Afin de réduire la portée de l’article 5 et, ainsi, de limiter les dépenses supportées par les employeurs en matière de prise en compte de la pénibilité, vous prévoyez, madame la ministre, que seuls les salariés exposés à un certain seuil de facteurs de risques seront pris en compte dans la fiche et dans le compte personnel de prévention de la pénibilité. Or chacun s’accorde à dire que, en matière de prévention de la pénibilité, la notion de seuil est à la fois complexe et pénalisante pour un certain nombre de travailleurs. En effet, le fait d’être en dessous du seuil fixé par décret ne signifie en rien que le travailleur n’est pas dans une situation de danger ou de réduction de son espérance de vie en bonne santé.
À titre d’exemple, l’exposition des salariés en dessous du seuil légal d’exposition à la radioactivité ne signifie pas que celle-ci n’a pas de conséquence sur l’état de santé du salarié. D’ailleurs, récemment, une juridiction a reconnu la responsabilité juridique d’EDF à la suite de la mort d’un agent chargé de l’entretien d’une centrale nucléaire, alors même que tous les relevés attestaient que celui-ci n’avait pas été exposé à une dose de radioactivité excédant le seuil légal. La Cour a ainsi pu considérer que le décès de l’agent était dû à une maladie professionnelle.
Qui plus est, la définition même des seuils n’est pas une chose aisée, et vous vous êtes opposée en première lecture, comme en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, à ce que ces seuils soient au moins définis en lien avec les CHSCT. Cela ne nous paraît pas judicieux. C’est la raison pour laquelle, dans la perspective d’une véritable réparation des préjudices liés à la pénibilité, notre amendement n° 27 rectifié vise à supprimer cette notion de seuils.
Quant à l’amendement n° 28 rectifié, il a pour objet de veiller à ce que le CHSCT ou, à défaut, le comité d’entreprise ou les délégués du personnel soient obligatoirement associés à la définition des postes à caractère pénible. Cette définition est aujourd’hui la prérogative des employeurs. On peut donc craindre que ceux d’entre eux qui sont les moins respectueux du droit du travail et de la santé des salariés ne soient tentés de minorer les risques figurant sur la fiche, puis, par la suite, leurs obligations en matière de prévention, voire d’indemnisation.