Monsieur le président, madame la présidente de la commission, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, en tant que rapporteur du volet médico-social du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, je tiens à saluer la progression des crédits qui seront alloués à ce secteur en 2014.
Avec une hausse de 3 %, l’ONDAM médico-social connaît une progression, certes moins marquée que les années précédentes, mais plus dynamique que celle de l’ONDAM dans son ensemble. Si l’on ajoute à cette enveloppe les ressources propres que mobilisera la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, 18, 8 milliards d’euros seront consacrés l’année prochaine au financement des établissements et services médico-sociaux ; 9, 5 milliards d’euros seront dédiés au secteur des personnes handicapées et 9, 3 milliards d’euros à celui des personnes âgées. L’objectif global de dépenses, l’OGD, sera, en outre, abondé par un prélèvement de 70 millions d’euros effectué sur les réserves de la CNSA.
Ces crédits supplémentaires permettront de renforcer les moyens existants dans les établissements et services médico-sociaux, de remplir les objectifs de créations de places fixés par les différents plans gouvernementaux et de poursuivre la médicalisation des EHPAD.
Sur ce point, il faut noter qu’à la fin de l’année 2012 31 % des établissements, soit 26 % des places, n’étaient pas encore passés à un mode de tarification défini en fonction du GIR moyen pondéré soins. Des efforts substantiels devront donc encore être réalisés dans les années à venir pour achever ce processus.
En 2014, 15 millions d’euros vont être plus spécifiquement consacrés à l’achèvement du plan Alzheimer. Le rapport d’évaluation publié au mois de juin dernier constitue une base de travail solide pour conforter et améliorer les structures créées dans le cadre du plan. Je pense, en particulier, aux maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades d’Alzheimer, les fameuses MAIA. Comme s’y est engagé le Président de la République, le plan doit être étendu à l’ensemble des maladies neurodégénératives. Je formule le souhait que la dynamique engagée avec le premier plan puisse être maintenue, voire amplifiée rapidement dans les années à venir.
Au cours des années passées, les rapporteurs pour le secteur médico-social ont fréquemment regretté la sous-consommation de l’OGD personnes âgées, qui a été de 189 millions d’euros en 2012 et devrait encore s’élever à 150 millions d’euros en 2013.
Le directeur de la CNSA, que nous avons rencontré lors des auditions, me l’a assuré, ce problème sera bientôt derrière nous grâce au resserrement du calendrier budgétaire et aux améliorations apportées au suivi des crédits, ainsi qu’à leurs modalités d’allocation pour les créations de places. Ainsi, les annonces de tarifications seront rapidement avancées du mois de juin au mois de mars, ce qui permettra une meilleure gestion. Je veillerai, en tout cas, à ce que les enveloppes sur lesquelles le Parlement se prononce chaque année puissent être effectivement consommées dans des conditions satisfaisantes.
À ce titre, il m’a semblé nécessaire d’améliorer le degré d’information dont dispose la représentation nationale quant au financement des établissements et services médico-sociaux. Le Gouvernement a l’obligation de transmettre au Parlement, chaque année avant le 15 septembre, un rapport sur le financement des établissements de santé qui, lorsqu’il est communiqué dans les temps, constitue un support utile à l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Rien n’existe dans le secteur médico-social, alors même que les règles de financement y sont à la fois hétérogènes et complexes.
Sur mon initiative, la commission a donc adopté un amendement tendant à introduire dans le code de l’action sociale et des familles un article qui constituera le pendant, pour les établissements et services financés par l’ONDAM médico-social, des dispositions du code de la sécurité sociale relatives au rapport annuel sur le financement des établissements de santé.
En début de navette, un seul article du projet de loi était consacré au secteur médico-social. Il s’agit, comme chaque année depuis la loi de financement pour 2011, d’affecter une partie du produit de la contribution de solidarité pour l’autonomie au financement du plan d’aide à l’investissement, le PAI. Pour 2014, ce sont 2 % qui doivent y être consacrés, soit un peu moins de 50 millions d’euros.
Chaque année, les crédits alloués au PAI sont gelés au titre des mesures de régulation de l’ONDAM. Ils sont ensuite abondés en cours d’exercice budgétaire à partir des réserves de la CNSA. Si la meilleure consommation de l’OGD se confirme dans les années à venir, les ressources de la CNSA ne permettront bientôt plus de compenser ces mesures de gel.
Or, grâce au PAI, la CNSA apporte un soutien indispensable pour le financement des investissements réalisés par les structures médico-sociales. En effet, ces crédits sécurisent l’accès à l’emprunt et contribuent à limiter le poids de l’investissement dans les tarifs appliqués par les établissements. Il s’ensuit donc nécessairement un allégement du prix de journée.
En outre, les besoins de modernisation et de remise aux normes, déjà importants, sont appelés à augmenter fortement dans les années à venir en raison du vieillissement du parc. Nous pouvons estimer, en tenant compte des situations différentes selon les départements, qu’il est actuellement obligatoire de rénover environ 40 % du parc des EHPAD ou, pour le dire plus communément, des maisons de retraite. Cela représente des sommes très importantes que les départements ne peuvent assumer à eux seuls.
La commission a donc adopté, sur ma proposition, un amendement visant à mieux identifier et sécuriser les crédits destinés au PAI au sein du budget de la CNSA. Au moins 2 % du produit de la CSA lui sera désormais affecté de façon pérenne au sein d’une nouvelle section dédiée à l’investissement.
L’Assemblée nationale a introduit un article additionnel qui a pour objet de mettre fin à l’expérimentation de la modulation du forfait soins dans les EHPAD en fonction d’indicateurs de qualité et d’efficience.
Dès l’examen du projet de loi de financement pour 2012, qui créait cette expérimentation, notre collègue Ronan Kerdraon avait demandé sa suppression, soulignant les incertitudes qui caractérisent la tarification des EHPAD, et la jugeant par conséquent prématurée.
Au nom de la commission des affaires sociales, je me félicite de cette convergence de vues entre nos deux assemblées, en regrettant cependant les blocages qui continuent d’empêcher toute clarification du système de financement des EHPAD. Je pense en particulier à la tarification à la ressource, prévue par la loi de financement pour 2009, mais qui n’est toujours pas entrée en vigueur, faute de décret. Un tel manque de visibilité est regrettable, d’autant plus qu’un nombre non négligeable d’établissements seront amenés à renouveler leurs conventions tripartites dans les prochaines années.
Une refonte de la tarification des établissements pour personnes handicapées vient d’être engagée dans le cadre de la modernisation de l’action publique, et nous nous en réjouissons, madame la ministre. Il s’agit d’un processus ambitieux qui a vocation à se dérouler sur plusieurs années. Je souhaite vivement qu’il puisse être une source d’inspiration pour réfléchir à des évolutions claires et consensuelles dans le secteur des personnes âgées.
Telles sont, mesdames les ministres, mes chers collègues, les principales observations que je souhaitais formuler sur le volet médico-social de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
À l’heure où l’effort de redressement de nos comptes sociaux doit être partagé par tous, le soutien à l’autonomie des personnes âgées et handicapées demeure une priorité du Gouvernement. J’en suis heureux. Je le suis d’autant plus que, depuis l’intervention, le 14 octobre dernier, du Premier ministre, dont vous avez confirmé les propos à la tribune, madame la ministre, nous connaissons les contours et le calendrier de la future réforme sur l’adaptation de la société au vieillissement.
Son premier volet, qui doit être adopté d’ici à la fin de l’année prochaine, sera centré sur la prise en charge au domicile. La réforme de l’allocation personnalisée d’autonomie en constituera l’un des points majeurs. Dans un contexte où plus du quart des plans d’aide élaborés pour les bénéficiaires de l’APA à domicile sont aujourd’hui saturés, elle devra permettre de mieux prendre en compte les besoins des personnes les plus dépendantes.
Cette réforme sera également indissociable d’une réflexion sur le financement de l’APA, qui repose aujourd’hui trop largement sur les départements : depuis 2002, date à laquelle la part de l’État et celle des départements étaient égales, donc de 50 % chacune, la part de l’État est passée à 28 % et celle des départements à 72 %.
Je sais que le Gouvernement travaille à soutenir les départements pour le financement des différentes allocations individuelles de solidarité ; nous aurons l’occasion d’en débattre lors de l’examen du projet de loi de finances. Il est indispensable, à ce titre, que des garanties puissent être apportées aux départements quant à un partage équitable du financement de l’APA dans les années à venir.
Le second volet de cette réforme, qui sera mis en œuvre ultérieurement, portera sur la prise en charge en établissement et devra notamment traiter de la grave question du reste à charge acquitté par les résidents. Sur ce point, il me semble essentiel de travailler, sur la base d’un diagnostic étayé des différents coûts que supportent les personnes hébergées en établissement, à la refonte de dispositifs d’aides qui sont aujourd’hui insuffisamment coordonnés et trop peu redistributifs.
Nous le savons, cette réforme ne pourra être réellement ambitieuse qu’à la condition de s’appuyer sur des financements suffisants. Le Premier ministre nous l’a assuré, et vous nous l’avez également confirmé, madame la ministre, le produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, lui sera entièrement consacré à partir de 2015. C’est heureux. Mais j’aurais été davantage satisfait si, comme cela avait été prévu initialement par le Gouvernement, la CASA avait été mise en réserve dès 2013 au sein d’une section dédiée du budget de la CNSA. De cette façon, nous aurions été en mesure de mobiliser, dès le début de l’année 2015, un peu plus de 1 milliard d’euros.
Or la CASA a été entièrement redirigée en 2013 pour alimenter le Fonds de solidarité vieillesse. Cette mesure, qui devait n’être qu’exceptionnelle, sera reconduite en 2014, même si – vous l’avez annoncé –, grâce à un amendement adopté par l’Assemblée nationale, 100 millions d’euros restent affectés à la CNSA. Il me semble qu’il aurait été plus lisible et plus compréhensible pour nos concitoyens que cette contribution, qui pèse sur les retraités, ait eu dès l’origine une vocation clairement assumée.
Je reste cependant optimiste. Depuis plusieurs années, sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, nous attendons cette réforme de l’adaptation de la société au vieillissement. Aujourd’hui, nous avons des certitudes. Un cap clair a été fixé. La concertation va être engagée dans les prochains jours. Je souhaite qu’elle puisse aboutir rapidement et que 2014 soit une année porteuse d’un espoir renouvelé pour les personnes en situation de perte d’autonomie, pour leurs proches, ainsi que pour l’ensemble des professionnels qui les accompagnent chaque jour.