Intervention de Nathalie Bajos

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 27 février 2014 : 1ère réunion
Prostitution — Audition de M. Michel Bozon sociologue et démographe directeur de recherche à l'institut national d'études démographiques ined et Mme Nathalie Bajos sociologue et démographe directrice de recherche à l'institut national de la santé et de la recherche médicale inserm

Nathalie Bajos, directrice de recherche à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) :

Nous vous tiendrons au courant. Oui, certains clients de prostituées ont des sièges enfant à l'arrière de leur voiture, mais les résultats de notre enquête montrent que ce sont surtout des jeunes célibataires : 7 % d'entre eux ont fréquenté une prostituée, soit le double de la moyenne globale. Ce chiffre tombe à 3,4 % chez les hommes en couple depuis moins de cinq ans, et à 1,2 % chez les hommes en couple depuis plus longtemps. Cela va, je vous l'accorde, à l'encontre du sens commun. Cela ne veut pas dire que les hommes âgés n'ont pas recours à la prostitution : certains y vont pour demander des choses que leur conjointe ne veut pas leur donner, une fellation, par exemple.

La violence et l'argent sont bien sûr centraux dans la relation de prostitution. Notre enquête ne les nie pas, elle se borne à interroger le schéma-type du client et à déconstruire les stéréotypes. Elle fait ainsi apparaître, contre les idées reçues, un continuum entre clients et non-clients. Il y a des rapports de violence dans la relation de prostitution comme dans le couple. Les clients de personnes prostituées n'ont pas nécessairement de représentation violente de la sexualité. Les femmes déclarant accepter un rapport sexuel sans en avoir envie, juste pour faire plaisir à leur conjoint, sont nombreuses, surtout lorsque leur autonomie dans le couple, pour des raisons financières par exemple, est faible. L'acte de prostitution n'est pas toujours empreint de violence, même si c'est souvent le cas. Reste que la violence est accentuée par la précarité des conditions de vie des personnes qui se prostituent, et pourrait augmenter avec la relégation de la prostitution dans la clandestinité.

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