Alors que cet article 1er réaffirme l’attachement de la Nation à un système de retraite par répartition, l’ensemble des articles qui suivent, et singulièrement l’article 3, conduisent à mettre en œuvre un changement majeur, à peine dissimulé : celui du basculement d’un système à prestations définies vers un système à cotisations définies.
Or les régimes à cotisations définies ne garantissent pas aux salariés un niveau de pensions une fois atteint l’âge de la retraite. Le montant de la pension constitue la première variable d’ajustement qui permet aux responsables publics de les augmenter ou, plus souvent, de les réduire, en général dans le but de diminuer les dépenses publiques.
L’équation est alors claire : quand les retraités deviennent nombreux, vivent plus longtemps et que le montant des retraites représente une part trop grande de la dépense sociale et publique, la réduction de cette dernière passe par une réduction des pensions.
À rebours de cette logique financière, notre système de protection sociale et le régime de base obligatoire de la sécurité sociale se sont constitués sur l’idée qu’il fallait impérativement que les salariés, en débutant leur carrière professionnelle, aient la garantie de pouvoir disposer d’une retraite minimum.
Or l’article 3 du présent projet de loi autorise explicitement le comité de suivi à proposer la réduction des pensions ; il est, d’ailleurs, précisé que celle-ci doit être limitée. Alors que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à s’inquiéter d’être privés du droit à bénéficier, comme nous demain et comme nos anciens hier, d’une retraite collective et solidaire, le signal envoyé par cet article 3 est anxiogène.
Qui plus est, si en vertu de cet article 3 les pensions peuvent être réduites, l’augmentation des cotisations sociales notamment celles qui sont supportées par les employeurs, apparaît comme une solution marginale. De toute évidence, ce n’est pas la solution que votre gouvernement privilégie puisque la faible hausse de cotisations patronales est aujourd’hui immédiatement compensée par une baisse significative du financement de la branche famille.
Madame la ministre, lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, vous avez, sans réelle explication, donné un avis défavorable à cette proposition d’amendement. Si le député Michel Issindou a, quant à lui, répondu à nos collègues du groupe GDR, sa réponse nous inquiète plus qu’elle ne nous rassure. En effet, selon lui, l’article 3 constitue « un principe de tunnel, qui ne fait pas de notre système un système à cotisations définies, puisque les recommandations du comité de suivi ne s’imposent pas au Gouvernement ni au Parlement ». Pour autant, il n’a pas exclu que les propositions du comité puissent aller dans ce sens, et pour cause !
Tout converge vers un possible basculement du système. Pour reprendre l’expression de notre collègue député, le bout du « tunnel » nous inquiète. C’est la raison pour laquelle il nous semble souhaitable que l’article 1er définisse le type de système de retraites par répartition que nous voulons pour notre pays, à savoir un régime à prestations définies.