Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 4 novembre 2013 à 15h00
Avenir et justice du système de retraites — Article 13

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

L’article 13, bien qu’abordant une question essentielle pour les femmes, à savoir les évolutions futures à apporter aux avantages familiaux de retraite, se limite en réalité à la remise par le Gouvernement d’un rapport.

Pas plus que vous, madame la ministre, nous ne saurions accepter que les droits familiaux, censés compenser les écarts de salaires puis de pensions, soient, dans leur grande partie, captés par les hommes et donc détournés de leur objectif. Ces avantages étant proportionnels aux salaires et les salaires des hommes étant supérieurs à ceux des femmes, l’architecture même de ces droits conduit à une injustice à laquelle il faut remédier. Nous voterons donc cet article.

Toutefois, je regrette que, sans attendre la remise de ce rapport, vous ayez déjà acté la taxation des majorations de pensions de 10 %.

Tout cela donne l’impression que vous êtes plus prompte à instaurer de nouveaux prélèvements sur les personnes physiques qu’à trouver des solutions justes et tenables en droit, permettant de combler les écarts de pensions dont les femmes sont victimes.

Je voudrais dire également à notre collègue Laurence Rossignol, rapporteur de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, que nous ne souscrivons pas à la recommandation qui figure dans son rapport, tendant à « mutualiser au niveau du couple les conséquences, en matière de retraite, des interruptions de travail subies par l’un des parents ».

En effet, si les parents font le choix, rationnel d’un point de vue économique, de réduire l’activité de la femme, c’est sans doute en raison d’un résidu machiste de notre société, mais surtout parce que les employeurs continuent, en violation totale de la loi et de nos principes constitutionnels, à sous-payer les femmes.

L’homme et la femme dans le couple sont en réalité moins décisionnaires que tributaires d’une situation injuste.

Tout cela nous conduit à penser que la réduction des inégalités de pensions se fera, pour l’essentiel, moins au travers des droits familiaux et conjugaux que grâce à l’émergence d’une société où, enfin, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes sera totale. C’était le sens des amendements que nous avons précédemment proposés.

Exiger une solidarité dans le couple n’a aucun sens dans un régime qui repose sur la solidarité plus large qu’est la sécurité sociale. Nous contestons donc l’analyse selon laquelle le membre du couple qui aurait eu la chance de partir à taux plein serait redevable à l’égard de l’autre.

Celles et ceux qui sont redevables à l’égard des femmes, ce sont les décideurs politiques qui ne prennent pas les mesures qui s’imposent. Pourtant, nous avons proposé d’organiser, pour les salariés travaillant à temps partiel, un mécanisme de surcotisation patronale qui permettrait de financer des droits nouveaux, conformément aux objectifs de 1945.

Nous avons proposé de supprimer les exonérations de cotisations sociales aux entreprises qui ne respecteraient pas l’égalité salariale et de moduler le taux des cotisations sociales. Là encore, les ressources dégagées devraient permettre de financer des droits nouveaux.

Qui plus est, dire de l’un de membres du couple qu’il est redevable à l’égard de l’autre conduit à se demander comment s’organise la compensation. Imaginez-vous que l’homme puisse transférer des droits à la retraite à la femme ?

Les droits acquis au sein de la sécurité sociale – par principe – n’appartiennent pas aux salariés. Ils ne composent pas leur patrimoine personnel ; ils ne peuvent ni les transférer, ni les donner, ni les léguer.

Si nous comprenons votre volonté, nous n’acceptons pas que la question fondamentale de l’égalité des pensions, qui est en réalité celle de l’égalité des droits, soit réduite, par une forme de nivellement par le bas, à une responsabilité interne au groupe. Cette question de l’égalité des droits est plus large : elle englobe la responsabilité sociale des entreprises, comme celle des pouvoirs publics en matière de service public de l’accueil des jeunes enfants.

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