Je vais commencer en répondant à la question relative aux listes. Au niveau international, trois catégories de listes ont été établies. La première porte sur les territoires non coopératifs en matière fiscale. Le Forum mondial identifie quatorze juridictions n'ayant pas franchi la première phase d'examen. Cette liste a été rendue publique suite au G20 de Londres en 2009. La deuxième est celle du GAFI. Elle identifie les territoires ne respectant pas ses standards en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Cette liste est publique. Enfin, une troisième, conduite par le Conseil de stabilité financière, porte sur le contrôle prudentiel. Un seul pays figure sur la liste « noire ». Nous considérons qu'il serait difficile de fusionner ces classements. En effet, même si les logiques peuvent être liées, elles restent spécifiques selon leur catégorie.
Par ailleurs, les Etats peuvent établir de manière autonome des listes de pays qu'ils considèrent au niveau national comme non coopératifs. C'est le cas de la France , qui établit une liste des Etats avec lesquels la coopération en matière fiscale n'est pas satisfaisante de son point de vue, ce qui correspond à des territoires que la communauté internationale n'a pas nécessairement identifiés comme peu coopératifs. Vous débattrez de ce point, Mesdames et Messieurs les sénateurs, lors des discussions autour du projet de loi contre la fraude. Le texte prévoit en effet que le gouvernement puisse ajouter à la liste les pays qui refusent de signer des textes de coopération en matière d'échange automatique d'informations fiscales, ou qui ont signé les textes mais ne les appliquent pas. Cette initiative nous aidera probablement à établir des listes plus effectives.
Concernant les systèmes de compensation, je dirais que les éléments relatifs aux infrastructures de marché sont complexes mais importants. Ces infrastructures incluent notamment les bourses. La conservation de l'influence et de la capacité d'action sur ces infrastructures représente un véritable intérêt. Elles incluent également les chambres de compensation. Il est très important de conserver une visibilité sur la chaîne du titre. Nous devons en effet savoir comment les titres sont échangés et compensés. Cette visibilité est d'autant plus importante sur des segments de marchés tels que celui des produits dérivés. Ces derniers étaient essentiellement échangés sur des marchés de gré à gré. Or nous tentons de les ramener sur des plateformes transparentes qui exigent des mécanismes de compensation. Ce point est inclus dans la législation européenne dite « EMIR » et son pendant aux Etats-Unis, le Dodd-Frank Act. Un accord a été conclu le 15 juillet 2013 entre les autorités européennes et américaines afin d'établir une reconnaissance mutuelle des règles régissant les échanges et la compensation des dérivés. Ce point est extrêmement important.
Je ne connais pas le détail de la jurisprudence relative à la notion de vie privée des personnes morales que vous évoquez. Je peux tout de même dire que des initiatives telles que la création de registres afin d'identifier les trusts ou les fiducies, n'ont pas vocation à rendre publiques toutes les informations dont l'administration dispose à leur sujet. L'administration fiscale doit bien entendu avoir accès à ces informations. La DGFIP gère d'ailleurs le registre des fiducies en France. Il permet d'identifier le bénéficiaire effectif d'une fiducie ou d'un trust. De nouvelles mesures sont actuellement envisagées dans le cadre du projet de loi sur la fraude fiscale. J'examinerai ce sujet qui mérite certainement une certaine vigilance et j'indiquerai ce point à la DGFIP qui est davantage concernée. Ce que j'en connais m'amène à penser que la nouvelle législation envisagée, autant que la législation existantes, ne devrait pas se heurter aux difficultés mentionnées en matière de vie privée des personnes morales.