Je vous remercie de vos remarques, mais si j'ai commis le rapport, la mise en oeuvre des préconisations qu'il contient incombe à l'exécutif, et notamment au ministre concerné, dans un contexte qui ne favorise pas la prise de décision, comme l'a illustré le récent débat sur l'écotaxe et les difficultés budgétaires auxquelles doivent faire face les différents organismes publics spécialisés dans les transports.
La création d'une société de projet s'inscrit dans ce contexte, marqué par la recherche du désendettement public, tout en prenant acte de l'incapacité de VNF d'emprunter. Mais je vous l'accorde, il faut trouver un milliard d'euros pour boucler le financement de ce projet. Aussi ai-je proposé de solliciter les capacités d'emprunt des collectivités territoriales lesquelles doivent certes réduire leurs coûts de fonctionnement mais sans pour autant obérer leur capacité de préparer l'avenir, tout en sollicitant l'État au stade le plus avancé possible de la réalisation du projet. Je suis persuadé que la croissance reviendra en France, ce qui légitime une politique d'investissement ambitieuse, à laquelle participe ce projet, avec ses retombées en termes d'activités et les quelque 50 000 emplois qu'il permettra de créer.
L'exemple du Canal Albert milite en faveur de la progressivité de l'investissement dans le secteur fluvial qui s'inscrit nécessairement sur une période longue. D'ailleurs, la géographie rend inéluctable et indispensable la connexion des ports du Havre et de Rouen avec le Nord de l'Europe. Les acteurs des communautés portuaires, parmi lesquels les chargeurs, s'accordent pour que soient réunies les conditions du renforcement de l'attractivité des hinterlands qui sont autant d'atouts pour le développement des ports. À cet égard, j'ai pu mesurer, dans le cadre de la rédaction de ce rapport, le retard que nous accusions sur ce plan.
Ainsi, HAROPA recherche désormais les moyens de soutenir la concurrence, tout comme le port de Dunkerque qui entend optimiser sa localisation stratégique, en développant des projets de massification, en relation avec le développement du site de Marquion, pour accompagner la reconfiguration du canal Seine-Nord-Europe et maximiser son positionnement dans le domaine du fret.
S'agissant de l'association des ports à la gouvernance du projet, ceux-ci nous ont notifié leur refus d'accorder un financement au projet d'aménagement du canal. Les préconisations que je formule dans mon rapport prennent ainsi acte de ce refus.
Je vous l'accorde. C'est bien la multi-modalité qui est un facteur de croissance. Il faut donc s'interroger sur l'évolution du transport routier, avec la fédération des transports routiers, en privilégiant la complémentarité des modes d'acheminement. Il importe de projeter l'évolution de notre fret à l'horizon de vingt à trente ans afin de résorber les déficits actuels, notamment dans le domaine ferroviaire, et le projet de reconfiguration du canal Seine-Nord-Europe permet de poser ce problème.
En réponse à l'interrogation sur les ouvrages d'art, dont l'entretien peut en effet s'avérer onéreux pour les collectivités, le rapport préconise une diminution de leur nombre sur le canal. En ce qui concerne la réaction de la SANEF, dont les principaux actionnaires sont espagnols, j'ai rencontré son président Alain Minc qui nous a assuré de son soutien.
L'éventualité d'un dépassement de l'enveloppe budgétaire, initialement fixée à cinq milliards d'euros, est prise en compte par l'Union européenne qui débloquera les crédits par tronçons afin de coller au mieux à la réalisation du projet. S'il est vrai que la majeure partie du financement devra être accordée sur la période 2014-2020, les instances européennes sont conscientes de la nécessité d'accompagner le projet jusqu'à sa réalisation. À nous donc de déployer le savoir-faire nécessaire pour honorer nos engagements.
Je reviendrai cependant sur une légère divergence de vue avec le ministre des transports quant à l'opportunité de solliciter un financement de la Belgique et de la Hollande dans le cadre du projet. A mon sens, cette demande n'est pas légitime : le chantier se trouve en France et il nous faut affirmer notre capacité à porter, au niveau national, un tel projet.
Je souscris à l'historique qui nous a été dressé par Marcel Deneux du secteur fluvial en France et qui rejoint le témoignage qui figure dans mon rapport de l'ancien Premier ministre, Michel Rocard, en sa qualité d'ancien maire de Conflans-Sainte-Honorine. Au gel des terres décidé par la SAFER doivent être ajoutés les quelque 300 millions d'euros qui ont déjà été investis dans le projet et qui légitiment sa mise en oeuvre. Dans mes propositions d'ailleurs, je propose la nomination d'un garant, sur le modèle européen, qui aura vocation à être le référent à la fois auprès des acteurs mobilisés pour la réalisation du projet et de son homologue européen qui vient d'être désigné.
Je passe maintenant la parole à Gilles Leblanc puisqu'il me faut, à mon grand regret, rejoindre l'Assemblée nationale où je dois retrouver mon groupe pour y déposer une proposition de loi.