Sur les soins de ville, nous récoltons les dividendes de la loi du 29 décembre 2011 sur la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, et ne pouvons qu’approuver la maîtrise médicalisée des prescriptions. N’oublions pas, cependant, que la Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale a jugé en 2012 que 28 % des prescriptions étaient « superflues ».
En matière hospitalière, à la suite du rapport d’Yves Cannac d’avril 2006 pour l’Observatoire de la dépense publique, nous n’avons cessé de répéter que d’importantes économies d’efficience pouvaient être réalisées, notamment des économies d’échelle par la constitution de centrales d’achat. Le Gouvernement semble vouloir s’engager dans cette voie. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Sans vouloir prolonger mon propos, en ce qui concerne la tarification hospitalière, je souscris tout à fait à ce qui a été dit par Alain Milon.
Les priorités identifiées, telles que la coordination des services aux patients au sein des maisons et centres de santé, la mise en place de nouveaux modes de rémunération, l’assouplissement de la tarification à l’activité, ou T2A, la rénovation du circuit du médicament, nous semblent parfaitement correspondre aux besoins les plus urgents du système de santé.
Madame la ministre, je sais que les parcours de santé sont l’une de vos priorités. Maisle tout n’est pas d’identifier des priorités : encore faut-il se doter effectivement des moyens de la mission. Or, tel n’est, hélas, pas le cas du parcours de santé qui, d’un bout à l’autre, souffre de manques criants. Autrement dit, on engage les gens sur une route dont certains tronçons ne sont pas encore créés. Du début à la fin, le parcours de santé est en pointillé. Et nous aurions justement attendu du PLFSS qu’il remplisse les blancs…
Au départ, le trou est béant, c’est celui de la désertification médicale. Vaste problème, que l’on pourrait cependant commencer à résoudre en ayant le courage d’utiliser le conventionnement pour flécher les installations de médecins vers les zones sous-dotées, comme on le fait d’ailleurs pour les infirmières, et comme le préconisait dans son excellent rapport notre collègue Hervé Maurey.
Les trous dans le parcours de santé ne sont pas uniquement spatiaux, ils sont aussi temporels. Comment accepter que, dans les contrats d’astreinte de garde des médecins, qui coûtent 700 millions d’euros par an, ainsi que nous l’a confirmé M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, demeure la notion de « nuit profonde » qui leur permet de ne pas assurer de permanence entre minuit et six heures du matin ? Cette notion est absolument irrecevable et doit être supprimée. Actuellement, mes chers collègues, il n’y a pas de garde entre minuit et six heures dans la plupart des territoires de France !
La sortie de l’hôpital constitue une autre rupture dans le parcours de soin: Le nombre de lits en soins de suite et de réadaptation est insuffisant. Par conséquent, après un accident de santé, la majorité des patients rentrent chez eux de façon un peu précoce, ce qui entraîne une chute de la qualité des soins, et, s’ils sont âgés, ils doivent aller en EHPAD. Or, après une hospitalisation trop brève, la qualité des soins ne peut être au rendez-vous en EHPAD. En outre, ces établissements sont de moins en moins accessibles au plus grand nombre, notamment du fait du niveau du « reste à charge » qui ne cesse de grimper avec l’incorporation du coût des investissements immobiliers et médicaux au prix de journée.
Nous sommes face à un vrai problème de financement de l’investissement médico-social du fait du désengagement de l’État, via la CNSA, et du désengagement consécutif des collectivités. Pour y remédier, la collégialité des investisseurs doit être restaurée. Je me souviens avec émotion de l’époque où les maisons de retraite étaient financées par des contrats État-région, auxquels s’adjoignaient les départements et souvent les communes. Nous avions ainsi une programmation sur quatre ans et des aides à l’investissement qui étaient tout à fait intéressantes et permettaient de modérer l’élévation des prix de journée.
En ce qui concerne les mesures de dépenses proposées pour les autres branches, je ne reviendrai pas longuement sur la branche vieillesse : vous connaissez notre position. Il est nécessaire de passer d’une réforme paramétrique à une réforme systémique qui institue un système unique, universel et par points.
La situation de la branche famille nous semble aussi quelque peu préoccupante pour le moment, ou plus précisément la politique familiale. Réduction du congé parental, baisse du quotient familial, fiscalisation de la majoration de pension pour enfants, tout porte à croire que la politique familiale est dans le collimateur du Gouvernement.
Certes, nous ne pouvons qu’appuyer la majoration du complément familial pour les familles vivant sous le seuil de pauvreté, ainsi que la revalorisation de 25 % de l’allocation de soutien familial. Certes, la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE, peut se justifier, ainsi que la suppression de la majoration du complément de libre choix d’activité. Mais tout cela ne fait pas une politique familiale.
Concernant le médico-social, c’est tout le problème de la compensation de l’APA qui est posé. Je pourrais m’y attarder, mais vous savez tous ce que j’ai à dire sur le sujet. Je ne manquerai cependant pas de saluer l’émergence significative du plan Autisme.
En ce qui concerne la branche accidents du travail-maladies professionnelles, je ne dirai pas mieux que Jean-Pierre Godefroy, pour qui l’absence totale de dotation de l’État au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, en 2014, est inacceptable.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, mes chers collègues, nous pensons qu’un autre projet de loi de financement de la sécurité sociale était possible, un PLFSS qui ne prenne pas l’eau, car nous sommes tous dans le même bateau, plus précisément dans la même galère !