Intervention de Jean-Claude Carle

Réunion du 19 novembre 2013 à 9h30
Questions orales — Conséquences de la nouvelle carte cantonale

Photo de Jean-Claude CarleJean-Claude Carle :

Monsieur le ministre, ma question est tout à fait complémentaire de celle de mon collègue Éric Doligé, puisque je souhaite appeler votre attention sur la modification de la carte des cantons.

Tout d’abord, l’augmentation de la superficie des cantons, si elle peut se justifier dans certains secteurs, n’est pas sans engendrer des difficultés dans d’autres, notamment en zone de montagne.

Ainsi, dans mon département, la Haute-Savoie, que penser du nouveau canton d’Évian-les-Bains, qui ira de Publier à Morzine, de Saint-Gingolph aux Gets, associant deux vallées bien distinctes aux rives du Léman ? Que penser encore du nouveau canton de Saint-Julien-en-Genevois, allant d’Archamps à Seyssel ?

Avec ce redécoupage, des chefs-lieux de canton perdront leur statut au profit de nouvelles communes devenant « bureau centralisateur » du nouveau canton. Outre le caractère très technocratique de ce terme, cette transformation engendre trois conséquences importantes.

La première est liée à l’histoire. Cette évolution, qui s'accompagne souvent d'un changement de nom et de commune-centre, jette un trouble parmi la population. Dans nos régions de montagne, spécifiquement contraintes et compartimentées par le relief, s’est développé au fil du temps un réel sentiment d’appartenance des habitants à un territoire bien défini et identifié.

Ce sentiment se voit aujourd’hui quelque peu remis en cause. Dans mon département, par exemple, le nouveau canton de Sciez, associant les actuels cantons de Douvaine et de Boëge à trois communes issues du canton de Thonon-les-Bains Ouest, aura pour bureau centralisateur la commune de Sciez. Autre exemple, le nouveau canton de Faverges regroupera les actuels cantons de Faverges et de Thônes avec des communes issues des cantons de Bonneville et d'Annecy-le-Vieux. Thônes perd ainsi sa fonction de chef-lieu de canton.

Ne serait-il pas opportun de trouver des dénominations plus consensuelles pour ces nouveaux cantons ? Dans le premier cas, l’on pourrait retenir « canton du Bas-Chablais » ; dans le second, « canton Tournette-Aravis », comme l’a d’ailleurs proposé le conseil général. Ces appellations correspondent à des réalités géographiques, historiques, humaines et même culturelles. Et ce qui est vrai en Haute-Savoie doit naturellement l’être dans d’autres départements…

La seconde incidence de cette réforme est d’ordre financier. Certaines communes vont perdre la majoration de la DSR, la dotation de solidarité rurale. Ce sera ainsi le cas dans l’ancien canton de Boëge, déjà cité. Cette commune subira une perte de 33 000 euros. Pour leur part, Bogève et Habère-Poche perdront respectivement 46 000 euros et 60 000 euros. Enfin, dans le nouveau canton de Sciez, Douvaine se verra privée de 120 000 euros, et Bons-en-Chablais de 119 000 euros.

Aussi, ne serait-il pas judicieux, monsieur le ministre, soit d’abaisser le seuil de la DSR de 15 % à 10 % de la population – cela, à enveloppe constante – afin d’annuler ou de réduire l’effet induit par la réforme, soit d’instaurer une sortie progressive afin d’en amortir l’incidence ?

La troisième conséquence porte sur l’avenir des services publics, souvent organisés au niveau du chef-lieu de canton. La loi va mécaniquement en supprimer au moins un sur deux. Nos concitoyens s’inquiètent donc de voir disparaître ces services publics, et il convient de les rassurer à ce sujet.

Monsieur le ministre, je sais votre attachement et celui du ministre de l'intérieur aux territoires ruraux, attachement que ce dernier a récemment réaffirmé lors de votre visite en Haute-Savoie. Mes propositions permettraient d'éviter de nouvelles difficultés à ces territoires, alors qu’ils en subissent déjà de nombreuses aujourd’hui, ne serait-ce que celles qui sont liées à la mise en place des rythmes scolaires.

Je vous remercie donc de bien vouloir m’indiquer quelles mesures vous entendez prendre afin que cette réforme ne soit pas source de querelles – dès lors qu’elles sont liées à notre histoire, elles ne sont jamais dénuées d'importance – et qu’elle n’ait pas de conséquences financières graves pour ces communes, qui subiraient ainsi la double peine !

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