Intervention de Dominique Watrin

Réunion du 29 octobre 2013 à 21h30
Avenir et justice du système de retraites — Article 2

Photo de Dominique WatrinDominique Watrin :

Le groupe CRC votera sans surprise pour la suppression de l’article 2.

C’est tout à fait logique. Dans nos interventions précédentes, nous avons souligné et dénoncé l'injustice des nouvelles mesures d'augmentation de la durée de cotisation. Il ne peut pas y avoir de justice dans une telle décision. Je pense en particulier aux jeunes ; que vous le vouliez ou non, vous vous apprêtez à les faire travailler au moins jusqu’à 66 ans. En plus, c’est inefficace, y compris au plan économique ; les expériences passées l'ont suffisamment démontré.

Nous avions prévu de remplacer cette disposition par une autre, plus juste et plus efficace pour les comptes sociaux : l’instauration d’une modulation de cotisations sociales en fonction de la politique salariale de l’entreprise.

Je ne développerai pas ce point, mais je tiens quand même à souligner que d'autres solutions sont possibles pour aller chercher les 20 milliards d'euros dont notre collègue vient de parler sans en faire peser la charge sur les jeunes générations. §Mais je constate que vous n’écoutez pas ce que nous disons…

En effet, comme nous le proposions dans notre amendement, il est possible de procéder tout à fait différemment. Je vous invite à regarder l'évolution des cotisations sociales patronales depuis le début des années quatre-vingt : personne ne peut nier qu’elles n’ont eu de cesse de décroître, alors que la part de la richesse créée dans l'entreprise et destinée à la rémunération du capital n’a, elle, jamais cessé d'augmenter.

Ce recul de société que vous nous proposez n’est donc qu’une conséquence du refus de prendre les mesures nécessaires pour une plus juste répartition des richesses créées par les salariés.

Je crois aussi qu’il faut vous interroger sur l'efficacité de nos politiques publiques.

En 2010, la France a consacré près de 20 milliards d’euros, soit plus de 1, 2 % de son produit intérieur brut, au financement de mesures d’exonération de cotisations sociales patronales sur les bas salaires. Cette action, présentée comme étant de nature à favoriser l’emploi, est le volet budgétaire le plus important de toutes les politiques menées en faveur de l’emploi dans notre pays, avec les résultats, constatés par la Cour des comptes, que vous connaissez.

En outre, de telles exonérations agissent comme des trappes à bas salaires, entraînant une baisse encore plus forte des cotisations entrant dans les caisses de retraite. Par leur caractère massif, elles contribuent également à faire pression sur le niveau des salaires. Les cotisations sociales étant également assises sur ceux-ci, la sécurité sociale est perdante une deuxième fois.

Conclusion, si le Gouvernement, au lieu d’adopter une mesure injuste, frappant exclusivement les salariés, en particulier les plus fragiles, en avait véritablement la volonté, il pourrait opter pour une solution efficace économiquement, pertinente en matière de politique de l’emploi et juste socialement : l’instauration d’une modulation des cotisations sociales acquittées par les entreprises. Les entreprises favorisant l’emploi et la formation bénéficieraient d’une réduction de leur taux de cotisation, tandis que celles qui privilégient la rémunération du capital au détriment d’une politique salariale juste se verraient appliquer des cotisations salariales plus importantes.

En d’autres termes, nous mettrions en place un dispositif de cotisations sociales « intelligentes ». Mais, chers collègues socialistes, depuis le temps où nous vous proposons une politique intelligente permettant de réorienter l’argent vers l’économie réelle plutôt que vers la finance, vous ne nous écoutez pas…

Ne déduisez pas de notre vote sur ces amendements que nous souhaitons le statu quo. Le financement des retraites, nous l’avons dit, dépend avant tout d’un choix de société : soit l’on fait payer le travail, c'est-à-dire les salariés actifs et les retraités, soit l’on fait payer le capital. Pour notre part, nous faisons le choix de mettre à contribution les revenus financiers des entreprises au même niveau que les salaires.

Nous regrettons de ne pas pouvoir développer nos propositions – de toute façon, on ne nous écoute pas –, mais nous voterons les amendements de suppression. §

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