Pour notre groupe, la question des pénalités à la charge des employeurs qui n’auraient ni conclu d’accord en faveur de la prévention de la pénibilité ni même mis en œuvre de manière unilatérale un plan d’action est centrale. Nous le savons, le nombre d’employeurs qui ne respectent pas leurs obligations en la matière est élevé, puisque le nombre d’entreprises couvertes par un accord ou un plan d’action est nettement inférieur au nombre d’entreprises satisfaisant aux obligations légales.
L’étude d’impact est en la matière particulièrement éclairante : on y apprend que, malgré l’existence d’une pénalité pouvant correspondre à 1 % de la masse salariale des salariés exposés, seulement deux branches sont aujourd’hui couvertes par un tel accord et 4 800 accords d’entreprise ont été signés. C’est dire si la menace de la sanction n’est pas particulièrement dissuasive, et ce pour au moins deux raisons : les employeurs savent pertinemment que le risque que le non-respect de leurs obligations soit constaté lors d’un contrôle est réduit ; ils peuvent également compter sur la clémence de l’autorité administrative qui est habilitée à prononcer la pénalité, puisque cette dernière peut faire varier le taux.
Je regrette d’ailleurs que l’étude d’impact soit si lapidaire sur cette disposition, car il nous manque des informations précieuses. Nous aurions notamment aimé connaître, madame la ministre, mais peut-être pouvez-vous nous le dire aujourd’hui, le nombre d’entreprises qui ont fait l’objet de contrôle, le nombre d’entre elles qui ont été sanctionnées, ainsi que le niveau moyen des sanctions.
En tout état de cause, nous sommes opposés à ce que l’autorité administrative puisse faire évoluer cette pénalité à la baisse.
Permettez-moi un parallèle un peu audacieux en apparence, mais qui a sa logique, avec la loi SRU : en l’espèce, l’absence d’application stricte des règles conduit les communes à ne pas respecter pleinement leurs obligations. S’agissant de la réforme que nous examinons, l’article 8 en particulier, on voit mal pourquoi les mêmes causes ne produiraient pas les mêmes effets. La question est pourtant majeure, puisqu’il s’agit théoriquement de contraindre des employeurs, parfois réticents, à prendre des mesures de prévention et de compensation en cas de pénibilité professionnelle.
En la matière, nous croyons en la force de la sanction, qui doit avoir une visée pédagogique. C’est pourquoi nous proposons de supprimer le troisième alinéa de l’article L. 138-29 du code de la sécurité sociale, appelé à devenir l’article L. 4163-2 du code du travail, qui dispose que « le montant [de la pénalité] est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, en fonction des efforts constatés dans l’entreprise en matière de prévention de la pénibilité. »