Je parle du transfert à la CADES, même partiel, de la dette des branches maladie et famille.
Le Gouvernement propose également un mécanisme dérogatoire pour le financement des activités isolées réalisées au sein d’établissements de santé situés dans des zones à faible densité de population. Cette disposition n’a de sens que si elle s’inscrit dans le cadre d’une véritable refonte de l’offre hospitalière dans les territoires.
L’objectif ne doit pas être de maintenir artificiellement des hôpitaux de petite taille ayant une faible activité, ou des activités qui ne correspondent ni aux besoins de santé de la population ni, surtout, aux exigences de qualité et de sécurité. Au contraire, il faut rechercher une complémentarité entre les établissements existants, ce qui suppose une restructuration plus contrainte ; je pense en particulier aux plateaux techniques, qui sont non seulement dispendieux, mais quelquefois très insuffisants sur le plan de la qualité.
Je constate que cette question est taboue, quoique nous en ayons déjà beaucoup débattu. Pourtant, aujourd’hui, nos concitoyens veulent l’excellence et la spécialisation plutôt que la proximité : ils n’hésitent pas à parcourir quelques kilomètres pour se faire soigner dans les meilleures conditions.
Que dire, ensuite, de la mise en œuvre de tarifs dégressifs dans les établissements de santé en fonction du volume de l’activité de soins ? Que la T2A présente peut-être des défauts, notamment celui d’être inflationniste, c’est une chose ; mais le système proposé par le Gouvernement, complexe, ne prend pas en compte certaines situations. Je pense notamment à l’établissement qui serait seul à pratiquer certains actes sur un territoire donné ou à certains établissements spécialisés dans des domaines où la demande de soins est en forte progression.
Vous reportez une nouvelle fois la facturation individuelle des séjours hospitaliers, au seul motif que certains établissements sont incapables d’adapter leur système d’information. Pourtant, ce dispositif va dans le sens de la transparence et de la rationalisation des finances sociales.
Quant au médicament, autre cible habituelle d’économies, il subit une cure d’amaigrissement de 1 milliard d’euros en dépenses. J’y suis évidemment favorable, ayant souvent dénoncé une consommation excessive à un prix exorbitant. Reste que le Gouvernement prévoit de réaliser la plus grande part des économies, à hauteur de 700 millions d’euros environ, sur les médicaments princeps. Ce choix découragera d’investir dans notre pays les entreprises innovantes, créatrices d’emplois dans la recherche et le développement. Ce secteur a pourtant été récemment reconnu comme un secteur d’avenir !
Les dispositions relatives au médicament m’inspirent deux autres réserves.
S’agissant de la délivrance à l’unité, s’il faut évidemment lutter contre le gaspillage et contre l’automédication, l’expérimentation lancée par le Gouvernement pour la classe des antibiotiques a été décidée sans réelle concertation avec les professionnels concernés, et soulève de nombreuses questions que l’étude d’impact n’aborde pas. En particulier, qu’en est-il de l’information et de la traçabilité, de la responsabilité des pharmaciens, des économies potentielles ou encore des conséquences pour l’activité de l’industrie pharmaceutique ?
Ma dernière réserve porte sur la promotion des médicaments biosimilaires. Contrairement à ce qui existe pour les génériques chimiques, l’autorisation de mise sur le marché de ces médicaments est délivrée sur le fondement d’une similarité des résultats thérapeutiques, et non pas uniquement sur le fondement de la bioéquivalence. Je ne suis donc pas convaincu que la substitution par le pharmacien, prévue à l’article 38 du projet de loi de financement de la sécurité sociale sur le modèle de la procédure en vigueur pour les génériques chimiques, soit très adaptée.
Je pense que cette décision mériterait un peu plus de réflexion. Les médicaments biologiques sont notamment prescrits dans le cadre de pathologies lourdes, par des médecins qui connaissent avec précision le profil de leurs patients, selon un protocole de soins technique et spécifique. La substitution par le pharmacien devrait être encadrée et adaptée aux diverses classes de médicaments biosimilaires. Il est dommageable pour la sécurité du patient de mêler tous les biosimilaires dans le même système ; de grâce, agissons avec prudence, surtout concernant un secteur en pleine évolution !
En conclusion, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 est bien loin de ce que le Gouvernement nous annonçait, madame la ministre. La diminution de la croissance des dépenses – cet oxymore est la manière la plus adaptée de décrire la réalité – devrait non pas porter sur l’objectif de dépenses pour 2013, mais prendre en compte le montant des exécutions prévisibles, inférieur de 500 millions d’euros ; on aurait aimé entendre M. le rapporteur pour avis de la commission des finances présenter ce calcul.
J’ai espoir que le Sénat ne sera pas renvoyé dans ses buts comme lors de l’examen du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, et qu’il pourra être entendu sur certains points !