Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 28 octobre 2013 à 21h30
Avenir et justice du système de retraites — Article 1er

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

Nous avons tenu, à travers cet amendement, à réaffirmer notre attachement au principe de solidarité qui fonde notre système de retraites.

En ce sens, toute réforme doit préserver les valeurs essentielles de justice sociale en maintenant la solidarité. Ce faisant, elle répond à l’exigence de maintien de la cohésion de la société. Remettre en cause ce principe même de solidarité, c’est incontestablement faire reculer significativement notre civilisation.

Il ne faudrait pas oublier que ce principe de solidarité, qui est à la base de notre système de protection sociale, s’est développé au cœur même de la Résistance. De même, n’oublions pas que toutes les avancées sociales de l’après-Seconde Guerre mondiale furent aussi une réponse au libéralisme sauvage des années vingt et à la déflation des années trente.

C’est donc dans une période particulièrement troublée qu’un système de protection sociale aussi novateur a été progressivement élaboré et a pu émerger après la guerre.

Malgré une situation particulièrement difficile, alors qu’il fallait reconstruire et consacrer de grands efforts au redressement économique de notre pays, nous avons su mobiliser les mesures nécessaires à la mise en place d’un régime d’assurance vieillesse permettant à tout un chacun, indépendamment de ses origines sociales et de sa trajectoire de vie, de bénéficier d’une sécurité pour ses vieux jours.

C’est donc avec perplexité que je constate que, sous la pression d’un vieillissement démographique relatif, on développe des discours alarmistes tendant à faire croire que notre système actuel de retraites est condamné ou que sa préservation passe par une réduction permanente et continue du niveau des pensions versées.

Je suis inquiète de voir prospérer de telles idées. À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, en réponse à la grande crise des années trente, nous avons cherché à réguler nos économies en réduisant le poids des mécanismes de marché, qui avaient montré toute leur inefficacité sur les plans économique et social.

J’ai l’intime conviction qu’aujourd’hui nous faisons un grand pas en arrière en abandonnant progressivement la régulation de notre économie aux seules forces du marché, car c’est bien ce renoncement qui est à l’œuvre quand on examine, au-delà du présent projet de loi, une bonne partie des choix politiques qui sont actuellement opérés.

Mes chers collègues, nous ne croyons pas plus en les vertus méconnues des fonds de pension, des plans d’épargne entreprise ou des plans d’épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, qu’en de multiples décisions fiscales et financières censées, en préservant notre compétitivité, sauver notre protection sociale.

Les secousses financières depuis 2008 ont montré que le capitalisme actionnarial n’est nullement capable d’assurer la régulation dont nous avons besoin. La domination des marchés financiers, toujours présente, est une machine à produire des inégalités, à affaiblir notre croissance et à créer du chômage.

On l’aura bien compris, à terme et au-delà du présent texte, c’est l’ensemble de notre système de protection sociale qui sera atteint dans ses fondements mêmes. Or, et je tiens à attirer l’attention sur ce point, croire que le marché et l’individualisme peuvent constituer des facteurs de régulation de nos sociétés, c’est commettre une grave erreur d’appréciation et d’analyse économique.

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