des loyers ne sont qu’un moyen temporaire d’accompagner la hausse des taux d’effort, mais elles ne sont pas à elles seules suffisantes et peuvent avoir un effet ricochet non négligeable.