Intervention de Corinne Bouchoux

Réunion du 29 octobre 2013 à 21h30
Avenir et justice du système de retraites — Article 2

Photo de Corinne BouchouxCorinne Bouchoux :

Malheureusement, ce fonds a été insuffisamment abondé par les gouvernements suivants, avant d’être dévoyé par la réforme de 2010.

Quant à l’augmentation de la durée de la vie, elle a bien un impact sur la masse des pensions, mais celui-ci est très faible. Pour les pensions de droit direct, la CNAV a calculé que, entre 2002 et 2017, l’allongement de la durée de vie a accru le montant des pensions à verser de 1, 9 milliard d’euros. Par comparaison, ce sont 11, 8 milliards d’euros, soit six fois plus, qui sont imputables au papy-mamy-boom, le tout rapporté à un montant total, en 2017, de 95 milliards d’euros. Faire porter le financement sur l’allongement de la durée de cotisation au motif que l’on vit plus longtemps est donc totalement injustifié !

Ce ne serait rien si, en plus d’être inepte, ce raisonnement n’était aussi injuste. En période de chômage, le nombre d’heures travaillées dans la société n’est pas lié à la durée de cotisation – cela se saurait !

Depuis 2008, le nombre de chômeurs de longue durée de plus de 50 ans a augmenté de 150 %. Autrement dit, allonger la durée de cotisation ne leur redonnera pas un emploi. Cette mesure n’aura donc pour effet que de contribuer à transformer des retraités en chômeurs, ou bien, si certains parviennent à se maintenir dans l’emploi, d’accroître encore un chômage des jeunes qui tourne déjà autour du taux alarmant de 24 %.

Ce faisant, en posant cette solution comme un remède miracle, on oublie de se poser la bonne question. Et si, au-delà de la question conjoncturelle du papy-mamy-boom, le véritable problème tenait moins à un surplus de dépenses qu’à un manque de recettes ? En effet, les cotisations pour la retraite sont assises sur les salaires. Or, vous le savez comme moi, mes chers collègues, la part de la valeur ajoutée attribuée aux salaires a tendanciellement baissé de cinq points au cours du demi-siècle dernier. Ce sont autant de cotisations en moins.

Plus récemment, la crise financière a accru de trois points le chômage, qui est passé de 7, 5 % en 2008 à 10, 5 % aujourd’hui. Même le rapport Moreau ne conteste pas la très grande responsabilité de la crise financière dans les besoins de financement du système de retraites.

Aussi, pourquoi ne pas chercher un remède en adéquation avec le mal ? Pourquoi ne pas soumettre à cotisation les revenus financiers distribués par les entreprises ? Cela permettrait d’offrir à notre système de retraites une source de financement cohérente avec les difficultés dont il souffre et aussi de freiner la financiarisation folle de l’économie, qui nous a menés – nous sommes tous d’accord sur ce point ! – au désastre.

En résumé, non seulement cet article apporte une mauvaise réponse, mais, surtout, il ne pose pas les bonnes questions. §

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