Madame le ministre, je tiens à attirer votre attention sur certaines pratiques de vente aux enchères qui n’ont pratiquement pas changé depuis le XIXe siècle, alors que des techniques tout à fait modernes permettent aujourd’hui de participer aux enchères, qu’il s’agisse du téléphone, du télécopieur, du télex, de l’internet, ou de toute autre méthode.
J’ajoute que ces pratiques obsolètes bafouent, dans une certaine mesure, les principes élémentaires des relations contractuelles et sont totalement inadaptées aux conditions présentes.
Nos ventes aux enchères ont donc une image très négative par rapport à celle des ventes pratiquées à l’étranger où d’autres techniques, beaucoup plus modernes et beaucoup plus vivantes, sont mises en œuvre. En effet, les ordres d’achat et les enchères téléphoniques ne sont perçus, en France, que comme un service gracieux, ce qui exonère de toute responsabilité les organisateurs d’une vente aux enchères en cas d’oubli ou d’ordre non exécuté, même lorsque ces offres ont été faites à partir d’un catalogue, lui, payant, qui engage donc, du même coup, la responsabilité du commissaire-priseur.
Une telle situation semble contraire aux règles contractuelles qui découlent tout naturellement de l’acceptation des ordres d’achat ou des enchères téléphoniques par l’organisateur de la vente aux enchères. Il y a bien formation d’un contrat dont les termes doivent être respectés, y compris pendant la vente aux enchères.
De plus, le refus du commissaire-priseur de prendre en compte ces ordres d’achat émis par téléphone, par télécopie ou même par lettre, est de nature à léser tant le vendeur – en effet, le prix proposé ne sera pas respecté et l’on repartira du prix de départ – que le donneur d’ordre en attribuant les enchères aux seules personnes présentes dans la salle d’adjudication, sans avoir prévenu ni le vendeur ni l’acquéreur potentiel. Dès lors, on ne peut que s’interroger et soupçonner une éventuelle collusion entre le commissaire-priseur et certains des acheteurs présents lors des enchères.
L’exonération de la société de vente et du commissaire-priseur judiciaire d’un défaut d’exécution pour des causes qui vont bien au-delà de l’erreur est extrêmement floue et large. On peut donc véritablement mettre en cause les relations contractuelles nées de l’offre faite par l’acquéreur éventuel.
Il ne faut pas faire perdre toute solennité à la vente aux enchères, mais celle-ci doit aussi respecter l’évolution des techniques modernes et ne pas en rester au XIXe siècle !
Je tiens à préciser que ces questions ne relèvent peut-être pas du règlement ni de la loi, mais plutôt de la déontologie professionnelle. Or, dans ce domaine, beaucoup reste à faire quand on sait que le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques donne systématiquement raison aux commissaires-priseurs !