J’ai déjà évoqué les dispositions de cet amendement. D’aucuns se demandent comment cette proposition de peine pourrait figurer dans le dossier dès lors que nous sommes à un stade de la procédure où aucun contact direct n’a encore eu lieu entre le procureur et la personne concernée. Nous devons entendre cet argument, puisque la procédure repose sur une forme d’individualisation de la sanction.
D’autres considèrent au contraire que cette proposition permet, dès le départ, de rassurer sur le cadre dans lequel va se dérouler la rencontre avec le procureur. L’avocat peut ainsi dûment informer la personne intéressée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai entendu vos observations sur l’état de notre droit pénal et les peines qui figurent dans notre code pénal. Celui qui reçoit cette proposition sait ce qu’il a fait, puisque c’est la raison même de sa convocation. Par conséquent, la première chose qu’il fait, a fortiori à l’heure d’Internet – mais c’était déjà le cas avant –, c’est de se précipiter sur le code pénal. Dans certains cas, sa première réaction à la vue de ce qu’il risque sera de rédiger immédiatement son testament ou de fuir ! Il se dira qu’il ne lui reste plus qu’à liquider ses biens…
J’ai donné un exemple tout à l'heure : dix ans de prison pour le vol d’une bouteille de Coca-Cola dès lors que celui-ci est commis à deux, c'est-à-dire en groupe. On imagine la réaction du prévenu lorsqu’il découvre le quantum de la peine encourue… Cela justifie qu’une proposition soit formulée en amont.
L’amendement du Gouvernement vise donc à répondre à la critique que vous formulez tous, à juste titre : il faudra bien que l’on revisite un jour le code pénal, dans la mesure où il existe aujourd'hui une rupture entre les dispositions pénales et les sanctions prononcées.
J’ai souligné également qu’il serait possible d’informer la victime ; c’est un point important. Cette dernière pourra elle aussi savoir ce qui va se passer. Cela lui permettra de ne pas se sentir écartée de cette procédure si particulière, de ne pas avoir le sentiment d’intervenir de manière trop tardive. Ce sentiment pourrait en effet expliquer une partie des échecs de la procédure.
La transparence que nous proposons sera rassurante à la fois pour le prévenu et pour son avocat. En effet, l’étape qui suit la réception de la convocation, c’est la rencontre entre le prévenu et son avocat. Je pense que la connaissance de la peine envisagée sera un plus pour l’avocat, dont le rôle est d’expliquer à une personne totalement affolée que la peine prévue par le code pénal ne correspond absolument pas à ce qu’elle risque réellement, la discussion avec le procureur s’engageant sur une autre base.
L’individualisation – vous voulez respecter ce principe, comme tout le monde – suppose que le prévenu reçoive une proposition individuelle, au lieu d’avoir le quantum de peine, c'est-à-dire le maximum, puisqu’il n’y a pas de minimum, pour seule information. Si aucune proposition ne lui est faite, cela crée un rapport extrêmement anxiogène à la procédure.
Le Gouvernement s’appuie également sur l’expérience. Dans certains endroits, l’information sur la peine encourue est déjà transmise verbalement par le parquet, et cela fonctionne plutôt bien. Nous ne proposons pas quelque chose de dramatique. Il s'agit d’une amélioration. Dans la mesure où il souhaite que cette proposition de loi devienne un jour notre droit positif, le Gouvernement a souhaité ouvrir ce débat d’une manière déterminée.