Séance en hémicycle du 31 octobre 2013 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’action
  • facteur
  • l’entreprise
  • prévention de la pénibilité
  • pénalité
  • pénibilité

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (projet n° 71, résultat des travaux de la commission n° 96, rapport n° 95, avis n° 76, rapport d’information n° 90).

Nous poursuivons la discussion des articles.

Titre II

RENDRE LE SYSTÈME PLUS JUSTE

Chapitre Ier

Mieux prendre en compte la pénibilité au travail

Nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, à l'examen des amendements portant article additionnel après l'article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 421, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du second alinéa du I de l'article L. 133-5-4 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 1441-8 », est insérée la référence : «, L. 4162-3 ».

La parole est à Mme la rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous souhaitons tous que les dispositifs adoptés à l’occasion de ce débat soient d’application la plus simple possible. C’est pourquoi, dans un souci de simplification des démarches pour les entreprises, nous proposons que la déclaration annuelle par l'employeur aux caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, les CARSAT, de l'exposition de ses salariés aux facteurs de risques professionnels se fasse par le biais de la déclaration annuelle des données sociales, la DADS. Cette nouvelle obligation, indispensable pour assurer la bonne alimentation du compte personnel de prévention de la pénibilité, s'intégrera donc dans le cadre de la relation de l'entreprise avec les organismes de sécurité sociale.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie

L’article 6 ayant été rejeté, j’invite la commission à retirer cet amendement qui n’a plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Tout le monde, y compris le Gouvernement, a bien saisi le sens de cet amendement. La simplification est nécessaire pour les entreprises, en particulier pour les plus petites d’entre elles, qui ne sont pas outillées comme les grandes.

Par conséquent, je retire cet amendement, madame la présidente. Je fais confiance à ceux qui appliqueront ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis donc saisie d’un amendement n° 421 rectifié, présenté par M. Longuet, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 421.

Vous avez la parole pour le défendre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je reprends cet amendement, car il correspond exactement à notre préoccupation de simplification.

Et comme l’article 6 sera rétabli par l’Assemblée nationale, il paraît tout à fait opportun de voter cet amendement particulièrement judicieux.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.

L'amendement n° 331 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er mars 2014, un rapport sur la pertinence et l’impact financier et social d’un déplafonnement du nombre maximal de points cumulables sur le compte personnel de prévention de la pénibilité prévu à l’article 6 et d’une suppression de l’obligation d’utiliser les premiers points du compte pour un achat de formation.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Encore un rapport, me direz-vous !

Si nous demandons une nouvelle fois un rapport, c’est bien parce que, en vertu de l’article 40 de la Constitution, nous n’avons pas la possibilité d’engager des dépenses par voie d’amendement. Si, en tant que parlementaires, nous n’avions la possibilité de ne proposer que des dispositions permettant de réaliser des recettes, notre action serait limitée, d’autant que nous avons souvent plus tendance à proposer des dépenses...

Le projet actuel de réforme pourrait prévoir, par décret, une limitation du compte personnel de prévention de la pénibilité à 100 points. Cela reviendrait notamment à pénaliser les salariés ayant été exposés pendant plus de vingt-cinq ans à un facteur de pénibilité, puisqu’ils ne pourraient par conséquent acquérir de droits supplémentaires au-delà de cette limite. Cette disposition serait donc injuste pour ces travailleurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C’est un constat, ma chère collègue !

L’article 6 prévoyait aussi l’utilisation des points pour suivre une formation en vue de se reconvertir d’un métier pénible, ce qui constituait une avancée pour encourager les travailleurs à s’engager vers de nouvelles voies. Or le projet de réforme pourrait autoriser uniquement l’utilisation des vingt premiers points du compte à cette fin, soit les droits acquis au titre des cinq premières années d’exposition à un facteur de pénibilité.

Nous demandons par conséquent au Gouvernement d’évaluer l’incidence d’un déplafonnement du nombre de points du compte personnel de prévention de la pénibilité et d’une possibilité laissée aux employés d’utiliser l’ensemble de leurs points pour choisir l’une des trois possibilités proposées : formation, départ anticipé, temps partiel. Cela équivaut à une remise en cause à la fois du plancher et du plafond de ce compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

J’indique que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement comme sur l’amendement n° 335 rectifié. Néanmoins, je me pose une question de logique : dans les deux cas, il s’agit d’apporter des modifications au compte personnel de prévention de la pénibilité, qui n’existe plus depuis la suppression de l’article 6 hier soir...

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Il arrive que des amendements portant article additionnel conservent toute leur pertinence indépendamment de l’article concerné. En l’occurrence, comment se prononcer sur des dispositions visant à l’amélioration – à mon sens, ce n’en est d’ailleurs pas une – d’un dispositif qui n’existe plus ?

Je m’interroge donc sur l’opportunité de discuter de ces deux amendements portant article additionnel.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Pour les raisons de cohérence que vient d’exposer Mme la rapporteur, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Madame la présidente, il y aura une commission mixte paritaire, me semble-t-il.

Pour l’instant, nous sommes en train d’aligner un squelette : l’article 1er a été totalement transformé, les articles 2, 3, 4 ont été supprimés, l’article 5 a été adopté, et l’article 6 a également été supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Sans cette commission mixte paritaire, je ne sais pas ce qui restera de ce projet de loi ! Elle va se réunir et analysera le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale ainsi que l’article 5, tel que le Sénat l’a modifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Aujourd’hui, nous en sommes à un article adopté sur six ! Je souhaite donc glisser deux articles additionnels par le biais des amendements n° 331 rectifié et 335 rectifié, afin de permettre à la commission mixte paritaire de travailler sur des propositions émanant des débats du Sénat. Ainsi, les sénateurs membres de cette commission mixte paritaire apporteront de quoi nourrir la réflexion. Par conséquent, je maintiens cet amendement.

Pourquoi devrait-on prévoir un plafonnement à 100 points, soit vingt-cinq ans d’exposition à des facteurs de pénibilité ? Je connais l’argument qui a été avancé en commission : les salariés vont continuer à exercer un travail pénible pour gagner des points. Ce sera peut-être le cas… Mais ont-ils vraiment le choix ? Imaginons une personne de quarante-cinq ans, exposée à la pénibilité depuis vingt-cinq ans, à qui on dit qu’elle doit changer d’activité et qui est parfaitement d’accord pour le faire. Pensez-vous vraiment que, d’un seul coup, elle va trouver un travail intéressant, sans pénibilité et bien payé ? Est-ce bien ainsi que les choses fonctionnent dans la réalité ? Non, celui qui a exercé un travail pénible jusqu’à quarante-cinq ans risque, dans neuf cas sur dix, de continuer le même travail pénible au-delà de cet âge ! Or, avec un plafonnement, il n’aura pas la possibilité d’engranger des points de pénibilité supplémentaires alors même qu’il sera le plus usé par le travail.

L’amendement n° 331 rectifié ne vise qu’à prévoir la remise d’un rapport dont l’objet serait d’évaluer concrètement les conséquences d’un déplafonnement au-delà de 100 points et d’une utilisation libre des 20 premiers points du compte. Il ne s’agit que d’un rapport, d’une simple volonté d’ouvrir le champ de la réflexion. Comme nous l’avons souligné hier lors du débat sur l’article 6 du projet de loi, certains éléments peuvent encore être précisés et un travail de terrain nous permettra d’y voir plus clair. Notre volonté est bien de ne pas figer les choses dès maintenant.

En tout cas, je n’entends pas cet argument selon lequel un salarié pourrait subitement, après avoir accompli des travaux pénibles pendant vingt-cinq ans, trouver une activité intéressante dans laquelle il s’épanouirait.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mes chers collègues, le droit d’amendement étant un droit constitutionnel, je ne peux déclarer cet amendement sans objet, et c’est à notre assemblée de juger de la cohérence.

Je mets aux voix l'amendement n° 331 rectifié.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 335 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2015, un rapport présentant les modalités de prise en compte de la pénibilité pour les travailleurs qui y ont été exposés par le passé. Ce rapport insiste notamment sur la possibilité de reconstitution de carrières sur des critères objectifs et sur le financement de ces reconstitutions de carrière.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Si nous nous félicitons de cette idée d’instaurer un compte personnel de prévention de la pénibilité, force est de constater que seule une partie des générations actuellement en situation d’emploi ou en recherche d’emploi sera concernée par le dispositif.

Dans la rédaction initiale du projet de loi, le « stock », c’est-à-dire les situations pénibles auxquelles les salariés ont fait face avant la promulgation de la loi, n’était pris en compte qu’à la marge, avec des modalités de doublement de points pour les travailleurs de plus de cinquante-sept ans. L’adoption d’un amendement du Gouvernement à l’Assemblée nationale permet désormais des possibilités d’aménagement du barème d’acquisition des points portés au compte personnel de prévention de la pénibilité, et les conditions d’utilisation des points acquis sont ouvertes aux personnes âgées d’au moins cinquante-deux ans en 2015.

Cette excellente initiative mériterait néanmoins d’être poussée un peu plus loin.

Le rapport de la commission présidée par Yannick Moreau préconisait une prise en charge, avec des critères progressifs, de ce stock, notamment en vue de reconstituer des carrières. Il nous semble indispensable de répondre efficacement aux situations particulières de personnes.

Un travailleur qui occupe depuis quinze ou vingt ans un poste exposé à un ou plusieurs facteurs de pénibilité, mais qui ne sera âgé que de cinquante et un ans au 1er janvier 2015 ne pourra pas comptabiliser des points de pénibilité pour cette période passée.

Certains facteurs, comme le travail de nuit ou l’exposition à des produits cancérigènes, sont faciles à prouver et permettraient une reconstitution de carrière qu’il faudrait faire valoir pour bénéficier de points de pénibilité. Toutefois, nous sommes bien conscients des difficultés administratives et financières qui se posent dès lors que l’on se penche sur la reconstitution des parcours, et ce d’autant plus que les carrières uniques se font de plus en plus rares et que les travailleurs changent plus souvent de vocation et de métier qu’auparavant.

Cette question centrale mériterait donc une réflexion plus poussée pour éclairer les décisions du Parlement.

C’est pourquoi cet amendement tend à prévoir que le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant la faisabilité d’un tel dispositif, en insistant sur la possibilité de reconstitution de carrières sur des critères objectifs et sur le financement de ces reconstitutions de carrière.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, il ne s’agit encore une fois que de l’élaboration d’un rapport examinant les modalités selon lesquelles nous pourrions prendre en compte la situation des personnes ayant été exposées toute leur vie à des situations de pénibilité et leur proposer une éventuelle rétroactivité.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

La commission Moreau s’est exprimée sur cette question et a souligné, dans son rapport, les très grandes difficultés que soulèverait cette appréciation rétroactive. L’avis du Gouvernement est défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

I. – Au premier alinéa de l’article L. 142-2 du code de la sécurité sociale, après la deuxième occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : «, de ceux relatifs à l’application de l’article L. 4162-12 du code du travail ».

II. – Au 7° de l’article L. 261-1 du code de l’organisation judiciaire, après la première occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, au code du travail ». –

Adopté.

Avant le dernier alinéa de l’article L. 6111-1 du code du travail, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° En cas d’utilisation des points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité, dans les conditions prévues à l’article L. 4162-5. »

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Cet article a pour objet de compléter l’article L. 6111-1 du code du travail, relatif au compte personnel de formation, afin de préciser que celui-ci peut être abondé, outre par les droits acquis au titre du droit individuel à la formation, le DIF, et les abondements complémentaires, par les points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité.

Comme vous le savez, mes chers collègues, le compte personnel de formation résulte de l’adoption de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, que nous avons vivement combattu au Sénat. Il faut dire que l’article 5 de cet accord, portant création de ce compte, est lapidaire, et certains observateurs aguerris redoutent que les conditions de son fonctionnement n’aient pour effet de réduire les droits des salariés.

L’article 7 du présent projet de loi prévoit les conditions dans lesquelles les points acquis au titre de la pénibilité seront transférés sur ce compte.

Nous sommes déjà intervenus pour indiquer combien le dispositif prévu à l’article 6 du texte que nous examinons était différent, dans sa philosophie, de celui qui a été mis en place par la droite en 2010. Mais nous avons aussi souligné à quel point il demeurait trop corseté, tout en exprimant notre déception sur certains aspects. Je pense, par exemple, à la limitation du nombre de points pouvant être accumulés ou au fait que seuls deux facteurs puissent s’additionner, même en cas d’exposition à un nombre plus important de facteurs de risques professionnels.

Mais si j’interviens à ce stade du débat et sur cet article, bien que l’article 6 n’ait finalement pas été adopté hier soir, c’est pour regretter l’obligation qui est faite aux salariés de consacrer à la formation les 20 premiers points du compte personnel de prévention de la pénibilité.

En raison des règles restrictives que je viens de décrire, bon nombre de salariés peineront à accumuler plus de 40 ou 50 points. Si on leur en retire immédiatement 20 pour les transférer sur le compte personnel de formation, on réduit d’autant, et mécaniquement, la possibilité qui leur est offerte de profiter des deux autres dispositifs, à savoir le départ anticipé à la retraite ou la réduction du temps de travail.

Ce mécanisme automatique est d’ailleurs peu compatible avec la notion de compte personnel de formation. En effet, si ce compte est la propriété du salarié, c’est à ce dernier que doit revenir la décision de convertir, ou non, en points de formation les points acquis au titre de l’exposition à des facteurs de risques professionnels.

Qui plus est, tout comme l’étude d’impact d’ailleurs, la rédaction de cet article 7 ne nous permet pas de comprendre le mécanisme de transfert de ces points, les droits acquis au titre du DIF prenant, eux, la forme d’heures de formation. Nous souhaiterions donc savoir, madame la ministre, dans quelles conditions ces points seront transférés et quel équivalent en heures leur sera attribué.

Cette question est essentielle puisqu’il ne faudrait pas que ces points, dont la valeur est importante au regard d’un départ anticipé ou d’une réduction du temps de travail, ne procurent, en définitive, qu’un avantage limité en matière de formation.

Enfin, dernier élément, bien que nous ne nous opposions pas à des mesures renforçant le droit des salariés à la formation, particulièrement lorsque celle-ci a vocation à leur permettre de gagner en niveau de qualification, nous regrettons l’absence d’ambition dans ce domaine. Certes, une négociation interprofessionnelle est en cours sur le sujet, et j’en prends note. Mais je doute quelle débouche sur une sécurité sociale professionnelle, à l’image de celle qui fut imaginée, en 1945, pour la santé, la maternité et la famille.

L’enjeu est de taille car la sécurité d’emploi et de formation rend possible une sécurisation de tous les moments de la vie.

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons sur cet article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 278, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Catherine Deroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

L’article 7 du projet de loi vise à prévoir l’abondement du compte personnel de formation par feu le compte personnel de prévention de la pénibilité.

Il est précisé dans l’étude d’impact que la négociation nationale interprofessionnelle sur la formation professionnelle et la concertation quadripartite entre l’État, les régions et les partenaires sociaux relative au compte personnel de formation devront déterminer l’ensemble des modalités opérationnelles de mise en œuvre du compte personnel de formation.

Par ailleurs, Michel Sapin nous l’a rappelé récemment lors de l’examen d’un texte, le projet de loi portant réforme de la formation professionnelle, dont le dépôt est prévu pour la fin de 2013 et l’adoption, nous a-t-on promis, pour le premier trimestre 2014, doit donner une traduction législative à cette mise en œuvre opérationnelle.

Dans ces conditions, nous souhaitons reporter le débat à l’examen de ce futur texte sur la formation professionnelle et proposons, de ce fait, la suppression de cet article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Cet article que le groupe UMP souhaite supprimer porte sur l’articulation entre les actions de formation financées grâce aux points accumulés sur le compte personnel de prévention de la pénibilité et le compte personnel de formation.

Il est extrêmement important – et je souscris en cela aux propos que vient de tenir Mme Pasquet – de faire du compte personnel de formation le réceptacle des droits à la formation des actifs, y compris des droits acquis au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité.

La question du financement de ces droits étant réglée, il n’y pas interférence avec la concertation actuelle sur les modalités opérationnelles de mise en œuvre du compte personnel de formation. Par ailleurs, nous aurons dans les prochains mois, ici au Sénat, l’occasion de nous prononcer sur un projet de loi portant réforme de la formation professionnelle et, à ce moment-là, nous devrons absolument examiner les modalités et les conditions dans lesquelles les deux comptes – le compte personnel de prévention de la pénibilité et le compte personnel de formation – pourront s’articuler, le but étant bien évidemment d’aboutir à une cohérence d’ensemble.

Cet article 7 est, bien sûr, tout à fait important et la commission a, bien sûr, émis un avis défavorable sur l’amendement de suppression n° 278.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Je partage, et ce pour les mêmes motifs, la position de Mme la rapporteur. L’avis du Gouvernement est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je constate qu’il y a deux poids, deux mesures dans cet hémicycle en fonction de la personne qui présente un texte de loi.

Voilà dix jours, tout le monde, ici, était d’accord pour dire que la proposition de loi visant à établir un contrôle des comptes des comités d’entreprise était pertinente sur le fond et méritait d’être présentée. Toutefois, M. le ministre du travail a jugé qu’elle intervenait trop tôt et qu’il était préférable que ses dispositions soient intégrées au futur projet de loi sur la formation professionnelle.

Inversement, vous prétendez aujourd’hui que les dispositions contenues dans l’article 7 ne pourraient pas attendre ledit projet de loi.

Il est quelque peu étrange de solliciter, dans un cas, le report du débat et, dans l’autre, le vote immédiat de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe UMP a en effet demandé la suppression de cet article.

Nous sommes certes absolument convaincus qu’il peut exister une passerelle, une transition, une coopération, une conciliation, une coordination entre les droits acquis au titre de la pénibilité et le droit individuel à la formation.

Toutefois, comme vient de le rappeler très pertinemment Mme Catherine Procaccia, M. le ministre du travail a annoncé un projet de loi sur la formation professionnelle, et des négociations sont en cours.

Vous n’avez pas eu la chance de participer à nos débats hier, madame la ministre, puisque vous nous avez rejoints ce matin, ce dont nous nous félicitons ; le problème majeur, aujourd’hui, en matière de pénibilité, c’est qu’il faut faire en sorte que les droits ouverts en matière de formation l’emportent sur le désir plus simple de prendre sa retraite plus tôt.

Si cette idée d’une retraite prise plus tôt est individuellement séduisante – je le reconnais –, elle est collectivement néfaste tant il est vrai que, en termes d’intérêt général, la somme des intérêts individuels n’est pas nécessairement le guide qui doit nous inspirer.

J’en viens à présent au point qui justifie mon souhait de voir cet article retiré à cet instant – nous devrons bien évidemment régler le problème ultérieurement.

Nous ne souhaitons pas que la pénibilité devienne pour les salariés une sorte de statut complémentaire. Nous voulons au contraire qu’elle soit une situation que l’on examine et que l’on s’efforce d’éradiquer, pour reprendre un mot que j’avais utilisé et qui semble rencontrer un certain succès.

Nous privilégions la formation et les mesures d’adaptation plutôt que les mesures de raccourcissement de la vie professionnelle, même si je comprends parfaitement, à titre personnel, que l’on puisse avoir une préférence pour cette dernière solution.

Toutefois, la formation ne doit pas être un marché de dupes. C’est le sens de mon intervention : je souhaite que cette réflexion sur la pénibilité et la formation professionnelle soit reliée à la capacité effective des entreprises de répondre aux attentes que peut générer le droit à une formation nouvelle.

Nous avons voté, hier dans la nuit, l’amendement présenté par Mme David, au nom du groupe CRC, offrant aux salariés ayant suivi une formation une priorité de reclassement dans un poste ne les exposant plus aux facteurs de risques auxquels ils étaient précédemment exposés.

Nous l’avons fait de bon cœur, mais encore eût-il fallu prolonger le raisonnement. En effet, pour qu’il y ait des fonctions moins pénibles, il faut des investissements.

Je suis désolé de rappeler ainsi les faits dans leur simplicité biblique, mais les investissements requièrent des bénéfices ou des perspectives de bénéfices pour les entreprises. Si nos entreprises sont en difficulté, elles ne pourront financer ni investissements nouveaux ni emplois nouveaux.

Nous avons eu cette discussion le premier jour de l’examen de ce texte. L’« intensité capitalistique », formule quasi grossière, n’est pas une vaine expression : aujourd’hui, un emploi consomme du capital. Si nous voulons que les salariés disposent d’outils de travail à la fois productifs et respectueux de leur dignité, il faut investir. Et pour investir, il faut gagner de l’argent. Et pour gagner de l’argent, il faut avoir une vision globale de la situation de l’entreprise !

Le « couple » formation professionnelle-lutte contre la pénibilité concerne certes le salarié, mais ce dernier n’obtiendra jamais de réponse favorable si l’on ne complète pas ce duo par un autre élément, à savoir l’investissement réalisé par l’entreprise.

C’est la raison pour laquelle nous considérons qu’il est prématuré à cet instant de vouloir simplement ajouter ces dispositions dans la loi. Nous devons avoir une vision globale, et l’entreprise doit être partie prenante à ce débat.

Voilà pourquoi nous souhaitons différer l’adoption de cette disposition en attendant que patrons et syndicats aient avancé sur la mise en œuvre effective de la formation professionnelle. Car, à défaut, nous ouvrirons des droits qui ne seront suivis d’aucun effet.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe UDI-UC l’a dit, ces articles sur la pénibilité, parce qu’ils veulent trop embrasser, engendrent de la confusion. En effet, on mélange réparation et prévention.

Je suis certes un fervent partisan de la formation professionnelle et, bien sûr, de la prévention. Mais, dans les petites entreprises, et particulièrement les TPE, ce sera un coup d’épée dans l’eau, comme nous l’avons démontré. Celles-ci ne disposent le plus souvent pas de postes permettant d’offrir aux salariés une autre chance et un emploi moins pénible. Dès lors, comment les salariés pourront-ils utiliser ce compte personnel de formation?

C’est pourquoi nous demandions davantage de liberté dans la négociation, afin de pouvoir attribuer plus de points pour réparer cette pénibilité, soit au moyen d’un départ plus précoce à la retraite, soit en favorisant le départ progressif, un dispositif très intelligent qui permet de surcroît à l’entreprise d’embaucher des jeunes et qui pourrait venir compléter utilement votre contrat de génération.

Pour toutes ces raisons, nous voterons l’amendement de suppression de cet article. Je pense qu’il faut revoir complètement ce texte, même si, sur le fond, nous le redisons, il nous convient…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Nous voulons effectivement réparer la pénibilité, mais pas dans les conditions que vous proposez.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Nous sommes dans une situation invraisemblable : nous discutons actuellement de l’article 7 et nous continuerons tout à l’heure avec les articles 8 et 9, et ce alors même que ces articles sont la conséquence de l’article 6, qui a été supprimé !

La simple logique voudrait que l’on ne discute pas des articles 7, 8 et 9 ! Mais puisque nous faisons comme si l’article 6 existait encore, l’article 7 n’a pas à être supprimé. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre cet amendement de suppression !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

L’article 7 prévoit de compléter le dernier alinéa de l’article L. 6111-1 du code du travail. Or ce dernier fixe les conditions d’attribution du label intitulé « Orientation pour tous-pôle information et orientation sur les formations et les métiers », valant reconnaissance de la participation au service public de l’orientation tout au long de la vie.

Si l’article 7 était adopté en l’état, ce label serait attribué :

« 3° En cas d’utilisation des points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité, dans les conditions prévues à l’article L. 4162-5. »

Si j’ai bien compris, ce label serait donc attribué aux organismes qui peuvent utiliser les points inscrits sur le compte personnel de prévention de la pénibilité, soit pour une bonification salariale de temps partiel, soit pour un départ anticipé à la retraite, soit pour un accès à la formation.

Je ne crois pas que cet article mérite d’être supprimé, d’autant qu’il sera surtout virtuel dans un premier temps. Il me semble toutefois que sa rédaction pourrait être améliorée. Mais il se pourrait aussi que je me sois trompé…

Quoi qu’il en soit, ce complément apporté à l’article 6111-1 ne remet nullement en cause le projet de loi annoncé sur la formation professionnelle, monsieur Longuet, et sa rédaction pourra toujours être améliorée en CMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Avant de poursuivre les explications de vote sur cet amendement, je voudrais apporter une réponse à M. Domeizel : tant que des articles sont en navette, mon cher collègue, je suis tenue de les soumettre à la discussion et de les mettre aux voix. Je ne peux pas les faire tomber comme par magie !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Nous allons justement voter contre la suppression de l’article 7 !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Ce n’est pas le moment ce matin de revenir sur la longue et intéressante discussion que nous avons eue hier à propos de l’article 6.

Je rappelle toutefois que le compte personnel de reconnaissance de la pénibilité est fondé sur trois dispositifs.

Il prévoit, en premier lieu, un accès obligatoire à la formation, puisque le compte peut être alimenté à hauteur de vingt points.

Il favorise, en deuxième lieu, toutes les formes d’organisation du temps de travail à temps non complet, mesure qui me semble tout à fait digne d’intérêt.

Enfin, en troisième lieu, il permet dans certaines conditions le départ anticipé à la retraite.

Nous jouons donc à la fois sur le levier de la prévention et de la réparation.

Sur le plan de la prévention, l’accès à la formation est fondamental. Et je ne vois pas pourquoi les salariés des TPE et des PME n’auraient pas les mêmes droits que ceux des grandes entreprises.

Il se trouve que l’article 6 a malheureusement été rejeté ; mais nos collègues du groupe CRC avaient déposé un amendement intéressant qui visait à accorder une priorité d’accès à un emploi non pénible aux salariés ayant bénéficié de ces formations.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Claude Jeannerot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pourquoi refuserons-nous cet amendement n° 278 ?

M. Longuet nous invite à la procrastination, en nous proposant de remettre à plus tard le débat sur le compte personnel de formation lié à la pénibilité.

Je veux insister sur deux points très simples.

Je rappelle tout d’abord que le compte personnel de formation est issu de la loi relative à la sécurisation de l’emploi. Il s’agit d’un droit nouveau ouvert aux salariés, dont les modalités concrètes d’application font en ce moment l’objet d’une concertation entre les partenaires sociaux. Nous savons d’ores et déjà que ce compte individuel de formation prendra par définition en compte les caractéristiques individuelles des salariés. Autrement dit, un jeune qui arrive dans l’entreprise sans formation initiale se verra probablement doté du nombre de points nécessaire pour lui permettre d’exercer une sorte de droit à une formation initiale différée.

On peut donc escompter sans risquer de se tromper que les propositions de ce projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites s’articuleront naturellement avec les dispositions du futur projet de loi sur la formation professionnelle. Pourquoi donc attendre les précisions à venir relatives au compte personnel de formation alors que le compte personnel de prévention de la pénibilité ne fait que créer une source supplémentaire de droit à la formation ?

Ma deuxième remarque s’adresse à Jean-Marie Vanlerenberghe : cher collègue, vous ne pouvez pas regretter que la prévention ne soit pas suffisamment au cœur du texte qui nous est proposé et, en même temps, récuser cette disposition qui, par nature, favorise la prévention. En effet, le compte personnel de formation permet, notamment en cas de pénibilité observée, avec les conséquences que l’on sait sur la santé, les réorientations professionnelles. Il participe véritablement d’une démarche de prévention. Cet argument devrait vous convaincre de défendre le compte personnel de prévention de la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

L’engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement sur des sujets aussi complexes que les retraites et la pénibilité montre les limites de l’exercice !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Il s’agit d’un texte important sur lequel nous aurions pu travailler. Dès 2010, nous avions inclus la notion de pénibilité dans notre réforme des retraites. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mes chers collègues, seule Mme Deroche a la parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Vous avez voulu passer en force, et le texte issu des travaux du Sénat va être totalement désossé. Si bien qu’un accord avec l’Assemblée nationale, lors de la commission mixte paritaire semble impossible. Cette situation est ubuesque !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je répète que, s’agissant d’un texte aussi important, sur lequel nous aurions pu travailler, il me paraît vraiment dommage que le Gouvernement ait engagé la procédure accélérée.

En outre, M. Desessard invite à voter un texte tout en reconnaissant son imperfection. Cessons d’agir ainsi ! Suffisamment de textes sont lourds et imparfaits ; dispensons-nous de les voter lorsque nous nous en rendons compte en séance !

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 7 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les écologistes ont été indispensables dans ce vote !

I. – Le titre VI du livre Ier de la quatrième partie du code du travail est complété par un chapitre III intitulé : « Accords en faveur de la prévention de la pénibilité » et comprenant les articles L. 4163-1 à L. 4163-4.

II. – L’article L. 4163-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 4163 -1 . – Le présent chapitre est applicable aux employeurs de droit privé, aux établissements publics à caractère industriel et commercial et aux établissements publics administratifs lorsqu’ils emploient des personnels dans les conditions du droit privé. »

III. – Les articles L. 138-29 à L. 138-31 du code de la sécurité sociale deviennent, respectivement, les articles L. 4163-2 à L. 4163-4 du code du travail.

IV. – L’article L. 4163-2 du code du travail, tel qu’il résulte du III du présent article, est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) La référence : « à l’article L. 4121-3-1 du code du travail » est remplacée par les mots : « à l’article L. 4161-1 au delà des seuils d’exposition définis par décret » et les deux occurrences des mots : « du même code » sont supprimées ;

b) Après les mots : « accord ou », sont insérés les mots : «, en cas de désaccord attesté par un procès-verbal dans les entreprises pourvues de délégués syndicaux ou dans lesquelles une négociation a été engagée dans les conditions prévues à l’article L. 2232-21, par » ;

2° Aux deuxième et dernier alinéas, les mots : « du présent code » sont remplacés par les mots : « du code de la sécurité sociale ».

V. – À l’article L. 4163-3 du même code, tel qu’il résulte du III du présent article, la référence : « L. 138-29 » est remplacée par la référence : « L. 4163-2 ».

VI. – L’article L. 4163-4 du même code, tel qu’il résulte du III du présent article, est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, la référence : « L. 138-29 » est remplacée par la référence : « L. 4163-2 » ;

2° À la fin de la première phrase du premier alinéa et du second alinéa, la référence : « L. 138-30 » est remplacée par la référence : « L. 4163-3 ».

VII

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a introduit un certain nombre de dispositions censées prévenir la pénibilité que le présent projet de loi vise à compléter ou à modifier.

Nous nous réjouissons que, pour la première fois, cette question soit traitée de façon que la loi favorise réellement la négociation sociale en rendant plus complexe la mise en œuvre d’un plan d’action unilatéral. C’est positif.

En effet, ces plans permettent aux employeurs de contourner le dialogue social dans l’entreprise et les placent en position d’être les seuls décideurs en la matière. Le plus souvent, ces plans méconnaissent les observations des salariés, pourtant les mieux à même de décrire leur réalité de travail. Au final, ces plans ne sont pas de nature à permettre la construction d’une démarche de prévention de la pénibilité qui repose, à l’inverse, sur une logique d’établissement de diagnostic et de propositions partagées.

En outre, parce qu’ils sont définis quasiment exclusivement par les employeurs, les plans d’action en matière de prévention de la pénibilité, comme ceux en faveur de l’égalité salariale, prévoient bien souvent la solution la moins coûteuse et non la plus protectrice.

Cela explique sans doute pourquoi le nombre de plans d’action mis en œuvre dans les entreprises est aujourd’hui supérieur au nombre d’accords : 53 % pour les premiers contre 47 % pour les seconds.

De plus, certains accords sont sans effets concrets sur la vie des salariés puisqu’il s’agit d’accords de méthodes « qui visent à cadrer la réalisation d’un futur accord ou plan d’action ».

On le voit, beaucoup reste encore à faire en la matière. Les dispositions prévues à l’alinéa 8 de cet article, prévoyant que la mise en œuvre d’un plan d’action ne sera possible qu’après échec de la négociation dûment attesté par un procès-verbal, constituent à notre avis une avancée.

Il nous semble toutefois opportun, afin de donner enfin et réellement la priorité à la négociation et à la signature d’accords entre employeurs et représentants des salariés, de prévoir une pénalité financière, à la charge des entreprises qui ne parviendraient pas à signer un accord.

De même, nous regrettons que ce projet de loi ne renforce pas les sanctions à l’égard des entreprises qui ne respecteraient pas leurs obligations légales. Aujourd’hui, la sanction peut théoriquement atteindre 1 % de la masse salariale. Ce n’est toutefois que rarement le cas dans les faits, l’autorité administrative conservant la possibilité de moduler cette sanction.

En conséquence, malgré les avancées contenues dans cet article, le groupe CRC s’abstiendra.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je m’inscris dans la continuité de l’intervention de mon collègue.

Les mutations techniques et technologiques entraînent une évolution des conditions de travail des salariés. Si cette évolution s’accompagne dans bien des cas d’une amélioration notable de la réalisation de l’activité professionnelle, elle peut également entraîner pour les salariés une plus grande exposition à des facteurs de risques, certains persistant tandis que d’autres apparaissent.

La pénibilité affecte les conditions de travail des salariés, ce qui peut réduire non seulement la productivité de ces derniers, mais surtout leur espérance de vie en bonne santé. Compte tenu des conséquences économiques, sociologiques et humaines, il s’agit d’un véritable enjeu de société.

En effet, 35 % des travailleurs âgés de cinquante à cinquante-neuf ans ont déclaré avoir été exposés pendant quinze ans ou plus à un poste pénible. La revue Santé et Travail soulignait ainsi, dans son édition de juillet 2011 : « Parmi eux, 24 % connaissent des limites dans leur vie quotidienne en raison de problèmes de santé, contre 17 % des autres seniors ».

Ces données ne sont pas nouvelles. Elles résultent de l’enquête « Santé et itinéraire professionnel », commandée et réalisée par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, dont les conclusions, étonnamment tardives, n’ont malheureusement pu être pleinement exploitées par les parlementaires en 2010.

Alors qu’en 2010 la réforme menée par Éric Woerth et François Fillon entendait réduire la pénibilité à une question médicale et individuelle, vous avez pour votre part fait un choix différent, ce que nous considérons comme positif.

Toutefois, comme le soulignent la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, la FNATH, et l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante, l’ANDEVA, vous auriez pu aller plus loin dans l’analyse, et nous regrettons que tel n’ait pas été le cas.

En effet, vous auriez pu profiter de l’occasion qui vous était donnée par l’examen du présent texte pour permettre à tous les salariés de bénéficier d’une protection supplémentaire en matière de pénibilité. Nous en avons d’ailleurs parlé hier soir tardivement.

Tel ne sera pas le cas puisque seules les entreprises d’au moins cinquante salariés, dont plus de 50 % des effectifs sont exposés à un ou plusieurs risques professionnels, seront soumises à l’obligation de négocier des accords ou des plans d’action relatifs à la prévention de la pénibilité. Ainsi, les salariés des entreprises de moins de cinquante salariés sont une nouvelle fois exclus du système de prévention.

Pourtant, un dispositif reposant sur les délégués du personnel voire, comme il en a été question hier soir, les conseillers du salarié aurait tout à fait pu être envisagé. Les dispositions de l’article auraient ainsi pu être étendues aux entreprises de dix à cinquante salariés.

Au final, les salariés des petites entreprises sont doublement perdants : ils ne peuvent compter ni sur la présence de représentants du personnel ni sur un CHSCT pour veiller au respect de leurs droits en matière de santé et d’hygiène au travail ; en outre, ils ne peuvent bénéficier d’aucun accord relatif à la prévention. Pourtant, les salariés des petites entreprises ne sont pas moins exposés à la pénibilité que ceux des grandes et moyennes entreprises.

De plus, aucune mesure n’est prise pour inciter à la signature d’accord de branche étendu. Les résultats sont pourtant, là encore, loin d’être satisfaisants. Si je m’en réfère à l’étude d’impact, on ne dénombrait au 31 août 2013 que quinze accords de branche. C’est dire le retard pris. Or, rien dans cet article n’est de nature à nous faire penser qu’une amélioration de la situation est possible. C’est tout à fait regrettable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Deux de mes collègues étant déjà intervenus sur cet article, mon intervention sera brève. Elle prendra la forme de deux questions adressées à M. le ministre du travail, questions auxquelles je ne doute pas que vous pourrez apporter des réponses, madame la ministre.

Cet article 8, si j’ai bien compris sa rédaction quelque peu complexe, tend à modifier les modalités de calcul de la proportion de salariés d’une entreprise exposés à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels.

Désormais, une entreprise sera soumise à cette obligation si 50 % de ses effectifs dépassent le seuil d’exposition à la pénibilité. Cette mesure contribue à l’objectivation des risques.

Cependant, dans la mesure où ces seuils devront être définis par décret, il nous sera impossible de connaître l’évolution du nombre d’entreprises soumises à cette obligation

La consultation nous paraît un minimum puisque la détermination des seuils n’est pas une chose aisée : elle fait en effet l’objet d’importants contentieux. Ainsi, de plus en plus de juridictions saisies dans le cas de pathologies ou décès liés au travail ne font plus nécessairement référence à ces seuils. Par exemple, dans une décision faisant suite au décès d’un agent EDF intervenant dans une centrale nucléaire, la nature professionnelle du décès, suite à un cancer, a été reconnue bien que l’exposition de l’agent aux radiations ait été largement inférieure aux seuils admis.

Madame la ministre, pouvez-vous nous fournir davantage de précisions quant aux modalités de définition de ces seuils ? En outre, dans quel délai le décret interviendra-t-il ?

Enfin, madame la ministre, j’en viens à la question des sanctions prises à l’encontre des entreprises qui ne respecteraient pas l’obligation prévue à l’article 8. Le manque criant de contrôleurs et d’inspecteurs du travail rend impossible un contrôle satisfaisant. Récemment d’ailleurs, les organisations syndicales de contrôleurs et inspecteurs du travail ont dénoncé avec force le projet de réforme de l’inspection du travail que vous élaborez. Ils arguent que votre projet pourrait conduire à la création de sections spécialisées, alors que les inspecteurs sont aujourd’hui compétents sur un territoire et généralistes. Selon eux, une telle spécialisation risquerait de réduire les interventions dans d’autres champs.

Outre cette inquiétude de la part des professionnels, nous ne parvenons pas à mesurer l’impact de cette réforme sur la mission précise de contrôle des obligations légales en matière de pénibilité.

Madame la ministre, pouvez-vous nous préciser ce qu’il en est réellement ? Comment cette réforme permettra-t-elle de garantir l’indépendance des agents de contrôle, qui constitue une garantie pour les agents publics comme pour les salariés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Sur cet article 8, le groupe UMP n’a pas déposé d’amendement. Les dispositions de la loi de 2010 nous conviennent, et les dispositions de l’article 8 du projet de loi tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale ne nous posent pas de problème majeur.

Toutefois, madame la ministre, nous avons posé hier à votre collègue Mme Touraine une question à laquelle nous n’avons toujours pas de réponse.

Cette question, que vous a déjà posée Philippe Bas, est la suivante : en 1993, comme en 2003, en 2008 et en 2010, votre majorité, qui était alors dans l’opposition, a combattu tous les textes que nous avons proposés afin d’adapter nos régimes de retraite aux réalités économiques et démographiques du temps, mais quelles dispositions de ces textes supprimez-vous aujourd'hui ?

Puisque vous aviez dénoncé des textes scélérats comportant des mesures injustes, excessives, violentes, au service du grand capital buveur du sang des prolétaires, nous pensions que notre héritage serait dilapidé et notre construction législative saccagée, que nous serions sur la défensive, à devoir lutter pour les textes que nous avions mis en place, dont nous pensions, et dont nous pensons toujours, à juste titre, qu’ils étaient pertinents.

Or nous constatons que toute notre construction est prolongée et peut-être même consolidée. Cet article 8 – c'est la raison pour laquelle je m’exprime à son sujet – en est une belle illustration. Il introduit en effet le procès-verbal de désaccord. Je le dis tout net, c’est un enrichissement de ce que nous avions proposé. Mais si nous n’avions pas d'abord institué les formules de l’accord d’entreprise et du plan unilatéral, il n’y aurait pas d’article 8 aujourd'hui. Vous consolidez le dispositif que nous avons adopté en 2010, en introduisant un élément qui n’est en rien choquant : le constat de désaccord.

Je renouvelle donc la question de Philippe Bas : diable, ou plutôt non, pas diable, puisque le diable se niche dans les détails et que je vous interroge sur l’essentiel, qu’avez-vous supprimé de ce que vous avez combattu pendant vingt ans ? La réponse est simple : rien, parce que nous étions dans la bonne direction !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 409, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 4

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – La section 2 du chapitre 8 ter du titre 3 du livre Ier du même code est abrogée.

La parole est à Mme la rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

L’article 8 est important, car il transfère les dispositions relatives aux accords en faveur de la prévention de la pénibilité du code de la sécurité sociale vers le code du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Non, ce n’est pas seulement symbolique. La loi de 2010 a établi un lien entre pénibilité et invalidité.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Le présent projet de loi a pour objectif de prévenir la pénibilité, et c'est pourquoi les dispositions relatives à la pénibilité doivent êtres transférées vers le code du travail. Vous le voyez, monsieur Longuet, les choses ont changé entre 2010 et 2013 !

L'amendement n° 409 est donc un amendement de coordination juridique qui vise à tirer les conséquences du transfert dont je viens de parler.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Je tiens à souligner à mon tour l’importante évolution que représente ce projet de loi. Désormais, la pénibilité est prise en compte en tant que telle, et non plus en lien avec l’invalidité. La confusion entre pénibilité et invalidité était d'ailleurs l’un des griefs principaux de l’opposition en 2010. Je crois que nous réalisons aujourd'hui un progrès, que nous pourrions qualifier de progrès de rupture, si cette expression était usuelle.

Je voudrais également répondre à Cécile Cukierman. Marisol Touraine a précisé hier que les seuils seraient fixés par décret et, surtout, après concertation des partenaires sociaux et avis du COR. Je ne peux que vous le confirmer, sans anticiper sur les résultats de la concertation, faute de quoi il ne s’agirait plus de concertation.

Quant à l’amendement n° 409, j’y suis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je voudrais confirmer notre approche bienveillante à l’égard de cet article. Néanmoins, j’ai encore un doute, qu’il vous serait aisé de lever, madame la ministre, en prenant un engagement précis au nom du Gouvernement.

Nous pouvons admettre que le désaccord sur les termes d’un éventuel accord en faveur de la prévention de la pénibilité soit consacré par un procès-verbal. Mais il faut que l’absence de ce procès-verbal ne puisse être opposée à un employeur qui aurait conduit de bonne foi des négociations qui n’auraient pas abouti à cause du refus des représentants des salariés.

Imaginez – le cas peut se présenter – que telle ou telle organisation syndicale refuse de signer le procès-verbal de désaccord. Comme il n’y aurait ni accord ni procès-verbal de désaccord, la pénalité pourrait être appliquée à l’employeur, même s’il a agi de bonne foi.

On ne peut tout de même pas imposer aux organisations syndicales de signer le procès-verbal de désaccord si elles ne le veulent pas. Dans le cas où des interlocuteurs sociaux refuseraient de signer le procès-verbal, faudra-t-il que l’employeur administre la preuve de leur mauvaise foi ou sera-ce à eux d’administrer la preuve de leur bonne foi ?

Autrement dit, je voudrais que l’on apporte davantage de sécurité juridique à nos entreprises. Mon vote, tant sur le présent amendement que sur l’article 8, dépendra de la réponse que le Gouvernement voudra bien nous donner pour nous rassurer et conforter le préjugé de bienveillance que Gérard Longuet a expliqué de manière précise.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 155, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Après le mot : « accord », la fin de cet alinéa est supprimée ;

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

L’article L. 138-29 du code de la sécurité sociale, qui est appelé à devenir l’article L. 4163-2 du code du travail, prévoit, à son deuxième alinéa, que les entreprises qui ne seraient pas couvertes par un accord ou un plan d’action relatif à la prévention de la pénibilité peuvent se voir imposer une pénalité financière correspondant au maximum à 1 % de leur masse salariale.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Dans les faits, cette sanction financière est tellement basse – nous ne partageons pas votre avis, monsieur Longuet – qu’elle n’incite pas fortement les employeurs à s’engager dans un réel processus de négociation sur la pénibilité. J’en veux pour preuve le fait que, selon un rapport du Conseil d’orientation des retraites, seulement onze branches ont conclu un accord ; qui plus est, pour deux d’entre elles, il ne s’agit que d’un accord de méthode qui ne contient aucune proposition concrète de lutte contre la pénibilité. Le rapport du COR soulignait donc clairement que le nombre d’accords conclus était faible.

Bien évidemment, les plans d’action sont plus nombreux, puisqu’ils représentent environ 55 % des mesures prises pour lutter contre la pénibilité, tandis que les accords n’en représentent que 45 %. Les plans d’action sont moins contraignants, plus souples et moins coûteux pour les employeurs. Pour autant, malgré cette faculté, toutes les entreprises ne se sont pas engagées dans la mise en œuvre de plans d’action.

C’est pourquoi il nous semble utile de renforcer les sanctions, en précisant que le taux de la pénalité peut atteindre 10 % ; « peut » et non pas « doit » : l’autorité administrative conserverait la possibilité de fixer le montant de la pénalité, dans une fourchette comprise entre 1 % et 10 %, en fonction des efforts réellement engagés par l’employeur pour se conformer au droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Cet amendement vise à accentuer les incitations à la signature d’accords d’entreprise sur la prévention de la pénibilité, en sanctionnant les éventuels plans d’action unilatéraux adoptés par les employeurs.

Le projet de loi s’y emploie déjà, en prévoyant qu’un plan d’action ne pourra être adopté qu’en cas d’échec de la négociation d’un accord entre les partenaires sociaux dans l’entreprise, attesté par un procès-verbal. Je rappelle que c’est déjà ce qui a été retenu en matière d’égalité professionnelle et pour le contrat de génération. Il semble difficile d’aller plus loin. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Le Gouvernement émet un avis défavorable, pour la même raison : la sanction proposée est disproportionnée.

J’en profite pour répondre à Philippe Bas.

Monsieur le sénateur, je vous invite à montrer à l’égard du ministère du travail la même bénévolence – je la salue – que vous montrez à l’égard de l’article 8. La démarche que vous avez évoquée existe déjà en matière d’égalité hommes-femmes. Quand l’employeur est à l’évidence de bonne foi, le ministère du travail, représenté par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, compétente, va dans son sens et le problème se résout.

Faisons confiance aux décisions de sagesse et de bienveillance du ministère du travail !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 158, présenté par Mme David, M. Watrin, Mmes Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au deuxième alinéa, le taux : « 1 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;

La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

La réforme des retraites de 2010 comportait des mesures relatives à la pénibilité au travail, avec notamment des sanctions en cas de manquement à la loi, mais nous attendons toujours certains décrets d’application.

En pratique, on constate que peu d’entreprises respectent cette disposition, qui, au final, n’est que très peu appliquée. Par la modification de cet alinéa, nous proposons donc de mettre en œuvre une politique volontariste et incitative en relevant le seuil des pénalités dues par les entreprises de 1 % à 10 %. Le taux de cette pénalité ainsi relevée devrait avoir pour effet d’inciter les entreprises concernées à mettre en place des dispositifs de protection de leurs salariés pour les soustraire, en partie au moins, à la pénibilité de leur métier. C’est une mesure indispensable si l’on veut atteindre les objectifs fixés.

À l’heure de la sous-déclaration massive des accidents du travail, de l’augmentation des maladies professionnelles – la lecture de l’annexe 1 du PLFSS pour 2013 nous permet de constater, pour la période 2004-2011, une augmentation de 35 %, soit environ 4 % en moyenne annuelle, du nombre de maladies professionnelles reconnues – et des suicides au travail, il y a urgence à mettre en œuvre une prévention de la pénibilité efficace.

Par cet amendement, nous proposons donc de porter la pénalité due par les employeurs dont l’entreprise ne serait pas couverte par un accord ou un plan d’action de 1 % à 10 % de la masse salariale. Nous souhaitons ainsi inciter fortement les entreprises à négocier un accord avec les représentants des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Les accords de prévention de la pénibilité sont un dispositif encore récent. Il faut donc laisser le temps aux entreprises et aux partenaires sociaux de s’approprier cette problématique nouvelle.

La pénalité de 1 % a un effet incitatif indéniable. L’augmenter en la multipliant par dix représenterait un mauvais signal, alors que l’évaluation des accords et plans d’action en vigueur n’est pas encore faite. À mon sens, une telle mesure serait excessive et prématurée. La commission a donc émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Même avis, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Soyez rassurés, je ne vais pas défendre l’amendement du groupe CRC.

Ah bon ? sur les travées du groupe CRC.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Avec beaucoup de sincérité, je voudrais juste plaindre le Gouvernement d’avoir de tels alliés. Mme Demontès, avec un sang-froid que je veux saluer, a eu des mots que nous partageons totalement. Elle est intervenue sans choquer, sans brutaliser, avec retenue et mesure, mais elle nous a quand même bien fait comprendre qu’elle devait faire avec une majorité à peu près impossible à animer et à rendre cohérente.

Cet hommage diplomatique rendu à l’impossible conciliation de l’ensemble des gauches est un événement réjouissant.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 160, présenté par Mme David, M. Watrin, Mmes Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le troisième alinéa est supprimé.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Pour notre groupe, la question des pénalités à la charge des employeurs qui n’auraient ni conclu d’accord en faveur de la prévention de la pénibilité ni même mis en œuvre de manière unilatérale un plan d’action est centrale. Nous le savons, le nombre d’employeurs qui ne respectent pas leurs obligations en la matière est élevé, puisque le nombre d’entreprises couvertes par un accord ou un plan d’action est nettement inférieur au nombre d’entreprises satisfaisant aux obligations légales.

L’étude d’impact est en la matière particulièrement éclairante : on y apprend que, malgré l’existence d’une pénalité pouvant correspondre à 1 % de la masse salariale des salariés exposés, seulement deux branches sont aujourd’hui couvertes par un tel accord et 4 800 accords d’entreprise ont été signés. C’est dire si la menace de la sanction n’est pas particulièrement dissuasive, et ce pour au moins deux raisons : les employeurs savent pertinemment que le risque que le non-respect de leurs obligations soit constaté lors d’un contrôle est réduit ; ils peuvent également compter sur la clémence de l’autorité administrative qui est habilitée à prononcer la pénalité, puisque cette dernière peut faire varier le taux.

Je regrette d’ailleurs que l’étude d’impact soit si lapidaire sur cette disposition, car il nous manque des informations précieuses. Nous aurions notamment aimé connaître, madame la ministre, mais peut-être pouvez-vous nous le dire aujourd’hui, le nombre d’entreprises qui ont fait l’objet de contrôle, le nombre d’entre elles qui ont été sanctionnées, ainsi que le niveau moyen des sanctions.

En tout état de cause, nous sommes opposés à ce que l’autorité administrative puisse faire évoluer cette pénalité à la baisse.

Permettez-moi un parallèle un peu audacieux en apparence, mais qui a sa logique, avec la loi SRU : en l’espèce, l’absence d’application stricte des règles conduit les communes à ne pas respecter pleinement leurs obligations. S’agissant de la réforme que nous examinons, l’article 8 en particulier, on voit mal pourquoi les mêmes causes ne produiraient pas les mêmes effets. La question est pourtant majeure, puisqu’il s’agit théoriquement de contraindre des employeurs, parfois réticents, à prendre des mesures de prévention et de compensation en cas de pénibilité professionnelle.

En la matière, nous croyons en la force de la sanction, qui doit avoir une visée pédagogique. C’est pourquoi nous proposons de supprimer le troisième alinéa de l’article L. 138-29 du code de la sécurité sociale, appelé à devenir l’article L. 4163-2 du code du travail, qui dispose que « le montant [de la pénalité] est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière de prévention de la pénibilité. »

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

La commission n’est pas favorable à cet amendement, estimant qu’il faut tenir compte des efforts faits par l’entreprise – il y en a qui en font – pour développer la prévention de la pénibilité. Néanmoins, si celle-ci se détourne totalement de ses obligations, il est évident que la pénalité sera bien de 1 % de la masse salariale, et non d’un montant inférieur.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Même avis.

J’en profite pour rappeler à M. Longuet, qui était tout à l’heure dans un moment d’euphorie, la très belle parabole de la paille et de la poutre…

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

La question qui nous est posée à travers cet amendement est de savoir si l’augmentation des pénalités permet d’avoir davantage d’effets sur la réalité. À l’évidence, cette problématique dépasse largement d’objet du présent projet de loi.

En tant que législateur – la législation portant sur la construction de logements sociaux par les communes a été évoquée –, nous sommes bien placés pour convenir que, face à des difficultés, nous sommes souvent tentés d’augmenter le quantum des peines et le niveau des pénalités. Or, à chaque fois que nous procédons ainsi, nous constatons que ceux qui sont en charge de prononcer ces sanctions se trouvent devant une responsabilité écrasante. En effet, plus la pénalité est forte, plus ses conséquences peuvent paraître disproportionnées par rapport à la situation qu’il convient de corriger par le mécanisme dissuasif de la sanction.

À l’instant, nous avons repoussé un amendement visant à multiplier par dix le montant des pénalités en cas d’absence d’accord de prévention de la pénibilité. À mon avis, s’engager dans ce type de démarche, qui revient à augmenter de 10 %, voire plus fortement, la masse salariale d’une entreprise est susceptible de mettre en péril son existence même. Or il y a pire que la pénibilité au travail : c’est le chômage !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il nous faut assumer nos responsabilités dans un monde réel qui n’est pas simple, ce qui doit nous conduire à faire des arbitrages entre des choix qui sont tous dignes d’être pris en considération. Mais si nous arbitrons en faveur de la sanction la plus lourde, au risque de porter atteinte à la pérennité de l’entreprise, nous risquons d’avoir à gérer des situations sociales extrêmement graves.

À l’occasion de ce débat, qui peut paraître mineur eu égard à l’objet de notre réforme, mais qui est en réalité très important, ressurgit la contradiction inhérente au discours de ceux qui veulent sans arrêt charger la barque, au point, non pas de tuer la poule aux œufs d’or, mais de mettre en péril l’activité économique de certaines entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Nous recherchons l’efficacité ; nous ne voulons pas mettre les entreprises à genoux !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il n’y a pas de pénalités si elles respectent la loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Aussi, je voudrais inciter nos collègues qui ont présenté cet amendement, comme le précédent, à plus de mesure face à la complexité des enjeux sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je suis d’accord avec M. Bas pour dire que ce débat fondamental dépasse le cadre du sujet que nous examinons.

Cela étant, j’ai le regret de constater que l’étude d’impact ne répond pas à toutes les questions que nous posons. Pourquoi seules deux branches sont-elles couvertes par un tel accord et pourquoi 4 800 accords d’entreprise seulement ont-ils été signés ? C’est dire que les entreprises qui ne respectent pas la loi bénéficient de l’impunité la plus totale. Lorsqu’on le constate, c’est aussitôt pour ajouter que, finalement, il n’y a rien à faire. En fait, on admet que la loi ne s’applique qu’aux plus faibles et aux plus fragiles.

Je ne sais pas si l’aggravation du montant de l’amende peut régler le problème. J’ai donné l’exemple de la loi SRU, mais je pourrais aussi évoquer les lois sur la parité. Dans ces derniers cas, des partis politiques – pas à gauche, mais je ne citerai personne ! – préfèrent de ne pas les respecter et payer des pénalités. En l’espèce, peut-être serait-il bon de réfléchir à des sanctions autres que financières, par exemple des peines d’inéligibilité ?

En tout cas, il est assez choquant d’entendre, ici, dans la Haute Assemblée, que, certes, c’est un problème que des entreprises ne respectent pas la loi, mais qu'il n’y a rien à y faire sinon on risque de les mettre en difficulté et de faire grimper le chômage. C’est un raisonnement qui, à mon sens, ne tient pas.

Nous ne demandons rien d’autre que l’application de la loi. Quand elle n’est pas respectée, il faut faire preuve d’un peu plus de fermeté. Tel est l’objet de notre amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je voudrais vous remercier, madame Delaunay de faire référence à cette culture judéo-chrétienne, qui est le socle, le creuset de notre vieux pays. À votre évocation de la parabole de la paille et de la poutre, je voudrais répondre par la parabole des talents ; c’est l’histoire d’un peuple qui, dix-huit mois après avoir élu un Président de la République à une majorité de 52 %, lui demande : « Qu’as-tu fait de mes 52 % de soutien ? Il n’en reste plus que 26 %... »

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je voudrais également répondre à Mme Cohen, car son intervention est importante.

Elle nous dit, au fond, que la crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse – je reste sur le terrain de la culture judéo-chrétienne. Mais dans un monde où les frontières sont ouvertes, avec une concurrence que nous avons les uns et les autres acceptée, qui est le Seigneur pour une entreprise ? Je vous le concède, madame le sénateur, le groupe CRC auquel vous appartenez n’a jamais été pour l’ouverture des frontières et la construction européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Ce grief s’adresse donc davantage à ceux qui, ayant accepté l’Europe et la globalisation, ne savent pas en tirer les conséquences.

Aujourd’hui, l’autorité de l’État est en concurrence avec la réalité de l’entreprise, qui est celle du marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il se trouve qu’étant l’élu d’une région industrielle et ayant exercé la coupable activité de ministre de l’industrie au siècle précédent, je pourrais, pour simplifier, dire que, dans le domaine que je connais, celui de l’industrie, dont je reconnais qu’il ne recouvre qu’une partie de l’activité française, il y a deux catégories d’entreprises : celles qui réussissent et celles qui sont sur la défensive.

Les entreprises qui réussissent – je pense à celles du secteur de l’aéronautique, de la pharmacie ou du luxe, par exemple – cherchent à investir sur les marchés qui se développent. Elles nous abandonnent, car leur devoir est de rester leaders mondiaux dans un marché mondialisé. Pour elles, l’autorité de l’État est une contrainte toute relative.

J’en viens à l’autre catégorie d’entreprises, celles qui recouvrent les industries de main-d’œuvre, celles qui fabriquent des biens de consommation courants, les secteurs du textile, de la confection, du meuble, de l’automobile, par exemple. Quand j’étais gamin, personne n’aurait pu croire que la forteresse ouvrière de Billancourt cesserait d’exister. Aujourd’hui, l’industrie automobile française produit plus de voitures françaises à l’étranger qu’en France !

Qui représente l’autorité pour ces entreprises sur la défensive ? Est-ce le Gouvernement qui les charge de contraintes ou est-ce le client qui se détourne d’elles pour acheter à des constructeurs meilleur marché ? La réponse va de soi : pour elles, c’est le client qui commande. Vous pouvez multiplier par dix le risque de pénalité, leur problème, c’est la survie.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Pas au détriment de la santé des travailleurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

C’est la raison pour laquelle votre menace est un sabre de bois. Mme Demontès a eu raison de vous le rappeler.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

On ne va pas exploiter les gens parce que ça coûte trop cher !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je souhaite simplement, pour expliquer mon vote négatif sur votre amendement, rappeler – comme l’a dit Philippe Bas – que la meilleure manière de défendre le salarié, c’est de garantir l’emploi grâce à des investissements productifs réalisés par des entreprises qui réussissent sur leur marché et non d’accumuler des contraintes, que l’État s’épargne d’ailleurs à lui-même. Je vous le rappelle, toutes ces mesures visent le seul secteur privé et excluent le secteur public, ce qui pose tout de même un problème d’égalité. Mme Delaunay va certainement nous trouver une parabole pour justifier cette distinction…

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Nous ne sommes pas ici pour donner un cours de politique, monsieur Longuet, mais, en ce qui concerne la position de mon groupe sur l’Europe, vous devriez réviser vos classiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Nous sommes pour l’Europe, mais pas celle que vous défendez. Nous, nous sommes pour une Europe des peuples. Nous ne voulons pas d’une Europe forteresse avec des barbelés autour de ses frontières pour empêcher quiconque qui ne serait pas Européen d’y entrer. Nous sommes pour une Europe de la solidarité, qui permette à chaque peuple d’avoir des conditions de vie et de travail au moins égales à celles que nous avons réussi à obtenir dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C’est la raison pour laquelle nous nous battons pour construire non pas une Europe revue à la baisse, mais une Europe solidaire !

Quant à cette pénalité, elle ne s’appliquera qu’aux entreprises qui ne respectent pas la loi. Le législateur que vous êtes souhaite-t-il que les lois que nous votons ici ne soient pas respectées par les entreprises ? Pour notre part, nous demandons que la loi s’applique. Or, on le sait, aujourd’hui, même la pénalité de 1 % n’est pas appliquée. Ce sont les inspecteurs des DIRECCTE qui apprécient si l’entreprise a fait un effort. S’il apparaît que c’est le cas, on lui fera grâce de la pénalité !

Mais de quel effort s’agit-il ? D’une décision unilatérale de l’entreprise, faute d’accord avec les organisations syndicales ? On peut imaginer que si les représentants des salariés ont refusé de signer l’accord proposé par l’entreprise, c’est parce que celui-ci ne répondait pas aux besoins de prévention de la pénibilité.

Ne vous inquiétez pas, je pense que les 10 % de pénalité que nous demandons ne s’appliqueront jamais… Mais, pour nous, cet amendement a une portée symbolique.

Vous réclamez des investissements productifs au nom de la survie de l’entreprise, mais on ne peut pas le faire, comme d’autres l’ont dit avant moi avec justesse, au détriment de la santé des salariés. Lorsqu’il n’y aura plus de salariés en mesure de travailler parce qu’ils auront tous été maltraités par ces entreprises qui ne respectent pas les accords de pénibilité, je ne sais pas ce qu’ils pourront produire.

Ne dégradons pas la sécurité et la santé des salariés sous prétexte de compétitivité. C’est aussi ce que nous dénonçons au travers des conditions de travail au sein de l’Europe.

Vous êtes bien loin de ces considérations lorsqu’on voit ce qui a été fait, par exemple, avec les travailleurs détachés et ce qui continue à se faire malgré tout ce que nous pouvons dénoncer.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le dumping social, en effet, mais aussi les délocalisations auxquelles vous n’avez jamais tenté de mettre un frein, soucieux que vous êtes d’accroître la compétitivité des entreprises. Eh bien oui, elles deviennent compétitives, mais au sens où vous l’entendez ! Pour nous, la compétitivité doit aussi passer par le respect des conditions de travail des salariés.

Pour toutes ces raisons, nous voterons cet amendement.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 156, présenté par Mme David, M. Watrin, Mmes Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

2° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « un plan d’action établi au niveau de l’entreprise ou du groupe relatif à la prévention de la pénibilité dont le contenu est conforme à celui mentionné à l’article L. 138-30 » sont supprimés ;

3° Les deuxième et troisième phrases du premier alinéa sont supprimées.

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Cet amendement vise à favoriser la négociation et l’élaboration d’un accord de prévention de la pénibilité entre les salariés et l’employeur au sein des entreprises

Le bilan d’application démontre que les entreprises ont majoritairement recours au plan d’action. Or ces mêmes bilans démontrent que le contenu des plans d’action est plus faible que celui des accords. Il convient donc, dans le prolongement de ce qui a été dit précédemment et de la volonté affichée par le Gouvernement, de mettre en place des dispositifs plus contraignants qui incitent au dialogue social.

Nous proposons, pour notre part, que la pénalité s’applique à l’ensemble des entreprises ne disposant pas d’un accord de prévention de la pénibilité. La loi permet une modulation de cette pénalité en fonction des efforts effectués par l’entreprise. Cela doit permettre de moins pénaliser celles qui disposent d’un plan d’action par rapport aux entreprises qui ne disposent d’aucun dispositif. On peut donc tout à fait assurer une certaine forme de justice.

Le montant de la pénalité applicable serait fixé par l’autorité administrative en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière de prévention de la pénibilité.

Par cet amendement, nous proposons donc une modulation de cette pénalité sur le modèle de ce qui est prévu en matière d’égalité entre les femmes et les hommes ou encore en matière d’emploi des personnes handicapées. Nous proposons que la pénalité s’applique bien à l’ensemble des entreprises ne disposant pas d’un accord de prévention de la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 157, présenté par Mme David, M. Watrin, Mmes Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

3° À la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « trois ans » sont remplacés par les mots : « un an ».

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Cet amendement porte sur la modification de la durée d’application du plan d’action de trois ans à un an.

L’article 8 prévoit une pénalité pour les entreprises et groupes qui ne seront pas couverts par un accord ou un plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité au travail.

Ce dispositif impose donc aux entreprises l’élaboration d’un accord de prévention de la pénibilité en concertation avec les représentants des salariés. À défaut, en l’absence d’accord, il exige la mise en œuvre d’un plan d’action à durée déterminée de trois ans maximum.

Or nous savons que le plan d’action peut être décidé de façon unilatérale par l’employeur en l’absence d’accord. Nous pensons que la concertation et la négociation collective sont primordiales à l’élaboration d’un bon diagnostic pénibilité et à la mise en œuvre d’un plan d’action de prévention cohérent et pérenne.

Nous devons favoriser une politique volontariste de réduction de la pénibilité pour qu’émergent des principes, démarches et méthodes valorisant des pratiques de travail préservant la santé des travailleurs. Aussi cet amendement tend-il à établir une distinction entre le plan d’action et l’accord en prévoyant que la durée du plan d’action est d’un an, ce qui incitera à la renégociation collective annuelle, contre trois ans pour les accords. En effet, dès lors qu’il n’y a pas d’accord et que le plan a été négocié unilatéralement, nous pensons qu’il serait dommageable et dangereux de s’engager sur une durée plus longue qu’un an.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

L’objet de l’amendement n° 156 est le même que celui de l’amendement n° 155, que nous avons déjà examiné. Il s’agit en effet d’appliquer une pénalité aux entreprises couvertes par un plan d’action unilatéral relatif à la prévention de la pénibilité. Pour les mêmes raisons que précédemment, la commission a émis un avis défavorable.

L’amendement n° 157 vise à réduire de trois à un an la durée de validité des plans d’action relatifs à la prévention de la pénibilité. Or je ne crois pas qu’il faille distinguer, en ce qui concerne leur périodicité, les accords et les plans d’action relatifs à la prévention de la pénibilité. Leur thème et leur contenu sont identiques, et il n’est absolument pas garanti qu’une négociation qui a échoué soit couronnée de succès moins d’un an plus tard.

Pour cette raison, tout en comprenant les remarques faites par les auteurs de l’amendement, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Même avis, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote sur l’amendement n° 156.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Les points de vue énoncés par Mme le rapporteur, comme par Mme la ministre, sont réalistes. J’admets tout à fait que, face à un certain nombre de surenchères, le Gouvernement puisse signifier à une partie de sa majorité qu’il y a un moment où le principe de réalité doit l’emporter sur les idéaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ces idéaux, les différents groupes de la majorité actuelle les partagent sans doute, mais ils doivent savoir qu’il faut chercher à les atteindre en prenant la mesure de ce qui est possible et de ce qui ne l’est pas.

En l’occurrence, il me semble que ces deux amendements servent d’accroche à un discours politique plus qu’ils ne sont véritablement destinés à être adoptés. En effet, leurs auteurs doivent se rendre compte eux-mêmes des effets pervers très importants que leur application pourrait comporter.

En fait, il y a trois types de situation et, pour le deuxième type, une variante. Je les reprends un à un.

Quelle est la situation la plus favorable, celle que nous recherchons tous ? C’est l’accord des partenaires sociaux dans l’entreprise, et ce, non parce que nous aurions une vision irénique de la vie des entreprises, laquelle nous ferait préférer systématiquement l’accord à toute décision unilatérale, mais parce que l’accord est plus efficace, permet d’entendre tous les points de vue et de prendre en considération ce qui vient de la base, c’est-à-dire de ceux qui sont exposés à la pénibilité et, éventuellement, aux risques professionnels. Il y a toute chance, par conséquent, qu’un accord conclu avec les représentants des salariés permette de mettre en œuvre des pratiques de prévention des risques et de diminution de la pénibilité bien supérieures à ce que l’on pourrait obtenir par la voie d’une décision unilatérale. Nous sommes d’accord sur ce point.

Il arrive malheureusement, et c’est le deuxième type de situation, que des désaccords de fond subsistent, soit parce que les points de vue sont inconciliables, compte tenu de la conjoncture propre à l’entreprise, soit parce que certaines organisations, pour des raisons de tactique de négociation, refusent par avance la conclusion d’un accord.

Cette situation connaît deux variantes : le désaccord de bonne foi, d’une part, et le désaccord qui ne donne pas lieu à conclusion d’un procès-verbal en raison de la mauvaise foi de l’un des partenaires, d’autre part. Quel que soit le cas, une pénalité sera ou ne sera pas prononcée.

Si nous ne prévoyons pas que le désaccord doit se résoudre par la mise en œuvre d’un plan unilatéral, nous ne pourrons pas progresser dans la lutte contre la pénibilité. Il est en effet hautement préférable d’avoir un plan unilatéral mis en œuvre par l’employeur que pas de plan du tout.

Je ne comprends pas cette politique du pire que reflètent ces amendements et qui consiste à miser tout sur la pénalité et rien sur le plan de prévention des risques unilatéral que mettrait en œuvre l’employeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

C’est postuler que l’employeur est toujours de mauvaise foi et que son plan sera toujours mauvais.

Ce plan, je vous l’accorde, sera sans doute moins bon qu’un plan qui résulterait d’un accord. Mais pourquoi partir du principe que mieux vaut pas de plan et des pénalités que pas de pénalités et un plan ? Faisons un peu confiance à nos chefs d’entreprise !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Vous n’avez pas le sentiment d’exagérer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. ... mais aussi confrontées à la complexité croissante des règles qui leur sont appliquées. Et voilà que vous ajoutez à cette défiance, en affirmant qu’aucune de ces entreprises ne serait capable de concevoir et de mettre en œuvre, de bonne foi, un plan de prévention des risques professionnels digne de ce nom !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

On ne peut pas rester sans réagir après cette intervention. Quelle caricature ! Vous nous faites dire des choses complètement fausses, monsieur Bas.

Bien évidemment que la situation la plus favorable est celle qui résulte d’un accord sur la pénibilité. C’est le seul élément de votre intervention sur lequel je partage votre point de vue. Nous aussi, nous préférons qu’un accord soit recherché et signé par l’employeur et les représentants élus par le personnel, ou bien par des représentants extérieurs mandatés dans le cas où il n’y aurait pas d’organisation syndicale dans l’entreprise.

Vous nous mettez en garde contre l’attitude de certaines organisations de salariés, qui viendraient à la table des négociations avec la volonté préconçue de ne pas signer l’accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous nous demandez également de faire confiance aux patrons. J’ai envie de vous répondre : faites confiance aux organisations syndicales de salariés !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Tout à fait, aux deux !

Pour notre part, nous demandons que, l’année suivant la mise en place d’un plan unilatéral de prévention des risques à la suite d’un constat de désaccord, on enjoigne aux partenaires en présence, c’est-à-dire à l’employeur et aux représentants des salariés, de revenir à la table des négociations pour aboutir enfin à un accord.

Nous en convenons tous, l’accord est la solution la plus favorable pour tout le monde : pour l’employeur, parce qu’il évite ainsi le paiement d’une pénalité ; pour les salariés, qui bénéficieront de meilleures conditions de travail, l’entreprise ayant pris des mesures pour lutter contre la pénibilité. Car le sujet qui nous occupe, monsieur Bas, c’est la pénibilité des conditions de travail des salariés dans l’entreprise !

Pensez-vous vraiment que des organisations syndicales mandatées par les salariés vont venir à la table des négociations en ayant décidé au préalable de ne pas signer l’accord dans le but que l’entreprise paie une pénalité ? Pensez-vous qu’elles se moquent à ce point des conditions de travail des salariés ? Non, cela ne marche pas comme cela dans les organisations syndicales ! Les représentants des personnels consultent les salariés et travaillent en concertation avec eux au sein de l’entreprise. Ils connaissent donc les mêmes conditions de travail que ceux au nom desquels ils négocient ce fameux accord.

Alors oui, faisons confiance au dialogue social dans nos entreprises et aux représentants des salariés pour proposer, lors de ces négociations, de vraies mesures de lutte contre la pénibilité ! Ces délégués sont tout de même les mieux placés pour connaître les conditions de travail auxquelles ils sont soumis au quotidien.

Vous nous faites parfois passer pour des utopistes qui ne connaissent rien à l’entreprise et qui se battent seulement pour des idéaux.

Oui, nous avons des valeurs, des idées, et elles sont tout aussi respectables que les vôtres ! Nos amendements ne sont pas des prétextes pour défendre je ne sais quelles postures idéologiques. Ces amendements, que mon groupe rédige et présente avec conviction, traduisent les propos de ceux qui nous ont fait confiance en nous permettant de les représenter dans cet hémicycle. C’est leur voix, que l’on n’entend jamais ailleurs, que nous avons envie de porter.

Oui, nous sommes favorables à des accords en faveur de la lutte contre la pénibilité des conditions de travail !

Oui, nous voulons que les entreprises qui ne respectent pas ces accords soient sanctionnées et que ces pénalités soient payées en vue d’abonder le fonds de pénibilité qui permettra, par la suite, de mettre en œuvre des mesures pour lutter contre la pénibilité !

Au XXIe siècle, dans la France de 2013, des salariés travaillent encore dans des conditions inacceptables.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Nous ne l’acceptons pas ! J’ai déjà évoqué le cas des travailleurs détachés ; je n’y reviens pas.

Ces amendements ont donc pour objet, je le répète, de faire entendre la voix de ces travailleurs qu’on n’entend nulle part ailleurs.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je suis particulièrement ému par le discours passionné de ma collègue Annie David, animé par son expérience de l’entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cette intervention me conduit à poser la question suivante à Mme la ministre : va-t-on créer des postes d’inspecteurs du travail ?

Dans l’opposition, nous déplorions une baisse de leur effectif. S’ajoute désormais à ce problème la nouvelle comptabilité des points de pénibilité, qui va compliquer la tâche, non des entreprises dotées d’un service des ressources humaines, mais des petites entreprises. Le recrutement d’inspecteurs du travail faciliterait cette réforme.

Deuxième réflexion que m’inspirent les propos de Mme David : le monde du travail est constitué non seulement de moyennes et grandes entreprises, au sein desquelles les salariés sont représentés par des délégués syndicaux, mais aussi de petites entreprises de sous-traitance employant des salariés à temps partiel qui font le sale boulot. Il ne s’agit plus là de négociation entre un patron et une organisation syndicale reconnue, mais d’une situation dans laquelle plusieurs petites entreprises, liées par un contrat de sous-traitance à un grand groupe, font travailler des gens dans des conditions très difficiles.

Pour aider les salariés de ces petites entreprises, qui subissent la pénibilité, la précarité et qui ont du mal à faire valoir leurs droits, il est nécessaire qu’existent des organisations syndicales, certes, mais aussi un corps administratif d’inspecteurs du travail qui puisse les épauler, les informer et effectuer des contrôles.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 159, présenté par Mme David, M. Watrin, Mmes Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 13

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le chapitre III du titre VI du livre Ier de la quatrième partie du code du travail, tel qu’il résulte du I est complété par un article ainsi rédigé :

« Art. L. 4163-5. – Trois mois avant l’échéance de l’accord ou du plan d’action mentionné à l’article L. 4163-2, l’entreprise transmet un bilan à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi ou aux délégués du personnel. Si les engagements n’ont pas été tenus, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi prononce une pénalité dans les conditions définies à l’article L. 4163-2. »

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Cet amendement vise à instaurer un dispositif d’évaluation des résultats sur les accords ou les plans d’action négociés, afin de prévenir la pénibilité dans les entreprises.

Si l’instauration d’une reconnaissance de la pénibilité au travail ne peut qu’être saluée, il convient toutefois d’en garantir l’application. Ainsi, à l’issue de l’évaluation, si les engagements pris par les entreprises n’ont pas été respectés, il appartiendra à l’autorité administrative compétente de prononcer une pénalité.

Le projet de loi tel que proposé permet aux entreprises d’appliquer ce texte a minima par le biais d’un plan d’action qui pourra être décidé de manière unilatérale, et donc sans concertation, par l’employeur.

En France, aujourd’hui, plus de la moitié des entreprises ne respecteraient pas leurs obligations de prévention. Selon un rapport de 2010 de la sécurité sociale portant sur l’année 2009, près d’un million d’accidents de travail – 3, 6 % des salariés – sont enregistrés annuellement et sont cause de plus de 500 décès.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Les maladies professionnelles, quant à elles, progressent de 8 % par rapport à l’année précédente, une tendance observée depuis dix ans.

Oui, l’exposition à des facteurs de pénibilité se traduit par des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les salariés ! On déplore ainsi chaque jour, dans notre pays, deux morts par accident du travail et plus de dix des suites d’une exposition à l’amiante.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Nous sommes face à une situation d’urgence sanitaire, absolument pas prise en compte, qui nécessite une politique volontariste.

Si cet article 8 relatif à l’accord et au plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité devait être adopté, pourquoi ne pas y préciser les modalités d’évaluation de ces actions spécifiques ? On ne peut pas, d’un côté, inciter les entreprises à définir des plans d’action pour lutter contre la pénibilité et, de l’autre, ne pas en évaluer les résultats. Cette situation n’est pas tenable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Par cet amendement, nous proposons donc d’inciter les entreprises à mettre en place une véritable politique de prévention de la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Par cet amendement, il s’agit de confier à la DIRECCTE le soin de contrôler l’exécution de l’accord ou du plan d’action relatif à la prévention de la pénibilité.

L’accord ou le plan d’action doit comporter des objectifs chiffrés, dont la réalisation est mesurée à leur échéance grâce à des indicateurs, lesquels sont communiqués annuellement au CHSCT. C’est donc aux partenaires sociaux présents au sein de l’entreprise de réagir lors de la renégociation de l’accord – ou, le cas échéant, du débat relatif au plan d’action – si les objectifs initiaux n’ont pas été atteints. Les services de l’État n’ont donc pas à intervenir. Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Défavorable, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

En cas d’accord, celui-ci est intégré dans le contrat de travail. Dès lors, le salarié doit pouvoir employer les recours de droit commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Sauf erreur de ma part, le contentieux naturel est celui de l’application des conventions collectives, dans la tradition de la loi du 11 février 1950.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur Longuet, tous les accords conclus au sein de l’entreprise, notamment les plans unilatéraux, ne sont pas intégrés dans le contrat de travail, qui lie simplement un employé à son employeur. Ce sont là deux choses différentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je songe par exemple aux dispositions relatives aux 35 heures. Le contrat de travail mentionne certes l’horaire, mais non l’accord en tant que tel. Je le répète, les accords relatifs à la pénibilité ne seront pas déclinés dans ce document.

Pour en revenir à ce que disait M. Bas il y a quelques instants, lorsqu’on se heurte à un désaccord, les organisations syndicales n’apposent pas leur signature au bas du procès-verbal. Dès lors, l’entreprise peut établir comme elle le souhaite le plan unilatéral qu’elle choisira ou non de mettre en œuvre. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement : bon nombre de plans peuvent être décidés unilatéralement par un employeur, mais si rien ne permet de les appliquer un tant soit peu par la suite, rien ne se fera dans l’entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Une fois n’est pas coutume, je souscris aux propos de Mme le rapporteur : si, lorsqu’un accord ou un plan d’action arrive à échéance, on constate que tous les engagements n’ont pas été tenus ou qu’ils ne l’ont été – plus vraisemblablement – que partiellement, c’est lors de la renégociation qu’il faut agir. Je ne suis donc pas favorable à cet amendement, qui tend à infliger des pénalités en cas de non-respect à l’échéance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il s’agit là d’une question délicate : faut-il ériger le juge ou bien l’inspecteur du travail en censeur ou en évaluateur de l’application des accords dont nous débattons ?

S’il s’agit du juge, lequel doit intervenir ? Seule une partie des accords collectifs peut être inscrite dans le contrat de travail, je l’entends bien. Toutefois, s’il s’agit d’un accord collectif portant sur la durée du travail ou sur l’évolution des salaires, certaines dispositions s’y incorporeront.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Si les engagements de l’employeur ne sont pas tenus, n’importe quel salarié pourra en revendiquer l’application devant les prud’hommes.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Mais il ne s’agira pas d’un contrat de travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Comme Mme David vient de le souligner à juste titre, une partie de l’accord collectif présente, dans ce cas, une dimension individuelle dont le salarié peut se prévaloir.

Parallèlement, en cas de violation de l’accord par le chef d’entreprise, le juge de l’accord de travail peut également être saisi par toute organisation syndicale.

Ainsi, si l’on se place dans la logique de la négociation, qui est justement celle que défendent nos collègues du groupe CRC et que nous défendons également, quoique d’une autre manière, il faut en tirer toutes les conséquences. Il faut considérer que, dans cette partie du droit du travail qui concerne la pénibilité, il n’y a pas lieu d’appliquer des règles différentes du droit commun. Dès lors, on se tourne vers le juge de droit commun.

Cela étant, les auteurs de cet amendement soulèvent la question suivante : ne vaut-il pas mieux se tourner vers l’inspecteur du travail que vers le juge ? C’est un vaste débat, qui a rebondi dans d’autres domaines du droit du travail au cours des vingt-cinq dernières années. Il s’agit, là aussi, d’une question délicate.

Je suis assez convaincu par les arguments donnés par Mme le rapporteur et approuvés par Mme la ministre, auxquelles je présente mes excuses à ce titre, car je ne voudrais pas que mon soutien leur paraisse trop encombrant auprès de leurs partenaires.

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Certes, si les engagements n’ont pas été tenus au terme du plan ou de l’accord, il s’agira là d’un élément majeur de la négociation, qui pourra conduire des organisations syndicales à refuser de conclure un nouvel accord et à exposer ainsi l’employeur à des pénalités. Néanmoins, cela ne prive en aucun cas les organisations syndicales et les représentants du personnel du droit à former un recours devant la juridiction compétente pour violation des engagements pris. Au reste, ce recours peut être formé à tout moment, si les organisations syndicales s’y jugent fondées pour avoir constaté, de leur point de vue, le non-respect de l’un des engagements.

Pour toutes ces raisons, et après avoir discuté de cette question avec mes collègues du groupe UMP – sans a priori négatif de principe concernant cette disposition –, nous ne pouvons que recommander le rejet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Pour la première fois, un projet de loi affiche comme objectif de prendre en compte les conséquences de la pénibilité du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Toutefois, le Gouvernement a choisi de présenter un texte de loi si complexe que son application pose question et qu’il laisse craindre un usage partiel de ces dispositions, notamment dans le cadre des négociations d’entreprise. En effet, si cette réforme des retraites introduit plusieurs dispositions dans les codes du travail et de la sécurité sociale au sujet de la pénibilité au travail, elle ne prévoit pas d’évaluer les résultats des plans d’action mis en place, alors que ceux-ci peuvent être décidés unilatéralement par l’employeur.

Pourtant, la pénibilité au travail est une réalité grandissante pour bon nombre de nos concitoyens. Je ne reviendrai pas sur les propos que j’ai développés en présentant cet amendement. Je souligne simplement que, dans son étude « Santé et travail des Franciliens » issue de l’exploitation régionale du baromètre santé 2010 de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, près de la moitié des actifs franciliens déclarent travailler dans des postures pénibles ou fatigantes.

L’exposition à des facteurs de risques professionnels engendrant des inégalités d’espérance de vie, elle nécessite la mise en place de dispositifs de prévention de la pénibilité. Évaluer ces actions spécifiques ne pourrait être que bénéfique aux salariés et aux entreprises. Ces dernières disposent notamment des outils de contrôle nécessaires à l’amélioration des dispositifs de prévention.

Il me semble important que les DIRECCTE soient chargées de ce dossier. En effet, elles peuvent jouer un rôle de modérateur et trouver ainsi toute leur place dans la lutte contre la pénibilité. C’est pourquoi, je le répète, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 8 est adopté.

I. – Après l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-17-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 161 -17 -4 . – L’âge prévu à l’article L. 161-17-2 est abaissé, à due concurrence du nombre de trimestres attribués au titre de la majoration de durée d’assurance prévue à l’article L. 351-6-1, dans des conditions et limites fixées par décret. »

II. – La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre V du livre III du même code est complétée par un article L. 351-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 351 -6 -1 . – I. – Les assurés titulaires d’un compte personnel de prévention de la pénibilité prévu à l’article L. 4162-2 du code du travail bénéficient, dans les conditions prévues à l’article L. 4162-4 du même code, d’une majoration de durée d’assurance.

« Cette majoration est accordée par le régime général de sécurité sociale.

« II. – La majoration prévue au I du présent article est utilisée pour la détermination du taux défini au deuxième alinéa de l’article L. 351-1.

« Les trimestres acquis au titre de cette majoration sont, en outre, réputés avoir donné lieu à cotisation pour le bénéfice des articles L. 351-1-1 et L. 634-3-2 du présent code, du II des articles L. 643-3 et L. 723-10-1 du même code, de l’article L. 732-18-1 du code rural et de la pêche maritime et de l’article L. 25 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite. »

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

En 2010, Nicolas Sarkozy, qui savait que sa réforme des retraites était contestée dans la rue, a voulu donner l’illusion de prendre en compte les besoins spécifiques des salariés exposés à des facteurs de risques. Ainsi, il a permis à certains d’entre eux, sous certaines conditions, d’obtenir une retraite « anticipée » à sa manière. En effet, cette disposition permettait à de très rares bénéficiaires de partir à la retraite à soixante ans, c’est-à-dire l’âge légal, avant qu’il ne le repousse. En définitive, par l’accumulation des règles et des restrictions, cette demi-mesure n’a totalisé que 5 000 bénéficiaires, quand elle aurait pu, théoriquement, en compter 30 000.

En la matière, le présent texte constitue indéniablement une amélioration. Il va également plus loin que les recommandations formulées au titre du rapport Moreau, qui ne prévoyait que la possibilité d’accorder aux salariés le droit de racheter des trimestres manquants, autrement dit d’éviter des périodes sans cotisations et non de garantir un droit à la retraite anticipée. Désormais, cette possibilité sera ouverte : les assurés pourront utiliser les points qu’ils auront cumulés du fait de leur exposition à des facteurs de risques, à la fois pour avancer leur âge de départ à la retraite à due concurrence du nombre de trimestres attribués grâce au compte et pour bénéficier d’une majoration de trimestres attribués par la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV.

Nous sommes, de prime abord, sensibles à cette approche, qui constitue le second volet du présent projet de loi en matière de pénibilité. Les précédents articles organisaient la prévention. Celui-ci, pour sa part, organise la réparation. Or c’était là la pierre d’achoppement avec le patronat, lequel refusait d’admettre que le travail pouvait être à l’origine d’une dégradation précipitée de l’espérance de vie et de l’espérance de vie en bonne santé. Visiblement, le MEDEF n’a pas pris connaissance des études statistiques démontrant que les conditions de travail des salariés sont en grande partie responsables des écarts observés en la matière : sept ans d’espérance de vie séparent, en moyenne, un cadre et un ouvrier, au détriment du second, bien entendu.

Néanmoins, cette faculté est strictement encadrée. Au mieux – c’est-à-dire en cas d’application complète du dispositif –, un salarié exposé pendant toute sa carrière à deux facteurs de risques ou plus ne pourra prétendre qu’à un départ à la retraite anticipé de deux ans. Ainsi, il pourra prendre sa retraite à soixante ans.

Paradoxe, alors que le Gouvernement souhaitait se démarquer de la réforme de 2010, in fine seuls les salariés qui sont exposés à des travaux pénibles et qui bénéficient du dispositif de carrière longue pourront prétendre à un départ à soixante ans.

Je reconnais que le dispositif proposé s’adresse potentiellement à un plus grand nombre de salariés que le système mis en place par M. Woerth. Certains éléments ne nous laissent pas moins dubitatifs.

Ainsi, pourquoi avoir renoncé à attribuer des points à titre rétroactif ? Il est certes nécessaire d’attendre l’élaboration d’une liste pour certains facteurs nouveaux, mais une fois ce document établi, pourquoi ne pas accorder des points au titre des expositions passées, sur la base même du contrat de travail ?

J’ai bien entendu l’argument selon lequel les fiches prévues à l’article 6 n’existant pas – même si cet article va certainement ressusciter à l’Assemblée nationale – et les fiches prévues par la loi de 2010 n’ayant pas été remplies, il serait difficile d’évaluer le degré ou la réalité de l’exposition du salarié à un ou plusieurs facteurs de risques.

Il est certaines professions où le travail est par essence pénible. Les ouvriers du BTP, qui réalisent des travaux en extérieur, été comme hiver, qui portent de lourdes charges et qui sont appelés à travailler en hauteur sont, personne ne le niera, exposés à des facteurs de risques.

De la même manière, est-il vraiment nécessaire d’attendre les nouvelles fiches pour mesurer l’exposition à des facteurs de risques de salariés au contact de substances chimiques dangereuses qui font l’objet de déclaration depuis des années, alors que, depuis le 7 mars 2008, l’article R. 4412-40 du code du travail dispose que « l’employeur tient une liste actualisée des travailleurs exposés aux agents chimiques dangereux très toxiques, toxiques, nocifs, corrosifs, irritants, sensibilisants, cancérogènes, mutagènes et toxiques de catégorie 3 pour la reproduction ainsi qu’aux agents cancérogènes mutagènes et toxiques pour la reproduction définis à l’article R. 4412-60. Cette liste précise la nature de l’exposition, sa durée ainsi que son degré, tel qu’il est connu par les résultats des contrôles réalisés ».

Pourquoi donc ne pas permettre aux salariés exposés à trois ou quatre facteurs de risques de cumuler plus de points que celles et ceux de leurs collègues qui ne sont exposés qu’à deux de ces facteurs ? Il est pourtant évident que plus les facteurs sont nombreux, plus les sources d’exposition sont diversifiées, plus les salariés sont fragilisés et encourent le risque de contracter de multiples maladies professionnelles, notamment à effets différés. Pourquoi, dès lors, ne pas avoir accordé plus de points aux salariés dont l’exposition a été plus longue ?

À notre grand regret, le départ à la retraite à soixante ans en cas de travaux pénibles, que nous défendions ensemble, n’est toujours pas possible. Tout nous porte à croire que les conditions limitatives que vous avez introduites ont été conçues de telle sorte que le symbole d’un départ à la retraite à taux plein avant soixante ans ne puisse être concrétisé. En raison de quoi, le groupe CRC s’abstiendra sur cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

L’article 9 n’a pas été adopté en commission. Mme Pasquet vient d’expliquer les raisons du groupe CRC ; quant à nous, nous avons repoussé cet article, parce que nous ne comprenons pas sa logique dans le temps : il permet d’utiliser les points du compte personnel de prévention de la pénibilité, le CPPP, pour des départs anticipés, mais il apparaît difficile pour un non-spécialiste de comprendre exactement ce qui sera possible.

Je me prends à penser, madame le ministre, que cette opacité est volontaire, car elle constitue la seule réponse que vous pouvez livrer à l’opinion compte tenu des contradictions dont vous êtes porteurs depuis 2003 et qui ont été renouvelées tout au long de la campagne présidentielle de 2012, contradictions dont vous ne parvenez pas à sortir.

Je le répète, vous avez condamné notre réforme de 2003, la réforme des régimes spéciaux de 2008, la réforme de 2010, en particulier le fait de porter à soixante-deux ans l’âge de la retraite à taux plein du régime général par répartition. Aujourd’hui, vous êtes contraints de sortir de cette impasse. À travers la confusion introduite avec le CPPP, vous donnez à croire qu’avec un peu de chance il sera possible d’échapper aux mesures que vous condamniez hier, qui, nous le savons, constituent, hormis pour les carrières longues, une nécessité absolue.

Vous remplacez en cet instant au banc Mme Marisol Touraine, c’est le droit du Gouvernement de s’organiser comme il l’entend, mais j’aurais pourtant aimé que Mme la ministre de la santé entende mon rappel de ses déclarations de novembre 2011, tenues au cours d’un débat sur internet.

Un internaute lui posait la question suivante : « Pouvez-vous nous confirmer que, en cas de victoire du PS en 2012, vous reviendrez sur l’âge de la retraite de façon objective, équitable et en toute transparence ? »

À cette question claire et légitime, la réponse fut plus obscure : « La question des âges est évidemment essentielle. » Jusque-là, c’est banal ! « Nous disons clairement » – il faut toujours se méfier des gens qui parlent clairement ou franchement – « que nous reviendrons à l’âge légal de départ en retraite à 60 ans. » Voilà qui est dit !

« Qu’est-ce que cela veut dire ? » Le « clairement » est là rendu plus complexe, afin de s’assurer que l’on ne répond pas : « Cela veut dire que l’on pourra partir en retraite à 60 ans comme c’est le cas aujourd’hui. On pourra le faire à taux plein si on a toutes ses annuités, » – le discours commence à déraper…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

… puisque l’on sait que les annuités ne seront pas remises en cause et que l’âge d’accès au travail est de l’ordre de vingt-trois ans en moyenne dans notre pays – « sinon il faudra travailler au-delà ou bien partir avec une moindre retraite. Mais contrairement à ce que dit la droite, ça n’est pas un recul puisque c’est très exactement la situation actuelle. Donc oui, nous sommes transparents : l’âge légal de départ en retraite reviendra à 60 ans et l’âge légal de départ sans décote à 65. »

Mes chers collègues, vous êtes prisonniers de cet engagement, qui, vous le saviez, était intenable au moment même où vous le contractiez. Vous n’êtes pas revenus sur l’âge de soixante-deux ans, ce dont je vous remercie sinon c’eût été une véritable catastrophe pour le pays, et vous vous ménagez une porte de sortie, ou plutôt une sorte de soupape de sûreté afin d’éviter que la marmite n’explose, avec le CPPP. Malgré la complexité évidente de ce dispositif, vous laissez entendre que des choses seront possibles, mais nous ne savons pas exactement comment.

Une majorité s’est constituée en commission pour repousser cet article. Pourtant, chacun avait des raisons différentes : les uns demandaient le retour à soixante ans et moins, les autres exigeaient le maintien à soixante-deux ans. Mais vous n’avez pas voulu répondre. Vous avez donc été victimes de cette équivoque.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Dès lors que l’on veut traiter de la pénibilité, cet article nous apparaît nécessaire. Nous ferons donc abstraction de la suppression de l’article 6.

L’article 9 vise à préciser les effets de la majoration de la durée d’assurance attribuée à un salarié au titre des points accumulés sur le compte de prévention de la pénibilité. Quel dommage que vous ne soyez pas convaincus par la nécessité de passer à un régime par points !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

C’eût été d’une simplicité biblique, sans référence aucune…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Assumons notre héritage, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je l’assume, mais, en l’occurrence, je ne cherchais pas à m’y référer.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je veux simplement dire qu’il aurait été beaucoup plus simple d’instaurer un tel système, parce qu’il aurait suffi de bonifier les points sur le compte de chaque travailleur exposé à la pénibilité.

Le dispositif proposé ici vise à transformer les trimestres en cotisation pour pouvoir donner cette bonification. Comme nous sommes tout à fait d’accord avec le principe, nous ne nous opposerons pas à cet article.

L'article 9 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Ainsi, le Sénat aura quelque chose à proposer en commission mixte paritaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 279, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans l’année suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant les possibilités de rationalisation des différents régimes de cessation anticipée d’activité dans le sens d’une mise en cohérence avec le dispositif du compte personnel de prévention de la pénibilité.

La parole est à Mme Catherine Deroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Cet amendement vise à demander au Gouvernement la remise d’un rapport qui étudierait les possibilités de rationalisation des différents régimes de cessation anticipée d’activité.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Il existe aujourd’hui plusieurs dispositifs de cessation anticipée d’activité : invalidité, inaptitude, exposition à l’amiante, ce dernier régime étant financé par le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA. Avec la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité, s’il était rétabli, il convient, dans un souci de simplification et de lisibilité, de rationaliser ces différents systèmes de cessation anticipée d’activité.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

J’avoue ne pas comprendre le sens de cet amendement. Les différents régimes de cessation anticipée d’activité ne répondent pas tous à la même logique, et le compte personnel de prévention de la pénibilité ne s’y superpose pas, mais les complète.

Quels sont les points communs entre une personne ayant commencé à travailler à seize ans et qui peut bénéficier de la retraite anticipée pour carrière longue, une personne souffrant d’une importante invalidité à la suite d’un accident professionnel, qui peut bénéficier d’une retraite anticipée pour invalidité, et un salarié ayant travaillé de nuit pendant toute sa carrière, qui bénéficiera d’une majoration de durée de cotisation grâce au CPPP ?

Face à la retraite, chaque situation spécifique doit être traitée de façon adaptée, et je ne vois pas en quoi un rapport pourrait relever autre chose que ce que je viens de dire. L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Même avis, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Cet amendement est pertinent en ce qu’il demande au Gouvernement de faire le point, d’une façon régulière, constante, officielle et publique, sur les raisons parfaitement justifiées et explicables – différentes aussi, je le reconnais – qui aboutissent toutes à un même résultat : le contournement de la règle des soixante-deux ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il est très important que le Gouvernement produise ce rapport, parce que, in fine, ce contournement, dont je conviens qu’il est le résultat de l’addition de parcours individuels, aboutit à des charges assumées par la collectivité, et donc par le contribuable, au titre de la solidarité de l’État vis-à-vis de l’équilibre des régimes dont il a lui-même fixé les règles de par la loi.

Madame la présidente, je ne comprends pas l’évolution du décompte de mon temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Je m’en inquiète, mes chers collègues, car j’essaie de respecter le temps qui m’est imparti, pour ne pas vous accabler.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Cela étant, il n’est pas complètement inutile de disposer d’un tableau de bord, car l’addition, et peut-être la superposition, de ces situations mérite d’être connue.

Je serais curieux, par exemple, madame la ministre, de savoir comment vous comptez rétablir le régime de l’exposition à l’amiante, qui est nécessairement en déséquilibre.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe Ump

Par une subvention de l’État !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Voilà ! Il ne serait donc pas inutile, pour ceux qui parlent au nom du contribuable, de disposer chaque année, d’une façon immédiate et prospective, des probabilités les plus fortes d’être sollicités.

Si certaines situations sont très claires et méritent considération et action immédiate, il est vraisemblable que le CPPP deviendra un facteur de conflits sociaux et donc d’arbitrages politiques, dont nous mesurons bien, au vu de l’actualité récente, que, s’ils sont parfois imprévisibles, ils se traduisent toujours par une charge nouvelle supportée par le contribuable.

Le rappel à l’ordre que propose Mme Deroche m’apparaît donc pertinent, afin que les représentants des contribuables puissent savoir à quels risques ils sont exposés en matière de finances publiques.

L'amendement n'est pas adopté.

À l’intitulé du chapitre II du titre IV de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, les mots : « de la pénibilité » sont remplacés par les mots : « d’une incapacité permanente ». –

Adopté.

I. – Le I de l’article 86 et l’article 88 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites sont abrogés.

II. – Les articles 5 à 9 de la présente loi entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2015, à l’exception du dernier alinéa de l’article L. 4162-3 du code du travail, qui entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État et, au plus tard, cinq ans après l’entrée en vigueur de l’article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Outre l’abrogation de deux articles de la réforme de 2010 – cela ne constitue ni une remise en cause de la loi de 2010 ni un quitus sur l’efficacité de cette réforme –, l’article 10 précise que les articles 5 à 9 de ce projet de loi, qui sont relatifs au compte personnel de prévention de la pénibilité, n’entreront en vigueur qu’au 1er janvier 2015, exception faite de la transmission de la copie de la fiche de prévention de la pénibilité aux caisses chargées de la gestion du compte, une mesure appliquée au plus tard cinq ans après l’entrée en vigueur de l’article 6, qui renaîtra sans doute de ses cendres.

Si nous n’avons pas d’observations particulières à formuler sur cet article, nous avons néanmoins quelques interrogations.

Tout d’abord, nous ne comprenons pas pourquoi ces mesures ne seront applicables que dans plus d’un an. Pourquoi ne pas avoir prévu dans la loi que le compte personnel de prévention de la pénibilité serait rétrospectivement crédité des points accumulés entre la promulgation de cette loi et le 1er janvier 2015 ? Cela aurait laissé aux partenaires sociaux le temps de la négociation, tout en garantissant aux salariés la prise en compte de leur exposition à des facteurs dangereux durant cette période.

En faisant dépendre tout le dispositif d’une entrée en vigueur si lointaine, vous laissez les salariés être exposés à des facteurs de risques professionnels, dans la mesure où jamais cette période d’exposition ne sera prise en compte.

Si je fais un parallèle avec l’amiante, le dispositif que vous proposez n’a guère de sens. En effet, en cas d’exposition à cette fibre hautement cancérigène, l’indemnisation du salarié commence au moment où le salarié a été exposé et non pas dès lors que l’employeur a eu conscience ou connaissance de cette exposition. C’est la base de l’obligation de résultat qui pèse sur les employeurs.

C’est pourquoi nous sommes persuadés qu’il était possible, souhaitable et conforme à notre tradition législative en matière de protection de la santé au travail de rendre possible l’accumulation des points dès la promulgation de la loi, charge, ensuite, aux caisses de redresser la carrière et d’attribuer les points correspondants.

En outre, nous partageons les inquiétudes de la FNATH, la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, quant au flou qui persiste concernant les dispositions applicables aux personnes ayant été exposées à des facteurs de pénibilité et arrivant, au cours des prochaines années, à l’âge de la retraite.

En dépit des mesures adoptées par l’Assemblée nationale et la commission, il nous semble que les salariés dont l’âge est compris entre 50 et 58 ans sont les grands perdants du compte personnel de prévention de la pénibilité. En effet, trop âgés pour accumuler suffisamment de points et pas assez pour bénéficier pleinement des majorations accordées aux salariés dont l’âge est proche de la retraite, ils ne parviendront à accumuler qu’un nombre limité de points et ne pourront, par conséquent, prétendre qu’à peu de droits.

Certes, les salariés âgés de plus de 52 ans ne seront désormais pas contraints de verser leurs vingt premiers points, qui pourront parfois représenter tout leur capital, sur le compte personnel de formation, et c’est là une avancée.

Toutefois, au-delà, quels seront leurs droits ? Quels avantages concrets tireront-ils des mesures prévues dans ces articles ? Un salarié âgé de 57 ans disposant de vingt points pourra-t-il prétendre à un départ anticipé ? Si oui, de combien de mois ou de trimestres pourra-t-il bénéficier, et dans quelles conditions ?

Ces interrogations sont légitimes, car les salariés ayant été exposés à des facteurs à risques sont nombreux. Nous ne devons ni les oublier ni renoncer à leur garantir une réparation entière eu égard à la diminution de leur espérance de vie en raison d’une exposition professionnelle à des facteurs de risques.

Sous réserve d’obtenir des réponses à ces questions, madame la ministre, le groupe CRC optera pour l’abstention.

Mes chers collègues, permettez-moi d’ajouter quelques mots au sujet du débat qui a eu lieu ce matin.

Je veux dire à nos collègues Philippe Bas et Gérard Longuet que le groupe CRC est du côté de tous les salariés et de tous les employeurs honnêtes et respectueux des lois et des salaires. Les sénateurs communistes ont aussi des mandats locaux et ils rencontrent donc des employeurs comme des salariés. Pendant dix-sept ans, je n’ai eu que de bonnes relations avec les employeurs de ma ville, qui compte de très nombreuses entreprises et offre 8 000 emplois.

Lorsque vous vous êtes exprimés tout à l'heure, j’ai ressenti un certain mépris à notre égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Je tenais à le dire, car c’est la première fois depuis plus de deux ans que je ressens un tel sentiment !

J’ai éprouvé le même malaise lorsque M. Bas a pris la parole, alors que le débat démocratique doit être marqué du sceau du respect des personnes, de leurs propos et de la liberté de pensée.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

M. Michel Le Scouarnec. Je ne sais pas si d’autres collègues ont également ressenti ce malaise.

Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

En tout cas, en cette fin de matinée, je tenais à le souligner.

Chers collègues de l’opposition, de temps à autre, il faut cesser de juger et de donner des leçons de morale ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.