Intervention de Monique Cerisier-ben Guiga

Réunion du 7 avril 2011 à 9h30
Bioéthique — Article 14

Photo de Monique Cerisier-ben GuigaMonique Cerisier-ben Guiga :

La position défendue par notre commission rejoint les conclusions auxquelles ils sont généralement parvenus. Cela explique le fait que onze pays occidentaux aient levé l’anonymat des donneurs de gamètes.

En outre, je note également que l’on a, en France, beaucoup trop tendance – et pas seulement sur ce sujet ! – à aborder ces questions abstraitement sur la base d’oppositions idéologiques : le génétique contre le social, par exemple. Mais le débat d’aujourd'hui ne se pose pas du tout en ces termes.

Dans le cadre de la procréation naturelle, le développement social et la personnalité de l’enfant se construisent sur l’héritage génétique.

Ainsi, la famille Bach a un don pour la musique, un don qui a été cultivé sur plusieurs générations. Pour prendre un exemple plus récent, Jean-Marie Périer a le talent musical d’un père qu’il ne connaît pas. Or, dès qu’il découvre que son père est Henri Salvador, il cesse définitivement le piano sur lequel il jouait des pièces de jazz, au motif que le père qu’il aime est François Périer et qu’il ne veut pas entendre parler de son père biologique.

Tous les cas de figure sont possibles. Ainsi, Éric Fottorino, qui découvre tardivement son père génétique, car il lui avait été interdit d’être son père social en raison de son judaïsme, a l’émotion de découvrir que celui-ci a les jambes aussi grêles que les siennes.

Il n’existe donc pas d’opposition entre le génétique et le social : l’un se construit sur l’autre quand les circonstances le permettent.

Pour l’enfant né d’une assistance médicale à la procréation, la primauté de l’affection et de l’éducation familiale efface le plus souvent la recherche de l’origine génétique.

Toutefois, les cliniciens connaissent bien, au quotidien, les difficultés rencontrées par les adolescents issus d’une assistance médicale à la procréation, qui peinent à se structurer, surtout les garçons, car ils n’ont aucun modèle familial masculin qui leur ressemble. Ainsi, ils ont toutes les peines du monde à faire coïncider leur tempérament, ce qui est de l’ordre du génétique, avec ce qui a forgé leur histoire familiale et leur éducation. Pourquoi nier ces réalités ?

Pour ma part, j’estime que la rédaction proposée par la commission répond à ces besoins, des besoins souvent minoritaires, parce que, je le répète, l’éducatif et l’affectif dominent très nettement le biologique. Toutefois, ne négligeons pas le besoin de certaines personnes nées de l’AMP de connaître leur origine biologique. En effet, ce sont, bien évidemment, non pas des parents qu’elles recherchent, mais tout simplement des réponses aux questions existentielles qu’elles se posent.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion