Intervention de Anne-Marie Payet

Réunion du 7 avril 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 20 ter nouveau

Photo de Anne-Marie PayetAnne-Marie Payet :

Cet amendement vise à limiter à trois le nombre d’embryons conçus à la demande du couple.

Le stock important d’embryons congelés vivants place les parents devant d’impossibles choix et attise les convoitises des chercheurs.

Dans ces conditions, il paraît souhaitable, ainsi que le prévoit la législation allemande, de poser comme principe que tous les embryons ont droit à la vie et qu’ils ne peuvent être ni éliminés ni utilisés comme matériau de recherche.

Les méthodes d’assistance médicale à la procréation doivent alors respecter ce principe. Le fait de ne pouvoir concevoir par fécondation in vitro qu’un maximum de trois embryons et de devoir les réimplanter immédiatement permet de respecter la santé de la mère et d’éviter la congélation d’embryons surnuméraires.

C’était le vœu exprimé par certains membres du Comité consultatif national d’éthique.

Dans le même sens, une étude menée par des chercheurs de l’université d’Aberdeen prouve que les femmes auxquelles les médecins transfèrent un seul embryon lors d’une fécondation in vitro ont cinq fois plus de chances de donner naissance à un bébé en bonne santé que celles qui reçoivent deux embryons. Par ailleurs, 87 % des femmes sont plus susceptibles d’éviter une naissance prématurée après un transfert mono-embryonnaire par rapport à un transfert de deux embryons à la fois.

Selon le bilan des activités de procréation et génétique humaines en France pour la seule année 2007, 278 505 embryons ont été conçus pour donner naissance à 14 487 enfants, nés par fécondation in vitro, ce qui représente 19 embryons pour une naissance.

Par ailleurs, sur les 149 191 embryons conservés congelés, 34 % sont sans projet parental.

Les parents sont placés devant des choix difficiles sur le devenir de leurs embryons. « Ce stock d’embryons a rapidement suscité une interrogation profonde sur leur statut ontologique et juridique », souligne Jean-René Binet.

La congélation des embryons peut poser problème aux couples dans la mesure « où elle a d’une certaine manière pour effet de suspendre le temps, entre la conception et la venue au monde éventuelle », est-il précisé dans un rapport parlementaire. C’est pourquoi certains psychologues pensent qu’il faudrait limiter le plus possible la congélation d’embryons. Une étude montre que la moitié des femmes interrogées éprouvent un sentiment d’abandon d’enfant lorsque les embryons congelés ne sont pas implantés.

Des pays comme l’Allemagne n’ont pas autorisé la production d’embryons surnuméraires et ont fait le choix de ne pas congeler les embryons.

La France manque de données épidémiologiques sur l’infertilité et sur le recours à l’assistance médicale à la procréation.

Selon l’Agence de la biomédecine, un couple sur sept consulte et un couple sur dix poursuit des traitements pour remédier à son infertilité.

Une étude conduite en 2008 par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, montre que la densité des spermatozoïdes aurait diminué de moitié en un demi-siècle chez les Occidentaux.

Si l’assistance médicale à la procréation donne de l’espoir à des couples, le parcours est néanmoins contraignant. Certains témoignent de la lourdeur de ces techniques, qui laissent près de la moitié de ceux qui y ont recours sans enfant et retardent bien souvent les demandes d’adoption.

Ces techniques soulèvent de nouvelles questions sur leurs conséquences pour la santé et pour le développement des enfants ainsi conçus.

Des programmes de recherche ont été mis en place par l’INSERM dès 2008 : 25 % des cas de grande prématurité sont liés à l’assistance médicale à la procréation et la prévalence des handicaps est supérieure chez les enfants nés de ces modes de procréation par rapport à la conception naturelle. Des psychologues font aussi état de risques par rapport à la psychologie des enfants.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de voter cet amendement.

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