Intervention de Jean-Pierre Michel

Réunion du 12 février 2014 à 14h30
Accueil et prise en charge des mineurs isolés étrangers — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre MichelJean-Pierre Michel :

Nous avons tous, mes chers collègues, rencontré ces mineurs ; j’en ai moi-même connu par le biais de diverses associations.

Je me souviens d’un jeune Égyptien de dix-sept ans, parti d’Alexandrie, qui était allé en Libye où il avait pris un bateau en laissant tout – son argent, sa carte d’identité – pour se rendre à Lampedusa. Là, il s’échappe et fait du stop jusqu’à Milan, avant de prendre un train pour retrouver à Paris un vague cousin. À la frontière, il est refoulé. Il retourne à Milan, où il travaille « au noir » un mois pour 200 euros. Il reprend le train, donne au contrôleur les 200 euros qu’il avait gagnés, et il arrive à Paris. Heureusement, le Gouvernement l’a régularisé. Aujourd’hui, il est majeur et il travaille. Voilà de qui nous parlons !

Bien sûr, il y a des problèmes. Dans le rapport sur la PJJ, j’aborde cette question, car il s’agit d’enfants en danger. M. Bas – il n’est plus présent –, qui est à l’origine de la loi de 2007, sait bien que tous les enfants en danger doivent être traités de la même manière, quels qu’ils soient. Je reconnais, pour m’être rendu dans plusieurs départements, que les conseils généraux ont bien souvent atteint les limites de ce qu’ils peuvent faire.

Les parquets signalent un certain nombre de difficultés, qui concernent notamment le paiement des réquisitions pour les interprètes, ainsi que les frais médicaux – qui ne sont pas toujours payés, vous le savez très bien, madame la ministre.

La non-reconnaissance de l’état de minorité pose également problème. Ces mineurs n’ont aucun recours et aucun conseil. Ils sont hors droit, hors-sol, hors vie, hors tout ! Il faut examiner cette question.

Enfin, se pose le problème juridique de l’accession de ces mineurs à la majorité. Certains ne demandent qu’à s’intégrer. Un quart d’entre eux, dans l’association où ils sont, travaillent, apprennent le français et, finalement, s’en sortent, mais pas forcément à 18 ans et un jour !

Alors que fait-on lorsqu’ils deviennent majeurs ? Certains conseils généraux ont passé des conventions avec la protection judiciaire de la jeunesse pour les accompagner encore pendant un certain temps. Pas tous !

Je ne méconnais pas les problèmes. Il faut bien évidemment les régler. Pour ma part, j’ai fait un certain nombre de propositions, mais ce n’est pas le moment de vous les dévoiler.

Je m’associe à la grande humanité dont a fait preuve René Vandierendonck. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas traiter cette proposition de loi totalement. Alors, que nous reste-t-il comme solution ? Devons-nous voter pour ou contre ? En effet, la commission des lois, par une majorité aléatoire – on connaît les majorités de commissions : l’un des membres sort, l’autre entre, certains ont un pouvoir, d’autres non… –, a repoussé le renvoi en commission, qui, dans l’esprit du rapporteur, était un véritable renvoi en commission.

Aujourd’hui, nous devons choisir entre voter pour ou contre cette proposition de loi. Un scrutin public sera-t-il demandé ? Allons-nous nous arranger pour que toute la majorité vote contre ? Ou allons-nous voter un certain nombre d’articles, alors même que, comme vous l’avez dit, monsieur Détraigne, ils mériteraient quelque réécriture par voie d’amendements ?

Nous sommes donc dans une impasse. Notre groupe votera contre cette proposition de loi, à regret car elle avait le mérite de poser les problèmes. §

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