Intervention de Virginie Klès

Réunion du 23 janvier 2014 à 9h00
Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Virginie KlèsVirginie Klès :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir failli débattre de la mise à mort ou de la quasi-disparition de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, nous allons finalement discuter des modalités de cette procédure et de l’amélioration de son fonctionnement comme de sa mise en œuvre.

En effet, comme cela a été déjà rappelé plusieurs fois, la CRPC, née en 2004, avait fait l’objet de très fortes réticences – le mot est faible – et d’un a priori extrêmement négatif. Ces très fortes inquiétudes, ces réticences et cet a priori négatif, que j’aurais partagés si j’avais été élue à cette époque, tenaient essentiellement, pour l’ensemble de la gauche, aux risques de déséquilibres entre les différents principes fondamentaux qui guident notre justice.

En effet, il semblait aux élus de gauche, tout d’abord, qu’il y avait une contradiction formelle entre, d’une part, le fait de comparaître en ayant reconnu sa culpabilité et, d’autre part, la présomption d’innocence. Il y avait là aussi, peut-être, une mise à mal du débat contradictoire, avec une concentration des pouvoirs et des décisions entre les mains du parquet, à la fois autorité de poursuite, autorité d’enquête et autorité de jugement. Il y avait en outre un risque de pression forte ou d’extorsion des aveux en poussant les prévenus vers cette CRPC, sans parler de cette crainte de la soustraction du débat à la publicité, au jugement public par le biais d’accords obtenus dans le bureau du procureur.

Toutes ces réserves et ces difficultés ont été de nouveau abordées aujourd’hui, et je ne vais donc pas revenir inutilement dessus.

L’idée initiale était de restreindre très fortement l’utilisation de cette procédure.

Avec un sens de l’écoute et de la mesure auquel je tiens à rendre hommage ici, M. le rapporteur et les auteurs de la proposition de loi eux-mêmes ont entendu les professionnels de la justice et ont pris en compte ce qui s’était réellement passé dans la mise en place de cette procédure : la sagesse de la justice et des professionnels de la justice a permis une utilisation parfaitement mesurée et raisonnable, ainsi qu’un fonctionnement tout à fait efficace de cette procédure, très loin des craintes initialement rapportées.

M. le rapporteur a donc changé son fusil d’épaule – là encore, je lui rends hommage pour avoir su le faire avec modération et efficacité – pour nous proposer finalement des amendements ne remettant pas en cause la procédure elle-même. Au contraire, ils contribuent, d’une part, à inscrire dans la loi le bon fonctionnement et l’utilisation judicieuse de cette procédure, et, d’autre part, à améliorer encore cette dernière par petites touches, de façon à ne pas mettre à mal l’équilibre aujourd’hui atteint.

En effet, 65 000 mesures liées à la procédure de la CRPC sont prises par an – ce n’est pas négligeable – et, selon les années, de 10 à 15 % seulement des décisions du parquet ne sont pas homologuées par le juge du siège.

Le champ d’application de la procédure, alors que l’on avait pensé le restreindre très sérieusement, ne changera finalement pas, car, de fait, cette procédure s’applique aujourd’hui à un contentieux de masse, à un contentieux dans lequel la culpabilité ne dépend pas des aveux, mais est objectivée par des faits matériels ; cela a déjà été rappelé plusieurs fois.

La peine encourue ne changera pas non plus, et là je voudrais souligner – cela a fait un peu débat au sein de la commission – que, si le quantum de peine encourue ne sera finalement pas modifié, restant bien à cinq ans et non à trois ans comme cela avait été initialement proposé, c’est sans doute dû à l’incohérence de notre échelle des peines figurant dans le code pénal, échelle qu’il faut très certainement revoir. Cette incohérence de l’échelle des peines est due à l’accumulation de lois sécuritaires et de lois « tout répressif » adoptées ces dernières années. Il y a donc là très certainement un travail de toilettage à faire…

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