Intervention de Dominique de Legge

Réunion du 10 avril 2014 à 9h30
Agriculture alimentation et forêt — Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Dominique de LeggeDominique de Legge :

Assigner autant de finalités à la politique agricole et de l’alimentation, n’est-ce pas prendre le risque d’en faire un outil au service de causes contradictoires et bien éloignées du sujet, alors que, plus que jamais, on attendait l’affirmation de quelques principes et leur traduction concrète ?

Je ne vois également rien dans ce texte qui aille dans le sens du « choc de simplification » annoncé par le Président de la République. Bien au contraire, je découvre au fil des articles de nouvelles procédures, de nouvelles normes et de nouvelles contraintes, comme à l’article 20, ou à l’article 3, qui crée les groupements d’intérêt économique et environnemental. Aucune étude d’impact n’a d’ailleurs pu évaluer les conséquences de la création de ces nouvelles structures.

Aux articles 4 et suivants, l’obligation de déclaration sur les engrais azotés, l’obligation de déclaration préalable trois ans avant le départ en retraite et toutes les obligations accompagnant le bail environnemental imposent des contraintes supplémentaires pesantes pour les agriculteurs.

En somme, je ne trouve dans ce projet qu’un encadrement administratif plus strict et une complexification des démarches, alors que la simplification de l’exercice de leur activité ou de leur installation est une revendication récurrente des agriculteurs.

Dans le même ordre d’idée, l’extension des prérogatives des SAFER, dont vous faites des instruments d’intervention généraliste bien au-delà de leur objectif initial d’amélioration des structures, est porteuse de confusion. Vous vous inquiétez de voir se mettre en place des montages ou des procédures juridiques ayant pour effet de les contourner ; mais peut-être devriez-vous vous interroger sur les raisons qui conduisent les agriculteurs eux-mêmes à cela !

Dans notre droit, la règle est la liberté du commerce et des échanges, et la préemption doit demeurer l’exception, justifiée par l’intérêt général. Les nouvelles attributions que vous conférez aux SAFER ne manqueront pas de mettre en concurrence ces dernières avec les établissements publics fonciers régionaux, mais pourront également se retourner contre les agriculteurs eux-mêmes, pour qui le foncier représente souvent le fruit d’une épargne construite par le travail de toute une vie et dont ils peuvent souhaiter disposer à leur guise au moment de la retraite.

Je ne vois pas davantage de mesures qui pourraient, dans l’esprit du pacte de responsabilité, apporter une réponse aux questions de compétitivité des entreprises agricoles et agroalimentaires. La filière agricole est sans doute celle qui s’est mobilisée le plus pour réaliser des investissements motivés par des considérations ou des contraintes environnementales, certes souhaitables, mais sans effet sur l’amélioration de la rentabilité des entreprises. Je ne vois rien dans le texte qui participe d’un engagement à ne plus imposer aux agriculteurs et à la filière des contraintes supérieures à celles de nos partenaires européens.

Concernant ce chapitre de l’écologie, notre commission a su, fort heureusement, rééquilibrer le texte initial en rappelant que le développement durable reposait sur un triptyque, les éléments environnementaux, économiques, et sociaux devant être considérés à parts égales.

Je crains que la promotion des circuits courts et de l’agriculture biologique ne nous dispense de répondre à une question, toujours esquivée pour ne pas fâcher certains lobbies, et pourtant essentielle : celle du potentiel de production.

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