Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission de l’économie, monsieur le président du groupe de suivi du SNIT, mes chers collègues, un nouvel objectif a été donné au volet routier du SNIT, à savoir « renforcer l’accessibilité des territoires dont les populations souffrent d’enclavement ».
Cet objectif figurait déjà, en 2008, dans les préconisations du rapport d’information de notre délégation sénatoriale à l’aménagement du territoire. Ce rapport, intitulé, je vous le rappelle, Pour une politique de désenclavement durable, concluait en effet : « La France a tout à gagner à engager cette politique de désenclavement, c’est-à-dire une politique fondée sur le lien fort entre les infrastructures et les projets de chacun des territoires ».
Je remercie vivement le président de la commission, Jean-Paul Emorine, qui a favorisé la tenue de ce débat, Louis Nègre, dynamique et efficace président du groupe de suivi du SNIT, ainsi que son collègue Raymond Vall, membre actif de ce groupe, qui a demandé l’organisation de ce débat, d’avoir attiré l’attention du Gouvernement sur la nécessité absolue de prendre en compte l’aménagement des territoires ruraux dans le SNIT.
Parmi les grandes liaisons d’aménagement du territoire intégrées dans le projet du SNIT, je souhaite attirer votre attention sur le cas de la RN 21. Mon intervention s’inscrit dans la ligne de celle de mon collègue, voisin et ami, Raymond Vall.
La RN 21 est un « équipement routier du siècle dernier », comme l’a qualifiée Louis Nègre, lorsqu’il l’a découverte au début de décembre 2010. Située à mi-chemin de l’autoroute A 10, Paris-Bordeaux, et de l’autoroute A 20, Paris-Toulouse, elle dessert un territoire grand comme deux fois la Belgique, sans aucune autre liaison autoroutière Nord-Sud.
La route nationale 21 relie Limoges à Tarbes et Lourdes ; elle traverse cinq départements ruraux – la Haute-Vienne, la Dordogne, le Lot-et-Garonne, le Gers et les Hautes-Pyrénées –, trois régions – le Limousin, l’Aquitaine et Midi-Pyrénées – et vingt-deux agglomérations dont Limoges, Périgueux, Bergerac, Villeneuve-sur-Lot, Agen, Auch et Tarbes. Il faut six heures et quart pour aller de Limoges à Tarbes, à une vitesse moyenne de soixante-deux kilomètres à l’heure et, malgré cette faible vitesse, cet axe connaît un taux d’accidents supérieur à la moyenne nationale, avec plus d’une centaine d’accidents corporels par an. L’indice de gravité de ces accidents est également supérieur à la moyenne nationale.
Sachant qu’une route à deux fois deux voies est trois à quatre fois moins accidentogène qu’une route large à deux voies, l’élargissement à deux fois deux voies de cet itinéraire permettrait d’épargner chaque année, au minimum, huit ou neuf vies humaines et trente-cinq blessés graves.
La concession de l’élargissement à deux fois deux voies de la RN 21 de Limoges aux Pyrénées permettrait aussi d’éviter la saturation des rocades bordelaise et toulousaine. Il suffit en effet de passer de temps en temps sur ces rocades et d’y rester bloqué pendant des heures pour se rendre compte de la signification du mot « saturation ».
La connexion intermodale de cet axe avec la future traversée « ferroutière » des Pyrénées centrales désengorgerait également les frontières océanique et méditerranéenne de Biriatou et du Perthus, par où transitent d’ores et déjà près de 20 000 camions par jour. En effet, la RN 21, qui se situe sur le plus court chemin de Paris à Madrid, a vocation à constituer le volet routier de l’axe n° 16 du réseau transeuropéen de transport Paris-Madrid-Algésiras.
Mais qu’en est-il de ce projet par rapport aux critères du Grenelle de l’environnement et aux objectifs du SNIT ?
L’association Euro 21 regroupe les chambres de commerce et d’industrie des cinq départements traversés par cet axe routier et travaille en relation étroite avec les chambres de commerce d’Aragon et l’association Eurosud Transport, qui milite pour la traversée centrale des Pyrénées en ferroutage. Cette association a fait réaliser une « étude socio-économique et d’opportunité de la mise à deux fois deux voies de la RN 21 ». Elle a confié cette étude au cabinet Egis Mobilité, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, qui avait déjà réalisé les études préalables des schémas régionaux d’infrastructures de transport d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées.
Les conclusions de ce cabinet indépendant sont très positives au regard des quatre axes du Grenelle de l’environnement.
En effet, le projet Euro 21 est complémentaire du réseau ferroviaire existant, car il sera en connexion intermodale avec la future traversée « ferroutière » des Pyrénées centrales et avec les gares TGV d’Agen et de Limoges ; c’est l’axe 1.
Axe 2, il renforcera la multipolarité des régions et participera ainsi à la revitalisation des territoires fragilisés de l’est de l’Aquitaine et de l’ouest de Midi-Pyrénées.
Axe 3, il permettra de mieux organiser les déplacements dans les aires métropolitaines de Bordeaux et de Toulouse.
Axe 4, il améliorera le bilan des nuisances induites par la traversée de vingt-deux agglomérations et préservera la qualité de vie des riverains de la route nationale.
En ce qui concerne les objectifs du SNIT, le projet Euro 21 répond aux quatre enjeux.
L’enjeu de la sécurité est satisfait par la division par trois ou par quatre des accidents corporels. L’enjeu de la congestion trouve une réponse avec l’absorption d’une partie des transits nord-sud des rocades bordelaise et toulousaine et des axes littoraux franco-ibériques. Enfin, les enjeux de l’équité territoriale et du désenclavement des quatre départements de l’est de l’Aquitaine – Dordogne et Lot-et-Garonne – et de l’ouest de Midi-Pyrénées – Gers et Hautes-Pyrénées –, restés à l’écart des dynamiques régionales, seront relevés par l’amélioration de l’accessibilité aux pôles de services, le renforcement de la logistique des entreprises de production, le développement des plates-formes multimodales, l’encouragement du tourisme, l’élargissement des bassins d’emplois et l’augmentation du PIB des territoires desservis.