Je remercie le président Marini pour cette excellente synthèse, dont je précise partager la plupart des constats et des analyses. Je serai bref, surtout que l'essentiel a été dit. Je retire essentiellement de cette Conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière de l'Union européenne que l'on n'a pas encore su tirer toutes les conséquences de l'adoption d'une monnaie unique. Selon moi, trois cercles concentriques doivent être distingués dans l'Europe d'aujourd'hui : la zone euro et ses dix-huit États membres, l'Union européenne et son marché unique à vingt-huit et, enfin, la zone formée par l'Union et les États candidats ou ayant vocation à rejoindre l'Union. Ce qui me parait important, c'est de soumettre tout nouvel élargissement à une condition institutionnelle d'approfondissement. Aucun élargissement de la zone euro ne devrait être possible tant que la zone euro ne s'est pas dotée d'une gouvernance digne de ce nom. J'ai vu la Lettonie entrer dans la zone euro il y a quelques semaines et je ne veux pas que nous revivions un épisode similaire à celui que Chypre nous a imposé. Et de la même façon, j'estime qu'aucun élargissement de l'Union européenne ne devrait se faire en l'absence d'une telle gouvernance.
Dans le prolongement du rapport sur l'avenir de la zone euro que j'ai remis en 2012 à François Fillon, alors Premier ministre, j'indique que la mise en place d'une gouvernance politique et une capacité renforcée de coordination budgétaire de la zone euro est plus que jamais nécessaire. Le titre de mon rapport, « l'intégration politique ou le chaos », exprime l'alternative qui demeure. Bien que des avancées en ce sens soient perceptibles, avec par exemple une meilleure harmonisation budgétaire, la mise en place progressive de l'Union bancaire et, enfin, la montée en puissance d'Eurostat et du MES, - j'ai d'ailleurs rendu compte avec notre ancien collègue Marc Massion de toutes ces avancées devant notre commission des finances -, nous n'allons pas assez vite, ni assez loin.
Il nous faut reconnaître la spécificité de la zone euro en ce qu'elle établit entre les dix-huit États qui en sont membres un niveau de solidarité sans commune mesure avec celui qui lie les vingt-huit membres de l'Union européenne. J'ai relevé que le projet de règlement de la Conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière de l'Union européenne, proposé par la présidence lituanienne en octobre 2013, permettait de constituer des commissions thématiques. C'est pourquoi je propose la création, dans le cadre de la Conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière de l'Union européenne, prévue par l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), d'une commission de surveillance de la zone euro associant le Parlement européen et les parlements nationaux. Une telle enceinte est aujourd'hui nécessaire. C'est aussi pourquoi j'attends également une initiative franco-allemande permettant de donner une nouvelle impulsion à la Conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière de l'Union européenne et d'associer plus étroitement les parlements nationaux, et le Parlement européen que je n'oublie pas, à la gouvernance de l'Union européenne et, partant, à la gouvernance de la zone euro. Ce dialogue a été constructif puisque nous avons convenu d'échanger des documents et une rencontre doit avoir lieu dans les prochaines semaines. Il est de notre responsabilité de promouvoir cette institution. Notre prochaine réunion avec nos collègues allemands doit nous aider à progresser de ce point de vue. Cette conférence interparlementaire reste aujourd'hui largement un alibi démocratique. Nous devons donc nous mobiliser et nous impliquer pour dissiper bien vite cette ambiguïté.
Je voudrais vous faire partager mon impression issue du petit déjeuner organisé par le représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne auquel étaient conviés les parlementaires français participant à la conférence et des députés européens français : j'ai noté, au-delà des affinités politiques, que les parlementaires nationaux avaient de fortes convergences de vue sur les ambitions de cette conférence, mais une rivalité s'est exprimée entre les députés européens français et leurs homologues parlementaires nationaux. C'est par exemple en raison de telles tensions que l'on n'a pas pu créer une commission dédiée à la zone euro au sein du Parlement européen lors de la mise en place de la monnaie unique. Pourtant l'impact budgétaire de cette dernière, visible avec la crise de la zone euro, est tel que nous avons besoin d'une implication forte des parlementaires nationaux. J'espère donc que nous pourrons gommer la rivalité entre le Parlement européen et les parlements nationaux. Je vous remercie de votre attention.