Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 31 octobre 2013 à 10h00
Avenir et justice du système de retraites — Article 7

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe UMP a en effet demandé la suppression de cet article.

Nous sommes certes absolument convaincus qu’il peut exister une passerelle, une transition, une coopération, une conciliation, une coordination entre les droits acquis au titre de la pénibilité et le droit individuel à la formation.

Toutefois, comme vient de le rappeler très pertinemment Mme Catherine Procaccia, M. le ministre du travail a annoncé un projet de loi sur la formation professionnelle, et des négociations sont en cours.

Vous n’avez pas eu la chance de participer à nos débats hier, madame la ministre, puisque vous nous avez rejoints ce matin, ce dont nous nous félicitons ; le problème majeur, aujourd’hui, en matière de pénibilité, c’est qu’il faut faire en sorte que les droits ouverts en matière de formation l’emportent sur le désir plus simple de prendre sa retraite plus tôt.

Si cette idée d’une retraite prise plus tôt est individuellement séduisante – je le reconnais –, elle est collectivement néfaste tant il est vrai que, en termes d’intérêt général, la somme des intérêts individuels n’est pas nécessairement le guide qui doit nous inspirer.

J’en viens à présent au point qui justifie mon souhait de voir cet article retiré à cet instant – nous devrons bien évidemment régler le problème ultérieurement.

Nous ne souhaitons pas que la pénibilité devienne pour les salariés une sorte de statut complémentaire. Nous voulons au contraire qu’elle soit une situation que l’on examine et que l’on s’efforce d’éradiquer, pour reprendre un mot que j’avais utilisé et qui semble rencontrer un certain succès.

Nous privilégions la formation et les mesures d’adaptation plutôt que les mesures de raccourcissement de la vie professionnelle, même si je comprends parfaitement, à titre personnel, que l’on puisse avoir une préférence pour cette dernière solution.

Toutefois, la formation ne doit pas être un marché de dupes. C’est le sens de mon intervention : je souhaite que cette réflexion sur la pénibilité et la formation professionnelle soit reliée à la capacité effective des entreprises de répondre aux attentes que peut générer le droit à une formation nouvelle.

Nous avons voté, hier dans la nuit, l’amendement présenté par Mme David, au nom du groupe CRC, offrant aux salariés ayant suivi une formation une priorité de reclassement dans un poste ne les exposant plus aux facteurs de risques auxquels ils étaient précédemment exposés.

Nous l’avons fait de bon cœur, mais encore eût-il fallu prolonger le raisonnement. En effet, pour qu’il y ait des fonctions moins pénibles, il faut des investissements.

Je suis désolé de rappeler ainsi les faits dans leur simplicité biblique, mais les investissements requièrent des bénéfices ou des perspectives de bénéfices pour les entreprises. Si nos entreprises sont en difficulté, elles ne pourront financer ni investissements nouveaux ni emplois nouveaux.

Nous avons eu cette discussion le premier jour de l’examen de ce texte. L’« intensité capitalistique », formule quasi grossière, n’est pas une vaine expression : aujourd’hui, un emploi consomme du capital. Si nous voulons que les salariés disposent d’outils de travail à la fois productifs et respectueux de leur dignité, il faut investir. Et pour investir, il faut gagner de l’argent. Et pour gagner de l’argent, il faut avoir une vision globale de la situation de l’entreprise !

Le « couple » formation professionnelle-lutte contre la pénibilité concerne certes le salarié, mais ce dernier n’obtiendra jamais de réponse favorable si l’on ne complète pas ce duo par un autre élément, à savoir l’investissement réalisé par l’entreprise.

C’est la raison pour laquelle nous considérons qu’il est prématuré à cet instant de vouloir simplement ajouter ces dispositions dans la loi. Nous devons avoir une vision globale, et l’entreprise doit être partie prenante à ce débat.

Voilà pourquoi nous souhaitons différer l’adoption de cette disposition en attendant que patrons et syndicats aient avancé sur la mise en œuvre effective de la formation professionnelle. Car, à défaut, nous ouvrirons des droits qui ne seront suivis d’aucun effet.

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